Élaboré par Jon McCracken, Ron Reid, Rosalind Renfrew, Barbara Frei, Jarmo Jalava, Amber Cowie et Andrew Couturier

Le goglu des prés (Dolichonyx oryzivorus) et la sturnelle des prés (Sturnella magna) dépendent tous les deux des prairies pour la reproduction, ont des aires de reproduction semblables sur le territoire de l’Ontario, partagent souvent les mêmes champs et sont confrontés aux mêmes menaces. De plus, leurs populations suivent une tendance semblable. C'est pourquoi on a élaboré un programme de rétablissement conjoint pour ces deux espèces.

Avant l’établissement des Européens dans l’est de l’Amérique du Nord, le goglu des prés et la sturnelle des prés nichaient dans les prairies indigènes, des savanes ou des alvars herbeux, des prés de castor, des secteurs ravagés par le feu, et des espaces ouverts pour l’agriculture par les autochtones des Premières Nations. Bien que la majorité de ces habitats ont été détruits à la suite de la colonisation européenne, les deux espèces ont rapidement adopté ce nouvel habitat de terres cultivées (surtout des pâturages et des prairies de fauche) comme habitat de nidification. En fait, si ces habitats n'avaient pas été créés pour le bétail, les deux espèces auraient vraisemblablement disparu de grandes régions de leur aire de répartition d’origine.

Bien qu'encore communs et répandus, le goglu des prés et la sturnelle des prés ont été désignés comme espèces en danger en Ontario, principalement en raison de l’important déclin que connaissent les populations en Ontario et dans la majeure partie de leurs aires de reproduction. Des disparitions de populations ont été constatées en Ontario au cours d’une grande partie des cinquante dernières années. Au cours de la dernière décennie, la population ontarienne du goglu des prés a subi un déclin annuel moyen de 4 pour cent, pour un total cumulatif de 33 pour cent. Au cours de la même période, la population de sturnelle des prés a subi un déclin annuel moyen de 2,9 pour cent (total cumulatif de 25 pour cent).

Plusieurs facteurs pourraient être responsables du déclin de la population en Ontario, la principale étant la perte de l’habitat de reproduction, particulièrement des pâturages et des prairies de fauche, qui ont été carrément abandonnés ou consacrés à d’autres cultures. De plus, l’usage et la gestion des prairies de fauche ont changé (p. ex. réduction de la proportion de graminées au profit de la luzerne, en raison de la valeur nutritionnelle accrue de cette dernière pour le bétail). Un faible taux de reproduction est une autre des principales causes du déclin. La destruction des nids pourrait être suffisamment importante dans les champs fréquemment fauchés pour menacer la viabilité de l’espèce, particulièrement lorsque la saison de fauche chevauche la période de pointe de la saison de reproduction. Tous ces problèmes découlent des pressions économiques associées à l’industrie de l’élevage en Ontario, particulièrement dans les secteurs des produits laitiers et du bœuf.

La perte d’aires d’hivernage figure également en tête de liste des menaces qui pèsent sur les deux espèces. En hiver, le goglu des prés est confronté à des menaces supplémentaires en Amérique du Sud, où il subit les conséquences de programmes de lutte contre les espèces considérées comme nuisibles : capture et élimination de l’oiseau; effets toxiques des insecticides utilisés dans la culture du riz.

Le rétablissement du goglu des prés et de la sturnelle des prés en Ontario représente tout un défi de conservation. La majeure partie de la population reproductrice fréquente des terres utilisées par des fermiers pour la production de biens et de services agricoles. Devant le déclin, continu et bien documenté, de la superficie des pâturages et du nombre de têtes de bétail, associé au déclin similaire de la superficie des terres majoritairement herbeuses, le défi consistera à ralentir la disparition des prairies agricoles due aux pressions du marché.

Le but à long terme du rétablissement est de maintenir des populations stables et autosuffisantes de goglus des prés et de sturnelles des prés en Ontario, et de contribuer ainsi à la conservation de la guilde des oiseaux des prés.

À court terme (c.-à-d. au cours de la décennie 2013-2023), le but est de réduire le taux annuel de déclin des populations des deux espèces à une moyenne annuelle maximale de 1 pour cent (c.-à-d. un maximum de 10 pour cent pour la décennie). L’objectif à long terme subséquent sera de maintenir l’effectif de la population à environ 90 pour cent de l’effectif actuel.

Soutenus par un cadre de gestion adaptatif, les buts pourront être atteints grâce à l’ensemble d’objectifs de protection et de rétablissement ciblés que voici :

  • décrire les habitats prioritaires et les régions de conservation, cerner les problèmes de fond et les facteurs limitant ou favorisant le rétablissement des espèces, établir des cibles en matière de superficie d’habitat et établir les régimes de gestion de l’habitat nécessaire à l’atteinte du but du rétablissement
  • sensibiliser le public à la conservation des deux espèces et de leur habitat
  • accroître le succès de la reproduction et améliorer la qualité de l’habitat
  • accroître la superficie de l’habitat (prairies naturelles)
  • maintenir, dans la mesure du possible, la superficie actuelle de prairies agricoles
  • établir des liens forts avec les autres travaux de planification de la conservation, réalisés en Ontario et ailleurs, pour d’autres espèces de prairies pour lesquelles le niveau de préoccupation est élevé
  • appliquer le niveau de protection adéquat en vertu de la LEVD, des règlements sur l’habitat et de toute autre politique provinciale, et évaluer dans quelle mesure ces moyens aident à stabiliser les populations des deux espèces
  • faire le suivi des résultats des activités de rétablissement (effets des activités sur les populations), et les communiquer.

On recommande que le règlement sur l’habitat du goglu des prés et de la sturnelle des prés cible les sites récemment occupés par l’une, l’autre ou les deux espèces au cours de la saison de reproduction. Ces sites incluent divers milieux ouverts : prairies naturelles ou semi-naturelles (incluant notamment les prairies d’herbes hautes, les alvars, les prés de castor, les tourbières herbeuses), prairies de fauche, pâturages, sites de restauration de l’habitat de prairie, champs abandonnés où des individus de l’une ou l’autre des espèces se sont effectivement ou probablement reproduits pendant la période de reproduction de l’année en cours ou des trois années précédentes. On recommande également que le règlement sur l’habitat exclue les cultures annuelles en rangs (p. ex. le blé d’hiver et le seigle). On recommande que les habitats réglementés soient délinéés (cartographiés) au cas par cas, au moyen du Système national de classification écologique des terres.