Note explicative

Le gouvernement de l’Ontario publie les précédents rapports du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales (UES) [présentés au procureur général avant mai 2017] qui portent sur les cas où il y a eu un décès impliquant une arme à feu, une empoignade et/ou l’utilisation d’une arme à impulsions, ou encore un autre type d’intervention notable de la part de la police n’ayant pas entraîné d’accusations criminelles.

Le juge Michael H. Tulloch a formulé des recommandations concernant la publication des précédents rapports du directeur de l’UES dans le Rapport de l’examen indépendant des organismes de surveillance de la police, lequel a été publié le 6 avril 2017.

Dans ce rapport, le juge Tulloch explique qu’étant donné que les précédents rapports n’avaient pas été rédigés au départ en vue d’être divulgués au public, il est possible qu’ils soient modifiés de façon importante pour protéger les renseignements de nature délicate qui s’y trouvent. Le juge a tenu compte du fait que divers témoins lors d’enquêtes de l’UES bénéficiaient de l’assurance de confidentialité et a donc recommandé que certains renseignements soient caviardés de manière à protéger la vie privée, la sûreté et la sécurité de ces témoins.

Conformément à la recommandation du juge Tulloch, la présente note explicative est fournie afin d’aider le lecteur à mieux comprendre les raisons pour lesquelles certains renseignements sont caviardés dans ces rapports. On a également inséré des notes tout au long des rapports pour décrire la nature des renseignements caviardés et les raisons justifiant leur caviardage.

Considérations relatives à l’application de la loi et à la protection des renseignements personnels

Conformément aux recommandations du juge Tulloch et selon les termes de l’article 14 de la Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (LAIPVP) [renseignements relatifs à l’exécution de la loi], des parties de ces rapports ont été retirées de manière à protéger la confidentialité de ce qui suit :

  • l’information divulguant des techniques ou procédures confidentielles utilisées par l’UES
  • l’information dont la publication pourrait raisonnablement faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre d’une enquête

Conformément aux recommandations du juge Tulloch et selon les termes de l’article 21 de la LAIPVP (renseignements relatifs à la protection de la vie privée), les renseignements personnels, notamment les renseignements personnels de nature délicate, doivent également être caviardés, sauf ceux qui sont nécessaires pour éclairer les motifs de la décision du directeur. Ces renseignements peuvent comprendre, sans toutefois s’y limiter, ce qui suit :

  • le nom de tout agent impliqué
  • le nom de tout agent témoin
  • le nom de tout témoin civil
  • les renseignements sur le lieu de l’incident
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête, notamment lorsqu’il s’agit d’enfants
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête

Renseignements personnels sur la santé

Les renseignements relatifs à la santé d’une personne qui ne sont pas liés à la décision du directeur (compte dûment tenu de la Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé) ont été caviardés.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis de ces rapports parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Rapport du directeur

Notification de l’UES

Le dimanche 29 août 2010, à 15 h 23, l’agent donnant l’avis du Service de police de Toronto (SPT) a avisé l’Unité des enquêtes spéciales (l’« UES » ou l’« Unité ») du décès par balle de M. Reyal Jardine-Douglas.

L’agent donnant l’avis a indiqué que les agents avaient fait face à un homme armé d’un couteau dans un autobus, au 1841, avenue Victoria Park, à Toronto. L’un des agents a tiré un coup de feu en direction du plaignant, qui a été transporté au Centre Sunnybrook des sciences de la santé, où on a constaté son décès. Un agent a également été transporté à l’hôpital, mais l’agent donnant l’avis ne savait pas lequel et ne connaissait pas non plus la nature des blessures de l’agent. Les agents du SPT ont sécurisé les lieux de l’incident, qu’ils estimaient se limiter à l’autobus.

L’enquête

Le 29 août 2010, à 16 h 17, sept enquêteurs de l’UES et quatre enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires ont été dépêchés sur les lieux de l’incident afin de mener une enquête. Les premiers enquêteurs sont arrivés sur place à 18 h 9. L’équipe de l’Unité a examiné, photographié et filmé les lieux. Elle a recueilli des éléments de preuve matériels et produit un schéma à l’échelle. Elle a également effectué un ratissage des lieux pour trouver des témoins, en plus d’obtenir les images captées par les caméras qui se trouvaient dans l’autobus de la Commission de transport de Toronto.

En fonction des renseignements recueillis, l’agent impliqué a été identifié comme étant l’agent impliqué. Ce dernier a participé à une entrevue le 8 septembre 2010. Le SPT a remis à l’UES une copie des notes de l’agent impliqué le 5 octobre 2010.

Les agents suivants ont été identifiés comme étant des agents témoins le 29 août 2010. Ils ont participé à une entrevue et ont fourni une copie de leurs notes aux dates indiquées :

  • agent témoin no 1 (le 29 août 2010 et le 30 novembre 2010)
  • agent témoin no 2 (le 30 août 2010)
  • agent témoin no 3 (le 30 août 2010)
  • agent témoin no 4 (le 30 août 2010)
  • agent témoin no 5 (le 30 août 2010)
  • agent témoin no 6 (le 30 août 2010)
  • agent témoin no 7 (le 30 août 2010)
  • agent témoin no 8 (le 30 août 2010)

Les agents suivants ont également été identifiés comme étant des agents témoins et leurs notes ont été examinées. Ils n’ont pas participé à une entrevue puisqu’ils ne possédaient aucun renseignement qui aurait permis de faire progresser l’enquête.

  • agent témoin no 9
  • agent témoin no 10
  • agent témoin no 11
  • agent témoin no 12
  • agent témoin no 13

Les témoins civils suivants ont participé à une entrevue aux dates indiquées :

  • témoin civil no 1 (le 29 août 2010)
  • témoin civil no 2 (le 29 août 2010)
  • témoin civil no 3 (le 29 août 2010)
  • témoin civil no 4 (le 29 août 2010)
  • témoin civil no 5 (le 29 août 2010)
  • témoin civil no 6 (le 29 août 2010)
  • témoin civil no 7 (le 29 août 2010)
  • témoin civil no 8 (le 30 août 2010)
  • témoin civil no 9 (le 30 août 2010)
  • témoin civil no 10 (le 31 août 2010)
  • témoin civil no 11 (le 1er septembre 2010)
  • témoin civil no 12 (le 1er septembre 2010)
  • témoin civil no 13 (le 1er septembre 2010)
  • témoin civil no 14 (le 1er septembre 2010)
  • témoin civil no 15 (le 3 septembre 2010)
  • témoin civil no 16 (le 3 septembre 2010)
  • témoin civil no 17 (le 9 septembre 2010)
  • témoin civil no 18 (le 9 septembre 2010)
  • témoin civil no 19 (le 15 septembre 2010)
  • témoin civil no 20 (le 15 septembre 2010)
  • témoin civil no 21 (le 29 septembre 2010)

À la demande de l’UES, le SPT a fourni à cette dernière les éléments et documents suivants :

  • le rapport du système de répartition assistée par ordinateur
  • l’enregistrement des communications audio
  • le dossier relatif à la formation sur l’usage de la force de l’agent impliqué
  • le rapport d’incident
  • la liste des témoins civils identifiés
  • les politiques du SPT relatives à l’usage de la force, le travail avec l’UES et les personnes troublées émotionnellement.

Déclarations des témoins et éléments de preuve fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête (considérations relatives à l’application de la loi et à la protection de la vie privée)

Décision du directeur en vertu du paragraphe 113(7) de la Loi sur les services policiers

S’il y a eu un retard dans la production de ce rapport, c’est en grande partie parce que l’Unité n’a reçu le rapport final d’autopsie que le 18 janvier 2011.

À mon avis, il n’existe pas de motifs raisonnables de croire que l’agent impliqué, nommément l’agent impliqué, a commis une infraction criminelle en ce qui a trait au décès par balle du défunt, M. Jardine-Douglas, survenu le 29 août 2010. Ce jour-là, l’agent impliqué a été chargé d’aller à la rencontre d’une personne vraisemblablement troublée émotionnellement; cette personne se trouvait à bord d’un autobus de la Commission de transport de Toronto qui se dirigeait vers le sud sur l’avenue Victoria Park. L’agent a suivi l’autobus sur quelques pâtés de maisons et s’est arrêté devant celui-ci lorsqu’il s’est immobilisé au coin de l’avenue Victoria Park et du boulevard Biscayne. Il est monté à bord de l’autobus, a reçu de l’information de la part du chauffeur et a porté son attention sur M. Jardine‑Douglas, qui se trouvait près de la porte latérale. M. Jardine-Douglas a alors fouillé dans un sac et en a sorti un couteau. L’agent impliqué lui a ordonné de jeter son couteau. Le défunt a refusé d’obtempérer aux ordres et s’est avancé délibérément vers l’agent impliqué. L’agent impliqué a réitéré son ordre et, dégainant son arme à feu, s’est mis à reculer vers la porte de l’autobus. L’agent impliqué, après être descendu de l’autobus, a continué à reculer vers une haie et à ordonner à M. Jardine-Douglas de jeter son couteau. Lorsque le défunt ne s’est trouvé qu’à trois ou quatre pieds de lui, l’agent impliqué a tiré trois coups de feu et une des balles a pénétré la hanche droite de M. Jardine-Douglas. M. Jardine-Douglas a trébuché et est tombé au sol. Selon un témoin, M. Jardine-Douglas a essayé de se relever et l’agent impliqué a tiré une autre fois; la balle a pénétré l’épaule gauche du défunt, se rendant jusqu’au côté gauche de la cage thoracique. Ce quatrième coup de feu a causé des blessures mortelles à M. Jardine-Douglas.

À mon avis, la décision de l’agent impliqué d’avoir recours à la force létale était justifiée en vertu du paragraphe 34(2) du Code criminel. Sans raison apparente, M. Jardine‑Douglas a attaqué l’agent avec un couteau, ce qui peut seulement s’expliquer par la paranoïa à l’égard de la police qui s’était saisie de lui au cours des jours précédant l’incident. L’agent impliqué est sorti de l’autobus en reculant, a ordonné à plusieurs reprises à M. Jardine-Douglas de jeter son couteau et a continué à reculer jusqu’à ce qu’il se trouve adossé contre une haie. Il a tiré trois coups de feu en direction de M. Jardine‑Douglas, qui a chancelé et est tombé au sol. L’agent impliqué avait de toute évidence des motifs raisonnables d’estimer qu’il était exposé à un risque imminent de subir des lésions corporelles graves ou de mourir. L’agent impliqué a tiré le coup fatal lorsque le défunt a tenté de se relever; à ce moment-là, M. Jardine-Douglas représentait toujours une menace imminente, puisqu’il tenait encore le couteau, ou, à tout le moins, l’agent ne pouvait pas déterminer s’il était désarmé. Par conséquent, j’estime que l’agent impliqué avait des motifs raisonnables de croire qu’il pouvait subir des lésions corporelles graves ou se faire tuer au cours des instants qui ont précédé le coup fatal, compte tenu des événements qui avaient mené à ce moment, de la courte distance qui le séparait de M. Jardine-Douglas et du fait qu’il croyait que le défunt était encore armé de son couteau et qu’il avait l’intention de l’utiliser. L’agent impliqué ne pouvait pas de sortir autrement de cette situation menaçante, puisqu’il avait dû reculer jusqu’à être adossé contre une haie.

J’ai l’intention d’ajouter ce qui suit dans la lettre adressée au chef :

Au cours de cette enquête, divers problèmes qui ont eu une incidence sur l’intégrité de celle‑ci sont survenus.

Premièrement, comme vous le verrez dans l’annexe ci-jointe, huit agents témoins ont refusé de répondre à la question des enquêteurs de l’UES à savoir s’ils avaient rédigé leurs notes relatives à l’incident après avoir consulté leur avocat/avocate, ce qui constitue une violation apparente de l’article 8 du Règl. de l’Ont. 267/10 pris au titre de la Loi sur les services policiers.

Deuxièmement, dans cet incident, un seul avocat/une seule avocate représentait tous les agents témoins et l’agent impliqué. étant donné que cet avocat/cette avocate a l’obligation professionnelle d’échanger les renseignements pertinents avec les clients qu’il/elle représente, cela pourrait constituer une violation des dispositions relatives à l’isolement des agents visées par l’article 6 du même règlement.

Puisque les agents ont consulté leur avocat/avocate avant de rédiger leurs notes et qu’ils ont eu recours au même avocat/à la même avocate, cela me fait douter de leur fiabilité. Heureusement, dans cette affaire, bon nombre de renseignements ont été recueillis grâce aux déclarations des témoins, aux vidéos et à la preuve médicolégale. J’estime donc avoir un portrait suffisamment précis de l’incident pour ne pas avoir à m’appuyer outre mesure sur les notes des agents et l’information qu’ils ont donnée dans leurs entrevues.

Troisièmement, comme vous le verrez dans l’article ci-joint, l’avocat/l’avocate a, peu de temps après l’incident, divulgué des renseignements concernant celui‑ci aux médias; cela peut avoir des répercussions néfastes sur le processus des entrevues avec les témoins. Je comprends qu’il n’est pas possible d’imposer des mesures disciplinaires à l’avocat/avocate, puisqu’il/elle n’est pas un agent de police. Toutefois, cet avocat/cette avocate était le représentant/la représentante de l’agent impliqué, ce qui signifie que ses déclarations pouvaient être attribuées à l’agent. J’ai écrit directement à l’avocat/l’avocate à ce sujet et apprécierais que vous vous penchiez sur cette violation apparente de l’article 12 de la réglementation de l’UES.

En ce qui concerne l’examen des violations apparentes de la réglementation applicable, j’ai écrit à votre bureau à de nombreuses reprises par le passé afin de porter le tout à votre attention et de vous demander d’informer mon bureau par écrit des résultats de vos démarches à cet égard. Mon objectif était de régler ces problèmes en entamant un dialogue avec vous et en respectant votre rôle, soit celui qui est chargé de rendre des comptes sur les questions relatives à la discipline. Je n’ai reçu aucune véritable réponse aux questions que je vous ai soumises au cours des deux dernières années. Vos agents semblent continuer de commettre, à la même fréquence, bon nombre des violations apparentes à la réglementation que je souligne dans mes lettres. Je vous demande de revoir votre position, à savoir votre décision de ne pas répondre à mes questions.

Date : Le 26 janvier 2011

Ian Scott
Directeur
Unité des enquêtes spéciales