Introduction

Chaque année, les attaques de pucerons se produisent de façon sporadique dans presque toutes les régions de l'Ontario où l'on cultive la laitue et le céleri. Les pucerons peuvent infliger des pertes importantes peu avant la récolte lorsque leurs populations sont considérables. La croissance des légumes s'en trouve réduite ou anormale, ces ravageurs étant vecteurs de plusieurs virus qui infectent la laitue et le céleri. Leur présence dans les légumes à la récolte rend ces derniers invendables.

La plupart des espèces de pucerons prolifèrent grâce à un vaste éventail de plantes hôtes telles que mauvaises herbes, plantes ornementales, arbres, cultures fruitières et légumes. Plusieurs espèces de pucerons attaquent la laitue et le céleri en Ontario. Le plus commun aux deux cultures est le puceron vert du pêcher (Myzus persicae Sulzer). Le puceron du tournesol (Aphis helianthi Monell) ne ravage que le céleri. Le puceron de la laitue (Ribisnigri nasonovia Mosley) se trouve seulement sur la laitue. Parmi les autres espèces qui, à l'occasion, peuvent infester ces cultures, mentionnons le puceron de la pomme de terre (Macrosiphum euphorbiae Thomas), le puceron de la digitale (Aulacorthum solani Kaltenbach) et le puceron du nerprun (Aphis nasturtii Kaltenbach).

 

Description et biologie

Le puceron vert du pêcher est l'espèce la plus fréquente dans les cultures de laitue et de céleri. Les pucerons se distinguent par la présence de deux cornicules ou protubérances allongées sur la partie postérieure de l'abdomen, et leur corps a généralement la forme d'une poire. L'adulte fait de 2 à 3 mm de long et sa couleur peut varier du vert pâle au rose. Il existe des formes aptères (sans ailes) et des formes ailées (figures 1a et 1b) du puceron vert du pêcher. La forme ailée porte des tâches foncées typiques sur la tête, le thorax et l'abdomen.

Figure 1a. Gros plan d'un puceron vert du pêcher

Figure 1a. Gros plan d'un puceron vert du pêcher

Figure 1b. Forme ailée du puceron vert du pêcher

Figure 1b. Forme ailée du puceron vert du pêcher

En Ontario, la plupart des pucerons ont un cycle évolutif plutôt similaire. Le puceron vert du pêcher hiverne à l'état d'oeuf sur les pêchers, les pruniers, les cerisiers sauvages et les autres arbres fruitiers à noyaux. À l'éclosion, les oeufs se transforment en pucerons femelles aptères qui, à leur tour, donnent naissance à de jeunes pucerons appelés nymphes - les nymphes sont tout simplement une version réduite des adultes. Quand les nouvelles colonies deviennent surpeu-plées ou que les ressources de la plante hôte diminuent, on peut constater l'apparition d'adultes ailés qui se dispersent vers d'autres plantes hôtes comme la laitue et le céleri. Les populations printanières peuvent aussi provenir d'autres sources que les hôtes d'hivernage. En effet, des pucerons ailés migrent depuis le sud vers l'Ontario, emportés par les fronts atmosphériques.

Les pucerons peuvent produire de dix à quinze générations au cours d'une même saison. Grâce à leur appareil buccal du type piqueur-suceur ils aspirent la sève des plantes. En se nourrissant, certains pucerons transmettent à la laitue et au céleri des virus qui proviennent des mauvaises herbes et d'autres plantes. Les populations peuvent pulluler très rapidement car les femelles sont vivipares et parthénogénétiques, c'est-à-dire qu'elles produisent un grand nombre de jeunes nymphes sans fécondation. Les adultes ailés apparaissent lorsque la colonie devient surpeuplée. C'est à l'automne que sortent les premiers mâles, quand les jours sont plus courts. À cette époque, la dernière génération retourne vers les hôtes d'hivernage et s'accouple, puis les femelles pondent les oeufs d'hiver.

Le puceron du tournesol apparaît normalement sur le céleri plus tard dans la saison. En Ontario, le cycle biologique de cette espèce n'est pas encore très clair, mais au Michigan on croit que le puceron hiverne sur le cornouiller stolonifère (hart rouge) et colonise les tournesols annuels (cultivés) ainsi que les tournesols sauvages et plusieurs ombellifères.

Les adultes et les nymphes sont d'un vert plus foncé que le puceron vert du pêcher et, sur le céleri, ils paraissent souvent brun foncé ou noir (figure 2).

Figure 2. Colonie de pucerons du tournesol sur le céleri

Figure 2. Colonie de pucerons du tournesol sur le céleri

Le puceron de la laitue n'est pas aussi courant en Ontario mais il peut poser un problème dans certaines régions. Le puceron de la laitue hiverne à l'état d'oeuf sur le gadellier, le groseillier et peut-être aussi sur d'autres espèces végétales. L'adulte fait 2-3 mm de long et sa couleur, habituellement vert olive, peut varier du vert clair au rose. Les colonies de pucerons s'installent profondément dans la pomme de laitue de sorte qu'il est très difficile de les dépister et de les combattre.

 

Dépistage et lutte

Les pucerons ailés en voie de se disperser peuvent être dépistés au moyen de pièges collants jaunes disposés en bordure de champs mais, dans la culture elle-même, le meilleur moyen de connaître le taux d'infestation est l'examen visuel des plantes. Il faut examiner au moins 50 à 100 pieds de laitue ou de céleri, en portant une attention particulière au revers des feuilles et aux nouvelles pousses tendres. Au cours de cet examen, on doit dénombrer les plantes qui abritent un puceron ou plus, quelle que soit l'espèce, puis calculer le taux d'infestation (pourcentage de plantes infestées).

Dans un champ où l'on examine 75 plantes et qu'on en trouve six abritant au moins un puceron, le taux d'infestation égale : (6 ÷ 75) x 100, soit 8 %. Il est habituellement conseillé de traiter la laitue et le céleri contre les pucerons dès que le taux d'infestation atteint 3-5 %, mais cette décision peut dépendre d'autres facteurs, notamment le stade de croissance de la culture, la présence de mauvaises herbes hôtes à proximité du champ, le nombre réel de pucerons par plante et aussi la présence d'insectes utiles. Par exemple, le seuil d'intervention dans le céleri tombe à 1 %, deux semaines avant la récolte. Pour ce qui est de la laitue un taux d'infestation de 3 % est considéré comme élevé, sauf sur la laitue pommée avant la formation de la pomme où une infestation de 10 % ou moins est acceptable. Cette exception ne s'applique pas lorsqu'on a affaire au puceron de la laitue. Pour tous les genres de laitue, un taux d'infestation de 1 % est considéré comme élevé 7 à 10 jours avant la récolte.

Nombreux sont les insectes bénéfiques qui contribuent à réduire considérablement les infestations de pucerons. Les larves de coccinelles (figure 3), de chrysopes (figure 4), de cécidomyies et de syrphes (figure 5) ainsi que certaines guêpes parasites sont fréquentes dans les champs de laitue et de céleri; elles peuvent ramener les populations de pucerons en deçà des niveaux dangereux. Les pucerons parasités se reconnaissent par leurs restes momifiés ocre ou bruns qu'on peut repérer partout dans les colonies de pucerons. Pour plus de renseignements sur les insectes utiles, se référer à la publication 208F du MAAARO, intitulée Insectes prédateurs dans les vergers du sud de l'Ontario.

Figure 3. Larve de coccinelle, parasite des pucerons

Figure 3. Larve de coccinelle, parasite des pucerons

Figure 4. Larve de chrysope

Figure 4. Larve de chrysope

Figure 5. Larve de syrphe en train de dévorer un puceron

Figure 5. Larve de syrphe en train de dévorer un puceron

L'emploi répété d'insecticides peut, en éliminant les prédateurs et les parasites naturels, provoquer la résurgence des populations aphidiennes. Ce phénomène se produit fréquemment dans le cas d'insecticides comme les pyréthroïdes de synthèse. Dans la mesure du possible, on utilisera donc des produits ayant une action sélective contre les pucerons. Par ailleurs, le puceron vert du pêcher et le puceron du tournesol sont devenus résistants à de nombreux insecticides dans certaines régions.

Le désherbage des cultures et des champs avoisinants aidera à réduire les populations de pucerons. On conseille aussi d'arracher tout ressemis et toute autre plante qui manifestent des signes de maladie virale. Ces plantes virosées sont une source d'infection continuelle. Les virus transmis à la laitue par les semences et les pucerons sont ceux de la mosaïque de la laitue, de la mosaïque du concombre, de la mosaïque du navet et de la flétrissure de la fève des marais. Chez la laitue, les symptômes d'infection comprennent la nécrose des nervures, l'enroulement des feuilles, le rabougrissement et le jaunissement.

Le céleri est sensible au virus de la mosaïque du céleri et à celui de la mosaïque du concombre. Les symptômes sont semblables à ceux des viroses de la laitue, sauf que la mosaïque du concombre produit des lésions renfoncées typiques sur les côtes du céleri (figure 6).

Figure 6. Symptômes de la mosaïque du concombre sur le céleri

Figure 6. Symptômes de la mosaïque du concombre sur le céleri

Il est préférable d'utiliser des semences certifiées exemptes de ces virus. Pour plus de renseignements sur ce sujet, les producteurs de légumes pour le commerce sont priés de se référer à l'édition courante de la publication 363F du MAAARO, Recommandations pour les cultures légumières, à la publication 700, intitulée Lutte intégrée contre les ennemis de l'oignon, de la carotte, du céleri et de la laitue en Ontario, ou de consulter un spécialiste des cultures légumières. Quant à eux, les jardiniers amateurs peuvent se référer à l'édition courante de la publication 64F du MAAARO, Lutte contre les insectes nuisibles et les maladies dans le jardin, pour plus d'information sur la lutte contre les pucerons dans les cultures légumières.