Vous pouvez aussi commander un exemplaire imprimé du document intitulé Report of the Independent Fact-Finding Panel on Herbicide 2,4,5-T: Executive Summary (anglais seulement).

Sommaire de gestion

Avril 2013

Présenté au gouvernement de l’Ontario

Leonard Ritter PhD, Fellow, Academy of Toxicological Sciences, Panel Chair
Aaron Blair PhD, Fellow, American College of Epidemiology, Ramazzini Collegium, American Epidemiological Society
Nancy I. Kerkvliet PhD
Elliot A. Sigal HBSc
Jeanne Mager Stellman PhD

Z partir de la fin des années 1940 et jusqu’à la fin des années 1970, l’acide 2,4,5-trichlorophénoxyacétique (2,4,5-T ) a été largement utilisé comme herbicide débroussaillant en Ontario, dans l’ensemble du Canada et ailleurs dans le monde. En Ontario, l’herbicide a été épandu par des ministères et organismes gouvernementaux provinciaux, des autorités municipales ou de simples citoyens, ou en leur nom. Les forces armées des États-Unis ont recouru au 2,4,5-T comme composante de mélanges herbicides employés pour défolier les forêts pendant la guerre du Vietnam. Le plus communément connu de ces mélanges herbicides était l’agent orange, un mélange 50 :50 de 2,4,5-T et de 2,4-D, nommé ainsi en raison d’une bande orangée sur la face externe des barils.

L’herbicide 2,4,5-T a été contaminé avec divers corps chimiques, le plus problématique étant le 2,3,7,8-tétrachlorodibenzo-p-dioxine (TCDD), plus communément connu sous le vocable de dioxine. Au début des années 1970, le gouvernement du Canada a commencé à exprimé sa préoccupation à l’égard d’effets possibles sur la santé dus à l’exposition au 2,4,5- T et, notamment, à sa dioxine contaminante. En 1979, voyant apparaître ces problématiques de santé émergentes au Canada et internationalement, et afin de mieux contrôler l’utilisation du 2,4,5-T, le gouvernement de l’Ontario a imposé un permis obligatoire pour l’emploi du 2,4,5-T dans la province. À mesure que la controverse prenait de l’ampleur, la province choisissait de ne pas délivrer de permis et donc d’empêcher toute nouvelle utilisation du 2,4,5-T en Ontario.

Charge du Comité indépendant d’enquête sur l’herbicide 2,4,5-T

Le 11 mars 2011, le ministre des Richesses naturelles annonçait la formation du Comité indépendant d’enquête sur l’herbicide 2,4,5-T. Le Comité se voyait confier le mandat suivant par le gouvernement de l’Ontario.

  • Enquêter et documenter afin de définir la portée et l’échelle de l’utilisation de l’herbicide 2,4,5-T dans la province par les ministères et organismes du gouvernement de l’Ontario, y compris les agents ou les contractuels
  • Déterminer la période spécifique pendant laquelle l’herbicide 2,4,5-T a été utilisé dans la province par les ministères et les organismes du gouvernement de l’Ontario
  • Déterminer l’aire géographique d’utilisation de l’herbicide 2,4,5-T dans la province par les ministères et organismes du gouvernement de l’Ontario
  • Examiner si l’exposition à l’herbicide 2,4,5-T dans les régions affectées a pu avoir des impacts potentiels sur la sante
  • Documenter les méthodes de déploiement de l’herbicide 2,4,5-T par le personnel des ministères et organismes provinciaux, de même que l’interaction de ces employés et la population en général dans les opérations d’épandage sur les zones affectées
  • Examiner les pratiques de préparation, d’épandage et d’entreposage de l’herbicide 2,4,5-T, ainsi que les lois, normes et pratiques de travail en matière de santé et de sécurité au travail en vigueur à l’époque, y compris l’utilisation d’équipement de protection individuelle et la formation appropriée offerte à l’époque
  • Transmettre à la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail toute constatation qui pourrait aider cet organisme dans sa tâche

Approche du Comité à l’égard de son mandat

M. Leonard Ritter, professeur (aujourd’hui, émérite) de toxicologie à l’École des sciences de l’environnement de l’Université de Guelph, était nommé en vue de présider le Comité. La première tâche du président du Comité consistait à déterminer l’expertise et les compétences nécessaires à la réalisation du mandat du Comité et de retenir les services des personnes les plus grandement compétentes à cette fin. Le processus de recrutement comprenait la communication directe avec des experts et des annonces dans des publications scientifiques. Les personnes souhaitant s’engager devaient transmettre une déclaration d’intérêt en précisant leur formation et leur expérience dans le domaine.

Au terme de recherches approfondies, le président du Comité indiquait à la ministre des Richesses naturelles qu’il avait nommé les membres suivants :

  • Dr Jack Bend, éminent professeur universitaire, membre des départements de pathologie, de physiologie et de pharmacologie, et de pédiatrie de la faculté de médecine et de dentisterie Schulich de l’Université Western Ontario
  • Dr Aaron Blair, expert épidémiologiste et scientifique émérite de National Cancer Institute, U.S. National Institutes of Health
  • M. Elliot A. Sigal, président et chercheur principal à Intrinsik Environmental Sciences, Inc., expert en évaluation de l’exposition et du risque
  • DreJeanne Mager Stellman, professeure émérite et conférencière spéciale à la faculté de santé publique Mailman de l’Université Columbia, experte en évaluation de de l’exposition.

Invoquant des raisons personnelles, Dr Bend s’est retiré du Comité au début de 2012. Dre Nancy Kerkvliet, professeure au département de toxicologie environnementale et moléculaire, directrice adjointe à Environmental Health Sciences Center, Université Oregon State, s’est ensuite jointe à l’équipe à titre d’experte en toxicologie.

Plusieurs réunions ont été tenues en séances privées pour assigner les tâches au sein du Comité, pour suivre les progrès et pour discuter des questions liées au mandat même du Comité. Les membres ont également communiqué entre eux fréquemment par courriel ou téléphone, selon le besoin.

Pour assister le Comité dans ses activités, un bureau de soutien était créé, composé de deux employés de la fonction publique de l’Ontario détachés de leurs postes réguliers pendant toute la durée du projet. Ces deux personnes relevaient directement et exclusivement du président du Comité relativement à toutes les questions liées à ce dernier. Elles étaient chargées du soutien administratif du Comité et recueillaient des renseignements supplémentaires à la demande de ses membres et de son président. Le Comité, avec l’aide du bureau de soutien, a également demandé et reçu de nombreux autres rapports, directement auprès de divers ministères.

Renseignements portés à l’attention du Comité

Afin de veiller à ce que le Comité puisse s’acquitter de son mandat, tous les ministères provinciaux, le Bureau du Cabinet, le Cabinet du premier ministre et l’ensemble des conseils, organismes et commissions du gouvernement de l’Ontario ont reçu la directive (sous réserve de tout privilège et de toute restriction juridique) d’aider le Comité dans la mesure du possible. Il leur a été précisé que le Comité pouvait présenter des demandes de renseignements de toutes sortes dans le cadre de son mandat et que les ministères gouvernementaux (sous réserve de tout privilège et de toute restriction juridique) devaient se montrer disposés à coopérer avec le Comité et à lui offrir leur aide.

Outre le bureau de soutien, un bureau de coordination unique était créé au sein du ministère des Richesses naturelles (MNR footnote 1 ) afin de s’assurer que les ministères étaient conséquents dans leurs réponses et dans la collecte, la numérisation et l’enregistrement de renseignements. Tous les ministères et les organismes ont transmis des renseignements au bureau de coordination du MRN qui ont été numérisés par son personnel sous forme de registres et réunis dans une base de données interrogeable. Environ 4700 registres ont été portés à l’attention du Comité, en lots et à mesure qu’ils devenaient disponibles, dont un dernier registre transmis en septembre 2012. Le Comité s’en remettait également à l’expertise de chacun de ses membres pour la localisation d’importantes publications de recherche, de rapports d’organismes experts internationalement reconnus et de rapports publiés par diverses autorités gouvernementales provinciales, fédérales et internationales pour étoffer les quelque 4700 registres reçus des ministères et organismes du gouvernement de l’Ontario. Tous les registres sur lesquels s’appuyait le Comité sont disponible pour publique à la demande, et tous les documents consultés par le Comité sont répertoriés dans la bibliographie du présent rapport.

Examen des constatations toxicologiques et épidémiologiques reliant l’exposition au 2,4,5-T et au TCDD avec des effetsnéfastes sur la santé

Nombre d’institutions et d’organismes nationaux et internationaux reconnus se sont penchés sur des études visant les effets possibles sur la santé attribuables à l’exposition au 2,4,5-T et au TCDD. En outre, des enquêtes indépendantes ont été menées individuellement par des scientifiques. Bien que le Comité ait consulté des ouvrages publiés par des scientifiques autonomes, les conclusions à l’égard des risques pour la santé liés au 2,4,5-T et au TCDD s’appuyaient principalement sur des enquêtes et des évaluations d’organismes nationaux et internationaux, dont l’Organisation mondiale de la santé des Nations Unies, l’Agence de protection de l’environnement des É.-U. (EPA), Santé Canada et le ministère de l’Environnement de l’Ontario (MEO). Le Comité considérait comme satisfaisantes l’exhaustivité et l’intégrité des enquêtes institutionnelles et ne voyait pas la nécessité de colliger de nouveau et de réévaluer les études sur lesquelles se fondent les enquêtes des institutions.

Dans la même veine, le Comité considérait, dans son évaluation globale des effets potentiellement néfastes sur la santé, les rapports et les enquêtes d’études expérimentales en laboratoire sur des animaux examinant les dangers potentiels liés au 2,4,5-T et au TCDD. Le Comité ne s’est pas proposé d’en inférer ses propres valeurs de dose journalière tolérable de TCDD ou de 2,4,5-T, étant convaincu de la justesse de la démarche et du fondement adoptés par d’autres autorités pour appuyer les valeurs de dose journalière tolérable qu’elles attribuent à ces composés.

Comme il est mentionné au chapitre 6 du présent rapport, le Comité adoptait un modèle avec seuil pour caractériser le potentiel du 2,4,5-T et du TCDD d’entraînement d’effets néfastes sur la santé humaine. Ce modèle avec seuil est internationalement accepté pour l’établissement de niveaux d’exposition ou de dose sécuritaires pour les médicaments d’ordonnance, les résidus dans les aliments et les contaminants aériens et aquatiques. Cette approche s’appuie sur l’hypothèse qu’il est possible de déterminer un niveau d’exposition seuil sous lequel aucun effet néfaste n’est prévuse manifester, même à la suite d’une exposition durant toute une vie. Le Comité concluait qu’en raison de l’absence de cancérogénicité qui caractérise le 2,4,5-T, des effets cancérogènes indirects du TCDD et de l’absence apparente de mutagénicité qui caractérise le 2,4,5-T et le TCDD, le modèle avec seuil était approprié à l’application au 2,4,5-T et à ses contaminants.

La toxicité du 2,4,5-T et du TCDD attire depuis des décennies l’attention de la communauté scientifique, et nombreuses sont les publications qui traitent de ce sujet. Le consensus international qui se dégage tant d’études en laboratoire sur des animaux que d’études auprès de populations humaines indique que le TCDD est un puissant toxique et un agent cancérigène potentiel pour l’humain, tandis que l’exposition seule au 2,4,5-T n’est liée qu’à une faible toxicité. Le Comité mixte FAO/OMS d’experts des additifs alimentaires de l’Organisation des Nations Unies a déterminé « qu’une dose tolérable de TCDD pourrait être établie en s’appuyant sur l’hypothèse qu’il existe un seuil pour tous les effets, dont le cancer » (traduction).

Cet établissement est fondé sur le mécanisme d’action indirecte par lequel le TCDD favorise le cancer par l’entremise de l’activation du récepteur aryl-hydrocarbone. Tel que décrit au chapitre 3, l’activation du récepteur Ah est considérée comme un évènement primaire essentiel qui est à la source de tous les effets toxiques liés à l’exposition au TCDD tant chez les humains que chez les animaux en laboratoire. Le comité d’experts de l’Organisation des Nations Unies a également conclu que l’établissement d’une absorption tolérable (un niveau « sécuritaire ») de TCDD fondé sur les effets autres que le cancer pourrait également soustraire à tout risque de cancer. La dose tolérable mensuelle de 74 µg/kg poids corporel (PC)/mois établie par le comité de l’ONU équivaut à une dose journalière tolérable de 2,3 µg/kg PC/jour. Santé Canada et le MEO ont adopté cette même dose tolérable de 2,3 µg/kg PC/jour. Pour son évaluation des risques, le Comité adoptait le niveau de dose journalière tolérable de TCDD qu’admettent et les gouvernements canadien et ontarien, et le Comité mixte FAO/OMS d’experts des additifs alimentaires.

Le Comité considérait également le besoin d’établir une dose journalière tolérable applicable à l’herbicide apparenté 2,4,5-T. Étant donné le peu de toxicité chronique du 2,4,5-T, le Comité adoptait une dose journalière tolérable aiguë de 20 µg/kg PC/jour pour des expositions de courte durée au 2,4,5-T.

Évaluation de l’exposition

Le Comité recourait à un processus en deux volets dans le cadre de l’évaluation de l’exposition. La première étape consistait en un examen détaillé de chaque document de la base de données du MRN particulièrement lié à l’emploi d’herbicides. Des données sur le lieu d’utilisation des substances chimiques, la façon dont étaient utilisées ces substances et les personnes engagées dans les activités ont été collectées et résumées. Des tableaux historiques récapitulatifs sur les activités de pulvérisation ont été créés pour estimer les quantités et les concentrations utilisées. Des cartes témoignant des pulvérisations ont été dressées pour créer une représentation matérielle de l’historique des zones visées par les activités de pulvérisation. Des scénarios d’exposition ont été conçus pour les programmes du MRN de pulvérisation visant à régénérer des essences d’arbres à valeur commerciale dans le Nord de l’Ontario, pour les activités de maintien du dégagement des emprises autour des lignes de transmission électriques d’Ontario Hydro et pour les activités de désherbage et de destruction des broussailles en bordure des routes principales par le ministère des Transports (MTO).

Les scénarios d’exposition ont ensuite servi à modéliser des expositions humaines potentielles aux substances chimiques en question. Les modèles d’évaluation de l’exposition ont tenu compte des caractéristiques chimiques du 2,4,5-T et du TCDD qui déterminent la façon dont un produit chimique réagit dans l’écosystème (p. ex., sa durée de vie, la probabilité qu’il se décompose lorsque exposé au soleil, sa voie d’accès à l’organisme). Des scénarios ont été créés pour la mesure de l’impact de l’exposition due à la consommation de fruits sauvages, de végétaux et d’animaux sauvages, à la dérive des herbicides épandus par pulvérisation aérienne et à la persistance des substances chimiques dans les sols et les sédiments des plans d’eau. Les données sur l’emploi ayant été incomplètes, le Comité s’inspirait de scénarios de paramétrage d’entrée faible, médian et élevé dans ses calculs estimatifs de l’exposition sur une plage donnée.

La modélisation de l’évaluation de l’exposition tenait également compte de facteurs physiologiques humains, tels que le poids corporel et le rythme de la respiration, qui influencent la mesure dans laquelle une substance toxique peut s’acheminer à l’intérieur de l’organisme et la façon dont interagit une fois logée. Lorsque cela était possible, le Comité recourait à des valeurs standards alignées sur celles de Santé Canada et du MEO pour les facteurs environnementaux et physiologiques. Le Comité modélisait les expositions professionnelles à partir des données de l’EPA dans l’Occupational Pesticide Handler Unit Exposure Surrogate Reference Table et de celles de la base de données d’exposition des personnes manipulant les pesticides. Les modèles professionnels tiennent compte de l’utilisation de l’équipement de protection, matériel que prévoyaient les procédures opérationnelles du MRN, d’Ontario Hydro et du MTO. Cependant, le Comité n’ayant eu aucune façon de déterminer si de l’équipement de protection approprié était ou non utilisé, ici encore, un paramétrage d’entrée estimatif faible, médian et élevé était mis en œuvre.

La recréation d’épisodes d’exposition s’étant produits il y a des décennies est parsemée d’inconnues et d’incertitudes. Ainsi, plusieurs décisions devaient être prises dans le processus qui ont influencé le résultat de l’évaluation. L’évaluation quantitative (ou numérique) de l’exposition exigeait la mise en œuvre de plusieurs hypothèses qui ont agi sur des quantités considérables de données et de variantes numériques. Certaines de ces variantes d’entrée provenaient d’ouvrages publiés, tandis que d’autres informations qui devaient être propres au scénario étaient tirées de diverses sources de renseignements mis à la disposition du Comité. Chacune des décisions et variantes d’entrée comporte une part de variabilité et d’incertitude, qui peut influencer les résultantes et les conclusions définitives. L’objectif de l’évaluation quantitative de l’exposition était de créer un modèle d’une prudence telle à éviter toute sous-estimation des risques estimatifs de maladie. Étant donné la tendance des hypothèses utilisées à surestimer l’exposition, il est très probable que cette évaluation soit plutôt teintée de prudence (sûreté).

Exposition à proximité des zones d’épandage

La probabilité et la mesure de l’exposition aux substances chimiques sont fonction de la distance séparant une personne des activités de pulvérisation. La pulvérisation d’herbicides a eu lieu tant dans des régions éloignées qu’en zones résidentielles plus populeuses. La pulvérisation en région a généralement eu lieu par épandage aérien, tandis que la pulvérisation résidentielle engageait des activités à pied d’œuvre.

Le MRN a recouru à des herbicides principalement dans les forêts des régions éloignées, le gros de la pulvérisation étant effectué par aéronef. Le MTO a utilisé des méthodes terrestres pour épandre les herbicides le long des routes tant en milieu urbain qu’en milieu rural. Pour le scénario du MTO, il était présumé que les propriétés ne se situaient pas à moins de 30 m de la voie de circulation. Ontario Hydro a effectué l’épandage le long des corridors de transmission tant en régions populeuses qu’en régions éloignées, par le biais de méthodes aériennes et terrestres. Pour le scénario d’Ontario Hydro, il était supposé que les propriétés résidentielles n’étaient pas situées à moins de 30 m de l’emprise et qu’un écart de plusieurs centaines de mètres séparait les zones récréatives des emprises.

Les herbicides ayant dérivé lors de la pulvérisation aérienne ont été estimés à l’aide d’un modèle standard (DériveMe) pour évaluer les concentrations dans le sol, les récoltes comestibles et les fruits sauvages, ainsi que la contamination faunique.

Populations àrisque

Les populations à risque (nommées groupes récepteurs dans l’analyse) consistaient en des groupes de personnes potentiellement exposées à des sources professionnelles, demeurant dans des logements à proximité des zones d’épandage ou se prêtant à des activités récréatives à l’intérieur ou près des zones d’épandage (voir la liste de catégories de récepteurs plus bas). Étant donné le grand nombre d’années pendant lesquelles a eu lieu la pulvérisation d’herbicide, il est très probable que plusieurs personnes différentes aient été professionnellement engagées dans ces activités à divers moments entre 1948 et 1979.

Professionnelle

  • Mélangeurs/chargeurs
  • Opérateurs d’épandeur
  • Signaleurs
  • Jeunes gardes forestiers
  • Superviseurs

Non professionnelle

  • Résidants
  • Visiteurs récréatifs
  • Chasseurs/pêcheurs
  • Personnes des Premières nations (diététique)
  • Public soumis à une pulvérisation aérienne fortuite ou de dérive
  • Conjoints/autres membres de la famille

Plusieurs voies d’exposition possibles aux substances chimiques ou au sol contaminé ont été considérées dans les modèles d’évaluation. Elles comprennent l’inhalation, l’ingestion de sol ou de gibier, poissons, végétaux ou petits fruits contaminés, ainsi que le contact cutané direct. L’exposition à des vêtements contaminés était possible pour plusieurs groupes récepteurs, mais le Comité ayant jugé qu’elle était moins probable et moins facilement quantifiable, cette possibilité n’était pas retenue pour la modélisation mathématique.

La documentation touchant le transport, l’entreposage et l’élimination d’herbicides était également examinée et résumée.

Établissementdenormesetde règlementssur l’usagede pesticidesen Ontario

Dans le cadre de son mandat, il était demandé au Comité d’examiner les pratiques de préparation, d’épandage et d’entreposage du 2,4,5-T, ainsi que les lois, normes et pratiques de travail provinciales en matière de santé et de sécurité au travail, y compris l’utilisation d’équipement de protection individuelle et la formation appropriée offerte à l’époque.

L’utilisation des herbicides du type phénoxy a commencé en Amérique du Nord à la fin des années 1940, sans réglementation systématique. Les premiers règlements étaient axés sur la réduction de la dérive et de l’endommagement des cultures voisines, plutôt que sur la protection de la santé et de la sécurité des épandeurs et des populations avoisinantes. Normes et règlements évoluaient depuis les années 1950, tandis qu’un discours propre à la protection de la santé humaine commençait à s’articuler dans les années 1970 sous forme soit du contrôle des expositions professionnelles, soit de la réduction au minimum de la contamination des denrées destinées à la consommation humaine. Bien que le Comité eût évalué et répertorié les normes et les règlements sur l’usage des pesticides en Ontario, il ne pouvait pas déterminer dans quelle mesure les pratiques auraient été adoptées, contrôlées ou imposées afin de protéger la population en générale ou les travailleurs œuvrant à la manipulation, au mélange, au chargement et à l’épandage.

Dès 1954, Ontario Hydro publiait un manuel des pratiques de pulvérisation dans lequel il était indiqué que « les herbicides ne sont pas considérés comme toxiques pour les humains ou les animaux, mais les opérateurs doivent réduire au minimum l’inhalation du brouillard ou le contact de celui-ci avec leur visage » (traduction). En 1962, des aspects de la sécurité des personnes étaient ajoutés au guide Manual of Spray Practices (A0141556 footnote 2 ) d’Ontario Hydro. Dans une circulaire de 1965, le ministère des Transports (MTO) mentionne gants en néoprène et combinaisons bleues en tant que vêtements mis à la disposition des équipes de désherbage par vaporisation. En 1976, le ministère du Travail de l’Ontario a indiqué dans une note de service que des lunettes et des visières de protection devraient toujours être portées, que des vêtements protecteurs imperméables étaient nécessaires et que des respirateurs à boîte filtrante pour vapeurs organiques étaient requis. La note de service indiquait également que « des travailleurs ont été observés ne portant aucun équipement ni vêtement de protection lors de la pulvérisation » (traduction).

Des préoccupations générales ont commencé à émerger au début des années soixante concernant les effets potentiels sur la santé humaine liés à l’exposition au 2,4,5-T et à sa dioxine contaminante. En 1979, réagissant aux inquiétudes quant à la sécurité du 2,4,5-T et de la dioxine contaminante, le gouvernement de l’Ontario imposait un permis obligatoire pour les utilisateurs du 2,4,5-T dans la province. La controverse à l’égard de la santé prenant de l’ampleur, le gouvernement provincial décida de ne plus délivrer de permis, prévenant ainsi toute nouvelle utilisation du 2,4,5-T en Ontario, six ans avant l’invalidation de l’herbicide par les autorités législatives fédérales.

Conclusions du Comité

L’évaluation de l’exposition est une composante clé du paradigme d’évaluation des risques qui représentait un aspect central à l’entreprise du Comité. L’utilisation du 2,4,5-T en Ontario s’est déroulé sur environ 30 ans. Le Comité considérait méthodiquement la question de l’exposition et engageait une démarche d’évaluation de l’exposition pour recréer un profil d’exposition des travailleurs et des résidants de la province qui pourrait servir dans une évaluation exposition-réponse, postulat de base du paradigme d’évaluation des risques toxicologiques.

Le Comité adoptait un protocole d’évaluation des risques bien documenté et largement utilisé pour cerner les risques sanitaires potentiels du 2,4,5-T et du TCDD, pour évaluer l’exposition potentielle des différentes populations ontariennes pouvant être attribuable à l’utilisation par les ministères et les organismes du gouvernement de l’Ontario, et pour associer ces niveaux d’exposition à des situations d’exposition pour lesquelles des effets néfastes ont été observés lors d’études en laboratoire sur des animaux et chez des populations humaines. Le Comité ne pouvait pas localiser de données précises de surveillance de l’exposition humaine relativement à l’utilisation de l’herbicide par les ministères et organismes du gouvernement ontarien. En absence d’information de cette nature sur l’exposition due à l’épandage de l’herbicide par le gouvernement provincial, le Comité entreprenait une évaluation exhaustive des registres d’utilisation par les divers ministères et organismes afin de déterminer les emplacements et les quantités d’épandage du 2,4,5-T et d’utiliser cette information pour estimer la probabilité d’une exposition humaine à l’herbicide et à son contaminant durant la période d’utilisation par le gouvernement de l’Ontario. Ces registres d’épandage indiquent que même si plusieurs ministères ont utilisé l’herbicide dans une certaine mesure, la plupart des utilisations par des ministères et organismes du gouvernement ontarien sont attribuables au MRN, au MTO et à Ontario Hydro. L’évaluation du Comité, par conséquent, focalisait sur ces trois intervenants. Le Comité remarque que ce n’est pas le gouvernement de l’Ontario qui a fait le plus usage de l’herbicide dans cette province, mais plutôt les utilisateurs privés et les autorités municipales. L’évaluation des utilisations non gouvernementales excédant le mandat du Comité, elle n’a pas fait l’objet de ces estimations.

En raison de la complexité du processus d’estimation de l’exposition et des incertitudes qu’elle entraîne, le Comité établissait une fourchette de niveaux d’exposition estimative ( faible, médian et élevé) pour chaque scénario d’exposition. Ces niveaux étaient fondés sur des hypothèses concernant chaque paramètre d’entrée dans l’algorithme. Le niveau estimatif élevé prévoyait une suite de pires hypothèses individuelles pour chaque composante de l’algorithme, appliquées l’une après l’autre, engageant un biais de sélection de paramètre d’entrée répétitif. Les niveaux estimatifs élevés représentaient la situation d’exposition du pire cas probable. Les niveaux estimatifs faibles s’appuyaient toujours sur les paramètres d’exposition de faible niveau pour générer l’exposition la moins probable au vu des données en main. Le niveau médian d’exposition estimative s’appuyait sur des paramètres intermédiaires (médian ou moyen) pour établir une exposition générale estimative de niveau moyen. Les paramètres à la source des expositions estimatives comprenaient la quantité de dioxine contaminante que renferme le 2,4,5-T, le recours à l’équipement de protection individuelle, la proportion d’herbicide épandu pénétrant la canopée forestière et les demi-vies de TCDD et de 2,4,5-T dans le sol. Une gamme de valeurs d’exposition potentielle (rendue possible par le recours à des paramètres d’entrée faible, médian et élevé) était prevue pour obtenir une appréciation globale du degré d’incertitude et de variabilité caractérisant les expositions estimatives quantitatives. Dans l’ensemble, le Comité considérait que le niveau estimatif médian représentait possiblement l’exposition estimative la plus probable.

Le Comité adoptait une approche de marge de sécurité pour caractériser les risques pour les divers sous-ensembles de population ayant pu être affectés par l’utilisation du 2,4,5-T par les ministères et organismes du gouvernement ontarien. Avec cette approche, les niveaux d’exposition au 2,4,5-T et au TCDD qui n’entraînaient pas d’effets néfastes sur la santé pouvait être déterminés à la lumière d’études en laboratoire sur des animaux et auprès de populations humaines. Ces niveaux d’exposition étaient rajustés par la mise en œuvre d’un facteur d’incertitude destiné à compenser l’incertitude inhérente à l’approche (par exemple, lorsque des études en laboratoire avec des animaux ont servi à prédire les effets chez l’humain et les incertitudes inhérentes d’évaluation de l’exposition des études auprès de populations humaines). Ce niveau de dose rajusté était ensuite directement comparé avec le niveau estimatif d’exposition obtenu par le Comité selon différents scénarios à l’égard des diverses populations de l’Ontario. En général, lorsque ce ratio surpassait un, les expositions auraient pu surpasser un seuil sécuritaire; si le ratio est plus petit que 1, elles se situaient dans la plage anticipée d’« aucun effet dangereux » sur le fondement de la documentation scientifique.

Le Comité relevait des situations d’exposition dépassant le cadre de référence pour certains sous-groupes de population ontarienne. Ces dépassements se limitaient presque entièrement aux expositions professionnelles chroniques entre les niveaux moyen et plus élevé de TCDD et les niveaux estimatifs médian et élevé pour Ontario Hydro, le MRN et le MTO. Lorsque des dépassements étaient observés à des niveaux moyens d’exposition au TCDD, ils étaient habituellement marginaux.

Les expositions fortuites, définies par le Comité comme étant brèves de nature et non attribuables à l’utilisation directement personnelle de l’herbicide, ne se révélaient excédentaires du niveau du cadre de référence que dans le cas d’Ontario Hydro et du MRN, et seulement dans le scénario de l’exposition la plus élevée au TCDD. Les expositions fortuites au TCDD moyennes et faibles, de même que toutes les expositions fortuites du MTO, n’excédaient aucunement la marge du cadre de référence. Aucune des expositions fortuites au 2,4,5-T d’Ontario Hydro, du MRN et du MTO n’a excédé le niveau du cadre de référence.

Le Comité dressait des cartes des zones traitées avec l’herbicide en Ontario pour mieux visualiser ou l’opportunité potentielle pour l’exposition humaine a pu existé. La création de ces cartes s’effectuait grâce à des données géographiques provenant des ministères. Les cartes indiquent que la plus grande partie de la pulvérisation a été effectuée loin de résidences et, suivant l’application de modèles standards, les risques d’exposition et risques d’effets sur la santé dans la plupart des situations pour ces zones se situent à l’intérieur des marges admissibles du cadre de référence decrit dans le rapport.

À la lumière des résultats de l’évaluation des expositions et des comparaisons des marges de sécurité effectuées par le Comité, celui-ci concluait que :

  • Le niveau estimatif médian représente l’estimation la plus fidèle de l’exposition.
  • Les niveaux estimatifs faibles et élevés permettaient d’obtenir une approximation utile de la plage d’exposition à considérer en raison de l’incertitude caractérisant le processus estimatif même.
  • MTO : Les expositions excédaient le cadre de référence pour un nombre relativement restreint de personnes œuvrant au mélange/chargement terrestre et à l’épandage par les employés du MTO.
  • Ontario Hydro : Les expositions excédaient le cadre de référence pour un certain nombre de personnes œuvrant au mélange/chargement terrestre et à l’épandage par les employés d’Ontario Hydro.
  • MRN : Les expositions excédaient le cadre de référence pour un certain nombre de personnes œuvrant au mélange/ chargement de réservoir dorsal et à l’épandage par les employés du MRN et les jeunes gardes forestiers.
  • MRN : Les expositions excédaient le cadre de référence pour un certain nombre de personnes œuvrant au mélange/chargement aérien et à la signalisation par les employés du MRN.

Certaines expositions fortuites excédaient la marge du cadre de référence fixée à 1, mais les expositions estimatives les plus élevées correspondaient aux marges de sécurité de moins de 2. Étant donné les hypothèses et les incertitudes qui caractérisent les expositions fortuites estimatives, le fait qu’elles soient aigües par nature et les facteurs de sécurité inhérents aux valeurs toxicologiques de référence (VTR) utilisées pour l’évaluation, le Comité etait d’avis que les marges de securite des expositions fortuites ne reflètaient pas nécessairement des conséquences néfastes pour la santé.

Le Comité considérait un éventail de conséquences néfastes pour la santé factuellement liées à l’exposition au TCDD et (ou) au 2,4,5-T. Bien que des personnes exposées à ces substances chimiques aient pu subir certaines de ces conséquences, il ne peut être conclu qu’une conséquence soit attribuable à l’exposition. Le processus d’évaluation des risques utilisé par le Comité s’appliquait nécessairement au niveau de la population et ne visait aucunement à cerner les risques au niveau de l’individu. L’évaluation révélait qu’un certain nombre de populations professionnellement exposées l’ont été au-dessus de la marge de sécurité. Cependant, de telles expositions se limitaient aux populations professionnelles (travailleurs d’Ontario Hydro, du MRN et du MTO) qui ont été chroniquement exposées. Tel qu’il est mentionné plus haut, les personnes pour lesquelles l’exposition excédait largement la marge du cadre de référence faisaient presque toutes partie des populations professionnellement exposées affichant les plus forts niveaux d’exposition au TCDD. Les VTR ayant servi à évaluer l’admissibilité de l’exposition avantageaient la sécurité, tel que le dictent les politiques réglementaires encadrant l’évaluation, mais la santé des populations affichant les plus forts niveaux d’exposition ne sera pas nécessairement menacée par des effets néfastes. L’évaluation indiquait tout simplement que des marges de sécurité admissibles ont été excédées et que la santé des personnes pouvait être affectée.

L’approche du Comité se voulait une évaluation populationnelle et n’était aucunement destinée à cerner les risques au niveau de l’individu. Une évaluation sur le plan collectif peut déboucher sur une occurrence probable d’effets néfastes sur une population donnée, mais ne peut aucunement mener à une détermination absolue du développement d’une maladie chez une personne en particulier. Les reponses à l’exposition et les expositions mêmes varient grandement d’un individu à un autre. Cela étant dit, le Comité remarquait que l’Institut de médecine des États-Unis (IOM) a dressé une liste de maladies dont le risque pourrait être plus élevé chez les personnes exposées au 2,4,5-T et à ses contaminants. Le Comité convenait que les conclusions de l’IOM s’alignent raisonnablement sur l’évaluation actuelle du danger associé à ces expositions. En Ontario, les personnes professionnellement exposées et quelques populations fortuitement exposées affichant les taux estimatifs les plus élevés excédaient la marge de sécurité du cadre de référence. Le risque connexe que les personnes de ces groupes contractent une maladie attribuable à l’exposition au 2,4,5-T ou au TCDD serait probablement très faible. Il importe également de noter qu’un effet néfaste ne se fera pas nécessairement sentir, même dans les cas pour lesquels les marges estimées par le Comité dépassaient le cadre de référence.

Eci est le sommaire d’un rapport. La version complete peut être téléchargée à l’adresse suivante : www.ontario.ca/245Tfr. On peut en obtenir une copie sur papier en communiquant avec www.serviceontario.ca/publications ou Tél. : 1 800 668-9938 ou ATS/ téléimprimeur (pour les malentendants). (The English version can be downloaded from www.ontario.ca/245T).

© Imprimeur de la Reine pour l’Ontario, 2013
Imprimé en Ontario, Canada
(0.5k P.R., 13 05 07) ISBN 978-1-4606-1568-3