Rapport du directeur de l'UES - dossier no 14-OFD-077
Livré le : 8 octobre 2014
Note explicative
Le gouvernement de l’Ontario publie les précédents rapports du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales (UES) [présentés au procureur général avant mai 2017] qui portent sur les cas où il y a eu un décès impliquant une arme à feu, une empoignade et/ou l’utilisation d’une arme à impulsions, ou encore un autre type d’intervention notable de la part de la police n’ayant pas entraîné d’accusations criminelles.
Le juge Michael H. Tulloch a formulé des recommandations concernant la publication des précédents rapports du directeur de l’UES dans le Rapport de l’examen indépendant des organismes de surveillance de la police, lequel a été publié le 6 avril 2017.
Dans ce rapport, le juge Tulloch explique qu’étant donné que les précédents rapports n’avaient pas été rédigés au départ en vue d’être divulgués au public, il est possible qu’ils soient modifiés de façon importante pour protéger les renseignements de nature délicate qui s’y trouvent. Le juge a tenu compte du fait que divers témoins lors d’enquêtes de l’UES bénéficiaient de l’assurance de confidentialité et a donc recommandé que certains renseignements soient caviardés de manière à protéger la vie privée, la sûreté et la sécurité de ces témoins.
Conformément à la recommandation du juge Tulloch, la présente note explicative est fournie afin d’aider le lecteur à mieux comprendre les raisons pour lesquelles certains renseignements sont caviardés dans ces rapports. On a également inséré des notes tout au long des rapports pour décrire la nature des renseignements caviardés et les raisons justifiant leur caviardage.
Considérations relatives à l’application de la loi et à la protection des renseignements personnels
Conformément aux recommandations du juge Tulloch et selon les termes de l’article 14 de la Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (LAIPVP) [renseignements relatifs à l’exécution de la loi], des parties de ces rapports ont été retirées de manière à protéger la confidentialité de ce qui suit :
- l’information divulguant des techniques ou procédures confidentielles utilisées par l’UES
- l’information dont la publication pourrait raisonnablement faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire
- les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre d’une enquête
Conformément aux recommandations du juge Tulloch et selon les termes de l’article 21 de la LAIPVP (renseignements relatifs à la protection de la vie privée), les renseignements personnels, notamment les renseignements personnels de nature délicate, doivent également être caviardés, sauf ceux qui sont nécessaires pour éclairer les motifs de la décision du directeur. Ces renseignements peuvent comprendre, sans toutefois s’y limiter, ce qui suit :
- le nom de tout agent impliqué
- le nom de tout agent témoin
- le nom de tout témoin civil
- les renseignements sur le lieu de l’incident
- d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête, notamment lorsqu’il s’agit d’enfants
- les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
Renseignements personnels sur la santé
Les renseignements relatifs à la santé d’une personne qui ne sont pas liés à la décision du directeur (compte dûment tenu de la Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé) ont été caviardés.
Autres instances, processus et enquêtes
Il se peut que certains renseignements aient été omis de ces rapports parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.
Rapport du directeur
Avis à l’UES
Date et heure de l’avis : 2014-03-28, à 11 h 27
Avis à l’UES
Date et heure de l’avis : 2014-03-28, à 11 h 27
Avis remis par : Police
L’agent donnant l’avis de la Police régionale de Peel (PRP) a signalé que, à 10 h 59, un homme (qui, au cours de l’enquête de l’Unité des enquêtes spéciales « l’UES », a été identifié comme étant M. Charnjit Bassi) s’est présenté à la zone de contrôle du palais de justice A. Grenville et William Davis au 7755, rue Hurontario, à Brampton, et s’est mis à faire feu avec une arme. Un agent (qui a plus tard été identifié par la PRP comme étant l’agent impliqué) a été atteint à l’abdomen et, par la suite, a été transporté à l’hôpital Civic de Brampton. L’agent témoin no 5 aurait, apparemment, tiré sur l’homme qui est décédé sur les lieux.
Récapitulatif
Le 28 mars 2014, à environ 10 h 50, M. Charnjit Bassi s’est présenté au palais de justice de Brampton, situé au 7755, rue Hurontario, à Brampton. Le palais de justice est conçu de façon à diriger les personnes qui entrent dans le bâtiment vers deux voies d’accès distinctes. L’une des voies est conçue pour le grand public et est située sur la droite dès que l’on entre par les portes extérieures du palais de justice. à l’entrée réservée au public, les visiteurs doivent placer leurs sacs et leurs objets sur un convoyeur relié à une machine à rayons X. Les visiteurs doivent ensuite passer par un détecteur de métal et se soumettre à une fouille effectuée à l’aide d’un détecteur de métal portatif pour déterminer s’ils ont des objets métalliques sur eux avant de pouvoir entrer dans le palais de justice. La deuxième voie d’accès au palais de justice se trouve à la gauche des portes extérieures et est réservée aux membres du personnel du palais de justice ainsi qu’aux professionnels de la justice pénale. Lorsqu’ils passent par cette voie d’accès, les personnes doivent présenter une pièce d’identité officielle, mais ne sont pas tenues de placer leurs sacs ou leurs objets sur la machine à rayons X ni de se soumettre à des fouilles personnelles.
Au moment où M. Bassi est entré dans le palais de justice, l’agent témoin no 2 de la PRP travaillait à la machine à rayons X, l’agent témoin no 5 travaillait dans la zone utilisée pour les fouilles effectuées à l’aide d’un détecteur de métal portatif, tandis que l’agent impliqué travaillait à l’entrée du personnel du palais de justice et des professionnels de la justice pénale.
M. Bassi portait un chapeau fedora, un manteau brun clair de longueur moyenne, un chandail brun et des pantalons propres rayés bruns. M. Bassi portait également un étui d’aisselle brun clair contenant un pistolet semi‑automatique Sig Sauer P226 de calibre 9 millimètres. Le pistolet était dissimulé en dessous de son bras gauche sous son manteau. L’arme était chargée et comprenait une balle dans le canon ainsi que cinq balles dans le chargeur.
M. Bassi a tenté de s’introduire dans le palais de justice par l’entrée réservée au personnel et aux professionnels de la justice pénale en même temps que quelques professionnels. L’agent impliqué a demandé à M. Bassi de s’identifier et M. Bassi a fourni une réponse inappropriée. L’agent impliqué a ordonné à M. Bassi de ressortir et d’entrer par l’entrée réservée au grand public. à ce moment‑là, l’agent impliqué et M. Bassi étaient à quelques pieds l’un de l’autre et M. Bassi a dégainé son arme avant de tirer deux coups de feu en direction de l’agent impliqué, qui ne portait pas son gilet pare‑balles. L’un des projectiles a pénétré l’avant du torse de l’agent impliqué et l’autre projectile est allé se loger dans le bureau derrière lequel se trouvait l’agent impliqué. L’agent impliqué est tombé sur le sol à la renverse.
M. Bassi s’est déplacé vers sa droite et a commencé à courir vers les détecteurs de métal où l’agent témoin no 5 se trouvait. L’agent témoin no 5 a entendu la détonation du pistolet de M. Bassi et s’est rapidement déplacé à sa gauche pour prendre position à couvert derrière une colonne derrière la machine à rayons X.
M. Bassi a été en mesure d’entrer dans le hall du palais de justice après que l’agent témoin no 5 a quitté son poste; il s’est tourné vers sa droite et a suivi l’agent témoin no 5. L’agent témoin no 5, à partir de sa position à couvert, a dégainé son arme de service puis s’est déplacé, s’éloignant ainsi de la colonne. L’agent témoin no 5 est tombé face à face avec M. Bassi alors qu’une distance de quelques mètres les séparait. L’agent témoin no 5 et M. Bassi ont fait feu en direction l’un de l’autre. Le projectile de M. Bassi n’a pas atteint l’agent témoin no 5 et est allé frapper le bas d’un mur qui mène à la cafétéria. Le projectile de l’agent témoin no 5 a atteint le devant de la cuisse droite de M. Bassi avant de transpercer l’intérieur de sa cuisse gauche et de ressortir par l’arrière de sa jambe gauche pour ensuite aller se loger dans un mur près de la salle d’audience 101.
Environ au même moment, l’agent impliqué, qui était au sol et maintenant derrière M. Bassi, a fait feu vers M. Bassi à trois reprises avec son arme de service. Deux des tirs de l’agent impliqué ont atteint M. Bassi par derrière. L’un des projectiles a pénétré le bas du flanc gauche de M. Bassi pour atteindre son aorte. L’autre projectile est entré à la base du cou de M. Bassi et est ressorti par sa mâchoire sur le côté avant gauche de son visage. Le troisième projectile de l’agent impliqué a raté complètement M. Bassi et est allé se loger dans un cadre de porte.
Après avoir été atteint par les projectiles de l’agent impliqué et de l’agent témoin no 5, M. Bassi s’est effondré sur le plancher, face contre terre. L’agent témoin no 5 a rengainé son arme, s’est approché de M. Bassi et l’a menotté, ses mains derrière son dos.
La PRP a sécurisé le palais de justice de Brampton, où se trouvaient plusieurs centaines de membres du public et de son personnel, établissant que personne pourrait y entrer, ni en sortir. De nombreux agents de la PRP sont arrivés sur les lieux pour trouver de possibles complices de M. Bassi.
Le personnel des services médicaux d’urgence et des pompiers sont également arrivés pour offrir des soins médicaux à l’agent impliqué et à M. Bassi.
L’enquête
Type d’intervention : Intervention immédiate
Date et heure de l’envoi de l’équipe : 2014-03-28, à 11 h 30
Date et heure de l’arrivée de l’UES sur les lieux : 2014-03-28, à 11 h 54
Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 19
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 3
Plaignant
Charnjit Singh Bassi Décédé
Témoins civils interviewés
- témoin civil no 1 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 2 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 3 Première entrevue : le 28 mars 2014 Entrevue de suivi : le 28 mars 2014
- témoin civil no 4 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 5 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 6 Première entrevue : le 28 mars 2014 Entrevue de suivi : le 29 avril 2014
- témoin civil no 7 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 8 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 9 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 10 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 11 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 12 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 13 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 14 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 15 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 16 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 17 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 18 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 19 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 20 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 21 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 22 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 23 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 24 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 25 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 26 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 27 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 28 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 29 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 30 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 31 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 32 Première entrevue : le 28 mars 2014
- témoin civil no 33 Première entrevue : le 1er avril 2014
- témoin civil no 34 Première entrevue : le 1er avril 2014
- témoin civil no 35 Première entrevue : le 1er avril 2014
- témoin civil no 36 Première entrevue : le 2 avril 2014
- témoin civil no 37 Première entrevue : le 2 avril 2014
- témoin civil no 38 Première entrevue : le 3 avril 2014
- témoin civil no 39 Première entrevue : le 3 avril 2014
- témoin civil no 40 Première entrevue : le 4 avril 2014
L’agent témoin no 5 avait d’abord été identifié comme étant un agent impliqué; cependant, à la lumière des résultats de l’autopsie, il est devenu évident que le projectile de l’agent témoin no 5 n’avait pas blessé mortellement M. Bassi. Par conséquent, on a modifié le statut de l’agent témoin no 5 pour qu’il soit plutôt identifié comme un agent témoin.
L’UES a obtenu un exemplaire de l’enregistrement vidéo fait par le système de surveillance à l’extérieur du palais de justice de Brampton durant la journée du 28 mars 2014. La vidéo n’a pas capté d’images de l’incident et n’était d’aucune utilité aux fins de la présente enquête.
Agent impliqué
agent impliqué a refusé de fournir une déclaration ou un exemplaire de ses notes de service.
Agents témoins
- agent témoin no 1 Première entrevue : le 28 mars 2014
- agent témoin no 2 Première entrevue : le 28 mars 2014
- agent témoin no 3 Première entrevue : le 30 mars 2014
- agent témoin no 4 Première entrevue : le 30 mars 2014
- agent témoin no 5 Première entrevue : le 4 avril 2014
- agent témoin no 6 Première entrevue : le 17 avril 2014
- agent témoin no 7 Première entrevue : le 23 juin 2014
- agent témoin no 8 Première entrevue : le 24 juin 2014
Employé de la police
employé de la police Première entrevue : le 28 mars 2014
Services ambulanciers de la région de Peel et services d’urgence et d’incendie de Brampton
- membre du personnel d’urgence no 1 Première entrevue : le 28 mars 2014
- membre du personnel d’urgence no 2 Première entrevue : le 28 mars 2014
- membre du personnel d’urgence no 3 Première entrevue : le 28 mars 2014
- membre du personnel d’urgence no 4 Première entrevue : le 28 mars 2014
- membre du personnel d’urgence no 5 Première entrevue : le 28 mars 2014
- membre du personnel d’urgence no 6 Première entrevue : le 28 mars 2014
- membre du personnel d’urgence no 7 Première entrevue : le 28 mars 2014
- membre du personnel d’urgence no 8 Première entrevue : le 28 mars 2014
- membre du personnel d’urgence no 9 Première entrevue : le 28 mars 2014
Témoins civils identifiés qui n’ont pas été interviewés
- témoin civil no 41 S.O.
- témoin civil no 42 S.O.
- témoin civil no 43 S.O.
- témoin civil no 44 S.O.
- témoin civil no 45 S.O.
- témoin civil no 46 S.O.
- témoin civil no 47 S.O.
- témoin civil no 48 S.O.
- témoin civil no 49 S.O.
- témoin civil no 50 S.O.
- témoin civil no 51 S.O.
- témoin civil no 52 S.O.
- témoin civil no 53 S.O.
Sur demande, la PRP a fourni les éléments et les documents suivants à l’UES qui les a examinés :
- un exemplaire de l’enregistrement des communications relatives à l’incident
- un exemplaire de la liste des témoins séquestrés préparée par l’agent non témoin no 1
- un exemplaire de la liste des témoins séquestrés préparée par l’agent non témoin no 2
- un exemplaire de la liste des témoins séquestrés préparée par l’agent non témoin no 3
- le registre de déclaration – téléphones cellulaires
- le registre de déclaration daté du 30 mars 2014
- les notes de service de l’agent témoin no 3
- les notes de service de l’agent témoin no 7
- les notes de service de l’agent témoin no 6
- les notes de service de l’agent témoin no 5
- les notes de service de l’agent témoin no 2
- les notes de service de l’agent témoin no 1
- les notes de service de l’agent témoin no 4
- un exemplaire de la déclaration du témoin civil no 6
- un exemplaire de la déclaration du témoin civil no 25
Déclarations des témoins et éléments de preuve fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête (considérations relatives à l’application de la loi et à la protection de la vie privée)
Décision du directeur en vertu du paragraphe 113(7) de la Loi sur les services policiers
À environ 11 h le 28 mars 2014, Charnjit Bassi s’est présenté au palais de justice de Brampton situé au 7755, rue Hurontario. Il était armé d’un pistolet semi‑automatique de calibre 9 millimètres chargé. Le palais de justice a rapidement sombré dans le chaos. Lorsque la poussière est retombée, un agent de la PRP était étendu grièvement blessé et M. Bassi était décédé.
Il était clair dès le départ que les coups de feu des policiers avaient causé la mort de M. Bassi; par conséquent, cela a déclenché la mise en œuvre d’une enquête de l’UES en vertu de son mandat. L’enquête de l’UES étant terminée, je suis convaincu qu’il n’existe aucun motif permettant de croire que l’un ou l’autre des agents de police a commis une infraction criminelle liée au décès de M. Bassi.
Le récit qui suit a été établi en examinant les nombreuses preuves recueillies lors de cette enquête, notamment les déclarations d’une quarantaine de témoins civils et de huit agents de police, l’examen judiciaire des lieux, une autopsie et des analyses balistiques de plusieurs armes, de cartouches vides et de balles tirées. M. Bassi s’est présenté au palais de justice vêtu d’une veste beige‑brun clair, d’un chapeau fedora, de pantalons bruns et d’un chandail brun avec des souliers noirs aux pieds. Il avait dissimulé dans un étui sous sa veste et sous son bras un pistolet de calibre 9 millimètres. Il est entré dans l’édifice et a tenté d’emprunter la voie d’accès réservée au personnel du palais de justice et aux professionnels de la justice pénale. Contrairement à la voie d’accès adjacente réservée aux membres du public, la voie qu’avait choisie M. Bassi ne l’obligeait pas à passer par un détecteur de métal, et elle n’impliquait pas qu’une fouille plus personnalisée soit effectuée par un agent à l’aide d’un détecteur de métal portatif. L’agent impliqué surveillait la voie d’accès du personnel du palais de justice et des professionnels de la justice pénale. Il semble que M. Bassi ait tenté de se dissimuler sans être détecté dans cette voie en prenant place dans le flot de personnes entrant dans le palais de justice, mais l’agent était sur ses gardes.
L’agent impliqué a fait face à M. Bassi et lui a ordonné d’intégrer l’autre voie où il pourrait se soumettre aux mêmes vérifications de sécurité que les autres citoyens. M. Bassi a rechigné et a plutôt porté sa main droite au côté gauche de sa veste, d’où il a sorti une arme à feu. Il a pointé le pistolet en direction de l’agent impliqué et a tiré deux coups de feu à bout portant. L’une des balles a pénétré l’avant du torse de l’agent, le projetant au sol. L’autre tir a raté sa cible; il a plutôt atteint le bureau à côté de l’agent et la balle s’y est logée.
Les coups de feu ont semé le chaos, particulièrement aux alentours du point de contrôle de sécurité près de l’entrée de l’édifice qui était bondée de membres du personnel de la cour et de gens qui entraient dans le palais de justice et y en sortaient. M. Bassi a passé le point de contrôle de sécurité et a tourné vers sa droite, où il a fait face à l’agent témoin no 5. L’agent témoin no 5 travaillait avec l’agent impliqué dans la zone de sécurité à l’avant et fouillait les personnes entrant dans le palais de justice avec son détecteur de métal portatif. Il a vu et entendu M. Bassi tirer sur son partenaire et s’est mis à couvert derrière une colonne à proximité, dégainant du même coup son arme. L’agent témoin no 5 s’est rapidement retrouvé face à face avec M. Bassi, qui a pointé son arme en sa direction. Il y a eu un échange de coups de feu lorsque l’agent et M. Bassi ont tiré un coup chacun. Environ au même moment, l’agent impliqué, qui avait réussi à se relever et qui avait dégainé son arme, s’est stabilisé et a tiré trois coups de feu en direction de M. Bassi (bien que certaines de ses déclarations faites à d’autres témoins laissent entendre qu’il a cru avoir tiré seulement à deux reprises).
La balle de l’agent témoin no 5 a atteint la jambe droite de M. Bassi et est ressortie par sa jambe gauche. Le tir de M. Bassi a raté l’agent témoin no 5. L’agent impliqué a raté M. Bassi avec l’un de ses trois tirs. Une autre balle a pénétré à l’arrière du cou de M. Bassi pour ressortir par le côté gauche à l’avant de son visage. L’autre balle a atteint le côté gauche du dos de M. Bassi et s’est logée dans la paroi abdominale antérieure. Selon le pathologiste responsable de l’autopsie, ce serait cette balle qui aurait causé le décès de M. Bassi.
M. Bassi s’est effondré sur le plancher et a rapidement été menotté par l’agent témoin no 5. Les autres agents présents au palais de justice ont commencé à converger vers les lieux et ont immédiatement prodigué les premiers soins à l’agent impliqué et à M. Bassi. Les ambulanciers et les pompiers sont arrivés rapidement. L’agent impliqué a été transporté à l’hôpital où l’on a soigné ses blessures. M. Bassi n’a pu être réanimé et son décès a été constaté au palais de justice.
Le paragraphe 25(3) du Code criminel autorise les agents de police à employer la force létale dans l’exercice de leurs fonctions lorsqu’une telle force est raisonnablement nécessaire afin de se protéger eux‑mêmes ou pour protéger les autres contre des lésions corporelles graves ou contre la mort. L’article 34 du Code criminel autorise l’emploi de la force dans le but de se défendre ou de défendre une autre personne, lorsque la force en question, incluant la force létale, est raisonnablement nécessaire au vu des circonstances. En ce qui concerne la force utilisée contre M. Bassi, je n’ai aucune difficulté à conclure, à la lumière de l’ensemble de la preuve, que les coups de feu tirés par l’agent impliqué et par l’agent témoin no 5 étaient légalement justifiés conformément à ces deux dispositions. L’agent impliqué venait tout juste d’être la cible de M. Bassi. Il avait toutes les raisons de croire que sa vie et la vie des autres personnes autour étaient en danger, et qu’il ne pouvait pas répondre à ce danger autrement qu’en faisant feu sur M. Bassi à son tour. La même chose s’applique pour l’agent témoin no 5. Il venait tout juste de voir M. Bassi tenter de tuer l’agent impliqué et il était la dernière ligne de défense avant que M. Bassi ne puisse pénétrer plus loin dans le palais de justice. Puisque l’agent était face à face avec M. Bassi qui pointait un pistolet dans sa direction à bout portant, sa décision de faire feu sur M. Bassi était éminemment justifiable.
Les raisons exactes qui ont poussé M. Bassi à entrer dans le palais de justice armé d’un pistolet chargé demeurent nébuleuses, mais l’enquête de l’UES ne portait pas sur celles‑ci. L’UES sait qu’au moins un rapport de police non confirmé laisse entendre que M. Bassi était là pour se venger d’une personne ou de personnes non identifiées puisqu’il croyait avoir été victime d’une injustice. Quoi qu’il en soit, il est clair que M. Bassi était prêt à utiliser son arme à feu, que ce soit contre sa cible prévue ou contre d’autres parties innocentes. L’agent impliqué et l’agent témoin no 5 ne pouvaient le laisser faire. Ce jour‑là, il était de leur devoir de veiller à contrôler à la porte les risques compromettant la sécurité du palais de justice et des gens qui s’y trouvaient. Malgré le fait qu’il avait été atteint par un projectile au torse et qu’il souffrait d’une blessure grave, l’agent impliqué a été en mesure de garder son calme, de se relever et de retourner les coups de feu avant de s’effondrer en raison de ses blessures. L’agent témoin no 5 était en état de choc à la suite de ce qu’il venait de voir et a bien fait de se mettre à couvert immédiatement avant que M. Bassi ne puisse également faire feu sur lui. Il a ensuite dégainé son arme et a été en mesure d’atteindre M. Bassi avec son seul et unique tir alors que M. Bassi pointait son arme dans sa direction et faisait feu. Ces agents ont fait leur devoir et ont agi avec bravoure et courage sur la ligne de tir. Grâce à leur intervention, toutes les personnes présentes au palais de justice ont pu retourner à la maison saines et sauves ce jour‑là.
Toutefois, les agents n’ont pas été les seuls à se distinguer. Au milieu du chaos généré par les coups de feu tirés par M. Bassi, des citoyens ordinaires ont fait preuve à plusieurs égards de bravoure et de vivacité d’esprit. Par exemple, un greffier du tribunal a mis à l’abri un juge président, une avocate a obligé son client à se mettre par terre lorsqu’elle a entendu des coups de feu et une personne accusée au palais de justice pour des affaires de possession de drogue a été l’une des premières personnes à prodiguer les premiers soins à l’agent impliqué lorsque les coups de feu ont cessé. Ce ne sont que quelques‑unes des histoires de gens ordinaires qui ont accompli des gestes extraordinaires en cette triste journée.
Date : Le 8 octobre 2014
Original signé par
Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales