Photo d’alétris farineux en pleine floraison.

Photo : M. J. Oldham

La protection et le rétablissement des espèces en péril en Ontario

Le rétablissement des espèces en péril est un volet clé de la protection de la biodiversité en Ontario. La Loi de 2007 sur les espèces en voie de disparition (LEVD) représente l’engagement juridique du gouvernement de l’Ontario envers la protection et le rétablissement des espèces en péril et de leurs habitats.

Aux termes de la LEVD, le ministère des Richesses naturelles et des Forêts (le ministère) doit veiller à ce qu’un programme de rétablissement soit élaboré pour chaque espèce inscrite à la liste des espèces en voie de disparition ou menacées. Un programme de rétablissement offre des conseils scientifiques au gouvernement à l’égard de ce qui est nécessaire pour réaliser le rétablissement d’une espèce.

Dans les neuf mois qui suivent l’élaboration d’un programme de rétablissement, la LEVD exige que le ministère publie une déclaration qui résume les mesures que le gouvernement de l’Ontario prévoit prendre en réponse au programme de rétablissement et ses priorités à cet égard. Cette déclaration est la réponse du gouvernement de l’Ontario aux conseils scientifiques fournis dans le programme de rétablissement. En plus de la stratégie, la déclaration du gouvernement a pris en compte (s’il y a lieu) les commentaires formulés par les collectivités et organismes autochtones, les parties intéressées, les autres autorités et les membres du public. Elle reflète les meilleures connaissances scientifiques et locales accessibles actuellement, dont les connaissances traditionnelles écologiques, lorsque celles-ci ont été partagées par les collectivités, le cas échéant. Elle pourrait être modifiée en cas de nouveaux renseignements. En mettant en œuvre les mesures prévues à la présente déclaration, la LEVD permet au ministère de déterminer ce qu’il est possible de réaliser, compte tenu des facteurs sociaux et économiques.

Le programme de rétablissement de l’alétris farineux (Aletris farinosa) en Ontario a été achevé le 15 juin 2017.

Protection et rétablissement de l’alétris farineux

L’alétris farineux est considéré comme une espèce à risque en vertu de la LEVD, qui protège à la fois la plante et son habitat. La LEVD interdit de nuire aux espèces protégées et de les harceler, ainsi que d’endommager ou de détruire leur habitat sans en avoir reçu l’autorisation. Une telle autorisation exigerait que les conditions établies par le ministère soient respectées.

À l’échelle mondiale, l’aire de répartition de l’alétris farineux se trouve à l’est de l’Amérique du Nord, dans une zone qui s’étend du nord de l’Ontario au sud de la Virginie et du Texas. Au Canada, on ne trouve l’alétris farineux que dans le sud-ouest de l’Ontario et on estime que cela représente 5 % de sa répartition mondiale. Sept populations d’alétris farineux connues et présentes en Ontario sont réparties dans quatre endroits : dans la région de la promenade Rt. Hon. Herb Gray (PHG) à Windsor, à Bkejwanong (Première Nation de Walpole Island), dans la ville de LaSalle et à West Elgin. Plusieurs autres populations ou sous-populations sont disparues, ce qui représente une perte nette de plus de 5 000 plantes depuis 1986.

En 2015, la taille de la population en Ontario était estimée à 16 270 plantes. La majorité (~ 84 %) de ces plantes se trouvent à proximité de la PHG dans la région de Windsor, et les autres sont réparties dans les populations aux trois autres emplacements. Plusieurs sous-populations se trouvent dans des zones protégées par des instances provinciales et municipales au sein du complexe d’Ojibway Prairie. L’alétris farineux pourrait également être présent sur un site à proximité de la pointe Turkey, mais l’état de cette population est inconnu. Dans quatre des sept populations présentes, on retrouve plusieurs sous-populations formées d’un petit nombre de plantes individuelles. Des mesures de gestion de l’habitat pourraient donc ne pas être suffisantes pour assurer leur persistance.

La taille de la population d’alétris farineux de l’Ontario décrite ci-dessus comprend des plantes de cinq sites de rétablissement des Prairies qui ont été transplantées pour remplir les conditions d’un permis délivré en vertu de la LEVD pour la construction de la promenade Herb Gray. Des milliers de plants d’alétris farineux inconnus ont été découverts lors des relevés réalisés dans cette zone avant la construction. La majorité de ces plants ont été transplantés dans des sites de rétablissement adjacents à la PHG. Les plantes ont également été multipliées par semence et plantées dans les sites de rétablissement, qui ont été gérés pour créer les conditions favorables à l’alétris farineux. La surveillance des sites a révélé que les plants prélevés et transplantés ont réussi à s’établir. En 2015, il y avait eu une augmentation totale d’environ 3 973 plantes en croissance, la plupart des plantes étant issues de la reproduction végétative suite au rétablissement ou de la germination des graines du réservoir de semences en réponse à la manipulation de l’habitat.

L’alétris farineux pousse en terrain dégagé et ne tolère pas l’ombre créée par la végétation environnante. Il se rencontre principalement dans les prairies à hautes herbes et les savanes reliques, qui sont très peu nombreuses en Ontario. Environ 97 % de l’habitat qui se trouvait dans le sud de l’Ontario a été perdu en raison de sa conversion en terres agricoles ou en zones urbaines. On trouve aussi l’alétris farineux dans les habitats naturalisés ou semi-naturalisés comme les champs abandonnés, le long des routes, les talus de chemin de fer, les prés humides, les corridors de services publics et à la lisière de boisés, là où les perturbations naturelles ou humaines maintiennent un habitat dégagé convenable. L’alétris farineux cohabite avec d’autres espèces menacées comme le liatris à épi (Liatris spicata), la gérardie de Skinner (Agalinis skinneriana), l’aster très élevé (Symphyotrichum praealtum), la platanthère blanchâtre de l’Est (Platanthera leucophaea), la polygale incarnat (Polygala incarnata), la lespédèze de Virginie (Lespedeza virginica), et le cypripède blanc (Cypripedium candidum).

L’alétris farineux a une capacité de dispersion limitée et ses populations se trouvent dans le sud-ouest de l’Ontario où l’habitat est fortement compartimenté par des barrières à la dispersion telles que des bâtiments, des pelouses, des rues, et l’asphalte.

Les principales menaces pour la survie de l’alétris farineux comprennent la dégradation de l’habitat en raison du développement et de l’expansion agricoles, la modification du régime d’incendie naturel et la succession naturelle de la végétation qui en résulte et les espèces envahissantes. Des perturbations périodiques sont nécessaires pour maintenir des conditions d’habitat convenables pour l’alétris farineux. La végétation ligneuse et les espèces envahissantes peuvent supplanter l’alétris farineux dans la compétition pour les ressources. Les espèces envahissantes présentes dans l’habitat de l’alétris farineux comprennent le phragmite (roseau commun) (Phragmites australis ssp. Australis), le pin sylvestre (Pinus sylvestris), le chalef en ombelle (Elaeagnus umbellata), le rosier multiflore (Rosa multiflora), le robinier faux-acacia (Robinia pseudoacacia), le mélilot officinal (Melilotus alba), et le nerprun cathartique (Rhamnus cathartica). L’utilisation de véhicules tout-terrain (VTT), le fauchage, l’utilisation des herbicides, les herbivores et le dépôt d’ordures pourraient constituer d’autres menaces à l’espèce.

Les programmes de rétablissement de l’alétris farineux mettront l’accent sur la gestion de l’habitat en collaboration avec les collectivités et les organisations autochtones locales, les propriétaires fonciers locaux et les partenaires en conservation; la surveillance des populations; le comblement des lacunes dans les connaissances sur la biologie de l’espèce. Étant donné que quatre des sept populations d’alétris farineux connues comprennent des peuplements ne comportant qu’un très faible nombre de plantes isolées, et que la capacité de dispersion de l’espèce est limitée à la fois biologiquement et par des barrières, des activités de recherche et de rétablissement supplémentaires peuvent être nécessaires pour maintenir la répartition de l’espèce.

Mesures

La protection et le rétablissement des espèces en péril sont une responsabilité partagée. Aucune agence ni aucun organisme n’a toutes les connaissances, l’autorité, ni les ressources financières pour protéger et rétablir toutes les espèces en péril de l’Ontario. Le succès sur le plan du rétablissement exige une coopération intergouvernementale et la participation de nombreuses personnes, organismes et collectivités. En élaborant la présente déclaration, le ministère a tenu compte des démarches qu’il pourrait entreprendre directement et de celles qu’il pourrait confier à ses partenaires en conservation, tout en leur offrant son appui.

Mesures appuyées par le gouvernement

Le gouvernement appuie les mesures suivantes qu’il juge comme étant nécessaires à la protection et au rétablissement de l’alétris farineux. On accordera la priorité aux mesures portant la mention « hautement prioritaire » en ce qui concerne le financement aux termes de la LEVD. Lorsque cela est raisonnable, le gouvernement tiendra également compte de la priorité accordée à ces mesures lors de l’examen et de la délivrance d’autorisation en vertu de la Loi de 2007 sur les espèces en voie de disparition. On encourage les autres organismes à tenir compte de ces priorités lorsqu’ils élaborent des projets ou des plans d’atténuation relatifs à des espèces en péril. Le gouvernement ciblera son appui sur ces mesures hautement prioritaires au cours des cinq prochaines années.

La perte d’habitat, la dégradation, les changements à la dynamique écologique, et les espèces envahissantes sont considérés comme les principales menaces pour la survie de l’alétris farineux L’espèce est présente sur les terres municipales, dans les zones protégées, sur des terres privées, et sur Bkejwanong (Première nation de Walpole Island). L’habitat exige une gestion active (par des perturbations et l’élimination des espèces envahissantes) pour assurer qu’il reste propice et que les populations sont en mesure de persister. Une approche concertée pour mettre en œuvre les meilleures pratiques de gestion permettra de partager les responsabilités et les leçons retenues, de réduire les menaces et d’assurer le maintien d’un habitat convenable.

Mesures :

  1. (Hautement prioritaire) Élaborer et mettre en œuvre les meilleures pratiques de gestion en collaboration avec les propriétaires fonciers, les gestionnaires des terres, les municipalités et les collectivités et organisations autochtones intéressées y compris Bkejwanong (Première nation de Walpole Island), afin d’améliorer la convenance de l’habitat et de minimiser les menaces qui pèsent contre l’alétris farineux et son habitat. Des efforts devraient être faits au besoin pour coordonner les activités avec les activités entreprises pour soutenir d’autres espèces menacées (p. ex., le liatris à épi) et les projets sur l’habitat des prairies d’herbes hautes. Les mesures peuvent inclure :
    • gérer la végétation pour améliorer la qualité de l’habitat (par exemple, contrôle des espèces envahissantes qui posent une menace directe, contrôle de la végétation ligneuse indigène, et brûlages dirigés, selon le cas);
    • surveiller la réponse de l’espèce et de l’habitat à la gestion de l’habitat afin de guider la mise en œuvre adaptative des approches de gestion;
    • rediriger les activités récréatives (p. ex., les VTT) au moyen de panneaux d’affichage et de clôtures.
  2. Lorsque les occasions se présentent, assurer la protection de l’habitat de l’alétris farineux qui se trouve sur des terres privées grâce à des programmes existants de protection des terres et d’intendance.

Le statut de l’alétris farineux sur plusieurs sous-populations est non confirmé ou inconnu. La confirmation de la présence/l’absence de l’espèce à ces endroits et le partage des connaissances actuelles et historiques aidera à déterminer la meilleure façon de répartir les activités de rétablissement. La mise en œuvre d’un programme de surveillance à long terme permettra de vérifier si les niveaux de population actuels de l’espèce dans la province se maintiennent. Au moment de leur mise en place, ces activités de surveillance devront être coordonnées avec celles d’autres espèces. En outre, le suivi de l’efficacité des méthodes de transplantation et du succès de la transplantation sur les sites de rétablissement nous renseignera sur l’état de la population actuelle et orientera les activités de rétablissement futures de l’espèce.

Mesures :

  1. (Hautement prioritaire) Élaborer et mettre en œuvre un programme de surveillance normalisé à long terme aux emplacements existants (ce qui comprend les sites de rétablissement) et effectuer des relevés où la présence continue de l’espèce est incertaine (p. ex., pointe Turkey). S’il y a lieu, le programme de surveillance devrait cibler de nombreuses espèces en péril (p. ex., le liatris à épi) et l’habitat des prairies à herbes hautes. Le programme de surveillance renforcera et adaptera les efforts précédents et visera à :
    • surveiller la dynamique, la vigueur et la productivité de la population;
    • évaluer et surveiller toutes les menaces connues et éventuelles pour les populations;
    • surveiller l’état des plants d’alétris farineux transplantés dans des sites remis en état.
  2. Le cas échéant, encourager l’enregistrement, l’échange et le transfert des connaissances écologiques traditionnelles lorsqu’elles ont été partagées par les collectivités afin d’accroître les connaissances historiques et actuelles sur l’espèce et d’appuyer les efforts de rétablissement futurs. Coordonner ces efforts avec les initiatives entreprises pour l’habitat des espèces en péril cooccurrentes (p. ex. le liatris à épis) et des prairies à hautes herbes.

Le comblement des principales lacunes dans les connaissances sur la réponse du réservoir de semences à la gestion de l’habitat, les relations écologiques avec d’autres espèces (p. ex. étudier le rôle des champignons mycorhiziens dans la réussite de la transplantation), la dynamique des populations de l’espèce et les effets de la faible variabilité génétique aidera à orienter la planification des mesures de gestion. Cela fournira des renseignements pour déterminer la capacité de l’espèce à maintenir des populations autosuffisantes.

Le rétablissement de l’alétris farineux bénéficiera aussi de l’amélioration des techniques actuelles de sa mise en œuvre, le cas échéant et si nécessaire. Des essais de propagation par semis et de transplantation ont été réalisés dans le cadre du projet PHG pour accroître les connaissances sur les méthodes de rétablissement de l’alétris farineux. Des méthodes de propagation par semis fructueuses ont été élaborées au cours d’essais expérimentaux. Les techniques de transplantation sur tapis de gazon ont été développées avec succès et utilisées à plusieurs reprises. Des études plus approfondies sont nécessaires pour montrer que les résultats de ces méthodes de propagation peuvent être reproduits; un suivi continu et une gestion adaptative sont en cours sur les sites de rétablissement. Des recherches plus poussées et des études sur la faisabilité d’augmenter les populations appropriées guideront les activités futures de rétablissement de l’alétris farineux en Ontario.

Mesures :

  1. (Hautement prioritaire) Étudier les caractéristiques du cycle biologique de l’espèce et ses exigences en matière d’habitat pour orienter les activités de rétablissement, notamment :
    • étudier les effets de la faible variabilité génétique, l’écologie des graines, les relations avec les pollinisateurs et la biologie de la floraison;
    • effectuer des analyses de la viabilité des populations;
    • étudier la relation avec les champignons mycorhiziens;
    • étudier la sensibilité de l’espèce aux effets de bordure et sa tolérance à la sécheresse.
  2. Étudier la réponse du réservoir de semences à la gestion de l’habitat afin de déterminer si des populations existent encore sur les emplacements d’où l’alétris farineux a pratiquement été éliminé par la succession.
  3. Étudier la faisabilité d’augmenter l’abondance de l’alétris farineux en identifiant les sites potentiels d’augmentation (c.-à-d. les sites existants où la population est jugée non viable) et en déterminant si cela est faisable et approprié.
  4. Évaluer l’efficacité des techniques d’augmentation actuelles, y compris en menant des recherches pour établir une méthode normalisée de propagation des plants de l’alétris farineux par semis.

Les membres de la collectivité, les gestionnaires des terres et les propriétaires des terres où se trouve l’alétris ont tous un rôle essentiel à jouer afin de réduire les menaces pour l’espèce. En sensibilisant davantage la population locale, les individus en sauront davantage sur les types d’activités qui peuvent avoir un impact sur l’espèce par inadvertance et comment la modification de ces activités peut aider à la protéger.

Mesures :

  1. Promouvoir la sensibilisation locale à l’égard de l’alétris farineux et des espèces en péril cooccurrentes parmi les propriétaires fonciers, les gestionnaires des terres et les collectivités et organisations autochtones intéressées, y compris Bkejwanong (Première nation de Walpole Island) et promouvoir la participation communautaire en partageant des renseignements sur :
    • l’identification de l’espèce;
    • les exigences en matière d’habitat de l’espèce;
    • les protections accordées à l’espèce et à son habitat en vertu de la LEVD;
    • les mesures qui peuvent être prises pour réduire les menaces pesant sur l’espèce et son habitat.

Mise en œuvre des mesures

Le programme d’intendance des espèces en péril offre une aide financière pour la mise en œuvre de mesures. On encourage les partenaires en conservation à discuter de leurs propositions de projets liés à la présente déclaration avec le ministère des Richesses naturelles et des Forêts. Le ministère peut aussi conseiller ses partenaires à l’égard des autorisations exigées aux termes de la LEVD afin d’entreprendre le projet.

La mise en œuvre des mesures pourra être modifiée si les priorités touchant l’ensemble des espèces en péril changent selon les ressources disponibles et la capacité des partenaires à entreprendre des activités de rétablissement. La mise en œuvre des mesures visant plusieurs espèces sera coordonnée partout là où les déclarations du gouvernement en réponse au programme de rétablissement l’exigent.

Évaluation des progrès

Aux termes de la LEVD, le gouvernement doit évaluer l’efficacité des mesures de protection et de rétablissement visant une espèce au plus tard cinq ans après la publication de la présente déclaration en réponse au programme de rétablissement. Cette évaluation permettra de déterminer si des rectifications sont nécessaires pour en arriver à protéger et à rétablir l’espèce.

Remerciements

Nous tenons à remercier tous ceux et celles qui ont pris part à l’élaboration du Programme de rétablissement pour l’alétris farineux (Aletris farinosa) en pour leur dévouement en ce qui a trait à la protection et au rétablissement des espèces en péril.

Renseignements supplémentaires

Consultez le site Web des espèces en périlà ontario.ca/especesenperil
Communiquez avec votre bureau de district du MRNF
Communiquez avec le Centre d'information sur les ressources naturelles et des Forêts
Téléphone : 1 800 667-1940
ATS : 1 866 686-6072
NRISC@ontario.ca
ontario.ca/mrnf