Introduction

Les biocombustibles représentent une source potentielle d’énergie renouvelable. Cependant, leur contenu énergétique est inférieur à celui des combustibles fossiles traditionnels, ce qui fait obstacle à leur usage général car il en faut plus pour obtenir la même quantité d’énergie. Lorsque ce contenu énergétique faible se double d’une faible masse volumique, le volume de biomasse dont on a besoin croît de façon considérable. Le compactage, ou densification, est un moyen d’accroître la densité d’énergie et de réduire les problèmes de manutention. La présente fiche technique examine les propriétés de la biomasse solide en matière de masse volumique ainsi que des technologies potentielles de densification.

Masse volumique apparente

La masse volumique apparente est définie comme étant la masse par unité de volume d’une matière, exprimée en kilogrammes par mètre cube (kg/m3) ou en livres par pied cube (lb/pi3). La plupart des résidus agricoles présentent une masse volumique apparente faible, comme le montre la figure 1.

Diagramme à barres illustrant la masse volumique apparente de divers types de biomasse non transformée
Figure 1. Masse volumique apparente de divers types de biomasse non transformée.

Par exemple, la masse volumique apparente de la paille de blé en vrac est d’environ 18 kg/m3 (1,1 lb/pi3), par rapport à 700 kg/m3 (44 lb/pi3) pour le charbon. Pour être rentable, la biomasse non transformée ne peut donc généralement être transportée à plus d’environ 200 km.footnote i.

Densité d’énergie

La densité d’énergie désigne la quantité d’énergie présente dans une unité de volume; elle est souvent exprimée en MJ/m3 ou en BTU/pi3.

La figure 2 est une représentation graphique de volumes de matières non transformées ayant une densité d’énergie équivalente, soit 16 unités de volume pour la paille, quatre pour le bois et une pour le charbon.

Illustration contenant trois cubes, le plus grand portant le mot paille, suivi d’un plus petit au milieu portant le mot bois, puis d’un petit cube portant le mot charbon. Ce diagramme illustre les volumes de ces matières non transformées ayant une densité d’énergie équivalente.
Figure 2. Volumes de matières non transformées ayant une densité d’énergie équivalentefootnote ii.

Densifier la biomasse

La faible masse volumique de la biomasse complique la manutention, le transport, l’entreposage et la combustion. Ces problèmes peuvent être résolus grâce à la densification, un processus qui permet d’obtenir un combustible liquide ou solide plus dense et aux propriétés plus uniformes que la biomasse brute.

Les principaux avantages de la densification de la biomasse à des fins de combustion sont les suivants :

  • manutention et alimentation mécaniques simplifiées
  • combustion uniforme dans les chaudières
  • réduction de la production de poussière
  • réduction du risque de combustion spontanée pendant l’entreposage
  • simplification de l’infrastructure d’entreposage et de manutention, réduisant les besoins en capital à l’installation de combustion
  • baisse des frais de transport grâce à une densité d’énergie accrue

Le principal inconvénient des technologies de densification de la biomasse réside dans le coût élevé de certains procédés de densification.

Prétraitement de la biomasse

Le prétraitement de la biomasse pourrait être requis avant sa densification afin d’optimiser la densité d’énergie et la masse volumique du produit.

Ce prétraitement peut comprendre :

  • la modification de la longueur de hachage ou le broyage
  • le séchage pour réduire la teneur en humidité
  • l’utilisation d’un agglomérant
  • le traitement à la vapeur
  • la torréfaction

Modification de la longueur de hachage ou broyage

Chaque procédé de densification nécessite une longueur de hachage précise ou un broyage pour assurer :

  • une densification moins énergivore
  • des produits plus denses
  • des produits moins friablesfootnote iii

Séchage

Une faible humidité permet d’améliorer la densité et la durabilité du combustible.footnote iv. Pour la plupart des procédés de densification de la biomasse, la teneur optimale en humidité se situe entre 8 et 20 % (à l’état humide)footnote v. La plupart des techniques de compactage nécessitent une petite quantité d’humidité pour « amollir » la biomasse. Cependant, lorsque la teneur optimale en humidité est dépassée, la résistance et la durabilité de la biomasse densifiée sont réduites.

Utilisation d’un agglomérant

La teneur des matières en agglomérants naturels influe sur la densité et la durabilité de la biomasse densifiée. Cette capacité agglomérante augmente parallèlement à la teneur en protéines et en amidonfootnote vi. Les tiges de maïs ont des propriétés agglomérantes élevées, contrairement aux graminées de saison chaude, qui sont faibles en protéines et en amidonfootnote vii. Il est possible d’ajouter des agglomérants aux matières pour compenser. Les agglomérants courants comprennent l’huile végétale, l’argile, l’amidon, l’huile à cuisson ou la cire.

Traitement à la vapeur

Un traitement à la vapeur préalable à la densification peut favoriser la libération et l’activation des agglomérants naturels présents dans la biomasse.

Torréfaction

La torréfaction est une forme de pyrolyse qui consiste à chauffer la biomasse en l’absence d’oxygène et d’air. Il s’agit d’un procédé de prétraitement employé pour améliorer les propriétés des granulés. Elle peut également être employée seule pour améliorer les propriétés de la biomasse. La torréfaction est une forme plus douce de pyrolyse lente dont l’objectif consiste à assécher, fragiliser et hydrofuger la biomasse en la chauffant dans un environnement inerte à une température de 280 à 320 °C.

Techniques de densification de la biomasse

La biomasse se densifie au moyen de deux grands procédés : la densification mécanique et la pyrolyse. La densification mécanique consiste à soumettre les matières à une pression mécanique pour la densifier. La pyrolyse consiste à chauffer la biomasse en l’absence d’oxygène. En général, la pyrolyse à une température plus faible pendant plus longtemps (pyrolyse lente) favorise la production de combustible solide (charbon). Une température moyenne (de 400 à 500 °C) pendant une très brève période (une ou deux secondes), ce que l’on appelle la pyrolyse rapide, favorise la production de combustible liquide ou biohuile.

La méthode de densification à employer repose sur le type de résidus et la situation locale. Le tableau 1 décrit les diverses technologies employées pour accroître la densité d’énergie de la biomasse ou lui donner une taille et une forme homogènes.

Tableau 1. Technologies de densification
Photo montrant deux balles de foin rondes dans un champDensification mécanique - La formation de Balles est une méthode traditionnelle de densification employée couramment pour la récolte. On forme une balle au moyen d’une machine agricole (appelée ramasseuse-botteleuse) qui comprime les matières hachées. Les balles peuvent être carrées, rectangulaires ou rondes, selon le type de ramasseuse-botteleuse employé. Les dimensions des balles rondes vont de 1,2 m x 1,5 m (4 pi x 5 pi) à 1,5 m x 1,5 m (5 pi x 5 pi). Les grosses balles rectangulaires mesurent généralement 0,9 m x 0,9 m x 1,8 m (3 pi x 3 pi x 6 pi). Les balles rondes sont moins coûteuses à produire; cependant, les grosses balles carrées sont généralement plus denses et plus faciles à manipuler et à transporter.
Photo montrant une petite pile de granulésDensification mécanique - Les Granulés sont de très haute densité. Ils sont plus faciles à manipuler que les autres produits de biomasse densifiés, car il est possible d’utiliser l’infrastructure employée pour la manutention des grains. Les granulés sont fabriqués au moyen d’un processus d’extrusion, en utilisant une presse à piston qui fait passer de la biomasse finement broyée dans une filière ronde ou carrée; les granulés sont coupés ensuite à la longueur désirée. Les granulés de biomasse sont généralement cylindriques, de moins de 38 mm (1,5 po) de longueur et de 7 mm (0,3 po) de diamètre. Bien qu’ils soient de taille uniforme, les granulés se brisent facilement pendant la manutention. Il existe différentes catégories de granulés dont la densité d’énergie et la teneur en cendres varient. Photo offerte par CanmetÉNERGIE.
Photo montrant une petite pile de cubes de biomasseDensification mécanique - Les Cubes sont de gros granulés de forme généralement cubique. Ils sont moins denses que les granulés. Leur taille varie; ils font de 13 à 38 mm (0,5 à 1,5 po) de largeur et de 25 à 102 mm (1 à 4 po) de longueur. Ils sont fabriqués en comprimant de la biomasse hachée au moyen d’une presse à roue qui la force à travers des filières pour produire des cubes. Photo offerte par CanmetÉNERGIE.
Photo montrant une briquette de biomasseDensification mécanique - Les Briquettes sont semblables aux granulés, sauf pour leur taille. Elles font au moins 25 mm (1 po) de diamètre, et sont fabriquées au moyen d’une presse à piston qui fait passer sous forte pression la biomasse dans une filière. Elles peuvent aussi être fabriquées au moyen d’un procédé appelé extrusion à vis. La biomasse est alors extrudée au moyen d’une vis à travers une filière chauffée. La biomasse densifiée par extrusion à vis est plus facile à entreposer et présente une densité d’énergie plus élevée que la biomasse produite par presse à piston. Photo offerte par Wayne Winkler.
Photo montrant quatre rondelles de biomasse empiléesDensification mécanique - Les Rondelles sont semblables à des rondelles de hockey, et font 75 mm (3 po) de diamètre. On les fabrique au moyen d’une machine de briquetage, et elles sont résistantes à l’humidité. D’une densité semblable à celle des granulés, elles ont l’avantage de coûter moins cher à produire.
Photo montrant des copeaux de boisDensification mécanique - Les Copeaux de bois sont employés dans de nombreux dispositifs, des appareils ménagers aux grandes centrales électriques. Les copeaux destinés aux chaudières mesurent de 5 à 50 mm (0,2 à 2 po) de longueur. Ils sont fabriqués au moyen d’un déchiqueteur. Comme combustible, les copeaux de bois sont d’un coût comparable au charbon. Photo offerte par CanmetÉNERGIE.
Photo montrant une pile de granulés de biomasse produits par torréfactionPyrolyse - La Torréfaction consiste à chauffer la biomasse dans une atmosphère inerte à une température de 280 à 320 ºC pendant quelques minutes. Le combustible torréfié présente une meilleure broyabilité. Il a également des propriétés hydrofuges qui le rendent résistant aux atteintes biologiques et à l’humidité, ce qui en facilite l’entreposage. Ce processus requiert peu d’énergie, car une partie des gaz volatils libérés pendant le chauffage sont brûlés, générant 80 % de la chaleur nécessaire à la torréfaction. La biomasse torréfiée est densifiée sous forme de granulés ou de briquettes, augmentant encore plus sa masse volumique et améliorant ses propriétés hydrofuges. Photo offerte par CanmetÉNERGIE.
Photo montrant du charbon produit par pyrolyse lentePyrolyse - La Pyrolyse lente consiste à chauffer la biomasse à une température de 350 à 500 ºC en l’absence d’oxygène et d’air pendant une longue période (généralement de 0,5 à 2 heures). Le principal produit de cette opération est un combustible solide (charbon) qui conserve de 60 à 70 % de l’énergie initiale de la biomasse brute. La densité d’énergie peut être accrue, de sorte que le charbon est un combustible qui se prête à des utilisations commerciales, comme dans le cas de la biomasse torréfiée, ou résidentielles (p. ex.., barbecues), et qui peut servir d’amendement appelé « biochar ». Photo offerte par CanmetÉNERGIE.
Photo montrant un technicien en laboratoire versant de la biohuile d’un bécher dans un autrePyrolyse - La Pyrolyse rapide consiste à traiter la biomasse à une température pouvant atteindre 450 à 500 ºC pendant une ou deux secondes. Ce procédé donne jusqu’à 75 % de biohuile et de 10 à 15 % de charbon. La biohuile est un combustible de densité d’énergie plus élevée qui est facile à manipuler, car il s’agit d’un liquide que l’on peut pomper et entreposer dans des citernes. Il faut prendre des précautions, car les biohuiles sont très acides, dégagent une odeur forte et tendent à se séparer ou à former un sédiment. Elles peuvent remplacer les combustibles fossiles et les huiles lourdes et moyennes. Des recherches sont en cours en vue de trouver un moyen de les transformer en huiles plus légères comme du diesel et de l’essence. Photo offerte par CanmetÉNERGIE.

Grâce à l’utilisation de diverses technologies de densification, la biomasse brute est comprimée afin d’atteindre une masse volumique de sept à 10 fois sa masse volumique brute initialefootnote viii. La masse volumique que certaines technologies de prétraitement permettent d’obtenir est indiquée au tableau 2 et à la figure 3.

Tableau 2. Masse volumique et densité d’énergie de la biomasse soumise à certaines technologies de densification
Remarque : La biomasse libre a une masse volumique 3,5 à 5 lb/pi3 ou 60 à 80 kg/m3
Forme de biomasseForme et tailleMasse volumique
(lb/ft3)
Masse volumique
(kg/m3)
Densité d’énergie
(GJ/m3)
Méthode traditionnelle Biomasse en balles3Grandes, rondes, milieu mou
1,2 x 1,2, 1,2 x 1,5, 1,5 x 1,2, 1,8 x 1,5 m
(4 x 4, 4 x 5, 5 x 4, 6 x 5 pi)
diamètre x largeur
10–12160–1902,8–3,4
Méthode traditionnelle Biomasse en balles3Grandes, rondes, milieu dur
1,2 x 1,2, 1,2 x 1,5, 1,5 x 1,2, 1,8 x 1,5 m
(4 x 4, 4 x 5, 5 x 4, 6 x 5 pi)
diamètre x largeur
12–15190–2403,4–4,5
Méthode traditionnelle Biomasse en balles3Grandes ou moyennes, carrées
0,6 x 0,9 x 2,4 m (2 x 3 x 8 pi)
0,9 x 1,2 x 2,4 m (3 x 4 x 8 pi)
13–16210–2553,7–4,7
Méthodes non traditionnelles Biomasse broyéefootnote ix (broyeur à marteaux)1,5 mm (0,06 po,) emballée et comprimée132003,6
Méthodes non traditionnelles Briquettesfootnote x32 mm (1,3 po) de diamètre x 25 mm (1 po) d’épaisseur223506,4
Méthodes non traditionnelles Cubesfootnote xi33 mm (1,3 po) x 33 mm (1,3 po)254007,3
Méthodes non traditionnelles Rondellesfootnote xii75 mm (3 po) de diamètre x 12 mm (0,5 po) d’épaisseur30–40480–6408,6–12,0
Méthodes non traditionnelles Granulésfootnote xiii6,24 mm (0,2 po) de diamètre35–45550–7009,8–14,0
Méthodes non traditionnelles Granulés torréfiésfootnote xiv6,24 mm (0,2 po) de diamètre5080015,0
Méthodes non traditionnelles Biohuilefootnote xvliquide751 20020
Conversion deàMultiplier par
mmpouce0,0394
poucepied0,0833
kg/m3lb/pi30,0624
MJ/kgBTU/lb430
Diagramme à barres illustrant la masse volumique apparente de la biomasse soumise à diverses technologies de densification.
Figure 3. Masse volumique brute résultant de la biomasse soumise à certaines technologies de densification.

Coût de la densification de la biomasse

Les matières pyrolysées sont les plus coûteuses à densifier; les cubes, rondelles, briquettes et copeaux de bois sont moins coûteux.

Les facteurs qui influent sur le coût des technologies de densification sont notamment les suivantsfootnote xvi :

  • taille de l’installation de densification (tonnes/an)
  • heures d’exploitation (h/jour)
  • coût de l’équipement
  • frais de personnel
  • coût des matières brutes

Les technologies de densification nécessitent une hausse de l’apport énergétique et augmentent les coûts. Une partie de ces coûts sont récupérés grâce à la réduction des coûts de manutention, d’entreposage et de transport, à un meilleur fonctionnement de la chaudière et à un processus de combustion amélioré. Certaines technologies mentionnées sont en vente dans le commerce, et d’autres sont nouvelles.

Conclusion

La faible densité d’énergie de la biomasse par unité de volume par rapport aux combustibles fossiles entraîne des coûts de manutention, d’entreposage et de transport plus élevés. La biomasse est donc rentable surtout lorsqu’elle est utilisée près de sa source. Le recours à des technologies de densification permet de réduire le coût du transport de la biomasse. Ces technologies permettent d’obtenir un produit homogène présentant une densité d’énergie supérieure à celle des matières brutes d’origine, moyennant des coûts d’immobilisations et d’exploitation supplémentaires.

Ressources

La présente fiche technique a été rédigée par Steve Clarke, ing. (retraité), spécialiste, énergie et génie agricole, MAAARO, Kemptville, et par Fernando Preto, Systèmes de bioénergie, CanmetÉNERGIE. Nous tenons à remercier Chantal Quesnel pour toute l’aide qu’elle nous a apportée aux fins de la rédaction de la présente fiche technique, Benjamin Bronson pour son apport et son examen consciencieux et Shalin Khosla, spécialiste de la culture de serre, MAAARO, qui nous a beaucoup aidés à évaluer des technologies de rechange.