La fertilisation d'une culture fourragère après une coupe peut en accroître de plus de 7 % les rendements et la qualité.

Les épandages de fumier dans les cultures sur pied se pratiquent dans les cultures fourragères, les cultures de pâturages, les céréales, le maïs et les grandes cultures, mais avec des taux de réussite variables. Le compactage du sol, le manque d'uniformité de l'application, des lacunes dans l'efficacité d'utilisation des éléments nutritifs, le choix du moment, le piétinement et les dommages à la culture constituent des obstacles de taille. Il reste que les épandages de fumier dans des cultures sur pied présentent des avantages encourageants sur les plans environnemental et économique. Le fumier épandu uniformément sur des cultures sur pied peut réduire l'utilisation d'engrais commerciaux, atténuer les odeurs et les émissions de gaz à effet de serre, piéger l'azote ammoniacal, réduire le ruissellement à la surface du sol, diminuer le lessivage et offrir des occasions de plus d'épandre le fumier sur les terres.

Une étude se penche actuellement sur les possibilités d'utilisation tout au long de la saison de croissance d'une barre à outils qui injecte le fumier à faible profondeur en bandes étroites (épandages en bandes latérales dans le blé et le maïs, application sur des cultures fourragères et de pâturages, épandages de lisier chargé des semences d'une culture de couverture après une récolte de céréales). La figure 1 présente les résultats obtenus au cours de la saison de croissance 2012. Le fumier avait alors été épandu après la première coupe d'une culture fourragère. Cette figure établit une comparaison entre l'injection à faible profondeur et un épandage en pleine surface, un épandage en bandes à la surface du sol, une application équivalente d'engrais et une parcelle témoin.

Perte d'ammoniac

Les épandages de fumier donnent lieu à des pertes par volatilisation, lessivage ou dénitrification. Les niveaux les plus élevés de lessivage et de dénitrification s'observent quand le fumier est épandu à l'automne. Le niveau le plus élevé de pertes d'ammoniac s'observe quand le fumier est épandu durant l'été. Les pertes d'ammoniac ont été mesurées à partir des lectures d'un dosimètre. Les résultats obtenus en 2012 (figure 2) sont cohérents avec les pertes mesurées au cours des quatre dernières saisons de croissance. Les résultats montrent un écart constant entre «l'injection à faible profondeur », «l'épandage en bandes à la surface du sol» et «l'épandage en pleine surface près de la surface du sol à l'aide d'un déflecteur». Quelle que soit la méthode d'application du fumier, les pertes d'ammoniac les plus grandes surviennent au cours des 24 premières heures, puis elles se stabilisent au cours des journées qui suivent. Une pluie dans les 24 premières heures suivant l'application réduit les pertes d'ammoniac. Les pertes ont été relativement plus faibles lorsque le fumier a été injecté à faible profondeur, mais elles étaient quand même plus élevées qu'avec la préparation commerciale d'azote de marque ESN. Les pertes d'azote sont plus grandes lorsque l'épandage se fait en pleine surface et est suivi d'une application en bandes. Elles sont environ 25 % moins grandes s'il y a injection à faible profondeur. L'injection à faible profondeur perturbe le sol sur une bande étroite, ce qui permet à une plus grande part du fumier de s'infiltrer dans le sol comparativement aux méthodes d'épandage en bandes à la surface ou d'épandage en pleine surface. Les plus grandes pertes de fumier s'observent là où les taux d'application sont les plus élevés et là où se forment des flaques du fait d'une faible infiltration dans le sol.

Les applications d'engrais azoté ont surtout été des applications d'azote ESN, un azote à libération lente. Là où du fumier de porc a été épandu, on a doublé le taux d'azote ESN pour compenser la faible teneur du fumier en azote. Là où l'on a augmenté le taux d'azote ESN, les pertes totales en ammoniac ont aussi doublé. Après quelques jours, les lectures du dosimètre ont augmenté de manière plus linéaire.

Impact sur le rendement et la qualité des fourrages

Les applications de fumier et d'engrais ont été faites après la première coupe. On a noté une grande variation des rendements fourragers aux deuxième, troisième et quatrième coupes, d'un emplacement à l'autre et d'un traitement à l'autre. La réaction la plus grande a été observée à la troisième coupe. La figure 3 présente les résultats obtenus en termes de rendement et de qualité pour chacune des différentes méthodes d'application, par coupe. Selon la tendance qui se dégage de l'analyse des résultats, tous emplacements confondus, la fertilisation du sol, que ce soit avec du fumier ou de l'engrais, a un effet positif sur le rendement. Les réactions observées en termes de rendement entre les différentes méthodes d'application du fumier ont été assez variables d'un emplacement à l'autre. Il se peut que la réaction aux apports de fumier et d'engrais ait été influencée par l'humidité présente au moment où ont été effectuées les différentes coupes. Certains sites ont reçu des précipitations en juin, ce qui s'est traduit par une amélioration des rendements et de la qualité à la coupe suivante. Dans les parcelles sèches, il se peut que la teneur en ammoniac du fumier ait causé des brûlures au feuillage et ait retardé la repousse.

Lorsqu'on a combiné qualité et rendement dans le programme MILK 20061, l'incidence de la fertilisation ressort beaucoup plus nettement. Une certaine variabilité demeure, mais la fertilisation a amené une augmentation du rendement et de la qualité combinés de 3 à 12 %, la plus forte augmentation étant associée aux apports de fumier. Toutefois, une comparaison des traitements pour chacune des deuxième, troisième et quatrième coupes montre que l'incidence de la fertilisation sur le rendement à la troisième coupe était de 6 à 25 % plus prononcée que dans la parcelle témoin.

 

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Figure 1 - Épandage de fumier sur une culture fourragère après la première coupe

 

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Figure 2 - Pertes d'ammoniac

Moyenne pour l'ensemble des coupes après l'application

Traitement Rendement
rajusté selon la teneur en matières sèches
Qualité Rendement + Qualité
rajusté selon la teneur en matières sèches
 
tonnes/ac
variation en %
lb de lait/tonne
variation en %
lb de lait/ac
variation en %
Engrais
2,55
2,4
3069
1,1
7826
3,4
Déflecteur
2,64
5,7
3038
0,1
8020
5,8
Épandage en bandes à la surface
2,64
5,7
3040
0,2
8026
5,8
Injection
2,82
11,7
3052
0,6
8607
12,2
Parcelle témoin
2,49
---
3035
----
7557
----
Ce tableau reflète les résultats obtenus pour les 2e, 3e et 4e coupes lors des essais menés à Oxford Centre, Salford, Brooksdale.
1 Milk2006 est un chiffrier Excel qui, à partir de l'analyse des fourrages (protéines brutes, teneur en fibres au détergent acide, teneur en fibres au détergent neutre et digestibilité des fibres) établit une approximation d'une ration équilibrée fondée sur les valeurs publiées par le National Research Council. Dans la préparation des tableaux sommaires ci-dessous, on a utilisé MILK2006 en appliquant toutes les valeurs par défaut, sauf pour les paramètres de qualité des fourrages.

Figure 3 - Comparaison des rendements et de la qualité des fourrages observés en 2012 à la suite d'applications de fumier et d'engrais

En fin de compte

C'est le maïs qui fait le meilleur usage des épandages printaniers de fumier liquide. Les épandages de fumier sur les cultures fourragères présentent des avantages sur les plans de la capacité de stockage du fumier, de la charge de travail et du programme de fertilisation des cultures de même que des avantages économiques en termes d'améliorations du rendement et de la qualité globale des fourrages. En combinant les résultats obtenus en 2012 et les comparaisons de rendement des années précédentes (2006-2011), on voit que, par comparaison aux parcelles témoins, la fertilisation a procuré des augmentations de rendement globales de 2,6 % avec les applications d'engrais commerciaux et de 7,0 % avec les épandages de fumier. Les améliorations au chapitre de la qualité sur la même période se sont traduites par une augmentation de la production de lait/acre de 4,5 % avec les engrais commerciaux et de 8,4 % avec les épandages de fumier par rapport aux rendements des parcelles témoins n'ayant reçu aucune fertilisation.