Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’ UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’ UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (La « LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :

  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • le nom de tout agent impliqué
  • le nom de tout agent témoin
  • le nom de tout témoin civil
  • les renseignements sur le lieu de l’incident
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’ UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave (y compris une allégation d’agression sexuelle).

On doit englober dans les « blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de « blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.

Ce rapport porte sur l’enquête de l’UES concernant le décès d’un homme de 70 ans (le plaignant) suite à des tirs de policiers le 27 octobre 2017.

L’enquête

Notification de l’UES

Le 28 octobre 2017, vers 0 h 55, le Service de police de Cobourg (SPC) a avisé l’UES du décès du plaignant, âgé de 70 ans, à la suite de blessures par balle lors d’une interaction avec des agents de police à l’hôpital Northumberland Hills une heure auparavant.

Le SPC a signalé que le 27 octobre 2017, à 23 h 08, le personnel infirmier avait appelé pour demander l’aide de la police à l’HNH après avoir entendu un coup de feu et l’affirmation, par un homme, que sa femme s’était tiré dessus dans une salle de triage. Les agents qui se sont rendus à l’hôpital en réponse à cet appel ont été confrontés à un homme en possession d’une arme à feu à l’urgence. Les agents ont tiré une rafale de coups de feu sur l’homme, qui est mort sur le coup. L’homme a été identifié comme étant le mari de la femme décédée.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 6

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 3 

Le 28 octobre 2017, à 2 heures du matin, six enquêteurs de l’UES et trois enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires (SSJ) de l’UES ont ouvert une enquête à Cobourg.

Les SSJ de l’UES ont sécurisé suffisamment les lieux, en prenant les dispositions nécessaires avec les directeurs administratifs de l’hôpital afin de maintenir l’accès au service d’urgence pour les patients, sans nuire à l’intégrité de l’enquête criminelle.

Les nombreux membres du personnel infirmier et autres employés de l’hôpital qui ont été témoins de l’incident ont été interrogés sur place. Les enquêteurs de l’UES ont rencontré les enquêteurs de la Police provinciale de l’Ontario chargés d’enquêter sur le décès de la TC no 12. Ils ont saisi et catalogué des éléments de preuve matériels et tracé un schéma des lieux. Au total, 142 éléments de preuve ont été recueillis, dont un certain nombre ont été remis au Centre des sciences judiciaires (CSJ) aux fins d’analyse.

Le 30 octobre 2017, des enquêteurs de l’UES se sont rendus à l’Unité de médecine légale de Toronto pour photographier l’autopsie du plaignant, selon les directives du médecin légiste.

Les enquêteurs ont pris des photographies du défunt et de ses vêtements. Les vêtements du défunt ainsi qu’un certain nombre de projectiles et de fragments récupérés ont été remis à l’UES, qui les a tous scellés individuellement. L’autopsie devait se poursuivre le lendemain.

Le 31 octobre 2017, à 9 h 30, l’autopsie a repris. D’autres photographies ont été prises et des éléments de preuve et des échantillons biologiques ont été recueillis en vue de leur soumission au CSJ aux fins d’analyses médicolégales. À la fin de l’autopsie, les SSJ de l’UES ont également prélevé les empreintes digitales du plaignant.

Plaignant

Homme de 70 ans, décédé

Témoins civils

TC no 1 A participé à une entrevue

TC no 2 A participé à une entrevue

TC no 3 A participé à une entrevue

TC no 4 A participé à une entrevue

TC no 5 A participé à une entrevue

TC no 6 A participé à une entrevue

TC no 7 A participé à une entrevue

TC no 8 A participé à une entrevue

TC no 9 A participé à une entrevue

TC no 10 A participé à une entrevue

TC no 11 A participé à une entrevue

TC no 12 N’a pas participé à une entrevue, décédée

TC no 13 A participé à une entrevue

TC no 14 A participé à une entrevue

TC no 15 A participé à une entrevue

TC no 16 A participé à une entrevue

TC no 17 A participé à une entrevue

TC no 18 A participé à une entrevue

TC no 19 A participé à une entrevue

TC no 20 A participé à une entrevue

TC no 21 A participé à une entrevue

TC no 22 A participé à une entrevue

TC no 23 A participé à une entrevue

TC no 24 A participé à une entrevue

Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue et ses notes ont été revues et examinées

AT no 2 A participé à une entrevue et ses notes ont été revues et examinées

Agents impliqués

AI no 1 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

AI no 2 A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

Description de l’incident

Le 27 octobre 2017, la TC no 12 a appelé la travailleuse de la santé qui s’occupait d’elle et de son mari (le plaignant), parce qu’elle s’inquiétait de la récente obsession du plaignant de se suicider et qu’elle craignait à la fois pour la sécurité de son mari et pour la sienne.

La travailleuse de la santé s’est rendue chez le couple et est restée un moment avec eux; le plaignant a fait plusieurs commentaires qui semblaient confirmer la crainte de la TC no 12 au sujet des intentions suicidaires de son mari. La travailleuse de la santé a donc appelé une ambulance pour qu’on emmène le plaignant et la TC no 12 à l’hôpital afin de répondre aux préoccupations de cette dernière et aux troubles de santé courants des conjoints. Avant de partir pour l’hôpital, le plaignant a dit qu’il avait besoin d’un moment pour se préparer. Il est alors allé dans sa chambre où il est resté seul pendant environ deux minutes, puis est ressorti lorsque les ambulanciers sont arrivés. Alors que les ambulanciers paramédicaux le plaçaient sur une civière, le plaignant a déclaré à sa femme : « J’ai été heureux avec toi pendant 46 ans et je t’aime, mais apparemment, 47 ans, ce n’était pour nous ». Il a aussi dit à la travailleuse de la santé qu’ils avaient dû [traduction] « finir par renoncer ». Le plaignant et son épouse ont alors été transportés à l’hôpital.

Une fois à l’hôpital, le plaignant et la TC no 12 ont été placés dans la salle de triage 7 où on les a laissés seuls en attendant qu’un médecin puisse les voir. Peu près, une forte détonation a été entendue depuis la salle 3?? et, une infirmière a constaté que la TC no 12 avait été touchée par une balle sur le côté droit de la tête. Le plaignant a affirmé à l’infirmière que c’était la TC no 12 elle-même qui avait tiré.

Le personnel infirmier a immédiatement transféré la TC no 12 en salle de réanimation pour tenter de lui sauver la vie et appelé le 9-1-1 pour demander l’aide de la police.

L’AI no 1 et l’AI no 2 sont arrivés à l’hôpital et le personnel médical leur a expliqué que, malgré la déclaration du plaignant que la TC no 12 s’était tiré elle-même une balle, l’arme à feu était introuvable. L’AI no 1 et l’AI no 2 sont allés à la salle de triage 7, accompagnés d’une infirmière. À leur arrivée, le plaignant a pointé une arme à feu en direction des deux agents; l’infirmière a immédiatement reculé. Les agents ont tous deux dégainé leurs armes de service et ordonné à plusieurs reprises au plaignant de lâcher son arme. Le plaignant refusant d’obtempérer, les deux agents ont fait feu. Après la première série de tirs, les agents ont constaté que le plaignant bougeait encore sous sa couverture, mais ils ne pouvaient pas voir son arme à feu. Ils ont donc fait feu une deuxième fois, puis se sont avancés, ont repéré l’arme à feu du plaignant et l’ont retiré.

Les deux agents impliqués ont déchargé leurs armes à feu 30 fois au total.

Les décès du plaignant et de son épouse, la TC no 12, ont été déclarés sur les lieux.

Cause du décès

Le 31 octobre 2017, une autopsie a eu lieu à l’Unité de médecine légale de la ville de Toronto, durant laquelle un certain nombre de projectiles et de fragments ont été récupérés. L’UES a reçu le rapport d’autopsie final le 13 septembre 2018 qui confirmait que le plaignant était décédé à la suite de multiples blessures par balle. Les blessures par balle étaient au torse et aux extrémités, y compris l’index de la main droite ainsi que l’annulaire et l’auriculaire de la main gauche. Les blessures par balle au torse ont été fatales.

Il a été déterminé que la cause du décès de la TC n° 12 était une blessure par balle perforante au cerveau. Ce projectile a traversé le crâne de droite à gauche et s’est incrusté du côté gauche. La distance du tir a été déclarée comme étant moyenne; le projectile a été récupéré.

Éléments de preuve

Les lieux

Il s’agit de salle de triage n° 7 de l’Hôpital Northumberland Hills.

Schéma des lieux

Schéma des lieux

Éléments de preuve matériels

L’arme à feu du plaignant

L’arme à feu du plaignant

Éléments de preuves médicolégaux

Les éléments suivants ont été remis au Centre des sciences judiciaires (CSJ) aux fins d’analyse. Les rapports du CSJ indiquaient les résultats suivants :

Armes à feu

Les SSJ de l’UES ont saisi trois armes à feu sur les lieux : les deux pistolets Glock des agents impliqués et un troisième pistolet que le plaignant a utilisé pour tuer sa femme.footnote 1

Les chercheurs du CSJ ont effectué les essais suivants, comme indiqué dans leur rapport sur les armes à feu.

Les détails des armes à feu consignés dans l’examen de l’état des biens de l’UES sont les suivants :

Article 053

Pistolet Glock 22 remis à l’AI no 2.

Article 065

Pistolet Glock 22 remis à l’AI no 1.

Article 001

Pistolet semi-automatique Taurus TCP de calibre .380 appartenant au plaignant.

Examen des armes à feu de la police du point de vue de leur conformité à Loi sur les services policiers.

  • L’arme à feu remise à l’AI no 2 répondait aux critères énoncés dans les dispositions réglementaires « Spécifications techniques pour les armes de poing » en application de la Loi sur les services policiers, sauf qu’à deux reprises, lors d’essais répétés de tir, la pression exercée sur la gâchette était inférieure au seuil prescrit
  • L’arme à feu remise à l’AI no 1 répondait aux critères énoncés dans les dispositions réglementaires « Spécifications techniques pour les armes de poing » en application de la Loi sur les services policiers, sauf qu’à une reprise, lors d’essais répétés de tir, la pression exercée sur la gâchette était inférieure au seuil prescrit

Essai pour déterminer les distances entre le canon des pistolets des policiers et la cible (le plaignant)

En raison de surfaces cibles intermédiaires – un drap recouvrant le plaignant et un double rideau – se trouvant à certains moments dans la trajectoire de tir des agents impliqués, aucun essai de détermination de la distance n’a été effectué.

Essai de correspondance entre les douilles et les armes à feu

Trente cartouches éjectées des pistolets Glock des policiers ont ​​été remises au CSJ pour déterminer le nombre de coups de feu tirés par chacun des agents impliqués. Les résultats des essais sont les suivants :

  • L’AI no 2 a tiré 16 coups de feu
  • L’AI no 1 a tiré 14 coups de feu
  • L’arme utilisée par le plaignant, un pistolet semi-automatique Taurus modèle PT738, avait un chargeur à six cartouches de calibre .380. Une balle a été retrouvée dans la tête de la TC no 12 lors de l’autopsie. Le chargeur contenait trois autres balles. L’AI n° 1 avait éjecté une balle après coup, par mesure de précaution, et la chambre du pistolet contenait une balle, pour un total de six balles

Récupération de projectiles

  • Vingt projectiles intacts ont été retrouvés dans le corps du plaignant
  • Sept fragments de projectiles ont été retrouvés dans le corps du plaignant
  • Trois projectiles ont été récupérés dans le mur ouest derrière la civière roulante du plaignant
  • Un projectile a été récupéré sur le sol de la pièce adjacente, au sud par rapport au plaignant
  • Un fragment de balle a été récupéré sous la civière roulante du plaignant
  • Un projectile a été retrouvé dans les vêtements du plaignant; et
  • Un projectile a été trouvé dans le sac mortuaire utilisé pour transporter la dépouille du plaignant

Analyse d’ADN sur l’arme de poing Taurus

Le profil ADN obtenu à partir de l’arme à feu qui n’appartenait à aucun des policiers correspondait à celui de l’ADN prélevé sur le plaignant avec une probabilité de 1 sur 180 trillions. L’emplacement et la probabilité de correspondance aléatoire liée aux sources de prélèvement des échantillons sur l’arme de poing prouvent que le plaignant l’a chargée et manipulée.footnote 2footnote 3

Témoignage d’expert

L’autopsie du corps du plaignant s’est déroulée sur deux jours, les 30 et 31 octobre 2017.

L’UES a reçu le rapport d’autopsie final le 13 septembre 2018, confirmant que le plaignant était décédé à la suite de multiples blessures par balle. Ces blessures étaient au torse et aux extrémités, y compris l’index de la main droite ainsi que l’annulaire et l’auriculaire de la main gauche. Les tirs au torse ont été fatals. Le rapport contenait les conclusions suivantes [traduction] :

Les blessures par balle les plus importantes du point de vue médical sont celles qui ont touché le cœur, les poumons, le foie, les principales artères sanguines, et la colonne vertébrale. Ces blessures ne laissaient aucune chance de survie et la mort allait survenir par suite de saignements, de l’arrêt cardiaque, de la perte de capacité à respirer ou d’une combinaison de ces mécanismes. La mort surviendrait en quelques secondes ou quelques minutes, en supposant que les blessures ont toutes été subies dans un bref laps de temps. De multiples projectiles à blindage de cuivre (20), des blindages de cuivre (3), des projectiles gris métallique déformés (3) et des fragments métalliques (3) ont été récupérés lors de l’autopsie. En raison du nombre de blessures ainsi que de la proximité immédiate et du chevauchement des plaies, dans de nombreux cas, il n’est pas possible d’associer avec certitude les blessures superficielles individuelles à des projectiles récupérés ou à des lésions d’organes internes.

Toutes les plaies des blessures par balle indiquaient un trajet de l’avant à l’arrière et de gauche à droite. Pour aucune des blessures par balle, il n’a été possible de déterminer la distance approximative entre le canon des pistolets et la surface du corps au moment des tirs. Rien d’autre n’a causé à la mort du plaignant ou n’y a contribué.

Le 20 septembre 2018, le médecin légiste a également précisé qu’aucune des blessures du plaignant ne devrait l’avoir neutralisé immédiatement et qu’il est possible que ce dernier ait continué de bouger après n’importe laquelle de ces blessures. Le médecin légiste a ensuite expliqué qu’une lésion du cœur ou à d’autres organes dans le torse n’arrêterait pas nécessairement immédiatement le cerveau et n’excluait pas la possibilité que la personne continue à bouger.

Le rapport de toxicologie indique la présence d’une petite quantité de médicaments sur ordonnance dans le corps du plaignant, dont aucun n’a causé sa mort ou n’y a contribué.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou photographiques

Le secteur de l’hôpital où l’incident a eu lieu n’est pas surveillé ni enregistré par vidéosurveillance. Aucune autre preuve vidéo, audio ou photographique n’a été trouvée.

Enregistrements des communications

Appel au 9-1-1

Le 28 octobre 2017, à 0 h 51, la TC no 6 a appelé le 9-1-1 pour signaler que la TC no 12 avait été touchée par un coup de feu. Alors qu’elle fournissait des précisions à l’opérateur, des agents de police sont arrivés sur place et ont trouvé le plaignant. Exactement deux minutes et 27 secondes après le début de l’appel, on entend la première série de tirs de la police sur l’enregistrement du 9-1-1. Cette première série dure trois secondes. Une accalmie, d’une durée de 3,51 secondes, s’ensuit pendant laquelle on n’entend aucun coup de feu. On entend ensuite une deuxième série de coups de feu qui dure trois secondes supplémentaires. Dix secondes se sont écoulées entre le premier et le dernier coup de feu.

L’UES a obtenu et analysé les enregistrements des communications de la police.

Éléments obtenus auprès du Service de police

L’UES a demandé les documents et éléments suivants au SPC, qu’elle a obtenus et examinés :

  • Sommaire du système de répartition assisté par ordinateur (RAO)
  • Enregistrements d’appel au 9-1-1
  • Enregistrements des communications radio de la police
  • Notes de l’AT no 1 et de l’AT no 2
  • Armes à feu acquises par la police – Programme canadien des armes à feu
  • Arme à feu acquise par un particulier – Programme canadien des armes à feu
  • Directive : Usage de la force
  • Procédure du SPC relative à l’analyse des troubles de l’ordre public en cas d’appel pour acte criminel]
  • Procédure du SPC relative aux infractions impliquant des armes à feu
  • Procédure du SPC relative à aux morts subites et à découverte de restes humains
  • Procédure du SPC relative aux homicides
  • Procédure du SPC relative aux contrevenants à risque élevé; et
  • Politique du SCP relative à l’usage de la force par armes à feu

L’UES a demandé les éléments et documents suivants à d’autres sources, qu’elle a obtenus et examinés :

  • Rapport d’examen et d’analyse judiciaire de téléphone cellulaire (ministère des Finances)
  • Rapports d’analyse d’ADN par le CSJ (x2)
  • Rapport sur des armes à feu par le CSJ (x2)
  • Rapport de toxicologie pour le plaignant par le CSJ
  • Messages textes du téléphone cellulaire du plaignant
  • Rapports du ministère des Finances sur l’examen et l’analyse du téléphone cellulaire du plaignant
  • Rapport d’événement rédigé par le service de sécurité de l’hôpital; et
  • Testament et procuration du plaignant et de la TC no12

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25 (1), Code criminel – Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :

  1. soit à titre de particulier
  2. soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
  3. soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
  4. soit en raison de ses fonctions

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

25 (3) Sous réserve des paragraphes (4) et (5), une personne n’est pas justifiée, pour l’application du paragraphe (1), d’employer la force avec l’intention de causer, ou de nature à causer la mort ou des lésions corporelles graves, à moins qu’elle n’estime, pour des motifs raisonnables, que cette force est nécessaire afin de se protéger elle-même ou de protéger toute autre personne sous sa protection, contre la mort ou contre des lésions corporelles graves.

Article 27, Code criminel – Recours à la force pour empêcher la perpétration d’une infraction

27 Toute personne est fondée à employer la force raisonnablement nécessaire :

  1. pour empêcher la perpétration d’une infraction :
    1. d’une part, pour laquelle, si elle était commise, la personne qui la commet pourrait être arrêtée sans mandat
    2. d’autre part, qui serait de nature à causer des blessures immédiates et graves à la personne ou des dégâts immédiats et graves aux biens de toute personne
  2. pour empêcher l’accomplissement de tout acte qui, à son avis, basé sur des motifs raisonnables, constituerait une infraction mentionnée à l’alinéa a)

Article 34, Code criminel – Défense – emploi ou menace d’emploi de la force

  1. (1)N’est pas coupable d’une infraction la personne qui, à la fois :
    1. croit, pour des motifs raisonnables, que la force est employée contre elle ou une autre personne ou qu’on menace de l’employer contre elle ou une autre personne
    2. commet l’acte constituant l’infraction dans le but de se défendre ou de se protéger — ou de défendre ou de protéger une autre personne — contre l’emploi ou la menace d’emploi de la force
    3. agit de façon raisonnable dans les circonstances

(2) Pour décider si la personne a agi de façon raisonnable dans les circonstances, le tribunal tient compte des faits pertinents dans la situation personnelle de la personne et celle des autres parties, de même que des faits pertinents de l’acte, ce qui comprend notamment les facteurs suivants :

  1. la nature de la force ou de la menace
  2. la mesure dans laquelle l’emploi de la force était imminent et l’existence d’autres moyens pour parer à son emploi éventuel
  3. le rôle joué par la personne lors de l’incident
  4. la question de savoir si les parties en cause ont utilisé ou menacé d’utiliser une arme
  5. la taille, l’âge, le sexe et les capacités physiques des parties en cause
  6. la nature, la durée et l’historique des rapports entre les parties en cause, notamment tout emploi ou toute menace d’emploi de la force avant l’incident, ainsi que la nature de cette force ou de cette menace
    1. f.1) l’historique des interactions ou communications entre les parties en cause;
  7. la nature et la proportionnalité de la réaction de la personne à l’emploi ou à la menace d’emploi de la force
  8. la question de savoir si la personne a agi en réaction à un emploi ou à une menace d’emploi de la force qu’elle savait légitime

Paragraphe 88 (1), Code criminel – Port d’arme dans un dessein dangereux

88 (1) Commet une infraction quiconque porte ou a en sa possession une arme, une imitation d’arme, un dispositif prohibé, des munitions ou des munitions prohibées dans un dessein dangereux pour la paix publique ou en vue de commettre une infraction.

Article 95, Code criminel – Possession d’une arme à feu prohibée ou à autorisation restreinte avec des munitions

95 (1) Sous réserve du paragraphe (3), commet une infraction quiconque a en sa possession dans un lieu quelconque soit une arme à feu prohibée ou une arme à feu à autorisation restreinte chargées, soit une telle arme non chargée avec des munitions facilement accessibles qui peuvent être utilisées avec celle-ci, sans être titulaire à la fois :

  1. d’une autorisation ou d’un permis qui l’y autorise dans ce lieu
  2. du certificat d’enregistrement de l’arme

(2) Quiconque commet l’infraction prévue au paragraphe (1) est coupable :

  1. soit d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de dix ans
  2. soit d’une infraction punissable, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, d’un emprisonnement maximal de un an

Article 222, Code criminel – Homicide

222 (1) Commet un homicide quiconque, directement ou indirectement, par quelque moyen, cause la mort d’un être humain.

(2) L’homicide est coupable ou non coupable.

(3) L’homicide non coupable ne constitue pas une infraction.

(4) L’homicide coupable est le meurtre, l’homicide involontaire coupable ou l’infanticide.

(5) Une personne commet un homicide coupable lorsqu’elle cause la mort d’un être humain :

  1. soit au moyen d’un acte illégal
  2. soit par négligence criminelle
  3. soit en portant cet être humain, par des menaces ou la crainte de quelque violence, ou par la supercherie, à faire quelque chose qui cause sa mort
  4. soit en effrayant volontairement cet être humain, dans le cas d’un enfant ou d’une personne malade

(6) Nonobstant les autres dispositions du présent article, une personne ne commet pas un homicide au sens de la présente loi, du seul fait qu’elle cause la mort d’un être humain en amenant, par de faux témoignages, la condamnation et la mort de cet être humain par sentence de la loi.

Article 229, Code criminel – Meurtre, homicide involontaire coupable et infanticide

229 L’homicide coupable est un meurtre dans l’un ou l’autre des cas suivants :

  1. la personne qui cause la mort d’un être humain :
    1. ou bien a l’intention de causer sa mort
    2. ou bien a l’intention de lui causer des lésions corporelles qu’elle sait être de nature à causer sa mort, et qu’il lui est indifférent que la mort s’ensuive ou non
  2. une personne, ayant l’intention de causer la mort d’un être humain ou ayant l’intention de lui causer des lésions corporelles qu’elle sait de nature à causer sa mort, et ne se souciant pas que la mort en résulte ou non, par accident ou erreur cause la mort d’un autre être humain, même si elle n’a pas l’intention de causer la mort ou des lésions corporelles à cet être humain
  3. une personne, pour une fin illégale, fait quelque chose qu’elle sait, ou devrait savoir, de nature à causer la mort et, conséquemment, cause la mort d’un être humain, même si elle désire atteindre son but sans causer la mort ou une lésion corporelle à qui que ce soit

Analyse et décision du directeur

Le plaignant et son épouse, la TC no 12, recevaient l’aide d’une préposée aux services de soutien à la personne (PSSP) à la suite de maladies et du déclin de leurs capacités liés à leur âge. Le 27 octobre 2017, la PSSP du plaignant et de la TC no 12, la TC no 17, s’est rendue à leur domicile où elle a trouvé la TC no 12 bouleversée, craignant que son mari ne soit suicidaire. En conséquence, la TC no 17 a contacté son superviseur et a finalement appelé le 9-1-1 pour que le plaignant et la TC no 12 soient transportés à l’hôpital afin d’y être évalués.

Avant de partir pour l’hôpital, le plaignant est retourné dans sa chambre, où il est resté seul pendant quelques minutes. Il a ensuite rencontré les ambulanciers paramédicaux qui l’ont placé sur une civière pour le transporter à l’hôpital. En présence de la TC no 17, le plaignant a déclaré à sa femme : [traduction] « J’ai été heureux avec toi pendant 46 ans et je t’aime, mais apparemment, 47 ans, ce n’était pas pour nous. » Lorsque la TC no 17 l’a rassuré en lui disant qu’ils allaient à l’hôpital, mais qu’ils n’y resteraient pas longtemps et que tout irait bien, le plaignant a répondu qu’il fallait bien finir par renoncer. Le plaignant a ensuite remercié la TC no 17 pour ses soins et son soutien et lui a fait ses adieux. Plus tard, à 21 h 27 (et pour la dernière fois), le plaignant a envoyé un texto à la TC no 17 de l’hôpital lui disant que c’était son dernier adieu.

Une fois à l’hôpital, le plaignant et la TC no 12 ont été placés dans la salle de triage 7 afin d’être examinés et leur état évalué par le premier médecin disponible. Les lumières de la pièce étaient éteintes et le rideau empêchait quiconque de voir ce qui se passait dans la pièce depuis le couloir. Vers 23 heures, une forte détonation a retenti dans la zone de triage, sans qu’on puisse identifier immédiatement sa provenance. À la recherche de l’origine de ce bruit, le personnel a trouvé la TC no 12 dans la salle de triage avec une blessure par balle au côté droit de la tête. Le plaignant était dans le lit adjacent, à environ deux pieds à droite de la TC no 12; une couverture dissimulait ses mains. Lorsqu’on lui a demandé ce qui s’était passé, le plaignant a dit au personnel que sa femme s’était tiré dessus; le plaignant a été décrit comme étant très calme lorsqu’il a fait cette déclaration au personnel de l’hôpital. Le personnel a alors appelé le 9-1-1 pour signaler l’incident, et deux agents du Service de police de Cobourg (SPC) sont arrivés à l’hôpital peu après, alors que l’appel au 9-1-1 était encore en cours.

Le personnel a immédiatement transporté la TC no 12 de la salle de triage à la salle de réanimation, afin de tenter de lui sauver la vie.footnote 4 Dans la salle de réanimation, on a retiré les couvertures de la TC no 12 pour rechercher l’arme à feu, mais on ne l’a trouvée ni sur la TC no 12, ni sur la civière. On a entendu une infirmière dire : « Elle n’a pas l’arme, c’est son mari qui a l’arme. »

L’AI no 1 et l’AI no 2 sont arrivés à ce moment-là dans la salle de réanimation, où on leur a dit que l’arme à feu était introuvable et que c’était sans doute le plaignant qui avait tiré sur sa femme. De nombreux témoins ont vu les deux agents de police se diriger rapidement vers la salle de triage où se trouvait toujours le plaignant; aucune des personnes présentes n’a vu l’un ou l’autre des deux agents dégainer son arme à feu ni tenir quoi que ce soit. Divers témoins ont décrit les agents comme étant calmes. Les deux agents étaient accompagnés par une infirmière, la TC no 3.

À son arrivée dans la chambre où se trouvait le plaignant, la TC no 3 a entendu un des agents demander au plaignant s’il avait une arme, puis répéter la question sur un ton qu’elle a décrit comme plus sévère. Le plaignant a alors admis qu’il avait effectivement une arme, tout en retirant la couverture de sa poitrine et en brandissant une arme à feu dans la main droite.

D’autres témoins ont entendu depuis l’extérieur de la pièce la voix d’un homme donner à plusieurs reprises l’ordre de lâcher l’arme.

La TC no 3 a vu le plaignant commencer à pointer l’arme en direction des agents; elle a ensuite entendu une dizaine de coups de feu dans la pièce et s’est enfuie en courant pour se mettre à l’abri.

Le TC no 13, un employé de l’hôpital qui a vu les deux agents décharger leurs armes à feu dans la salle de triage 7, a décrit l’un des policiers comme paraissant effrayé, craintif et comme forcé de faire quelque chose malgré lui. Le TC no 13 a également vu la décharge répétée de l’arme à feu du policier, décrivant une série de six à huit coups de feu successifs, sans pause, et le doigt de l’agent appuyant sur la gâchette à une vitesse étonnante.

Depuis l’endroit où elle se trouvait, dans la salle de réanimation, une ambulancière paramédicale, la TC no 16, a vu les deux policiers s’approcher de la chambre du plaignant et a entendu, environ 30 à 45 secondes plus tard, une série rapide de cinq ou six coups de feu, suivis d’une brève pause, puis d’une série de quatre à six coups de feu.

Lorsque la TC no 16 est entrée plus tard dans la salle de triage où se trouvait le plaignant, elle a vu une arme à feu posée sur une petite table médicale dans la pièce, à environ deux à trois pieds du lit du plaignant.

Après avoir constaté que les tentatives de réanimation de la TC n° 12 étaient en vain, le TC n° 5, un médecin, a déclaré son décès, puis s’est rendu dans la salle de triage 7 pour voir le plaignant, dont il a alors aussi déclaré le décès. Il a vu de nombreuses douilles par terre dans la pièce. Le TC n° 5 a précisé qu’alors qu’il était dans la salle de triage 7, il a entendu l’un des deux policiers dire que lorsqu’ils étaient entrés dans la salle, ils avaient demandé au plaignant où était le pistolet et que le plaignant avait répondu « Right here » [ici] en le sortant de sous la couverture. L’agent a fait la démonstration du mouvement en parlant au TC n° 5, indiquant que le plaignant avait utilisé sa main droite pour soulever le pistolet, du côté gauche de son abdomen.

Les investigations ultérieures ont révélé que l’AI no 1 et l’AI no 2 avaient déchargé leurs armes à feu 30 fois au total, l’AI no 1 ayant tiré 14 fois et l’AI no 2, 16 fois.

Les analyses ont montré que la balle extraite de la blessure mortelle à la tête de la TC n° 12 provenait de l’arme à feu en possession du plaignant.footnote 5 L’examen de l’arme à feu du plaignant a également révélé la présence de trois balles dans le chargeur, d’une balle dans la chambre et d’une balle éjectée par l’AI no 1 pour sécuriser l’arme à feu après la fusillade, soit au total les six balles correspondant à la capacité du chargeur de cette arme à feu.

L’autopsie a révélé 20 projectiles intacts et 7 fragments de projectiles dans le corps du plaignant. Selon le rapport d’autopsie, le décès du plaignant était attribuable à de multiples blessures au torse et nul autre facteur n’avait contribué à sa mort.

Dans son entrevue avec les enquêteurs de l’UES, l’AI no 2 a déclaré que le 27 octobre 2017, il travaillait en équipe avec l’AI no 1 et qu’ils roulaient dans leur véhicule près de l’hôpital Northumberland Hills (HNH) lorsqu’ils ont reçu un appel radio concernant une femme qui se serait tiré une balle dans la tête à l’urgence de l’hôpital. Les agents sont arrivés à l’entrée de l’urgence de l’hôpital dans la minute qui a suivi l’appel.

L’AI no 2 a déclaré que, lorsque l’AI no 1 et lui-même sont entrés dans le secteur de l’urgence, il a dégainé son arme à feu et l’a maintenue discrètement sur la hanche. Ils ont ensuite été dirigés vers la salle de réanimation où la TC no 3 leur a dit [traduction] « son mari (de la TC no 12) est dans la dernière salle au fond du couloir et nous n’avons pas trouvé d’arme ». L’AI no 2 a indiqué que c’était la première fois qu’il entendait parler de la présence du mari. Les deux agents se sont ensuite rapidement rendus à la salle de triage no 7.

Arrivé à la salle de triage, l’AI no 2 a constaté que la pièce était bien éclairée, mais que le rideau était tiré, ce qui limitait la visibilité sur l’intérieur de la pièce. L’AI no 2 pensait que la situation était semblable à celle d’un « tireur actif » pour laquelle il avait reçu une formation, et il craignait que si le plaignant avait tiré sur sa femme, il serait peut-être prêt à tirer sur quiconque entrerait dans la pièce.

L’AI no 2 est entré en premier dans la pièce et a immédiatement pointé son arme à feu sur le plaignant, qui était allongé sur le lit. L’AI no 2 lui a clairement demandé : [traduction] « Où est l’arme, où est l’arme? » tout en observant qu’une couverture recouvrait le plaignant jusqu’à la poitrine.

L’AI no 2 a ensuite vu le plaignant retirer la couverture de la main gauche, tout en brandissant simultanément une arme de poing dans la main droite et la pointant directement sur l’AI no 2. L’AI no 2 qui, selon sa description, faisait maintenant face directement au canon de l’arme à feu brandie par le plaignant, a continué à se déplacer sur sa droite tout en tirant huit à dix coups de feu avec son arme de service, visant le centre du corps du plaignant. L’AI no 1 a déchargé simultanément sa propre arme de poing sur le plaignant.

Selon la description donnée par l’AI no 2, il y a eu ensuite une brève accalmie dans le tir et comme il ne pouvait plus voir l’arme à feu du plaignant, l’AI no 2 a demandé à l’AI no 1 si la menace était passée. Toutefois, il a ensuite remarqué que le plaignant tremblait ou était agité de secousses sous la couverture et comme l’arme à feu du plaignant n’était plus visible, l’AI no 1 et l’AI no 2 ont tiré de nouveau sur le plaignant.footnote 6 L’AI no 2 a ensuite effectué un rechargement d’urgence de son arme à feu, laissant tomber le chargeur vide par terre. Après avoir rechargé son arme, l’AI no 2 a noté que le plaignant ne bougeait plus; il s’est donc tenu en retrait et n’a plus fait feu, même s’il n’était pas encore convaincu que la menace soit entièrement éliminée.

Sous le couvert de l’AI no 2, l’AI no 1 a enfilé des gants de latex et s’est approché du lit. L’AI no 1 a tiré la couverture qui recouvrait le plaignant et a repéré l’arme de poing sur le côté gauche du plaignant. L’AI no 1 a actionné la glissière du pistolet une fois, éjectant une balle, puis a placé l’arme à feu et la balle éjectée sur une table basse près du pied du lit. Le répartiteur a alors été averti.

L’AI no 2 a précisé qu’il n’était pas en possession d’une arme à impulsions (AI) au moment de l’incident et qu’il n’avait pas suivi de formation sur l’utilisation d’une AI.

Il a ajouté qu’à son avis, comme l’AI no 1 et lui-même ignoraient les intentions du plaignant et qu’ils devaient l’empêcher de tirer sur l’un d’eux, sur le personnel de l’hôpital ainsi que sur des patients ou des visiteurs, le recours à la force létale était la seule option appropriée dans les circonstances.

L’AT no 2 a déclaré que, dès son arrivée à l’hôpital, il avait immédiatement séparé les deux policiers et que l’AI no 2 lui avait dit qu’il s’était rendu à l’hôpital avec l’AI no 1 en réponse à un appel radio signalant qu’une femme s’était blessée avec une arme à feu à l’urgence de l’hôpital. L’AI no 2 lui a dit qu’ils avaient ensuite appris que le personnel de l’hôpital n’avait pas été en mesure de retrouver l’arme à feu et les avait dirigés, lui-même et l’AI no 1, vers la salle de triage où se trouvait toujours le plaignant et où avait eu lieu le tir. Lorsque l’AI no 1 et l’AI no 2 sont arrivés dans la pièce où se trouvait le plaignant, l’AI no 2 a crié au plaignant : [traduction] « Où est l’arme? Où est l’arme? » à la suite de quoi le plaignant a levé les bras et a pointé une arme à feu sur eux. Les deux agents ont réagi en déchargeant leurs pistolets de service sur le plaignant.

Un examen de l’enregistrement du 9-1-1 révèle que, tandis qu’une infirmière était toujours au téléphone et donnait des détails à l’opérateur du 9-1-1, les deux agents sont arrivés à l’hôpital et, exactement deux minutes et 27 secondes après le début de l’appel, on entend dans l’enregistrement une première série de coups de feu, d’une durée de trois secondes, suivie d’une pause de 3,51 secondes, puis d’une seconde série de tirs de trois secondes supplémentaires. Dix secondes se sont écoulées entre le premier tir et le dernier tir des policiers.footnote 7

En vertu du par. 25 (1) du Code criminel, un agent de police, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, est fondé de recourir à toute la force nécessaire pour exécuter un devoir légitime. En outre, conformément au paragraphe 3 :

(3) Sous réserve des paragraphes (4) et (5), une personne n’est pas justifiée, pour l’application du paragraphe (1), d’employer la force avec l’intention de causer, ou de nature à causer la mort ou des lésions corporelles graves, à moins qu’elle n’estime, pour des motifs raisonnables, que cette force est nécessaire afin de se protéger elle-même ou de protéger toute autre personne sous sa protection, contre la mort ou contre des lésions corporelles graves.

Par conséquent, pour que l’AI no 2 et l’AI no 1 puissent bénéficier d’une protection en vertu de l’article 25, il doit être établi qu’ils exerçaient un devoir légitime, qu’ils agissaient pour des motifs raisonnables et qu’ils n’ont pas utilisé plus de force que nécessaire. En outre, conformément au paragraphe 3, en cas de mort ou de lésions corporelles graves, il doit être établi que les agents de la police ont agi ainsi en ayant des motifs raisonnables de croire que c’était nécessaire pour se protéger eux-mêmes ou pour protéger d’autres personnes contre la mort ou contre des lésions corporelles graves.

Pour commencer, en ce qui concerne la légalité de l’arrestation du plaignant, il ressort clairement de l’appel au 9-1-1 et des déclarations des témoins civils qu’il existait des motifs raisonnables de croire que le plaignant était en possession d’une arme à feu et venait peut-être de tuer sa femme. Les agents de police avaient donc des motifs raisonnables d’arrêter le plaignant pour port d’arme dans un dessein dangereux (article 88 du Code criminel), possession d’une arme à feu prohibée ou à autorisation restreinte avec des munitions (article 95) et meurtre (article 229,) en plus de nombreuses autres infractions liées à la possession d’une arme à feu sans permis approprié. L’appréhension et l’arrestation du plaignant étaient donc légalement justifiées dans les circonstances.

En ce qui concerne les autres exigences visées par les paragraphes 25 (1) et 25 (3), je garde à l’esprit l’état du droit applicable tel qu’il a été énoncé par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt R. c. Nasogaluak, [2010] 1 R.C.S. 206 :

Les actes des policiers ne devraient pas être jugés au regard d’une norme de perfection. Il ne faut pas oublier que ceux‑ci accomplissent un travail exigeant et dangereux et qu’ils doivent souvent réagir rapidement à des situations urgentes. Leurs actes doivent alors être appréciés selon ce que commande ce contexte difficile. Comme le juge Anderson l’explique dans R. c. Bottrell (1981), 1981 CanLII 339 (BC CA), 60 C.C.C. (2d) 211 (C.A.C.‑B.) :

[traduction] Pour déterminer si la force employée par le policier était nécessaire, les jurés doivent tenir compte des circonstances dans lesquelles le policier y a eu recours. Il aurait fallu leur indiquer qu’on ne pouvait s’attendre à ce que l’appelant mesure la force appliquée avec précision. [p. 218]

La Cour décrit comme suit le critère requis en vertu de l’article 25 :

Le paragraphe 25(1) indique essentiellement qu’un policier est fondé à utiliser la force pour effectuer une arrestation légale, pourvu qu’il agisse sur la foi de motifs raisonnables et probables et qu’il utilise seulement la force nécessaire dans les circonstances. Mais l’examen de la question ne s’arrête pas là. Le paragraphe 25(3) précise qu’il est interdit au policier d’utiliser une trop grande force, c’est‑à‑dire une force susceptible de causer la mort ou des lésions corporelles graves ou visant un tel but, à moins qu’il ne croie que cette force est nécessaire afin de le protéger ou de protéger toute autre personne sous sa protection contre de telles conséquences. La croyance du policier doit rester objectivement raisonnable. Par conséquent, le recours à la force visé au par. 25(3) doit être examiné à la lumière de motifs subjectifs et objectifs (Chartier c. Greaves, [2001] O.J. No. 634 (QL) (C.S.J.), par. 59).

La décision rendue par le juge Power de la Cour supérieure de justice de l’Ontario dans Chartier c. Greaves [2001] O.J. No. 634, telle qu’elle a été adoptée par la Cour suprême du Canada, énonce d’autres dispositions pertinentes du Code criminel à prendre en considération, à savoir : [traduction]

  1. Recours à la force pour empêcher la perpétration d’une infraction - Toute personne est fondée à employer la force raisonnablement nécessaire :
    1. pour empêcher la perpétration d’une infraction :
      1. d’une part, pour laquelle, si elle était commise, la personne qui la commet pourrait être arrêtée sans mandat
      2. d’autre part, qui serait de nature à causer des blessures immédiates et graves à la personne ou des dégâts immédiats et graves aux biens de toute personne
    2. pour empêcher l’accomplissement de tout acte qui, à son avis, basé sur des motifs raisonnables, constituerait une infraction mentionnée à l’alinéa a)

[Traduction] Cet article autorise donc le recours à la force pour empêcher la perpétration de certaines infractions. « Toute personne » inclurait un agent de police. La force ne doit pas dépasser ce qui est raisonnablement nécessaire. Par conséquent, un critère objectif est requis. Dans l’arrêt Scopelliti (1981), 63 C.C.C. (2d) 481, la Cour d’appel de l’Ontario a statué que le recours à la force létale ne pouvait être justifié que dans les cas de légitime défense ou pour empêcher la perpétration d’un crime susceptible de causer des blessures immédiates et graves.

34 (1) Légitime défense contre une attaque sans provocation - Toute personne illégalement attaquée sans provocation de sa part est fondée à employer la force qui est nécessaire pour repousser l’attaque si, en ce faisant, elle n’a pas l’intention de causer la mort ni des lésions corporelles graves.

  1. Mesure de la justification – Quiconque est illégalement attaqué et cause la mort ou une lésion corporelle grave en repoussant l’attaque est justifié si :
  2. d’une part, il la cause parce qu’il a des motifs raisonnables pour appréhender que la mort ou quelque lésion corporelle grave ne résulte de la violence avec laquelle l’attaque a en premier lieu été faite, ou avec laquelle l’assaillant poursuit son dessein
  3. d’autre part, il croit, pour des motifs raisonnables, qu’il ne peut pas autrement se soustraire à la mort ou à des lésions corporelles graves

[traduction] Pour invoquer la défense au titre du paragraphe (2) de l’article 34, un agent de police devrait démontrer qu’il a été attaqué illégalement et qu’il a causé la mort ou des lésions corporelles graves à l’agresseur en repoussant l’attaque. L’agent de police doit démontrer qu’il avait des motifs raisonnables de craindre de risquer de mourir ou d’être grièvement blessé et qu’il croyait, là encore pour des motifs raisonnables, qu’il ne pourrait pas autrement se soustraire à la mort ou à des lésions corporelles graves. Là encore, l’utilisation du terme « raisonnable » nécessite l’application d’un critère objectif.

En outre, la cour énonce un certain nombre d’autres principes juridiques tirés des précédents juridiques cités, dont les suivants : [traduction]

  1. Quel que soit l’article du Code criminel utilisé pour évaluer les actes de la police, la Cour doit tenir compte du degré de force qui était nécessaire compte tenu des circonstances entourant l’événement en cause
  2. « Il faut tenir compte dans une certaine mesure du fait qu’un agent, dans les exigences du moment, peut se méprendre sur le degré de force nécessaire pour maîtriser un prisonnier. » Il en va de même pour le recours à la force pour procéder à une arrestation ou empêcher une évasion. À l’instar du conducteur d’un véhicule confronté à une urgence soudaine, le policier « ne saurait être tenu de satisfaire à une norme de conduite dont on aura ultérieurement déterminé, dans la quiétude d’une salle d’audience, qu’elle constituait la meilleure méthode d’intervention » (Foster c. Pawsey) Autrement dit : c’est une chose que d’avoir le temps, dans un procès s’étalant sur plusieurs jours, de reconstituer et d’examiner les événements survenus le soir du 14 août, mais ç’en est une autre que d’être un policier face à une situation d’urgence ayant le devoir d’agir et disposant de très peu de temps pour analyser minutieusement la signification des événements ou réfléchir calmement aux décisions à prendre (Berntt c. Vancouver)
  3. Les policiers exercent une fonction essentielle dans des circonstances parfois difficiles et souvent dangereuses. Ils ne doivent pas être indûment entravés dans l’exécution de cette obligation. Les policiers doivent fréquemment agir rapidement et réagir à des situations urgentes qui surviennent soudainement. Il faut donc considérer leurs actes à la lumière des circonstances
  4. « Il est à la fois déraisonnable et irréaliste d’imposer à la police l’obligation de n’employer que le minimum de force susceptible de permettre d’atteindre son objectif. Il en résulterait un danger inutile pour eux-mêmes et pour autrui. En pareilles situations, les policiers sont fondés à agir et exonérés de toute responsabilité s’ils n’emploient pas plus que la force qui est nécessaire en se fondant sur leur évaluation raisonnable des circonstances et des dangers dans lesquels ils se trouvent »(Levesque c. Zanibbi et al.)

En me fondant sur les principes de droit qui précèdent, je dois déterminer si l’AI no 2 et l’AI no 1 :

  1. croyaient subjectivement qu’eux-mêmes ou d’autres personnes risquaient d’être tués ou grièvement blessés par le plaignant au moment où ils ont déchargé leurs armes à feu; et
  2. si cette conviction était objectivement raisonnable, ou, autrement dit, si leurs actes seraient jugés raisonnables par un observateur objectif disposant de tous les renseignements à la disposition des agents lorsqu’ils ont déchargé leurs armes à feu

Pour ce qui est du premier de ces critères, il ressort clairement de la déclaration de l’AI no 2 qu’il croyait qu’il risquait de mourir ou d’être grièvement blessé lorsqu’il a fait feu. Sa conviction était fondée sur ses observations durant l’incident, à savoir : le plaignant avait un pistolet pointé sur les policiers; de nombreux témoins avaient déjà signalé qu’il y avait des motifs raisonnables de croire que le plaignant s’était servi de l’arme pour tuer sa femme; le plaignant savait que des policiers étaient sur place, mais avait refusé d’obéir à l’ordre de déposer son arme, et le plaignant pointait maintenant son arme sur les policiers, après avoir prouvé qu’il était parfaitement capable de faire feu pour tuer quelqu’un.

En outre, l’AI no 2 a déclaré qu’il a pris en compte le fait que l’incident se déroulait à un endroit où se trouvaient de nombreux civils et du personnel médical et que, par conséquent, le plaignant mettait en danger non seulement la vie des deux policiers, mais aussi de nombreuses autres personnes. Il existe donc une preuve abondante pour répondre à la question 1 par l’affirmative, à savoir qu’au moment où il a fait feu, l’AI no 2 croyait raisonnablement que lui-même et d’autres personnes risquaient d’être tués ou blessés grièvement par le plaignant.

Bien que l’AI no 1 n’ait pas fourni de déclaration aux enquêteurs de l’UES, il est raisonnable de déduire, à partir des éléments de preuve, qu’il éprouvait les mêmes craintes que l’AI no 2, puisqu’il était dans la même situation et disposait des mêmes renseignements que lui.

En passant à la deuxième question, à savoir s’il existait ou non des motifs objectivement raisonnables de croire que l’AI no 1 et l’AI no 2, ou toute autre personne sous leur protection, risquaient d’être tués ou grièvement blessés par le plaignant, il suffit de se référer aux observations de la seule personne qui était avec les agents de police juste avant qu’ils ne fassent feu, soit la TC no 3, qui a été le témoin direct des actes du plaignant. La TC no 3 a indiqué avoir entendu un des agents demander à deux reprises au plaignant s’il avait une arme, avant que le plaignant ne réponde par l’affirmative puis pointe l’arme vers le haut, après quoi elle a entendu le premier des coups de feu tirés par les deux agents. Elle a également indiqué qu’elle était sortie de la pièce en courant pour se mettre à l’abri.footnote 8

De plus, selon le témoignage d’une autre infirmière, la TC no 23, ainsi que celui des TC no 1, TC no 8 et TC no 24, l’AI no 1 ou l’AI no 2, ou les deux, ont crié à plusieurs reprises au plaignant de lâcher son arme, ce qu’il a refusé de faire. Il apparaît donc clairement que les deux agents impliqués n’ont pas immédiatement utilisé leurs armes à feu, mais qu’ils ont tenté d’abord de régler la situation sans recourir à la force létale. Le plaignant a toutefois refusé de coopérer.

Après avoir examiné de manière approfondie toutes les preuves et la législation relative à la justification du recours à la force dans le but de causer la mort ou des lésions corporelles graves lorsqu’on estime raisonnablement que c’est nécessaire pour se protéger soi-même ou pour protéger un tiers de la mort ou de lésions corporelles graves, je conclus que, dans toutes les circonstances, l’AI no 2 et l’AI no 1 croyaient que le plaignant mettait en danger leur vie et celles du personnel de l’hôpital et des civils qui se trouvaient à proximité, et je conclus que cette crainte était objectivement raisonnable et, par conséquent, que leurs actes, lorsqu’ils ont fait feu sur le plaignant, étaient justifiés. J’estime qu’il aurait été insensé et imprudent de la part de ces deux agents de police de mettre leur vie en danger en attendant de savoir si le plaignant tirerait un autre coup de feu avec l’arme qu’il détenait, arme qui était clairement en état de fonctionner puisque, d’après ce qu’on leur avait dit, elle avait déjà été utilisée pour tuer la TC no 12 et avec laquelle le plaignant visait maintenant les agents. Ce n’était pas un risque que l’AI no 1 et l’AI no 2 auraient dû prendre alors qu’ils risquaient de se faire tirer dessus par un homme qui, de toute évidence, était armé et présentait un danger imminent pour les deux policiers et pour les personnes sous leur protection, et qui avait clairement la volonté et la capacité de faire feu et de tuer, comme le prouvait la mort de la TC no 12.

En concluant que l’AI no 1 et l’AI no 2 étaient fondés de faire feu sur le plaignant, causant sa mort, je me référerai de nouveau à l’arrêt de la Cour suprême du Canada cité ci-dessus, qui est particulièrement pertinent dans cette affaire, à savoir qu’« il ne faut pas oublier que les agents de police accomplissent un travail exigeant et dangereux et qu’ils doivent souvent réagir rapidement à des situations urgentes. Leurs actes doivent alors être appréciés selon ce que commande ce contexte difficile. »

Par conséquent, au vu du présent dossier, j’en conclus que les coups de feu qui ont été tirés, dont plus de 20 ont frappé et finalement tué le plaignant, étaient justifiés au regard des paragraphes 25 (1) et (3) du Code criminel, et que l’AI no 1 et l’AI no 2, pour se protéger eux-mêmes et protéger d’autres personnes contre la mort ou contre des lésions corporelles graves que le plaignant pourrait leur infliger, n’ont pas utilisé plus de force qu’il n’était nécessaire pour exercer une fonction légitime. De ce fait, je n’ai pas de motifs raisonnables de croire que les actes de l’AI no 1 et de l’AI no 2 sont sortis des limites prescrites par le droit pénal et je conclus plutôt qu’il n’y a aucun motif de porter des accusations criminelles dans cette affaire.

Date : 26 septembre 2018

Original signé par

Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales