Choix des chiens et dressage
ISSN 1198-7138, Publié mars 2022
Aperçu
Il existe au moins 40 races de chiens utilisées dans le monde pour garder les troupeaux
La présente fiche technique traite des points dont il faut tenir compte dans le choix de chiens de berger et contient des recommandations concernant leur dressage afin qu’ils deviennent des gardiens efficaces de troupeaux de moutons ou de chèvres.
Les fiches complémentaires suivantes contiennent d’autres renseignements à l’intention des producteurs qui souhaitent se doter de chiens de berger :

Caractéristiques des chiens de berger
Le comportement de tous les animaux dépend à la fois de leur bagage génétique et de l’environnement dans lequel ils ont été élevés et vivent. Selon Coppinger et coll., pour être un bon gardien de troupeaux, un chien de berger doit présenter trois traits de comportement : loyal, vigilant et protecteur
- Avoir été élevé depuis la naissance ou peu après avec les animaux qu’il devra protéger
- Établir de bons liens avec le troupeau
- Demeurer à proximité du troupeau et se montrer vigilant
- Travailler de manière indépendante
- Assurer la protection d’un certain périmètre et manifester un comportement protecteur contre les prédateurs
- Demeurer dans le pâturage ou les limites de la ferme
- Ne pas chasser les véhicules, les vélos ou les gens
- Être en bonne forme physique, avoir un bon état de chair, une bonne conformation et une bonne santé lui offrant une certaine longévité
Voici des traits de chiens de berger qui peuvent les rendre moins efficaces à accomplir leurs fonctions :
- Avoir été élevé à l’écart des animaux à protéger (c’est-à-dire un animal de compagnie ou un chien de ferme)
- Trop attaché à la personne responsable du troupeau
- Laisse le troupeau sans protection du crépuscule jusqu’à l’aube, alors que c’est la période durant laquelle les prédateurs sont le plus actifs
- Manifeste des comportements trop agressifs envers les humains, le bétail ou les animaux sauvages non prédateurs
- Chasse les véhicules, les vélos ou les gens sur les routes municipales
- N’éloigne pas les prédateurs de manière adéquate
- Poursuit ou effraie les animaux du troupeau ou s’amuse avec eux
- Se promène à l’extérieur du pâturage ou des limites de la ferme
- Présente une boiterie chronique, une conformation déficiente ou a une mauvaise santé
Choix de la race de chien de berger
Race
Les chiens de berger ont été spécialement sélectionnés pendant des milliers d’années pour leur capacité à se lier au troupeau, à travailler sans la présence d’humains et à manifester de puissants instincts de protection ainsi qu’une faible tendance à poursuivre les animaux qu’ils gardent
Les races populaires de chiens de berger sont habituellement d’apparence similaire (figure 2)
Il y a peu de preuves qu’une race soit plus efficace qu’une autre à réduire la prédation, bien que le sondage a montré certaines différences dans les comportements de garde respectifs

Les facteurs | Race Montagne des Pyrénées | Race Berger de Maremme | Race Berger Akbash | Race Berger d’Anatolie | Race Berger Komondor |
---|---|---|---|---|---|
Nombre de chiens évalués | 437 | 20 | 62 | 56 | 138 |
Très efficace | 71 % | 70 % | 69 % | 77 % | 69 % |
Assez efficace | 22 % | 20 % | 22 % | 13 % | 1 % |
Non efficace | 7 % | 10 % | 9 % | 10 % | 12 % |
Atout économique | 83 % | 84 % | 71 % | 82 % | 82 % |
Agressif envers les prédateurs | 95 % | 94 % | 100 % | 96 % | 94 % |
Agressif envers les chiens | 67 % | 94 % | 92 % | 86 % | 77 % |
Agressif envers les moutons | 7 % | 20 % | 20 % | 14 % | 24 % |
Agressif envers les gens | 4 % | 5 % | 6 % | 9 % | 17 % |
Adapté de Green et Woodruff (1988).
Choix du sexe du chien
De nombreuses études sur les chiens de berger n’ont signalé aucune différence entre l’efficacité des chiens mâles ou femelles, bien que certains producteurs aient des préférences personnelles
Il est habituellement recommandé que les chiens qui ne sont pas destinés à la reproduction soient stérilisés ou castrés, car les femelles ne peuvent pas protéger le troupeau lorsqu’elles sont gardées au chenil durant leurs chaleurs ou lorsqu’elles allaitent les chiots, et les chiens non stérilisés peuvent avoir tendance à errer davantage. La décision de stériliser ou castrer un chien de berger, et de l’âge approprié pour le faire, devrait être prise après consultation auprès du vétérinaire du troupeau.
Âge des chiens
Les jeunes chiens de berger ne sont pas entièrement efficaces avant environ l’âge de deux ans
Au moment de l’achat d’un chien de berger, il est normalement possible de se procurer un chiot (âgé de 8 à 10 semaines), un adolescent ou un adulte. Le prix d’achat du chien augmente avec son âge, étant donné que l’éleveur de chiens investit plus de ressources dans son développement, mais les risques de se retrouver avec un chien qui ne convient pas peuvent être moins élevés.
Les producteurs qui cherchent à se procurer un chien de berger pour la première fois devraient envisager d’acheter un chien adulte pour une protection plus immédiate de leur troupeau. Les nouveaux chiens de berger devraient être introduits dans l’exploitation de manière à répartir adéquatement l’âge des chiens. On réduira ainsi les exigences associées au dressage puisque les plus jeunes chiens apprendront des plus vieux. Il n’est pas recommandé d’acheter plusieurs chiots du même âge, car cela augmente la charge de travail pour le producteur et les plus vieux chiens, et rend plus difficile de répartir uniformément l’âge des différents chiens.
Éleveurs de chiens
De manière générale, il est plus important de se procurer des chiens auprès d’un éleveur reconnu que de se préoccuper des questions de race, de sexe ou d’âge du chien de berger. Ceux qui achètent un tel chien pour la première fois ont intérêt à trouver un éleveur qui peut leur offrir un soutien à moyen terme. Il est préférable pour le producteur de trouver un éleveur dont la situation en ce qui a trait à la prédation est semblable à la sienne (espèces en cause et pression exercée par les prédateurs). Il est également utile de tenir compte des enjeux associés à l’utilisation des chiens de berger sur la ferme du producteur qui pourraient ne pas être importants pour l’éleveur de chiens. Ainsi, les chiens de berger qui errent ou qui ont des comportements défensifs envers les humains pourraient ne pas être tolérés dans les exploitations situées à proximité de zones plus peuplées.
Dans le cadre du choix d’un éleveur auprès de qui on souhaite se procurer un chien de berger, vérifier si les chiens offerts répondent aux critères suivants
- Les deux parents du chien sont des gardiens de troupeau d’une race (ou d’un croisement de races de chiens de berger) utilisée traditionnellement comme chien de berger
- L’éleveur met dès leur jeune âge les chiots en contact avec les animaux à protéger
- Les animaux reproducteurs et les chiots sont en bonne santé (ils sont, par exemple, vaccinés, vermifugés, ont fait l’objet de soins vétérinaires de routine et, dans le cas des animaux reproducteurs, sont dotés d’une certification éventuelle de l’examen des hanches et des yeux)
Il est important de choisir judicieusement le vendeur du chien, car l’achat, le dressage et l’entretien d’un chien de berger constituent un investissement majeur.
Dresser des chiens de berger pour qu’ils soient efficaces
Principes généraux de dressage
Les races de chiens de berger possèdent des traits innés de gardiens de troupeaux, mais tous ont besoin d’une forme de dressage, et certains plus que d’autres. Le dressage d’un chien de berger, comme de tout animal, est plus efficace lorsqu’on récompense les comportements souhaités et qu’on gère le milieu ambiant pour prévenir les comportements indésirables. Il est beaucoup plus facile de prévenir un problème par des méthodes de supervision et de gestion que de tenter de le résoudre plus tard. Il est bien reconnu que les chiens apprennent beaucoup plus rapidement par renforcement positif (par des félicitations, des récompenses, un accès à des ressources) qu’en les punissant (par des réprimandes). Toutefois, les comportements inappropriés (comme poursuivre le bétail, errer) doivent être interrompus immédiatement.
Il est habituellement utile de faire comprendre à un chien de berger les commandements de base (par exemple, « viens, assis, couché, reste, donne ») et de l’habituer à être manipulé par différentes personnes, à marcher en laisse et à tolérer les tours d’automobile. On réduira ainsi le stress du chien au moment de lui prodiguer des soins et au cours des visites chez le vétérinaire. L’heure des repas constitue un bon moment de mettre en pratique et de renforcer les bons comportements.
Auparavant, les producteurs évitaient souvent d’interagir avec leurs chiens de berger pour ne pas compromettre leur capacité à se lier aux animaux à protéger. De nos jours, bon nombre de producteurs reconnaissent que de brèves interactions, comme féliciter le chien et le flatter, sont utiles au cours du dressage des chiens et des soins à leur donner.
Il importe de reconnaître que les chiens de berger ne sont pas uniquement des outils pour réduire la prédation, mais aussi des animaux ayant leurs propres besoins. Ce ne sont pas tous les chiens qui sont aptes à garder les troupeaux, et il se peut que des chiens de berger qui n’effectuent pas bien leurs tâches conviennent mieux dans une autre ferme ou soient mieux adaptés à un autre style de vie. Les chiens ont aussi besoin de temps de repos et de détente pour se montre efficaces au travail.
Établissement des liens avec les animaux à protéger
Il est important que les chiots de chien de berger soient élevés avec le bétail dès le plus jeune âge afin de favoriser l’établissement des liens avec les animaux à protéger ainsi que les comportements souhaitables envers le troupeau (figure 3). Des chercheurs ont montré que le taux de réussite des chiots élevés avec du bétail dès l’âge de trois mois était plus élevé que pour ceux qui étaient mis en contact avec le bétail après cet âge
- Les chiots vivent une période critique située environ entre la 8e et la 16e semaine, au moment où se forment leurs liens sociaux et qu’ils peuvent apprendre à se montrer attentifs au bétail.
- De l’âge de quatre mois environ jusqu’à un peu plus d’un an, les jeunes chiens de berger apprennent à être loyaux envers le bétail, et bon nombre d’entre eux poursuivent les animaux et se promènent ici et là tout en apprenant graduellement les comportements appropriés.
- À l’âge d’environ un an, les chiens deviennent plus matures, montrent des comportements protecteurs et commencent habituellement à devenir de bons gardiens.
Pour favoriser l’établissement de liens avec les autres animaux, les chiots devraient être placés dans des enclos avec du bétail, soit seuls ou avec un autre chien, de l’âge de huit semaines jusqu’à cinq mois. Ces enclos devraient être de petites dimensions (14 m2, soit environ 150 pi2), abriter de trois à six animaux d’élevage et comporter une aire inaccessible au bétail où les chiots peuvent se nourrir et se reposer

Apprentissage des limites physiques à ne pas dépasser
L’errance des chiens au-delà des pâturages ou des limites de la ferme est l’un des problèmes les plus courants pour les propriétaires de chiens de berger. Les chiens ont naturellement de vastes territoires, ou « domaines vitaux ». Sous des conditions australiennes, on a observé que les chiens de berger avaient un domaine vital de base, c’est-à-dire une zone où les chiens passent 50 % de leur temps, d’une superficie variant de 4 à 252 hectares et le plein territoire des chiens allait jusqu’à 2 km à l’extérieur des pâturages de moutons
Les chiens qui se promènent hors des limites de la ferme peuvent être une source de conflits avec les voisins et les conducteurs de véhicules en plus de laisser le bétail sans protection. Ces chiens risquent davantage aussi de se blesser ou d’être tués. Une étude réalisée dans le cadre d’un projet sur les chiens gardiens de troupeaux a montré que 48 % de tous les décès de chiens de ferme étaient attribuables à des accidents (chiens disparus, frappés par un véhicule), et dans bon nombre de ces cas, il s’agissait de chiens qui erraient
Les frontières à ne pas dépasser par le chien peuvent être un pâturage en particulier ou les limites de la ferme, selon l’exploitation. Le fait de contenir les chiens avec des moyens physiques (comme des barrières fermées, des clôtures électriques ou grillagées en bon état) les empêchera de s’éloigner des zones à protéger. Il s’agit là d’une première étape déterminante pour leur apprendre à respecter les frontières de la ferme. Promener régulièrement les chiots ou les chiens adultes en suivant le périmètre de la propriété ou des pâturages peut aider les chiens à ne pas s’aventurer hors des limites permises.
Conclusion
Les chiens de berger peuvent représenter un apport valable à une stratégie de réduction de la prédation pour certaines exploitations. Le choix judicieux des chiens et un bon dressage sont toutefois déterminants pour qu’ils deviennent des gardiens de troupeaux efficaces. En effet, les chiens inefficaces peuvent causer autant de problèmes qu’en résoudre s’ils se promènent hors des limites de la ferme, poursuivent le bétail. Choisir des chiens d’une race, ou d’un croisement, traditionnellement utilisée pour garder les troupeaux dont les deux parents travaillent comme chiens de berger, et s’assurer qu’ils sont élevés avec le bétail dès le plus jeune âge afin de faciliter l’acquisition de comportements souhaitables envers le troupeau. Les producteurs qui souhaitent se procurer un chien de berger pour la première fois devraient consulter des producteurs expérimentés dans ce domaine ou des éleveurs de chiens de berger pour de l’information et du soutien additionnels.
La présente fiche technique a été rédigée par Erin Massender, spécialiste des petits ruminants, MAAARO.
Notes en bas de page
- note de bas de page[14] Retour au paragraphe Gehring, T.M., VerCauteren, K.C. et Landry, J-M. (2010). Livestock protection dogs in the 21st century: Is an ancient tool relevant to modern conservation challenges?. USDA National Wildlife Center – Staff Publications. 919, 299-309.
- note de bas de page[15] Retour au paragraphe Coppinger, R., Coppinger, L., Langeloh, G., Gettler, L. et Lorenz, J. (1988). A decade of use of livestock guarding dogs. Proceedings of the Thirteenth Vertebrate Pest Conference (1988). 43, 209-214.
- note de bas de page[16] Retour au paragraphe Coppinger, L. et Coppinger, R. (2014). Dogs for herding and guarding livestock. In T. Grandin (Ed.), Livestock Handling and Transport, 4e éd. (pp. 245-260). CAB International.
- note de bas de page[17] Retour au paragraphe Smith, M.E., Linnell, J.D.C., Odden, J. et Swenson, J.E. (2000). Review of methods to reduce livestock depredation: I. Guardian animals. Acta Agriculturae Scandinavica, 50, 279-290.
- note de bas de page[18] Retour au paragraphe Green, J.S. et Woodruff, R.A. (1988). Breed comparisons and characteristics of use of livestock guarding dogs. Journal or Range Management, 41(3), 249-251.
- note de bas de page[19] Retour au paragraphe Redden, R.R., Tomeček, J.M. et Walker, J.W. (2015). Livestock guardian dogs. Texas A&M AgriLife Extension Service, 1-8.
- note de bas de page[20] Retour au paragraphe Costanzo, B., Redden, R. et Walker, J. (2020). How to select a livestock guardian dog puppy. Texas A&M AgriLife Extension Service.
- note de bas de page[21] Retour au paragraphe Lorenz, J. et Coppinger, L. (2002). Raising and training a livestock-guarding dog. Oregon State University Extension Service. (Original work published in 1996).
- note de bas de page[22] Retour au paragraphe Van Bommel, L. et Johnson, C.N. (2014). Where do livestock guardian dogs go? Movement patterns of free-ranging Maremma Sheepdogs. PloS ONE, 9(10), e111444, 1-12.
- note de bas de page[23] Retour au paragraphe Lorenz, J.R., Coppinger, R.P. et Sutherland, M.R. (1986). Causes and economic effects of mortality in livestock guarding dogs. Journal of Range Management, 39(4), 293-295.