Rapport du directeur de l'UES - dossier no 12-PFD-116
Livré le : 26 juin 2012
Note explicative
Le gouvernement de l’Ontario publie les précédents rapports du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales (UES) [présentés au procureur général avant mai 2017] qui portent sur les cas où il y a eu un décès impliquant une arme à feu, une empoignade et/ou l’utilisation d’une arme à impulsions, ou encore un autre type d’intervention notable de la part de la police n’ayant pas entraîné d’accusations criminelles.
Le juge Michael H. Tulloch a formulé des recommandations concernant la publication des précédents rapports du directeur de l’UES dans le Rapport de l’examen indépendant des organismes de surveillance de la police, lequel a été publié le 6 avril 2017.
Dans ce rapport, le juge Tulloch explique qu’étant donné que les précédents rapports n’avaient pas été rédigés au départ en vue d’être divulgués au public, il est possible qu’ils soient modifiés de façon importante pour protéger les renseignements de nature délicate qui s’y trouvent. Le juge a tenu compte du fait que divers témoins lors d’enquêtes de l’UES bénéficiaient de l’assurance de confidentialité et a donc recommandé que certains renseignements soient caviardés de manière à protéger la vie privée, la sûreté et la sécurité de ces témoins.
Conformément à la recommandation du juge Tulloch, la présente note explicative est fournie afin d’aider le lecteur à mieux comprendre les raisons pour lesquelles certains renseignements sont caviardés dans ces rapports. On a également inséré des notes tout au long des rapports pour décrire la nature des renseignements caviardés et les raisons justifiant leur caviardage.
Considérations relatives à l’application de la loi et à la protection des renseignements personnels
Conformément aux recommandations du juge Tulloch et selon les termes de l’article 14 de la Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (LAIPVP) [renseignements relatifs à l’exécution de la loi], des parties de ces rapports ont été retirées de manière à protéger la confidentialité de ce qui suit :
- l’information divulguant des techniques ou procédures confidentielles utilisées par l’UES
- l’information dont la publication pourrait raisonnablement faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire
- les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre d’une enquête
Conformément aux recommandations du juge Tulloch et selon les termes de l’article 21 de la LAIPVP (renseignements relatifs à la protection de la vie privée), les renseignements personnels, notamment les renseignements personnels de nature délicate, doivent également être caviardés, sauf ceux qui sont nécessaires pour éclairer les motifs de la décision du directeur. Ces renseignements peuvent comprendre, sans toutefois s’y limiter, ce qui suit :
- le nom de tout agent impliqué
- le nom de tout agent témoin
- le nom de tout témoin civil
- les renseignements sur le lieu de l’incident
- d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête, notamment lorsqu’il s’agit d’enfants
- les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
Renseignements personnels sur la santé
Les renseignements relatifs à la santé d’une personne qui ne sont pas liés à la décision du directeur (compte dûment tenu de la Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé) ont été caviardés.
Autres instances, processus et enquêtes
Il se peut que certains renseignements aient été omis de ces rapports parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.
Rapport du directeur
Notification de l’UES
Le 27 avril 2012, à 8 h 30, l’agent donnant l’avis de la Police provinciale de l’Ontario a avisé l’Unité des enquêtes spéciales (l’« UES » ou l’« Unité ») du décès par balle du défunt, 53 ans, survenu 40 minutes plus tôt à la suite d’un long siège entrepris par les policiers à une résidence de Chatsworth, dans le comté de Grey.
Aperçu
L’agent donnant l’avis a signalé que les agents recherchaient le défunt durant la soirée du 26 avril 2012 après qu’il eut menacé des résidents du secteur avec un pistolet. Le défunt est d’abord parvenu à s’échapper et a fui dans les bois. Il est réapparu à quelques kilomètres du lieu de sa fuite et a pénétré dans le garage d’une propriété appartenant à une personne.
Une fois dans le garage, le défunt s’est armé d’un fusil de chasse et de centaines de cartouches. L’arme à feu et les munitions étaient la propriété d’une personne et avaient été laissées dans le garage sans être gardées sous verrou. Durant la nuit, le défunt n’a pas obéi aux ordres des policiers lui intimant de se rendre et a tiré des douzaines de projectiles en direction des agents qui occupaient le périmètre de la propriété.
Finalement, il est sorti du garage et s’est avancé vers certains agents. Un membre de l’unité d’intervention tactique de la Police provinciale de l’Ontario a riposté aux coups de feu, atteignant le défunt une fois à la poitrine, causant la mort sur le coup.
L’enquête
Le 27 avril 2012, cinq enquêteurs de l’Unité et quatre enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES ont lancé une enquête à Chatsworth, après être arrivés sur les lieux trois heures après avoir été dépêchés. Le personnel a méticuleusement mesuré et photographié les lieux en plus de préparer un diagramme représentant ces derniers. On a ratissé le secteur, ce qui a permis d’identifier des témoins civils qui ont pu être interviewés. L’UES a reçu et examiné les documents et les pièces qu’elle a demandées à la Police provinciale :
- des copies des notes de service de tous les agents témoins dans leur carnet
- le rapport du système de répartition assistée par ordinateur
- la chronologie des événements
- un disque numérique polyvalent (DVD) comprenant des enregistrements de la ligne téléphonique de répartition de la Police provinciale
- un DVD contenant l’enregistrement de l’appel au téléphoniste du service 9‑1‑1
- une clé USB contenant des enregistrements audio des conversations des membres de l’équipe de l’unité d’intervention tactique
- un exemplaire du diagramme des lieux dessiné par une personne
- un DVD contenant des photographies du tableau blanc situé dans le poste de commandement de la Police provinciale de l’Ontario
- un DVD contenant les normes des cours de formation des membres de l’unité d’intervention tactique
- un DVD contenant les photographies prises par l’agent témoin no 2
- des photographies des lieux prises par l’agent non témoin
- un DVD contenant une vidéo des lieux faite par l’agent non témoin
- une liste des témoins civils et des agents témoins
- le registre des opérations du poste de commandement de la Police provinciale de l’Ontario
Les agents témoins ont été identifiés le 27 avril 2012 et ont été interrogés aux dates indiquées :
- agent témoin no 1 (le 30 avril 2012)
- agent témoin no 2 (le 1er mai 2012)
- agent témoin no 3 (le 1er mai 2012)
- agent témoin no 4 (le 1er mai 2012)
- agent témoin no 5 (le 30 avril 2012)
- agent témoin no 6 (le 30 avril 2012)
- agent(e) témoin no 7 (le 1er mai 2012)
- agent témoin no 8 (le 1er mai 2012)
Bien que ces agents aient été identifiés et interrogés, les témoignages de l’agent témoin no 8, de l’agent témoin no 5, de l’agent témoin no 6 et de l’agent témoin no 4 ont été corroborés par les autres et n’ont pas été inclus dans le sommaire suivant.
L’agent impliqué, l’agent impliqué, a été interrogé le 23 mai 2012.
Les témoins civils suivants ont été interrogés aux dates indiquées :
- témoin civil no 1 (le 2 mai 2012)
- témoin civil no 2 (le 2 mai 2012)
- témoin civil no 3 (le 1er mai 2012)
- témoin civil no 4 (le 1er mai 2012)
Bien que les témoins civils suivants aient été interviewés par l’UES, leurs témoignages n’ont fait que corroborer ceux d’autres témoins ou n’ont pas permis de faire progresser l’enquête :
- témoin civil no 5 (le 2 mai 2012)
- témoin civil no 6 (le 28 avril 2012)
- témoin civil no 7 (le 28 avril 2012)
- témoin civil no 8 (le 28 avril 2012)
- témoin civil no 9 (le 28 avril 2012); and
- témoin civil no 10 (le 2 mai 2012)
Décision du directeur en vertu du paragraphe 113(7) de la Loi sur les services policiers
À mon avis, il n’existe aucun motif raisonnable de croire que l’agent impliqué, nommément l’agent impliqué, a commis une infraction criminelle en relation avec la mort par balle du défunt le 27 avril 2012. L’agent impliqué a volontairement fourni ses notes et une déclaration aux enquêteurs de l’UES et le contenu de celles‑ci concorde avec tous les autres renseignements recueillis au cours de l’enquête. Il y avait notamment des enregistrements audio des conversations avec les membres de l’unité d’intervention tactique durant l’incident et un registre des opérations du poste de commandement de la Police provinciale de l’Ontario, dont le contenu fournit un portrait raisonnablement complet de cet événement dramatique.
L’agent impliqué était un membre de l’unité d’intervention tactique et a été dépêché à la suite d’un appel concernant un suspect barricadé à un lieu, à Chatsworth, dans le comté de Grey le 26 avril 2012. Il avait été informé que le défunt était recherché en vertu d’un mandat pour avoir proféré des menaces de mort, pour port d’arme dans un dessein dangereux et pour bris de ses conditions de libération, et que l’homme s’était barricadé dans un grand garage sur les lieux. L’agent avait aussi été informé que le défunt avait à sa disposition un fusil de chasse et de nombreuses cartouches ainsi qu’une carabine de petit calibre, les deux armes ayant été rangées dans le garage par leur propriétaire. Le défunt avait aussi été vu en possession d’un pistolet avant qu’il n’entre dans le garage.
L’agent impliqué et son/sa partenaire, l’agent(e) témoin no 7, ont pris position derrière le garage, en élévation par rapport aux portes avant du bâtiment. L’agent impliqué avait une carabine C8 et l’agent(e) témoin no 7 avait des armes non létales dont un fusil conçu pour tirer des sacs de plombs et une arme anti‑émeute ARWEN pouvant lancer des bâtons cinétiques en plastique.
À environ 19 h, l’agent impliqué a d’abord vu le défunt lorsqu’il est sorti du garage par la porte piétonne et qu’il a fait feu avec son fusil dans les airs. Une heure plus tard, vers 20 h, il est sorti de nouveau et a tiré un coup de fusil ainsi qu’un coup de pistolet en direction du véhicule de sauvetage blindé de la Police provinciale, qui était garé dans l’allée d’accès au garage. Ce véhicule ressemble à un petit char d’assaut et est solidement renforcé. Ensuite, le suspect a tiré cinq ou six autres balles en direction du véhicule de sauvetage blindé.
À 21 h 45, les agents impliqués se sont déplacés vers un secteur plus densément boisé. Vers 22 h 30, l’agent impliqué a entendu le défunt démarrer le moteur de l’un des véhicules dans le garage et ouvrir la porte du garage. Le véhicule de sauvetage blindé s’est approché de la porte du garage pour bloquer toute tentative de sortie du bâtiment. Le défunt a fait feu à de nombreuses reprises en direction du véhicule de sauvetage blindé et a refermé la porte.
Vers 1 h 45 le jour suivant, le défunt a lancé un téléphone cellulaire que la Police provinciale avait tenté d’utiliser pour communiquer avec lui.
Pendant quelques heures, tout a été relativement calme. Cependant, peu après 6 h, alors qu’il faisait toujours sombre, le défunt est sorti du garage armé d’un fusil. Il a commencé à se déplacer vers les marches en pierre située à côté du garage en direction de l’agent impliqué et de son/sa partenaire. Les deux agents se sont avancés et se sont mis à couvert derrière un arbre alors que le défunt montait les marches en pierre. L’agent impliqué a pointé sa carabine C8 et l’agent(e) témoin no 7 son fusil en direction du défunt. L’agent(e) témoin no 7 lui a ordonné de lâcher son arme et les deux agents ont illuminé le suspect avec les torches électriques fixées sur le canon de leurs armes. Plutôt que d’obéir à l’ordre de l’agent(e), le défunt a braqué son fusil en direction des deux agents. L’agent(e) témoin no 7 a tiré un sac de plombs, mais cela n’a pas semblé avoir d’effet. Le défunt a commencé à avancer vers les agents en tenant le canon de son fusil en position de tir. L’agent impliqué a tiré deux projectiles avec sa carabine C8 alors que l’agent(e) témoin no 7 tirait d’autres sacs de plombs. à ce moment, le défunt était à environ dix mètres des agents. Le défunt s’est retourné et a couru pour descendre les marches de pierre afin de retourner dans le garage par la porte piétonne. Une fois à l’intérieur, le suspect s’est effondré, toujours en tenant son fusil, et est décédé à cet endroit. Une autopsie effectuée le 30 avril 2012 a permis de déterminer que la cause du décès était une blessure par balle à la poitrine.
À mon avis, l’utilisation de la force létale par l’agent impliqué, qui a conduit au décès du défunt, était justifiée au regard de la loi. Il s’est avéré que le défunt représentait une menace de mort pour de nombreux agents qui étaient sur les lieux lorsqu’il a fait feu à de multiples reprises avec son fusil sur une période prolongée et qu’il a refusé de se rendre. Plus tard, l’enquête judiciaire de l’UES a permis de conclure que le suspect avait fait feu avec le fusil à environ 80 reprises. Lorsque le défunt est sorti du garage armé de son fusil en profitant de l’obscurité pour se cacher, l’agent impliqué pouvait raisonnablement conclure que l’homme représentait une menace immédiate pour lui et son/sa partenaire, l’agent(e) témoin no 7, s’il menaçait l’un ou l’autre avec son arme. Les deux agents ont donné l’occasion au défunt de lâcher son arme. Plutôt que d’obtempérer, il a pointé son fusil de façon agressive en direction des deux agents. à la lumière du comportement antérieur du défunt, à mon avis, l’agent impliqué croyait raisonnablement que ces gestes constituaient une menace de mort immédiate pour lui et son/sa partenaire lorsque le suspect a pointé son fusil dans leur direction. Par conséquent, l’emploi de la force létale par l’agent impliqué menant au décès du défunt était justifié dans ces circonstances.
Date : Le 26 juin 2012
Ian Scott
Directeur
Unité des enquêtes spéciales
Annexe
Tous les agents ont respecté les politiques de la Police provinciale de l’Ontario concernant les notes de service dans leur carnet et aucun d’entre eux n’a tenté de communiquer avec un avocat avant de rédiger ses notes.