Rapport du directeur de l'UES - dossier no 10-OFD-278
Livré le : 4 mai 2011
Note explicative
Le gouvernement de l’Ontario publie les précédents rapports du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales (UES) [présentés au procureur général avant mai 2017] qui portent sur les cas où il y a eu un décès impliquant une arme à feu, une empoignade et/ou l’utilisation d’une arme à impulsions, ou encore un autre type d’intervention notable de la part de la police n’ayant pas entraîné d’accusations criminelles.
Le juge Michael H. Tulloch a formulé des recommandations concernant la publication des précédents rapports du directeur de l’UES dans le Rapport de l’examen indépendant des organismes de surveillance de la police, lequel a été publié le 6 avril 2017.
Dans ce rapport, le juge Tulloch explique qu’étant donné que les précédents rapports n’avaient pas été rédigés au départ en vue d’être divulgués au public, il est possible qu’ils soient modifiés de façon importante pour protéger les renseignements de nature délicate qui s’y trouvent. Le juge a tenu compte du fait que divers témoins lors d’enquêtes de l’UES bénéficiaient de l’assurance de confidentialité et a donc recommandé que certains renseignements soient caviardés de manière à protéger la vie privée, la sûreté et la sécurité de ces témoins.
Conformément à la recommandation du juge Tulloch, la présente note explicative est fournie afin d’aider le lecteur à mieux comprendre les raisons pour lesquelles certains renseignements sont caviardés dans ces rapports. On a également inséré des notes tout au long des rapports pour décrire la nature des renseignements caviardés et les raisons justifiant leur caviardage.
Considérations relatives à l’application de la loi et à la protection des renseignements personnels
Conformément aux recommandations du juge Tulloch et selon les termes de l’article 14 de la Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (LAIPVP) [renseignements relatifs à l’exécution de la loi], des parties de ces rapports ont été retirées de manière à protéger la confidentialité de ce qui suit :
- l’information divulguant des techniques ou procédures confidentielles utilisées par l’UES
- l’information dont la publication pourrait raisonnablement faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire
- les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre d’une enquête
Conformément aux recommandations du juge Tulloch et selon les termes de l’article 21 de la LAIPVP (renseignements relatifs à la protection de la vie privée), les renseignements personnels, notamment les renseignements personnels de nature délicate, doivent également être caviardés, sauf ceux qui sont nécessaires pour éclairer les motifs de la décision du directeur. Ces renseignements peuvent comprendre, sans toutefois s’y limiter, ce qui suit :
- le nom de tout agent impliqué
- le nom de tout agent témoin
- le nom de tout témoin civil
- les renseignements sur le lieu de l’incident
- d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête, notamment lorsqu’il s’agit d’enfants
- les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
Renseignements personnels sur la santé
Les renseignements relatifs à la santé d’une personne qui ne sont pas liés à la décision du directeur (compte dûment tenu de la Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé) ont été caviardés.
Autres instances, processus et enquêtes
Il se peut que certains renseignements aient été omis de ces rapports parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.
Rapport du directeur
Notification de l’UES
Le mercredi 29 décembre 2010 à 2 h, l’agent donnant l’avis du Service de police du Grand Sudbury (SPGS) a avisé l’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») du décès par balles de M. Marcel Tranchemontagne. L’agent donnant l’avis a signalé que le mardi 29 décembre 2010 à 1 h 10, M. Tranchemontagne avait appelé le SPGS pour révéler qu’il venait de poignarder à mort un homme dans sa résidence. Les policiers se sont rendus à la résidence de M. Tranchemontagne à un lieu. à leur arrivée, M. Tranchemontagne a confronté les deux agents en tenant un couteau. Les deux agents ont fait feu avec leurs armes de service et M. Tranchemontagne a été arrêté avant d’être transporté à l’Hôpital régional de Sudbury où il a été traité avant de succomber à ses blessures. Le corps d’un autre homme a été retrouvé dans l’appartement de M. Tranchemontagne.
L’enquête
Le mercredi 29 décembre 2010 à 2 h 15, quatre enquêteurs et deux enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires ont été affectés à cette enquête. Le personnel de l’UES est arrivé sur les lieux à 5 h 30, le même jour, et il a immédiatement amorcé une enquête. Les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires ont examiné les lieux de l’incident, et l’équipement des policiers a été perquisitionné. Le secteur a été ratissé et des témoins ont été interviewés. Le jeudi 30 décembre 2010, un troisième enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES a été affecté et a participé à l’analyse de la morphologie des taches de sang.
L’agent impliqué no 1 et l’agent impliqué no 2 ont été identifiés comme étant des agents impliqués. Ils ont refusé de participer à une entrevue ou de fournir à l’UES une copie de leur carnet de notes de service.
Les agents suivants ont été identifiés comme étant des agents témoins. Ils ont fourni leurs notes de service et ont participé à une entrevue aux dates indiquées :
- agent témoin no 1 (le 29 décembre 2010)
- agent témoin no 2 (le 29 décembre 2010)
- agent témoin no 3 (le 30 décembre 2010)
- agent témoin no 4 (le 29 décembre 2010)
- agent témoin no 5 (le 29 décembre 2010)
- agent témoin no 6 (le 30 décembre 2010)
L’agent témoin no 7 a également été identifié. Après avoir examiné ses notes de service, le personnel de l’UES ne l’a pas interrogé.
Les témoins civils suivants ont été interviewés aux dates indiquées :
- témoin civil no 1 (le 29 décembre 2010)
- témoin civil no 2 (le 29 décembre 2011)
- témoin civil no 3 (le 30 décembre 2010);·
- témoin civil no 4 (le 30 décembre 2010)
- témoin civil no 5 (le 4 janvier 2011)
- témoin civil no 6 (le 4 janvier 2011)
- témoin civil no 7 (le 4 janvier 2011);·
- témoin civil no 8 (le 4 janvier 2011);·
- témoin civil no 9 (le 4 janvier 2011);·
- témoin civil no 10 (le 4 janvier 2011);·
- témoin civil no 11 (le 4 janvier 2011);·
- témoin civil no 12 (le 4 janvier 2011)
L’UES a reçu les documents suivants de la part du SPGS et les a examinés :
- les rapports du système de répartition assistée par ordinateur
- l’enregistrement des communications
- une vidéo de la scène
- le registre de service
- les procédures relatives à l’usage de la force
- les formulaires relatifs aux démarches de ratissage menées durant l’enquête
- les dossiers en matière de tactiques défensives de l’agent impliqué no 2 et de l’agent impliqué no 1
- la description de M. Tranchemontagne et de la personne concernée
- des photographies et une carte des rues d’un lieu
- des photographies de la personne concernée et de M. Tranchemontagne
- des rapports de vérification informatique de la personne concernée et de M. Tranchemontagne
- le sommaire des dépositions de l’agent témoin no 5
- le sommaire des dépositions de l’agent témoin no 1
- le sommaire des dépositions de l’agent témoin no 2
- le sommaire des dépositions de l’agent témoin no 7
- le sommaire des dépositions de l’agent témoin no 3
- le sommaire des dépositions de l’agent témoin no 6
- le sommaire des dépositions de l’agent témoin no 4
- le sommaire des dépositions de l’agent non-témoin no 1
- le sommaire des dépositions de l’agent non-témoin no 2
- le sommaire des dépositions de l’agent non-témoin no 3
- le sommaire des dépositions de l’agent non-témoin no 4
- le sommaire des dépositions de l’agent non-témoin no 5
- le sommaire des dépositions de l’agent non-témoin no 6
- le sommaire des dépositions de l’agent non-témoin no 7
- le sommaire des dépositions de l’agent non-témoin no 8
- le sommaire des dépositions de l’agent non-témoin no 9
- le sommaire des dépositions de l’agent non-témoin no 10
- le sommaire des dépositions de l’agent non-témoin no 11
- le sommaire des dépositions de l’agent non-témoin no 12
Déclarations des témoins et éléments de preuve fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête (considérations relatives à l’application de la loi et à la protection de la vie privée)
Décision du directeur en vertu du paragraphe 113(7) de la Loi sur les services policiers
L’Unité a terminé son enquête, le dossier a été clos et l’on n’envisage aucune mesure supplémentaire. à mon avis, il n’existe aucun motif raisonnable de croire que les agents impliqués, nommément l’agent impliqué no 1 et l’agent impliqué no 2, ont commis une infraction criminelle liée au décès par balles de M. Marcel Tranchemontagne, le 29 décembre 2010. Aux premières heures du jour, les deux agents impliqués ont été dépêchés à un lieu, après avoir été informés que l’occupant, M. Tranchemontagne, avait poignardé son colocataire. Peu de temps après, les agents ont fait feu sur M. Tranchemontagne, le blessant mortellement. Bien que les deux agents impliqués n’aient pas fourni de déclaration à l’UES et qu’il n’y ait pas eu de témoins survivant aux coups de feu, le défunt parlait avec un opérateur du service 9‑1‑1 au moment où il a été abattu. Cette conversation enregistrée, de même que l’autopsie, l’identification médicolégale et l’analyse balistique de la scène m’ont permis de tirer les conclusions suivantes.
Les deux agents impliqués sont entrés dans l’édifice en brisant une fenêtre de la porte avant. Ils ont descendu quelques marches pour se rendre à la porte extérieure de l’appartement au sous-sol du défunt et ont ordonné à M. Tranchemontagne d’ouvrir la porte. Lorsqu’il a refusé d’obtempérer, les agents ont défoncé la porte à coups de pied. Au moment où les agents impliqués sont entrés dans une petite antichambre de l’appartement, ils ont vu M. Tranchemontagne assis sur une chaise ou près de cette chaise à proximité de l’embrasure de la porte. Dans une main, il tenait un téléphone et dans l’autre il tenait un couteau. Il parlait avec l’opérateur du service 9‑1‑1 et refusait de déposer son couteau. Lorsque les agents impliqués sont entrés dans l’antichambre de l’appartement, l’un d’entre eux a ordonné au suspect de lâcher son couteau. L’extrait suivant de l’enregistrement de l’appel au service 9‑1‑1 saisit le moment le plus important :
[Traduction]
Opérateur : Avez-vous déposé le couteau?
Tranchemontagne : Non.
Opérateur : Déposez le couteau, il est important que vous le fassiez.
Agent inconnu : Déposez le couteau. Déposez le couteau.
Sons de plusieurs coups de feu tirés de manière rapprochée.
Agent inconnu : Déposez le couteau. Déposez le couteau.
À la lumière de cet extrait, il est clair que M. Tranchemontagne était armé d’un couteau lorsque les agents impliqués l’ont trouvé la première fois, ils lui ont ordonné de le lâcher et il a été abattu alors qu’il le tenait toujours. En effet, plus tard, un couteau a été retrouvé près du corps du défunt. également, dans le salon, il y avait le corps sans vie de la personne concernée.
L’analyse balistique permet de tirer la conclusion que les agents impliqués ont fait feu à six reprises au total; l’agent impliqué no 1 à quatre reprises et l’agent impliqué no 2 à deux reprises. Quatre de ces balles ont atteint M. Tranchemontagne. Deux des balles ont causé des blessures mortelles à M. Tranchemontagne et celles-ci ont suivi des trajectoires descendantes dans son corps. Ces trajectoires de même que l’analyse de la morphologie des taches de sang donnent à penser que M. Tranchemontagne faisait face aux agents impliqués lorsqu’il a été abattu et probablement qu’il se relevait de la chaise ou qu’il se penchait vers l’avant pendant qu’il était assis sur la chaise. La distance entre les armes à feu et le défunt était d’environ deux mètres.
Les agents impliqués étaient autorisés par la loi à entrer dans l’appartement en raison des circonstances urgentes qui prévalaient – ils avaient été informés que son occupant avait poignardé un homme. à ce stade, les agents impliqués ne savaient pas si l’occupant de l’appartement continuait de représenter une menace pour d’autres personnes. Une fois entrés, ils se sont retrouvés très près d’un individu armé qui refusait de lâcher son couteau. Bien que la nature de ses mouvements au moment des coups de feu ne soit pas entièrement claire, il est probable qu’il se levait de sa chaise ou qu’il penchait son corps vers l’avant en direction des agents impliqués, accentuant ainsi la perception des agents qu’il représentait une menace immédiate. En vertu du paragraphe 34(2) du Code criminel, les agents impliqués étaient autorisés par la loi à utiliser une force létale puisqu’ils croyaient raisonnablement que l’homme représentait une menace immédiate de mort ou de blessures graves pour eux. Par conséquent, aucune responsabilité criminelle ne peut être imputée à leurs actions qui ont causé le décès malheureux de M. Tranchemontagne.
Date : Le 4 mai 2011
Ian Scott
Directeur
Unité des enquêtes spéciales