Message du président du comité consultatif ontarien de la relance du marché du travail

À titre de président et au nom du Comité consultatif ontarien de la relance du marché du travail, je suis heureux de présenter le rapport sur l’avenir du travail en Ontario.

Les questions abordées dans le présent rapport sont essentielles pour déterminer le niveau et la qualité de vie de la population de l’Ontario pour les années à venir. Ces questions touchent les tendances de l’évolution technologique, les effets de la pandémie de COVID‑19 et la relance du marché du travail. Nous avons examiné les points de vue des nombreux travailleurs, entreprises, parties prenantes, universitaires et représentants syndicaux qui se sont manifestés et avons entrepris un processus de consultation exhaustif que nous décrivons dans notre rapport.

Nous remercions les quelque 700 personnes et organisations qui ont fourni leur avis de vive voix et par écrit à l’étape de consultation des travaux du comité. L’objectif de ce comité était de fournir une expertise, d’écouter et d’apprendre. Grâce aux contributions des participants, ces trois objectifs ont pu être atteints. Notre rapport n’aurait pas vu le jour sans les points de vue divers, sages et sincères que nous avons ainsi pu recueillir.

Le comité remercie tout particulièrement Monte McNaughton, ministre du Travail, de la Formation et du Développement des compétences, d’avoir entrepris cet exercice crucial et de nous avoir offert son appui indéfectible à toutes les étapes du travail.

Le personnel de son bureau, plus précisément Alexandra Rodgers, directrice des politiques, Vladislav Yakovlyev, conseiller principal en politiques et Kofi Yeboah, stagiaire en analyse des politiques, ont été remarquablement ouverts et patients, interagissant avec nous et répondant aux demandes du comité de manière compétente et avec bonne humeur. Nous remercions les représentants du ministère, en particulier David Beaulieu, sous-ministre adjoint, Division des politiques stratégiques et David Carter-Whitney, sous-ministre adjoint, Division des politiques et des innovations relatives à la main-d’œuvre, tous deux du ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences. Avec leurs équipes, ils ont fourni au comité d’excellentes séances d’information techniques et opérationnelles à l’amorce de notre travail et ont répondu avec diligence à nos questions subséquentes.

À l’origine, Susan McArthur était présidente du Comité consultatif ontarien de la relance du marché du travail. Le travail de sa secrétaire pour mettre sur pied le comité, en déterminer la structure et l’orientation et diriger les premières étapes formatrices a su nous guider jusqu’à la fin de notre mandat.

Enfin, nous remercions l’équipe d’Ipsos pour son aide à la recherche dans le cadre du présent rapport, pour l’organisation des consultations publiques et pour l’ébauche et la production du rapport lui-même.

Tout en reconnaissant l’apport de toutes les parties susmentionnées, les opinions exprimées dans le présent rapport, de même que toute erreur ou omission éventuelle, relèvent exclusivement du comité.

Rohinton P. Medhora, Président

Comité Consultatif Ontarien de la Relance du Marché du Travail

L’évolution de la main-d’œuvre et la COVID-19

Le monde du travail évolue depuis des décennies, mais aucun événement n’a autant accéléré ces changements que la pandémie de COVID‑19. La main-d’œuvre mondiale a été transformée en peu de temps, car de nombreux travailleurs de l’Ontario se sont soudainement retrouvés à travailler de chez eux, l’une des plus importantes transitions de tous les temps en matière de travail à distance.

Selon un document de Statistique Canada, on estime qu’en janvier 2021, 32 % des employés canadiens âgés de 15 à 69 ans travaillaient principalement depuis leur domicile. En 2016, ce chiffre n’était que de 4 %.

Maintenant que nous émergeons de la pandémie de COVID‑19, le moment est venu de revoir et de moderniser les lois régissant le travail et les programmes de soutien aux différents types de travailleurs.

Lorsque la COVID‑19 a frappé, la population canadienne a rapidement compris à quel point certains travailleurs sont indispensables – les messagers, les commis d’épicerie et le personnel de santé de première ligne – pour nous procurer les biens et les services dont nous avons besoin. Parallèlement, les travailleurs essentiels ont dû affronter de nouveaux défis, comme la possibilité de tomber malade simplement en se rendant au travail. Dans d’autres secteurs, un grand nombre de personnes ont perdu leur emploi ou ont dû se rabattre sur des emplois précaires pour joindre les deux bouts, malgré une aide généreuse du gouvernement.

La pandémie a également entraîné une transformation technologique rapide, car nous avons dû nous habituer à la vidéoconférence pour l’école, les rendez-vous médicaux, les réunions et les rassemblements sociaux. En fait, toutes les consultations et tous les échanges avec les parties prenantes entrepris dans le cadre du présent rapport se sont faits à distance. Même les membres du Comité consultatif ontarien de la relance du marché du travail se sont uniquement réunis de façon virtuelle.

L’Ontario a également subi un choc de chômage. Bien que l’aide gouvernementale ait contribué à atténuer certains des effets les plus graves de la pandémie, beaucoup de gens se sont retrouvés sans travail, et certains ont aussi soudainement perdu leur sentiment d’identité et leur moyen d’interagir avec les autres. Statistique Canada montre qu’au début de la pandémie, le taux de chômage de l’Ontario a dépassé 10 % avant de commencer progressivement à se rétablir.

Graphique : au début de la pandémie, le taux de chômage de l’Ontario a dépassé 10 % avant de commencer progressivement à se rétablir.

Taux de chômage et variation mensuelle (en milliers)

Source : Octobre 2021, Statistique Canada

Pour les personnes toujours en emploi, la COVID‑19 a entraîné une réévaluation de la suite des choses. Certaines personnes quittent leur emploi et optent pour des changements radicaux de carrière. Selon une étude Ipsos, la pandémie pourrait conduire à une « grande démission ». Un article de Forbes publié en mai 2021 soulignait que de nombreux employés envisageaient un changement d’emploi après la pandémie, tandis qu’un rapport de McKinsey and Company sur l’avenir du travail daté de février 2021 suggérait que « les emplois où la proximité physique est plus importante sont susceptibles d’être les plus perturbés ».

En septembre 2021, le taux de chômage de l’Ontario atteignait 7,3 %. Les jeunes hommes (âgés de 15 à 24 ans) ont été durement touchés par la pandémie, avec un taux de chômage de 15,3 %. Bien que certains secteurs, comme l’information, la culture et les loisirs, aient commencé à relancer leurs activités, les travailleurs des secteurs les plus touchés, comme l’hébergement et les services alimentaires, l’agriculture, le commerce de gros et le commerce de détail, restent confrontés à l’incertitude en matière d’emploi.

Variation mensuelle de l’emploi selon l’industrie en Ontario (%)
IndustrieVariation mensuelle de l’emploi
Information, culture et loisirs33,8 %
Finances, assurances et immobilier20,1 %
Services professionnels, scientifiques et techniques18,2 %
Administrations publiques15,6 %
Soins de santé et aide sociale9,1 %
Transport et entreposage8,9 %
Services d’enseignement4,4 %
Services aux entreprises, services relatifs aux bâtiments et autres services de soutien2,0 %
Foresterie, pêche, mines, exploitation en carrière, et extraction de pétrole et de gaz1,6 %
Services publics-0,4 %
Construction-0,5 %
Fabrication-5,3 %
Commerce de gros et de détail-5,5 %
Agriculture-6,0 %
Autres services (sauf les administrations publiques)-7,5 %
Services d’hébergement et de restauration-15,2 %

Pour d’autres, la COVID‑19 a entraîné un report de la retraite. Une enquête Ipsos réalisée en septembre 2021 pour l’Institut canadien des actuaires a révélé que près d’un quart (23 %) des travailleurs canadiens interrogés déclarent un report de leur retraite ou de celle de leur partenaire.

Selon une enquête distincte menée par Placements Mackenzie, près de 4 % travailleurs canadiens sur 10 éprouvent des doutes quant au montant que leur fournira leur revenu de retraite. Bien que tout le monde ait dû surmonter des défis en raison de la COVID‑19, la pandémie n’a pas été une expérience uniforme pour l’ensemble des travailleurs.

Pour la population ontarienne, le problème est clair et presque tous croient que la province a besoin de meilleurs programmes de soutien à la main-d’œuvre et avantages sociaux pour l’ensemble des travailleurs. Quatre personnes sur cinq (80 %) croient que des mesures de soutien plus importantes sont nécessaires, et non que les mesures et les avantages actuels sont suffisants (20 %). Seule une faible majorité (54 %) a indiqué que, pour les employeurs, l’Ontario est l’un des meilleurs endroits en Amérique du Nord pour trouver du personnel.

Un système de soins de santé de qualité supérieure (92 %), un système d’éducation de qualité supérieure (89 %) et des mesures incitatives pour l’apprentissage continu et le perfectionnement professionnel (86 %) sont considérés comme les plus importants éléments sur lesquels le gouvernement devrait se concentrer pour faire de l’Ontario le meilleur endroit où travailler.

L’Ontario est considéré comme un candidat de premier plan sur le marché mondial de l’emploi et est un excellent lieu de travail. Malgré les obstacles érigés par la pandémie, la province s’appuie sur des bases déjà très solides.

La technologie et les tendances de l’emploi en effervescence demandent que l’on s’attarde aux modèles de formation et aux politiques en matière d’emploi pour veiller à ce que l’Ontario demeure une destination de choix.

Comme la nature du travail a changé, il devient clair que les lois régissant le travail et les programmes de soutien aux travailleurs devront être revus. C’est pourquoi le gouvernement de l’Ontario, par l’intermédiaire du ministre du Travail, de la Formation et du Développement des compétences, Monte McNaughton a convoqué un comité consultatif sur l’avenir du travail.

Le comité consultatif

En juin 2021, le ministre McNaughton a annoncé la création du Comité consultatif ontarien de la relance du marché du travail et lui a demandé de réaliser un tracé de l’avenir du travail dans ce monde post-pandémique. Il a par la suite publié dans le National Post du 17 juin 2021 une lettre d’opinion décrivant sa vision de notre travail en tant que comité.

Auparavant, nous nous efforcions de trouver un équilibre entre notre vie professionnelle et notre vie personnelle. Ces frontières nettes n’existent plus.

Les anciens modèles et modes de pensée de part et d’autre du fossé idéologique ne sont plus tout à fait adaptés. Les partisans de gauche croient que le gouvernement devrait tout faire. Les partisans de droite croient que le gouvernement ne devrait rien faire. Pour ma part, je crois que le gouvernement devrait donner un coup de main aux gens et partager plus équitablement et plus largement les occasions.

Monte McNaughton, ministre du Travail, de la Formation et du Développement des compétences de l’Ontario

Le comité consultatif a été nommé par le ministre McNaughton et a pour mandat de formuler des recommandations sur les principaux domaines d’intérêt :

  1. Reprise économique : Comment faire en sorte que l’Ontario devienne la destination par excellence où trouver une main- d’œuvre et un bassin de talents de calibre mondial?

  2. Renforcement de la position concurrentielle de l’Ontario : Dans une économie de plus en plus périphérique, mondiale et évoluée sur le plan technologique, comment ferons-nous pour que l’Ontario demeure le meilleur endroit en Amérique du Nord pour recruter, maintenir en poste et récompenser les travailleurs?

  3. Soutien des travailleurs : Comment nous assurerons-nous d’offrir souplesse, contrôle et sécurité aux travailleurs de plateforme technologique de l’Ontario?

Le mandat du comité indiquait que « la pandémie de COVID‑19 a entraîné une perturbation sans précédent du marché du travail qui a modifié de façon irréversible les modalités de travail ». Le comité s’est fixé pour objectif de s’attaquer à ces changements et de présenter des recommandations sur la meilleure façon de garantir l’avenir du travail en Ontario.

On nous a demandé, en tant que comité consultatif, de fournir au gouvernement une voie à suivre, comprenant des recommandations claires et concrètes, dans la veine des trois domaines d’intérêt définis par le ministre McNaughton. Notre travail a été soutenu par Ipsos et une équipe de fonctionnaires dévoués au ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences. Nous avons fait appel à un large éventail d’expériences et d’expertises dans notre travail, notamment dans les domaines du droit du travail, de la gouvernance, du milieu universitaire et du capital de risque :

  • Mark Beckles est vice-président, Innovation et impact sociaux auprès de Citoyenneté d’entreprise RBC et compte plus de 25 ans d’expérience dans le domaine des services financiers, en plus d’avoir une grande expérience des conseils d’administration.
  • Vasiliki (Vass) Bednar est directrice générale du programme Masters of Public Policy in Digital Society de l’Université McMaster, membre du Forum des politiques publiques et experte des structures de réglementation nécessaires pour se préparer à l’avenir du travail.
  • Kathryn Marshall est avocate spécialisée en droit du travail. Son cabinet, situé à Toronto, est spécialisé dans le droit du travail et le contentieux des affaires civiles. Mme Marshall possède une expérience des questions d’emploi complexes mettant en cause les communautés autochtones, les fonctionnaires, le personnel politique et le personnel syndiqué.
  • Susan McArthur est directrice d’entreprise, investisseuse en capital- risque et banquière d’affaires. Auparavant, Mme McArthur était associée directrice pour GreenSoil Investments, une société de capital de risque axée sur l’investissement dans les technologies immobilière et agroalimentaire.
  • Rohinton P. Medhora est président du Centre pour l’innovation dans la gouvernance internationale à Waterloo, en Ontario, et président du Comité consultatif ontarien de la relance du marché du travail.
  • M. Rohinton siège à plusieurs conseils, dont la Commission on Global.
  • Mark Quail est avocat en pratique privée à Toronto, dans les domaines du divertissement et des technologies. L’esprit d’entreprise de M. Quail l’a amené à la création et à la gestion de nombreuses maisons de disques, d’une société d’administration d’édition musicale et d’une société d’applications.
  • Sean Speer est professeur adjoint en politique publique à la Munk School of Global Affairs and Public Policy de l’Université de Toronto. Il est également codirecteur du projet Ontario 360 à l’école Munk et boursier de la Banque Scotia au Forum des politiques publiques.

Un processus de mobilisation complet

Pour éclairer notre travail, nous avons examiné un large éventail de points de vue provenant de résidents, de travailleurs, de groupes travaillistes, de parties prenantes, d’experts et d’organisations de l’Ontario, du Canada et de l’étranger. Nous nous sommes entretenus avec différents types de travailleurs, notamment des travailleurs à la demande ou travailleurs de plateforme technologique, ce qui comprend les chauffeurs travaillant pour des entreprises de covoiturage ou de messagerie. Dans le présent rapport, « travailleur à la demande » s’entend d’une personne susceptible d’utiliser une application numérique pour réserver des tâches comme la livraison de nourriture, et non d’un journaliste qui accepte à la pige des contrats de rédaction.

Notre objectif comportait deux volets : cerner les principaux problèmes se posant à l’avenir du travail et nous renseigner auprès du plus grand nombre possible de personnes et d’organisations. Les enjeux abordés se sont avérés complexes et variés, et il ne semble pas y avoir de consensus sur la manière de les aborder. Il nous fallait obtenir l’avis de toutes les parties sur l’avenir du travail. Nous avons décrit en détail ci- dessous notre processus de mobilisation, qui s’est déroulé entre juin et septembre 2021.

Observations écrites

Le ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences a accepté les observations écrites par courriel du 17 juin au 31 juillet 2021. Celles-ci ont été acheminées à Ipsos en vue de leur analyse. Quiconque souhaitait écrire au ministère au sujet de l’avenir du travail pouvait le faire et nous avons reçu beaucoup d’observations.

Au total, le comité a reçu plus de 550 observations écrites provenant d’organisations et de particuliers – dont certaines se ressemblaient au niveau du style et du contenu – allant des travailleurs aux syndicats, en passant par les universitaires, les entreprises et les associations.

Ces observations écrites portaient sur une grande variété de questions. Nous avons reçu des commentaires de travailleurs à la demande ou travailleurs de plateforme technologique s’inquiétant de la façon dont les services basés sur une application régissent leur rendement et leurs heures, et citant la nécessité d’un ensemble d’avantages sociaux. Nous avons reçu des commentaires de chefs de la direction et de présidents d’associations portant sur le besoin de moderniser les lois régissant les lieux de travail en Ontario. Nous avons reçu des commentaires de propriétaires de petites entreprises, d’entrepreneurs indépendants et de syndicats souhaitant protéger et améliorer les droits de leurs membres.

Bien qu’il soit impossible de traiter tous les conseils reçus ou de tous les mettre en pratique, nous remercions toutes les personnes qui ont pris le temps de mettre par écrit leurs idées et leurs opinions et de les transmettre au comité. Nous avons lu les conseils de tous ceux qui ont communiqué avec nous et nous y avons réfléchi.

Ipsos a analysé les réponses écrites pour cerner les thèmes et les recommandations liés au travail du comité, et nous avons utilisé ces renseignements pour éclairer nos recommandations. Les observations fournies ont été examinées avec soin et Ipsos en a tiré des recommandations et des citations à notre intention. Le présent rapport comprend une sélection de citations tirées des observations reçues, et l’annexe C énumère les organisations qui ont soumis une réponse écrite. Les citations tirées des observations écrites ont été modifiées pour plus de concision et de clarté.

Consultation des intervenants

En collaboration avec Ipsos et avec l’aide du ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences, nous avons sélectionné plus de 150 personnes et organisations avec qui nous entretenir directement. Leur sélection s’est appuyée sur leur expertise ainsi que sur les groupes qu’elles représentent, leur profil public ou leurs antécédents en matière de perspectives sur l’avenir du travail, ainsi que sur leurs qualifications.

Entre juin et septembre 2021, nous nous sommes longuement entretenus avec des travailleurs, des dirigeants syndicaux, des universitaires, des experts et des propriétaires de petites et grandes entreprises, pour ne nommer que ceux-ci. Il était impressionnant et gratifiant de voir tant de personnes et d’organisations prêtes à prendre le temps de discuter avec nous. Pour favoriser un dialogue ouvert, nous avons tenu une série de tables rondes virtuelles pour les parties prenantes. Par leur nature, ces consultations auprès des parties prenantes évoquaient l’avenir du travail, puisqu’elles ont toutes eu lieu en ligne.

Le fait de parler directement avec ces personnes a donné plus de substance à la conversation. Nous avons discuté avec les travailleurs pour entendre directement l’opinion des personnes les plus touchées par les changements dans l’avenir du travail. Par ailleurs, nous avons réalisé des entrevues, individuelles et conjointes, ainsi que de petites réunions stratégiques avec des experts reconnus. Les personnes interrogées ont aussi été identifiées à mesure que le projet progressait, en se fondant sur des discussions antérieures ou des recherches secondaires ou supplémentaires.

Chaque séance comprenait une introduction d’Ipsos et d’un membre du comité, un aperçu de la confidentialité et du format, mettant l’accent sur la règle de Chatham House pour favoriser un dialogue ouvert, ainsi qu’une série de questions posées par les membres du comité.

Nous avons grandement tiré profit de la vaste discussion ouverte entre les participants. Certaines des questions soulevées touchaient les modifications requises à la Loi de 2000 sur les normes d’emploi, les définitions de « travailleur précaire » et d’« entrepreneur indépendant », de même que le besoin des travailleurs de pouvoir se « déconnecter » dans un monde post-pandémique où ils travaillent depuis n’importe quel endroit. Nous avons également entendu des suggestions précises sur des sujets comme les taux d’assurance de la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail pour les employeurs, dont certains sont repris dans nos recommandations.

Notre mandat et l’incroyable volume de recommandations et de suggestions reçues limitaient notre champ d’action et, bien qu’il soit impossible de les traiter toutes dans notre rapport, nous sommes grandement reconnaissants du temps et des efforts consacrés par les participants pour nous faire part directement de leurs commentaires.

Au total, 6 tables rondes, 7 petites réunions, 11 entrevues conjointes et 54 entrevues individuelles ont été menées. En tout, le comité s’est entretenu avec 164 personnes. Tous les débats ont été présidés par un membre du comité. La plupart des séances ont été enregistrées, les transcriptions étant produites uniquement à des fins d’analyse interne.

Dans les cas où la transcription ou l’enregistrement a été omis à la demande des participants, nous avons pris des notes détaillées pour nous assurer de bien saisir les commentaires.

Ipsos a analysé les transcriptions et les enregistrements en procédant à une lecture attentive des commentaires des participants et a relevé les principaux thèmes et recommandations. Par exemple, dans le cadre d’une table ronde, nous avons recueilli les commentaires de plusieurs chauffeurs d’entreprises de covoiturage et de messagerie sur l’importance d’établir un régime d’avantages sociaux et d’examiner le classement attribué à ces travailleurs.

À partir des transcriptions et des enregistrements, Ipsos a relevé les principales recommandations et citations. Un choix de citations est intégré au présent rapport et la liste complète des organisations ayant consenti à être nommées est fournie à l’annexe C. Les citations des parties prenantes ont été abrégées et clarifiées, au besoin.

Enquête d’opinion publique

Nous avons également commandé une enquête auprès des résidents de l’Ontario. Ipsos a lancé et géré une enquête en ligne entre le 27 et le 30 juillet 2021. En Ontario, 2 003  personnes de 18 ans et plus ont été interrogées. Les données ont été pondérées selon les variables démographiques standard – âge, sexe, région et éducation – selon les proportions du recensement. La précision des enquêtes en ligne Ipsos est calculée au moyen d’un intervalle de crédibilité.

Dans ce cas, l’échantillon est jugé exact à +/-2,5 points de pourcentage si tous les résidents de l’Ontario âgés de 18 ans ou plus avaient été interrogés. L’enquête est considérée comme un échantillon représentatif, mais non aléatoire, de la population. Tout au long de ce rapport, nous faisons référence à certains résultats clés de cette enquête, et les résultats complets sont fournis à l’annexe B.

Analyse des médias publics

Nous avons procédé à un examen approfondi des médias sociaux et des médias traditionnels entre mars et septembre 2021. Ipsos a utilisé l’intelligence artificielle pour trouver et classifier des articles de nouvelles et des publications sur les médias sociaux provenant de sources de partout en Ontario et a mis en évidence les principales tendances.

Afin de gérer le codage et la catégorisation par thème des données, Ipsos a utilisé des processus assistés par machine exclusifs pour extraire les concepts depuis des données non structurées en fonction du code, puis a catégorisé les publications selon des thèmes. Ce processus fondé sur l’intelligence artificielle « apprend » en classant les données non structurées pour suggérer des séries et des structures de données pouvant s’harmoniser avec les concepts et produire une trame de codage.

Plus précisément, le processus assisté par l’intelligence artificielle s’est amorcé par la préparation des données pour la modélisation de sujets (en établissant en premier lieu un ensemble de base de catégories ou de thèmes). Les bigrammes (paires de mots) communs ont été repérés et regroupés (par exemple, au lieu d’avoir un sujet pour « transférable » et un pour « prestations », Ipsos a créé un seul sujet, « prestations transférables »). Un exemple du futur du travail pourrait comprendre des « prestations transférables », où la modélisation préliminaire du sujet a ensuite été appliquée aux publications dans les médias et les réseaux sociaux. À cette étape, l’ensemble des publications dans les médias et les réseaux sociaux a été traité au moyen d’un algorithme de modélisation des sujets exclusif. Le modèle a « appris » en examinant chaque mot dans chaque document et en déterminant lesquels étaient plus susceptibles d’apparaître ensemble, créant ainsi l’ensemble initial de sujets. Un nombre fixe de sujets a été établi. Une fois qu’un nombre optimal de thèmes a été déterminé, les détails de la modélisation des sujets ont été fournis comme données de sortie, et une analyse de sentiments a été appliquée pour déterminer si la publication était « positive » ou « négative  ».

Au cours de l’essai du modèle, Ipsos a utilisé BERT, ELMo, CNN+RNN et d’autres cadres de TLN (traitement du langage naturel) pour définir des thèmes et des sujets.

Récemment, il y a eu une plus grande couverture médiatique des prestations transférables et de la classification des travailleurs, car de nombreux territoires de compétence internationaux ont déposé des projets de loi traitant de ces questions. Le présent rapport tient compte de certains de ces projets de loi et y fait référence.

Un résumé des résultats de l’analyse des médias est fourni à l’annexe D.

Ipsos a présenté les résultats de l’analyse des médias au comité et au ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences pour examen.

Examen de la documentation

Enfin, nous avons procédé à un examen approfondi des travaux antérieurs sur l’avenir du travail. Nous avons examiné des documents de position, des rapports gouvernementaux antérieurs, des articles de presse et des publications provenant de diverses sources en Ontario, au Canada et à l’étranger. Par exemple, nous avons examiné une étude approfondie du Massachusetts Institute of Technology (MIT) sur l’avenir du travail. Nous avons examiné une partie de la vaste documentation antérieure à la COVID‑19, et nous en avons tenu compte dans notre analyse. Tout au long de ce rapport, nous citons bon nombre des sources externes sur lesquelles nous nous sommes appuyés pour parvenir à nos recommandations et à nos conclusions.

Notre démarche de recommandations

Nos recommandations s’appuient sur la rétroaction reçue dans le cadre du processus décrit ci-dessus, sur notre examen de la recherche et des statistiques existantes et sur notre propre expertise.

Nous nous sommes fréquemment rencontrés pour revoir les recommandations et décider de la meilleure marche à suivre. En fin de compte, nous avons formulé à l’intention du gouvernement vingt et une (21) recommandations portant sur trois grands thèmes.

Nous avons présenté un rapport provisoire au ministre McNaughton et au ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences à mi-chemin de notre processus. Nous avons également maintenu un dialogue ouvert avec le ministère tout au long du processus, tout en agissant indépendamment du gouvernement.

De plus, nous avons reconnu que l’avenir du travail évoluait, même au moment de terminer ses travaux. Les récents rapports sur les pénuries de main-d’œuvre ont ajouté de la complexité aux problèmes auxquels nous sommes confrontés.

Selon une étude récente de la Banque de développement du Canada (BDC), 64 % des entreprises canadiennes estiment que la pénurie de main-d’œuvre limite leur croissance.

Alors même que l’économie se remet de la pandémie de COVID‑19, nous avons appris que les entreprises ont de la difficulté à trouver du personnel. Cinquante-cinq pour cent (55 %) des entrepreneurs canadiens disent avoir de la difficulté à pourvoir les postes vacants. Selon la BDC, « la réduction à long terme de la croissance de la population active et les effets récents de la pandémie ont exacerbé les répercussions inégales de la pénurie de main-d’œuvre ». La BDC ajoute que « le chômage persiste dans certains secteurs, alors que la rareté de la main- d’œuvre persiste dans d’autres ».

Comme l’a indiqué le National Post le 8 octobre 2021, Statistique Canada a souligné qu’en juillet 2021, il y avait environ 1,5 million de chômeurs canadiens, alors que les employeurs devaient pourvoir quelque 800∇000 postes vacants. Il existe un fossé entre les personnes disposées à travailler et les besoins des employeurs.

Nous avons inclus des points de données comme celui-ci dans notre réflexion et, dans la mesure du possible, nous avons cité des sources externes pour valider nos recommandations.

S’appuyer sur les travaux antérieurs du government de l’Ontario

Nous n’en sommes pas à la case départ. Nous avons examiné attentivement le travail déjà accompli par le gouvernement de l’Ontario au cours de la pandémie ainsi que la transformation ardue de la main-d’œuvre. L’établissement d’une nouvelle Stratégie relative aux métiers spécialisés par la province nous a également guidés. Nous avons examiné comment le projet de loi 288, Loi de 2021 ouvrant des perspectives dans les métiers spécialisés, a permis au gouvernement de mettre fin progressivement à l’Ordre des métiers, qui a été remplacé par Métiers spécialisés Ontario. Déjà, le gouvernement de l’Ontario a investi plus d’un milliard de dollars sur quatre ans et les nouvelles inscriptions à un programme d’apprentissage ont augmenté de 5,5 %. Métiers spécialisés Ontario devrait être en fonction au début de 2022.

Ce travail et d’autres travaux réalisés par le gouvernement de l’Ontario servent de fondement à notre propre travail en tant que comité chargé de formuler des recommandations sur l’avenir du travail.

Cerner les problèmes et les thèmes

Le comité a fondé ses consultations et ses délibérations sur les trois domaines d’intérêt définis par le ministre McNaughton, et ses recommandations sont organisées selon trois thèmes de ces domaines d’intérêt. Ces thèmes sont les suivants :

  1. Veiller à ce que l’Ontario demeure le meilleur endroit en Amérique du Nord pour recruter, maintenir en poste et récompenser les travailleurs.

  2. Soutenir les travailleurs, en particulier les travailleurs de plateforme, en leur offrant souplesse, contrôle et sécurité.

  3. Faire de l’Ontario la destination par excellence où trouver une main-d’œuvre et un bassin de talents de calibre mondial.

Nous avons présenté nos recommandations en fonction de ces thèmes et avons veillé à ce qu’elles soient concrètes et claires – des domaines où le gouvernement peut apporter des changements immédiats qui profiteront aux travailleurs rapidement et de manière significative et mesurable.

L’un des principaux thèmes récurrents était le travail à domicile. Bien que cela ne soit pas possible pour tous les travailleurs, nous savons que près de la moitié des résidents de l’Ontario travaillent principalement ou toujours (39 %) ou parfois (7 %) depuis leur domicile.

Le travail à distance, autrefois simplement appelé « télétravail » et ne s’appliquant alors qu’à une petite partie des travailleurs, est désormais une caractéristique quasi universelle. Certains travailleurs, en particulier ceux qui sont hautement qualifiés, ont pu passer au travail depuis leur domicile ou n’importe quel endroit avec une relative facilité. Cette tendance semble susceptible de se maintenir pour certains types de travailleurs, car les organisations adoptent un modèle hybride où les employés passent une partie de leur temps de travail au bureau et une partie à leur domicile ou ailleurs.

Les entreprises semblent être d’accord. Selon un rapport Navigator de 2021, 67 % des 2 000 entreprises interrogées dans le monde entier affirment que « le travail à distance est essentiel à la croissance », tandis que « 77 % voient une forte relation entre un investissement dans la main-d’œuvre et la rentabilité ».

D’autres types d’employés n’ont pas eu cette possibilité. Les travailleurs de plateforme technologique, le personnel de première ligne – notamment le personnel de la santé et de la vente au détail – la main – d’œuvre de la construction, les entrepreneurs en bâtiment et même certains types de travailleurs de bureau peuvent accomplir leur travail seulement depuis un lieu précis. Pour ces travailleurs, quel que soit leur niveau de compétence, l’option de travailler depuis n’importe quel endroit n’a jamais existé.

L’un des thèmes les plus persistants ayant émergé de la pandémie de COVID‑19 sera probablement le lieu de travail des gens. Les avantages et les inconvénients émergeant du travail depuis n’importe quel endroit sont variés, mais pas universels. Les gouvernements, les organisations et les entreprises devront faire face à la nécessité de trouver un équilibre entre la souplesse et l’équité, et entre la responsabilité et la productivité. Le travail depuis n’importe quel endroit semble pour l’instant être une réalité qui demeurera présente, mais son incidence différera considérablement d’un type de travailleurs à l’autre. Certaines de nos recommandations fournissent une orientation sur la façon dont le gouvernement peut répondre à la tendance du « travail depuis n’importe quel endroit ».

Un autre domaine que nous avons soigneusement examiné est la façon dont la législation en vigueur – en particulier la Loi de 2000 sur les normes d’emploi – est, ou devrait être, interprétée et appliquée. Nous nous sommes cependant davantage concentrés sur les améliorations, la modernisation ou la simplification possibles de la législation que sur l’interprétation et l’application par le gouvernement des lois déjà en place. Pour cette raison, nous n’avons pas formulé de recommandations précises concernant l’interprétation ou l’application des lois en vigueur. Lorsque nous nous sommes penchés sur la législation, c’était pour trouver des moyens d’améliorer et de moderniser l’aspect du travail de l’avenir.

Communiquer nos recommandations

Tout au long de ce rapport, nous avons inclus des points de données choisis pour aider le lecteur à comprendre le contexte de nos recommandations. Nous avons également inclus des exemples pour permettre au lecteur de mieux comprendre le type de travailleur ciblé par la recommandation.

Nous avons tenté d’adopter un style narratif, mais toutes les recommandations sont étayées par des données, des recherches et des consultations approfondies avec les parties prenantes. Parmi ces parties prenantes, on retrouvait des travailleurs, en particulier ceux qui participent à l’économie à la demande, ou des entrepreneurs indépendants. L’avenir du travail évolue rapidement et le comité a été chargé de suivre le rythme et de formuler des recommandations pour appuyer la population de l’Ontario dès maintenant. C’est ce que nous avons fait dans ce rapport.

Il reste encore beaucoup de travail. Nous exhortons donc le gouvernement à établir un processus annuel sur l’avenir du travail. Cela pourrait mener à un rapport périodique sur l’état de la main-d’œuvre.

Enfin, nous remercions le gouvernement, et plus précisément le ministre McNaughton, d’avoir demandé au comité de fournir des conseils sur la meilleure façon de créer un avenir du travail qui puisse profiter aux employés de l’Ontario – actuels et à venir – ainsi qu’aux employeurs.