Introduction

La punaise terne (figure 1), ou punaise, est répandue partout en Amérique du Nord et elle est présente dans une grande variété de plantes sauvages et de cultures. On l’a signalée dans au moins 385 espèces végétales. Elle infeste généralement les poivrons de serre, et dans une moindre mesure, les concombres de serre. Même si elle peut aussi se nourrir des tomates, elle constitue rarement un problème dans cette culture. Dans la production des cultures ornementales de serre, la punaise terne constitue un risque dans les cas d’utilisation réduite de pesticides, par exemple quand des moyens de lutte biologique sont en usage. Ce ravageur endommage les cultures comme les chrysanthèmes et les gerberas et perturbe les programmes de lutte biologique.

Punaise terne adulte
Figure 1. Punaise terne adulte.

Description

La punaise terne adulte est de couleur variable, verdâtre ou brunâtre, avec des taches brunes rougeâtres sur les ailes. C’est un insecte plat, de forme ovale d’;environ 5 à 6 mm de longueur et 2,5 à 3,0 mm de largeur, les femelles ayant tendance à être plus grosses que les mâles. Les stades immatures ou nymphes ont une forme similaire et sont de couleur vert jaunâtre. Le premier stade nymphal est d’environ 1 mm de longueur et 0,5 mm de largeur. Les nymphes de 5e stade ont des ébauches alaires visibles, une longueur d’environ 3 à 4 mm et une largeur d’;environ 2 mm. Les nymphes se déplacent rapidement d’ordinaire et se laissent tomber immédiatement quand on les dérange.

Les punaises ternes adultes qui ont hiverné ne ressemblent pas à la nouvelle génération d’ adultes quant à la couleur et à la forme; elles sont souvent considérées comme une espèce différente par un simple observateur. L’intensité et l’étendue des taches de couleur, ainsi que les différences entre mâles et femelles sont probablement influencées par la température, les degrés d’humidité, le soleil, les plantes hôtes et l’âge des individus. L’espèce Lygus prédominante de ce ravageur et la seule qui soit importante en Ontario est Lygus lineolaris.

Biologie et cycle biologique

La punaise terne passe l’hiver à l’état adulte dans des endroits abrités, par exemple sous les litières de feuilles, sous l’écorce, entre les feuilles des plantes et les longues graminées sèches. Elle émerge en général de ces sites en avril et au début mai à des températures aussi basses que 8 °C, pour commencer à se nourrir, s’accoupler et pondre des oeufs dans les jeunes tissus des plantes. Même si de nombreux accouplements se produisent, un seul suffit pour que la femelle ponde des oeufs viables pour le reste de sa vie. L’incubation des oeufs dure environ 7 à 12 jours, selon la température. À la température optimale de 20 °C pour la ponte, chaque femelle pond en moyenne 96 oeufs, mais ce n’est qu’une moyenne, ce nombre peut s’élever jusqu’à 140. Les femelles vivent environ 52 jours à 20 °C, et 37 jours à 28 °C. Les nymphes éclosent (figure 2) et passent par cinq stades nymphaux, et des adultes de la nouvelle génération apparaissent au bout d’environ 30 à 45 jours.

Nymphe de punaise terne.
Figure 2. Nymphe de punaise terne.

Les oeufs pondus par les adultes de l’été produisent des adultes 20 à 25 jours plus tard. Les adultes vivent pendant 1 à 2 mois. La génération des adultes qui ont hiverné chevauche souvent celle des adultes de la nouvelle génération pendant plusieurs semaines, mais la nouvelle génération est plus nombreuse.

Quand les jours raccourcissent à 12,5 heures et moins, la diapause est induite chez les nymphes et se manifeste chez les adultes. Toutefois, la lumière continue empêche la diapause chez les jeunes adultes et met fin à celle des adultes qui était déjà en diapause.

Dommages

La punaise se nourrit d’une vaste gamme de graines, de légumes, de fruits, de fibres et de cultures fourragères. Ce ravageur a une préférence marquée pour les jeunes tissus en développement et les fruits immatures. Ainsi, les dommages qu’il cause dans les poivrons se manifestent souvent par la croissance de tiges multiples, la déformation des fleurs et des jeunes fruits (figure 3), et la perte des boutons floraux. Les dégâts causés par ces ravageurs dans le concombre peuvent inclure la destruction du point végétatif des jeunes plants et des feuilles percées de plusieurs trous en « dents de scie » (figure 4).

Poivrons verts endommagés
Figure 3. Dégâts dus à la punaise terne dans le poivron.
Feuille de concombre avec des trous
Figure 4. Dommages dus à la punaise terne dans le concombre.

Dans les cultures ornementales comme le chrysanthème, les punaises qui s’alimentent causent des malformations des fleurs (figure 5) et du feuillage (figure 6).

Dommages causés par l’alimentation de la punaise terne sur des fleurs de chrysanthèmes.
Figure 5. Dommages causés par l’alimentation de la punaise terne sur des fleurs de chrysanthèmes.
Dégâts dus à la punaise sur le feuillage des chrysanthèmes
Figure 6. Dégâts dus à la punaise sur le feuillage des chrysanthèmes.

Certains chercheurs ont attribué les malformations résultant de l’alimentation des punaises aux causes suivantes :

  • alimentation sur de jeunes tissus en croissance rapide
  • destruction mécanique des tissus en croissance par les pièces buccales de l’insecte
  • destruction chimique de cellules par les enzymes salivaires produites par le ravageur
  • inhibition de croissance de la partie blessée par les substances induites par l’alimentation du ravageur
  • plus grande croissance dans les tissus aux alentours des sites d’alimentation à cause des substances qui favorisent la croissance provenant de la salive du ravageur

Lutee contre la punaise terne

Chaque printemps les punaises arrivent dans les cultures de serre. Elles posent surtout problème chez les nombreux producteurs de légumes et de plus en plus de producteurs horticoles qui ont adopté des moyens de lutte biologique pour combattre la plupart des insectes et des acariens ravageurs. À ce jour, toutefois, aucun agent de lutte biologique n’existe sur le marché pour maîtriser spécifiquement ce ravageur.

Parmi les stratégies de lutte contre ce ravageur, mentionnons :

Dépistage

Plaquettes adhésives et dépistage des cultures : Il est essentiel d’effectuer la surveillance des plaquettes adhésives et du couvert supérieur pour dépister le ravageur au plus tôt. Les cartons collants jaunes qui servent à dépister d’autres ravageurs dans les cultures de serre attirent aussi la punaise. Un examen régulier des jeunes fleurs et des jeunes feuilles de poivrons et de concombres aide aussi à détecter la présence du ravageur et à évaluer le niveau des populations dans la culture.

Lutte culturale

Désherbage : L’éradication des mauvaises herbes dans le voisinage immédiat de la serre réduit le risque que de fortes populations se développent dans la zone. Il est primordial de désherber au bon moment. Tondre ou débroussailler oblige les populations qui résident dans les mauvaises herbes à migrer dans la serre et peuvent aggraver le problème. Il est par conséquent plus avantageux de désherber à l’automne pour empêcher les ravageurs de passer l’hiver dans la zone. On recommande de tondre une large bande tout autour de la serre.

Lutte physique

Barrières grillagées : Des ventilateurs, des entrées de porte et autres ouvertures grillagées peuvent grandement réduire les risques que ce ravageur volant n’entre dans la serre. Comme la punaise terne est un insecte de bonne dimension, le grillage aux mailles plus grosses sera suffisant pour exclure le ravageur. Il aura aussi l’avantage d’exclure aussi d’autres insectes plus gros comme les papillons nocturnes, avec un impact minimal sur la circulation de l’air.

Lutte biologique

Orius insidiosus : Des rapports isolés ont indiqué que des populations de l’insecte prédateur Orius insidiosus, dans les cultures de poivrons de serre sont associées à l’éradication de populations de la punaise terne. En effet, des chercheurs d’Agriculture et Agroalimentaire Canada ont observé des Orius adultes qui attaquaient des jeunes lymphes de la punaise.

Beauveria bassiana : Cet agent de lutte fongique bénéfique possède une vaste gamme d’hôtes (>700 espèces d’insectes), dont la punaise terne fait partie. Des recherches effectuées en Ontario et ailleurs ont démontré que B. bassiana peut accomplir une maîtrise efficace de la punaise. Bien qu’il ne soit pas spécifiquement homologué pour lutter contre la punaise, son usage est homologué contre d’autres ravageurs des cultures de serre en Ontario.

Lutte chimique

Pour en savoir plus sur les produits dont l’usage est homologué contre la punaise terne, voir la publication 835F du MAAARO intitulée Guide de protection des légumes de serre, et la publication 370F intitulée Guide de la floriculture en serre.

Références

Bostanian, N.J. 1994. The tarnished plant bug and strawberry production. Research Branch, Agriculture and Agri-Food Canada, Technical Bulletin 1994-1E.

Kelton, L.A. 1975. The lygus bugs (genus Lygus Hahn) of North America (Heteroptera: Miridae). Mem. Ent. Soc. Can. 95: 1-101.

Khattat, A.R. and R., K. Stewart. 1977. Development and survival of Lygus lineolaris exposed to different laboratory rearing conditions. Annals of the Entomological Society of America 70: 274-278

Schwartz, M.D., R.G. Foottit. 1992. Lygus bugs on the prairies: biology, systematics and distribution. Research Branch, Agriculture Canada, Technical Bulletin 1992-4E: 46 pp.

Ugine, T.A. 2011. The effect of temperature and exposure to Beauveria bassiana on tarnished plant bug Lygus lineolaris (Heteroptera: Miridae) population dynamics, and the broader implications of treating insects with entomopathogenic fungi over a range of temperatures. Biological Control, Volume 59, Issue 3, pp. 373-383.

La présente fiche technique a été rédigée par Gillian Ferguson, spécialiste de la lutte intégrée contre les ennemis des cultures légumières, MAAARO, Harrow; Graeme Murphy, spécialiste de la lutte intégrée contre les ennemis des cultures floricoles en serre, MAAARO, Vineland; et Les Shipp, chercheur scientifique, lutte intégrée aux parasites des serres, Agriculture et Agroalimentaire Canada, Harrow. Les auteurs remercient vivement pour la révision de cette fiche technique Bruce Broadbent, Ph.D., entomologiste, Agriculture et Agroalimentaire Canada, London.