Introduction

Indépendamment du modelé du relief, tous les sols sont naturellement soumis à l’érosion. En agriculture, l’érosion du sol renvoie à l’amincissement de la couche arable d’un champ sous l’effet des forces érosives naturelles de l’eau (figure 1) et du vent (figure 2), ou sous l’effet des activités agricoles, comme le travail du sol.

Photo du point de concentration des eaux de ruissellement dans un champ
Figure 1. Force érosive de l’eau attribuable à la concentration de l’écoulement des eaux de ruissellement.
Photo d’un champ exposé au vent montrant le sol et la végétation emportés par le vent
Figure 2. Force érosive du vent dans un champ non protégé.

Que la cause de l’érosion soit l’eau, le vent ou le travail du sol, dans tous les cas, le sol : se détache, se déplace, puis se dépose. La couche arable, fertile, vivante et riche en matière organique, est emportée ailleurs sur le terrain, où elle s’accumule avec le temps, ou hors du terrain, dans les réseaux de drainage. L’érosion du sol abaisse la productivité de la terre et contribue à la pollution des cours d’eau, des terres humides et des lacs adjacents.

Le phénomène peut être lent et passer relativement inaperçu. Il peut aussi se produire à un rythme alarmant et causer alors de lourdes pertes de terre arable. Le compactage du sol, l’appauvrissement du sol en matière organique, la dégradation de la structure du sol, un mauvais drainage interne, des problèmes de salinisation et d’acidification du sol sont d’autres causes de détérioration du sol qui en accélèrent l’érosion.

La présente fiche technique s’attarde aux causes et aux effets de l’érosion des terres agricoles par l’eau, le vent et le travail du sol.

Érosion hydrique

Du fait de l’ampleur du problème et de la gravité de ses répercussions sur le terrain et hors du terrain, l’érosion hydrique est au cœur des efforts de conservation des sols en Ontario.

La vitesse et l’ampleur de l’érosion causée par l’eau dépendent des facteurs suivants :

Pluie et ruissellement

Plus grandes sont l’intensité et la durée d’un épisode de pluie, plus grand est le risque d’érosion. L’impact des gouttes de pluie sur la surface du sol peut briser les agrégats et disperser les particules de sol. Les particules les plus légères, dont les particules très fines de sable, de limon, d’argile et de matière organique, sont facilement emportées par les éclaboussures d’eau de pluie et les eaux de ruissellement. Il faut davantage d’énergie transmise par les gouttes de pluie et un écoulement plus important pour emporter les particules plus grossières de sable et de gravier.

Les déplacements de sol causés par la pluie (les éclaboussures d’eau) sont habituellement plus grands et plus facilement observables au cours d’orages brefs et violents. Même si l’érosion causée par des averses de longue durée et de moindre intensité n’est habituellement pas aussi spectaculaire ni manifeste que celle qui est produite par les gros orages, elle peut néanmoins à la longue entraîner des pertes de sol significatives.

Sur les terrains en pente, l’eau commence à ruisseler à la surface du sol lorsque l’excédent d’eau ne peut plus être absorbé par le sol ou que l’eau est piégée à la surface. Le ruissellement s’intensifie lorsque le taux d’infiltration diminue sous l’effet du gel, de l’encroûtement ou du compactage du sol. Sur les terres agricoles, le ruissellement le plus considérable est observé au printemps, lorsque, normalement, les sols sont saturés, la neige fond et le couvert végétal est minimal.

Érodabilité du sol

L’érodabilité d’un sol est une estimation, fondée sur les caractéristiques physiques du sol, de la vulnérabilité de ce sol à l’érosion. L’érodabilité est surtout influencée par la texture du sol, mais elle l’est également par sa structure, sa teneur en matière organique et sa perméabilité. En général, les sols qui affichent une plus grande résistance à l’érosion sont ceux dans lesquels l’eau s’infiltre plus rapidement, ceux qui sont riches en matière organique et ceux dont la structure est améliorée. Les sables, les loams sableux et les sols loameux ont tendance à être moins vulnérables à l’érosion que les limons, les sables très fins et certains sols argileux.

Les pratiques aratoires et culturales qui appauvrissent le sol en matière organique, nuisent à la structure du sol ou provoquent le compactage du sol contribuent à accroître l’érodabilité. Par exemple, les couches de sol compactées sous la surface peuvent faire obstacle à l’infiltration de l’eau et contribuer au ruissellement. La formation d’une croûte de sol, qui a tendance à « sceller » la surface, nuit aussi à l’infiltration de l’eau. Si, à certains endroits, l’encroûtement peut réduire les pertes de sol causées par l’impact des gouttes de pluie et des éclaboussures d’eau, il entraîne quand même une augmentation correspondante du volume des eaux de ruissellement qui risque de provoquer des problèmes d’érosion plus graves encore.

L’érosion passée influence aussi l’érodabilité du sol, car, bien souvent, les couches de sol sous-jacentes à la couche arable qui se trouvent exposées ont tendance à être plus vulnérables à l’érosion que les couches de sol originales en raison de leur moins bonne structure et de leur faible teneur en matière organique. Elles sont aussi moins fertiles, ce qui se répercute sur le rendement des cultures. Les peuplements étant alors généralement plus clairsemés, la protection du sol offerte par les cultures se trouve compromise.

Pente et longueur de pente

Plus la pente d’un champ est raide et plus cette pente est longue, plus les risques d’érosion sont grands. L’érosion hydrique augmente aussi avec la longueur de la pente à cause de l’augmentation du ruissellement. La fusion de petits champs pour en faire de plus grands a souvent pour conséquence d’allonger les pentes. Le débit de l’eau étant alors plus rapide, le transport des sédiments augmente, ce qui donne lieu à des risques accrus d’érosion et d’affouillement.

Cultures et végétation

Le risque d’érosion augmente si le sol n’est pas suffisamment protégé par le couvert végétal et/ou une couche de résidus de culture. Les résidus et la végétation protègent le sol de l’impact des gouttes de pluie et des éclaboussures d’eau. Ils ont aussi tendance à réduire la vitesse d’écoulement de l’eau et à favoriser l’infiltration de l’eau dans le sol.

L’efficacité de la végétation et des résidus à réduire l’érosion dépend du type, de l’étendue et de la densité du couvert végétal. La meilleure façon de combattre l’érosion est de miser à la fois sur un couvert végétal et sur des résidus de culture (p. ex., forêts et pâturages permanents) qui couvrent complètement le sol et qui interceptent les gouttes de pluie à la surface du sol et près de celle-ci. Les résidus partiellement incorporés et les vieilles racines ont aussi leur importance, parce qu’ils facilitent l’infiltration.

L’efficacité d’un couvert végétal à réduire l’érosion dépend aussi de la protection qu’il offre à différentes périodes de l’année en fonction de l’importance des précipitations érosives reçues au cours de ces périodes. Les cultures qui procurent un couvert végétal complet durant la majeure partie de l’année (p. ex., luzerne et cultures de couverture d’automne) permettent de beaucoup mieux maîtriser l’érosion que les cultures qui laissent le sol nu pendant plus longtemps (p. ex., cultures en rangs), particulièrement pendant les périodes de précipitations très érosives, comme le printemps et l’été. Les systèmes de conduite des cultures qui favorisent les techniques de culture selon les courbes de niveau et de culture en bandes peuvent réduire encore davantage l’érosion. Pour freiner le gros de l’érosion dans les cultures en rangs, laisser des résidus couvrant plus de 30 % de la surface du sol après la récolte et pendant les mois d’hiver, ou semer une culture de couverture sous couvert (p. ex., du trèfle rouge sous couvert de blé ou de l’avoine à la suite de maïs à ensilage).

Pratiques culturales

L’érosion hydrique est influencée par les opérations culturales, notamment par la profondeur de travail du sol, le sens dans lequel celui-ci se fait, le moment des labours, le type d’instruments aratoires et le nombre de passages. Généralement, moins le travail du sol perturbe la végétation ou la couche de résidus en surface ou près de la surface, moins le travail du sol engendre d’érosion hydrique. Le travail réduit du sol et le semis direct sont des moyens efficaces de limiter ce type d’érosion.

Au contraire, les pratiques aratoires réalisées dans le sens de la pente favorisent l’érosion hydrique en offrant des voies d’écoulement aux eaux de ruissellement. Le travail du sol à contre-pente et les techniques de labour suivant les courbes de niveau s’opposent à la concentration des eaux de ruissellement et limitent les déplacements de sol.

Formes d’érosion hydrique

Érosion en nappe

L’érosion en nappe s’entend du déplacement des particules de sol provoqué par le choc des gouttes de pluie et les eaux de ruissellement. Elle se produit habituellement d’une manière égale sur une pente uniforme et passe inaperçue jusqu’à ce que la quasi-totalité de la couche arable productive ait été enlevée. Le sol fertile détaché par l’érosion se retrouve au bas de la pente (figure 3) ou dans des terres basses. On reconnaît aussi ce type d’érosion à la couleur claire du sol sur les buttes, aux changements dans l’épaisseur des couches de sol et aux faibles rendements sur les épaulements et les buttes.

Photo d’un champ récolté montrant, au bas d’une pente, les dépôts de sol et de résidus de culture qui s’y sont accumulés
Figure 3. L’accumulation de sol et de débris de culture à l’extrémité basse de ce champ est un indice d’érosion en nappe.

Érosion en rigoles

On assiste à l’érosion en rigoles quand les eaux de ruissellement se concentrent et forment des filets ou rigoles (figure 4). Ces dépressions bien définies qui résultent de l’enlèvement du sol par la force de l’eau qui coule sont néanmoins suffisamment petites pour ne pas nuire au travail de la machinerie. Dans bien des cas, ces rigoles sont comblées chaque année par le travail du sol.

Photo montrant un champ récolté et la voie d’écoulement tracée par les eaux de ruissellement.
Figure 4. Le tracé distinct formé par les eaux de ruissellement est un signe d’érosion en rigoles ayant emporté le sol

Érosion par ravinement

Le ravinement, ou érosion par ravinement, est un stade avancé de l’érosion en rigoles. Le sol est alors si profondément entaillé que les dépressions qui se forment nuisent aux opérations normales de travail du sol (figure 5). Sur certaines fermes de l’Ontario, le ravinement est responsable de la perte de grandes quantités de sol arable et de sous-sol chaque année. L’écoulement superficiel qui amène la formation de ravins ou l’élargissement de ravines est habituellement le résultat d’une mauvaise conception des exutoires des réseaux de drainage de surface et souterrain. L’instabilité des talus des ravins, habituellement associée au suintement des eaux souterraines, provoque l’érosion puis l’effondrement des talus. De tels effondrements surviennent généralement au printemps lorsque le régime des eaux est le plus propice à l’érosion.

Photo d’un champ en culture traversé par un gros ravin
Figure 5. Sans intervention, l’érosion en rigoles peut mener à l’érosion par ravinement.

Sans mesures correctives bien pensées et efficaces, la formation de ravins est difficile à prévenir. Les mesures adoptées doivent prendre en considération la cause de l’augmentation du débit de l’eau sur le terrain et permettre de diriger l’écoulement vers un exutoire convenable. Le ravinement fait perdre des superficies considérables de terres productives en plus de représenter un danger pour les opérateurs de machinerie agricole.

Érosion des berges

Les cours d’eau naturels et les canaux de drainage servent d’exutoires aux eaux de ruissellement et aux effluents des réseaux de drainage souterrain. L’érosion fait son œuvre sur les berges au fur et à mesure du sapement, de l’affouillement et de l’effondrement de celles-ci (figure 6). Des aménagements déficients, le manque d’entretien, le libre accès du bétail et la trop grande proximité des superficies cultivées sont autant de facteurs en cause.

Photo montrant un canal de drainage érodé et le sapement et l’affouillement subis par ses berges
Figure 6. L’érosion des berges résulte du sapement et de l’affouillement des berges des cours d’eau naturels et des canaux de drainage.

On peut aussi pointer du doigt la conception des sorties de drainage souterrain. Certaines ne remplissent pas leur rôle convenablement faute d’un tuyau de sortie rigide, ou parce qu’aucun bloc antiérosif n’a été installé ou parce que celui-ci ne convient pas, ou encore parce que les tuyaux de sortie ont été endommagés par l’érosion, la machinerie ou le sapement de la base de la berge.

Les conséquences directes de l’érosion des berges sont, entre autres : la perte de terre arable; le sapement de la base des ouvrages, tels que les ponts; les exigences accrues de nettoyage et d’entretien des canaux de drainage; et le ravinement des voies de circulation et des superficies longeant les clôtures.

Effets de l’érosion hydrique

Sur le terrain

Les répercussions de l’érosion des sols vont au-delà de la perte de sol arable. La levée, la croissance et le rendement des cultures sont directement affectés par l’appauvrissement du sol en éléments nutritifs et en engrais. L’érosion peut déplacer ou carrément emporter les semences et les plants. Du fait de leur légèreté, la matière organique présente dans le sol, les résidus à la surface et le fumier épandu peuvent facilement être emportés hors du champ, particulièrement à la fonte des neiges, et entraîner avec eux des pesticides.

Les pertes de sol peuvent nuire à la qualité, à la structure, à la stabilité et à la texture du sol. Le morcellement des agrégats et l’enlèvement des particules plus fines ou de couches entières de sol ou de matière organique peuvent détériorer la structure et même modifier la texture du sol. Toute modification de la texture du sol peut à son tour nuire à la capacité de rétention d’eau du sol et exposer davantage celui-ci à des conditions extrêmes telles que la sécheresse.

Hors du champ

Les répercussions de l’érosion hydrique ne sont pas toujours aussi apparentes hors du champ que sur les lieux mêmes où elle se produit. Le sol érodé, déposé au bas des pentes, empêche ou retarde la germination, enterre les jeunes pousses et oblige à ressemer les zones dégarnies. De plus, des sédiments peuvent s’accumuler au bas des pentes et contribuer à la détérioration des routes.

Les sédiments qui atteignent des cours d’eau peuvent accélérer l’érosion des berges, ensabler les fossés de drainage et les cours d’eau, envaser les réservoirs, endommager l’habitat des poissons et dégrader la qualité de l’eau en aval. Les pesticides et engrais, souvent emportés avec les particules de sol, contaminent ou polluent les sources d’eau, les terres humides et les lacs en aval. Du fait de la gravité de certaines des répercussions de l’érosion hors du champ, la pollution diffuse de source agricole est un point important à considérer.

Érosion éolienne

L’érosion éolienne s’observe dans les régions vulnérables de l’Ontario, mais elle ne touche qu’un faible pourcentage des terres, essentiellement les terres sableuses et les terres noires. Sous les conditions qui y sont favorables, l’érosion éolienne peut occasionner des pertes de sol et de terrain considérables (figure 7).

Gros plan d’un champ balayé par le vent montrant les conditions sévères imposées aux cultures
Figure 7. L’érosion éolienne peut être considérable sur les vastes superficies lisses et non protégées.

Il existe trois modes de déplacement des particules de sol : la suspension, la saltation et le roulement. Le mode varie selon la grosseur des particules et la puissance du vent.

La vitesse et l’ampleur de l’érosion causée par le vent dépendent des facteurs suivants :

Érodabilité du sol

Le vent peut soulever haut dans les airs les particules de sol très fines et les transporter sur de grandes distances (suspension). Il peut soulever les particules de moyennes à fines sur de courtes distances et provoquer leur déplacement par petits bonds successifs qui endommagent les cultures et délogent davantage de sol (saltation). Si les particules de sol sont trop grosses pour que le vent les soulève, celui-ci les déloge et les fait rouler à la surface du sol (roulement). L’abrasion engendrée par le mouvement des particules soufflées par le vent amène une dégradation des agrégats stables à la surface du sol, ce qui accroît encore davantage l’érodabilité du sol.

Rugosité de la surface du sol

Les sols lisses opposent peu de résistance au vent. Par contre, sur les crêtes des sillons des sols qui sont travaillés, les particules peuvent s’assécher plus rapidement qu’ailleurs lorsque le vent se lève, ce qui fait que davantage de sol meuble et sec peut être emporté par le vent. Avec le temps, les creux peuvent se combler, de sorte que les sols rugueux peuvent s’aplanir par abrasion. Il en résulte une surface plus lisse vulnérable à l’érosion éolienne. Un travail excessif du sol peut contribuer à briser la structure du sol et intensifier ainsi l’érosion.

Climat

La vitesse du vent et la durée de l’épisode venteux ont un effet direct sur l’ampleur de l’érosion du sol. Les taux d’humidité sont très faibles à la surface des sols excessivement drainés ou durant des périodes de sécheresse, ce qui amène des particules à se détacher et à être emportées par le vent. Le même phénomène se produit lors de l’assèchement du sol par le gel au cours des mois d’hiver. L’accumulation de sol du côté sous le vent d’obstacles tels que clôtures, arbres ou bâtiments, ou une couverture de neige qui est brune durant l’hiver sont des indices d’érosion éolienne.

Longueur exposée des champs

En l’absence d’arbres, d’arbustes, de résidus, etc., faisant obstacle au vent, celui-ci met les particules de sol en mouvement sur de grandes distances, ce qui augmente l’abrasion et l’érosion du sol. Comme les buttes et les sommets des collines sont habituellement exposés, ce sont les endroits qui en souffrent le plus.

Couvert végétal

À certains endroits, l’absence de couvert végétal permanent donne vraiment prise à l’érosion éolienne. Les sols nus, secs et exposés sont les plus vulnérables. Cependant, les cultures qui produisent peu de résidus (comme le soya et de nombreuses cultures légumières) n’opposent pas toujours une résistance au vent suffisante. Dans les endroits très venteux, il arrive que même les cultures qui produisent beaucoup de résidus ne protègent pas suffisamment le sol.

Le couvert végétal le plus efficace est composé d’une culture de couverture et de plantations brise-vent établies à des endroits stratégiques, combinées à un bon travail du sol, à une bonne gestion des résidus et à un choix approprié de cultures.

Effets de l’érosion éolienne

L’érosion éolienne endommage les cultures en soumettant les plantules ou les plants repiqués à l’abrasion, en enterrant les plants ou les semences et en exposant les semences. Elle peut entraîner la destruction des cultures, ce qui occasionne des retards coûteux. Elle peut même obliger à reprendre les semis. Les plantes soumises à l’abrasion des particules de sol sont sensibles aux maladies, ce qui se traduit par des baisses de rendement, de qualité et de valeur marchande. L’érosion éolienne peut par ailleurs compliquer les travaux aratoires et empêcher de réaliser les travaux à temps.

L’abrasion par le vent appauvrit le sol, ce qui peut se répercuter sur la croissance et les rendements dans les parcelles où l’érosion est un problème récurrent. Le vent qui souffle constamment au même endroit finit par modifier la texture du sol. Dans les sols sableux, la perte des particules de matière organique, de sable fin, de limon et d’argile entraîne une baisse de la capacité de rétention d’eau du sol. Il en résulte une érodabilité accrue et une aggravation du problème.

Il y a un coût important à laisser le vent soulever les particules de sol le long des clôtures, dans les canaux de drainage et les voies de circulation ainsi qu’autour des bâtiments. Sans compter que des éléments nutritifs et des produits chimiques appliqués à la surface du sol peuvent être emportés avec les particules et avoir des répercussions négatives en se déposant hors du champ. La poussière dont est alors chargée l’atmosphère peut aussi nuire à la santé humaine et compromettre la sécurité du public.

Érosion liée au travail du sol

L’érosion liée au travail du sol vient de la redistribution du sol par la machinerie et la gravité (figure 8). Elle amène un déplacement progressif du sol vers le bas des pentes. Il s’ensuit des pertes de sol considérables dans le haut des pentes et des accumulations dans le bas des pentes. Cette forme d’érosion pave la voie à l’érosion hydrique. Les instruments aratoires déplacent le sol vers des zones de convergence du champ où les eaux de ruissellement se concentrent. De plus, le sous-sol ainsi exposé devient très vulnérable aux forces érosives de l’eau et du vent. L’érosion liée au travail du sol est la forme d’érosion qui risque le plus de causer des déplacements de sol à l’intérieur du champ. Dans bien des cas, elle peut causer plus d’érosion que l’eau ou le vent.

Photo de tracteurs faisant l’aller-retour dans le sens de la pente pour travailler le sol
Figure 8. L’érosion liée au travail du sol entraîne un déplacement progressif du sol vers le bas de la pente.

La vitesse et l’ampleur de l’érosion causée par le travail du sol dépendent des facteurs suivants :

Type d’instruments aratoires

Les instruments aratoires qui soulèvent et emportent le sol sont ceux qui déplacent le plus de sol. Par exemple, par rapport à une charrue à versoirs classique, une charrue chisel laisse beaucoup plus de résidus de culture à la surface du sol, mais elle peut déplacer autant de sol et peut même emporter celui-ci sur une plus grande distance. L’utilisation d’instruments aratoires qui déplacent peu le sol contribue à réduire au minimum l’érosion liée au travail du sol.

Sens du travail du sol

Les instruments aratoires, tels que charrues ou herses à disques, projettent le sol vers le haut ou vers le bas de la pente, selon le sens du travail du sol. Ordinairement, le déplacement de sol est plus grand lorsque le travail du sol se fait vers le bas de la pente que lorsqu’il se fait vers le haut de la pente.

Vitesse d’avancement et profondeur de travail

La vitesse d’avancement et la profondeur de travail du sol ont une influence sur la quantité de sol déplacé. Un travail profond déplace davantage de sol et une vitesse d’avancement accrue pousse le sol plus loin.

Nombre de passages

La réduction du nombre de passages limite les déplacements de sol. En faisant moins de passages, on laisse aussi une couche de résidus plus épaisse à la surface du sol et on réduit la pulvérisation des agrégats, deux facteurs qui s’opposent aux érosions éolienne et hydrique.

Effets de l’érosion liée au travail du sol

L’érosion liée au travail du sol se répercute sur la croissance et le rendement des cultures. Sur les épaulements et les buttes, la croissance des cultures est lente et les plants sont rabougris du fait de la détérioration de la structure du sol et de la perte de matière organique. Ces cultures sont plus vulnérables aux différents facteurs de stress quand les conditions de culture sont défavorables. Des changements dans la structure et la texture du sol peuvent accroître l’érodabilité du sol et exposer encore davantage celui-ci aux forces érosives de l’eau et du vent.

Dans les cas extrêmes, l’érosion liée au travail du sol provoque même le déplacement du sol se situant dans les couches inférieures du sol. Le sous-sol déplacé du haut vers le bas d’une pente risque d’enterrer la couche arable productive dans le bas de la pente, ce qui nuit encore davantage à la croissance et au rendement des cultures. Des recherches réalisées montrent que l’érosion liée au travail du sol peut entraîner des pertes de sol sur une profondeur allant jusqu’à 2 m dans le haut des pentes et des diminutions de rendement allant jusqu’à 40 % dans le maïs. Dans les cas extrêmes, les mesures d’atténuation des répercussions consistent à ramener le sol dans le haut des pentes.

Mesures de conservation

L’adoption de diverses mesures de conservation des sols permet de lutter contre l’érosion causée par l’eau, le vent et le travail du sol. À la ferme, les pratiques de travail du sol, les pratiques culturales et les pratiques de gestion des terres influencent directement les problèmes d’érosion du sol et les solutions à ces problèmes. Quand la rotation des cultures ou la modification des pratiques de travail du sol ne suffisent pas à maîtriser l’érosion dans un champ, il faut parfois recourir à une combinaison de mesures ou à des mesures extrêmes. Il y a alors lieu d’envisager, par exemple, la culture suivant les courbes de niveau, la culture en bandes ou l’aménagement de terrasses. Dans les cas vraiment graves où l’on est en présence d’écoulements superficiels concentrés, l’aménagement d’ouvrages fait partie de la solution. Il peut s’agir de voies d’eau gazonnées, de colonnes descendantes, d’ouvrages de rupture de pente, de déversoirs enrochés et de bassins de captage et de sédimentation.

Pour plus de détails sur les pratiques de gestion optimales, notamment celles qui précèdent, consulter la publication BMP 26F du MAAARO, Lutte contre l’érosion du sol à la ferme.

Résumé

L’érosion du sol reste l’un des principaux défis pour l’agriculture de l’Ontario. De nombreux agriculteurs ont déjà beaucoup amélioré leurs pratiques de lutte contre l’érosion des sols sur leurs terres. Toutefois, vu les progrès constants réalisés dans les technologies de gestion des sols et de production des cultures, progrès qui ont maintenu ou augmenté les rendements malgré l’érosion des sols, d’autres producteurs ne sont pas conscients de l’aggravation du problème sur leurs terres. La prise de conscience survient ordinairement une fois que la terre a subi des dommages et affiche des pertes de sol arable.

L’augmentation prévue des phénomènes météorologiques extrêmes apportés par le changement climatique accentuera les problèmes existants attribuables aux érosions éolienne et hydrique et fera surgir de nouveaux problèmes. On doit, dans toute la mesure du possible, protéger les terres agricoles en prêtant une attention particulière aux situations les plus à risques qui exposent le sol à l’érosion.

La version originale anglaise de la présente fiche technique a été rédigée par le personnel du MAAARO avec la collaboration de G. Wall et de I.J. Shelton, Institut de pédologie de l’Ontario, ainsi que de C.S. Baldwin, Collège de technologie agricole de Ridgetown. Elle a été révisée par Jim Ritter, ing., ingénieur, gestion des sols, MAAARO et revue par Adam Hayes, spécialiste de la gestion des sols — grandes cultures, MAAARO et Anne Verhallen, spécialiste de la gestion des sols — horticulture, MAAARO.