Omble chevalier
Introduction
L’omble chevalier (Salvelinus alpinus) est originaire des régions circompolaires de l’hémisphère Nord en Amérique du Nord, en Europe et en Asie. Son aire de répartition se situe plus au nord que celle des autres poissons d’eau douce. L’omble chevalier vit dans les plans d’eau douce et d’eau salée, y compris dans les milieux marins côtiers ainsi que dans les rivières et les lacs d’eau douce.
L’exploitation de l’omble chevalier (figure 1) en tant qu’espèce aquacole au Canada a commencé au début des années 1980 lorsque Pêches et Océans Canada a effectué la collecte de gamètes de poissons sauvages dans le fleuve Fraser (Labrador), la rivière Tree (Nunavut) et le lac Nauyuk (Nunavut). La descendance engendrée grâce à cette collecte d’œufs de poissons sauvages a formé la base génétique actuelle des populations reproductrices d’ombles chevaliers domestiques au Canada qui sont largement utilisées par l’industrie de l’aquaculture.
Au Canada, on pratique l’élevage de l’omble chevalier au Yukon, au Manitoba, en Ontario, au Québec, au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse et à Terre-Neuve. Le programme de surveillance des pêcheries de produits de la mer (Seafood Watch) de l’aquarium de Monterey Bay a d’ailleurs souligné que l’omble chevalier produit au Canada au moyen de systèmes d’aquaculture en recirculation et à passage unique terrestres est un produit durable sur le plan écologique et le « meilleur choix » pour les consommateurs dans la mesure où le risque que la production de l’espèce ait un impact environnemental demeure faible.
Élevage de l’omble chevalier en Ontario
L’élevage de l’omble chevalier en Ontario a débuté en 1989 lors de l’importation, au Centre ontarien de recherche en aquaculture – Alma, d’un stock génétique provenant de la souche de la rivière Fraser (Labrador). Il est pratiqué exclusivement par des systèmes de production terrestres employant de l’eau douce. Bien que la production de l’espèce demeure à l’heure actuelle un secteur restreint, elle a connu une certaine croissance au cours des dernières années grâce à l’ajout de trois fermes aquacoles ontariennes.
L’omble chevalier est notamment une espèce unique de grande valeur dont l’approvisionnement est restreint, ce qui explique généralement pourquoi son prix de gros est plus élevé que celui d’autres salmonidés. Compte tenu de l’abondance de ressources en eau douce froide en Ontario, la province est une candidate incontournable pour l’élevage d’omble chevalier. L’omble chevalier est une espèce qui tolère bien l’eau froide, qui peut se nourrir à des températures avoisinant le point de congélation et qui connaît sa croissance maximale entre 12 °C et 15 °C. Il préfère une densité de stockage élevée se situant entre 60 et 90 kg/m3 qui contribue du même coup à accroître la production économique; cela dit, il peut être élevé à une densité de stockage allant jusqu’à 150 kg/m3 lorsque la qualité de l’eau et les conditions d’élevage sont optimales, et ce, sans qu’il y ait de conséquences négatives sur son bien‑être. Quoique l’omble chevalier puisse survivre lorsqu’il est exposé brièvement à une concentration faible d’oxygène dissous, il est recommandé de maintenir la saturation en oxygène entre 80 % et 100 % pour que la santé et la productivité du poisson demeurent optimales.
Conditions d’élevage de l’omble chevalier
Dans la mesure où l’omble chevalier d’élevage affiche des taux variables de croissance au sein de la population, les producteurs tirent parti du classement par taille ordinaire en vue de favoriser au maximum l’alimentation et la croissance. En Ontario, la récolte commence aussitôt que le plus gros poisson de la population atteint une taille de 1 kg. Le classement aux deux semaines du plus gros poisson (c.-à-d. le retrait de celui-ci) aux fins de récolte permet au plus petit poisson de la population de grossir jusqu’à la taille marchande. La maturation sexuelle de l’omble chevalier élevé dans les conditions normales qui prévalent en Ontario se produit à l’âge de trois ans. Toutefois, en raison de la moins bonne qualité de chair attribuable à la reproduction, l’omble chevalier doit être récolté avant de parvenir à ce stade.
L’un des principaux problèmes liés à la production d’omble chevalier est la survie des œufs. En effet, la faible capacité d’adaptation de l’omble chevalier à une température plus chaude de l’eau pendant l’incubation nuit à la qualité des œufs et à l’éclosion. Des études ont par ailleurs révélé qu’au terme de l’éclosion, le taux de croissance de l’omble chevalier juvénile s’améliore et sa mortalité cumulée diminue lorsque ce dernier est exposé à une photopériode continue de 24 heures et dispose de façon continue d’aliments pendant 24 heures.
Au cours de la phase de grossissement, l’omble chevalier se porte bien dans les eaux souterraines naturelles de l’Ontario (8,5 °C à 9,0 °C) et peut supporter des densités d’élevage supérieures à celles d’autres salmonidés. Néanmoins, un autre problème auquel se heurtent les producteurs ontariens d’omble chevalier est la vulnérabilité de l’espèce aux maladies bactériennes à l’approche de la période de fécondité. C’est pourquoi il est recommandé d’élever l’omble chevalier dans une eau provenant d’une source souterraine ou en ayant recours à un système terrestre d’aquaculture en recirculation où les concentrations d’agents pathogènes sont inférieures et où il est possible d’appliquer les pratiques en matière de biosécurité.
Perspectives concernant l’espèce
L’omble chevalier est une espèce aquacole unique qui s’adapte bien aux conditions dans les installations d’aquaculture intensive et aux environnements d’eau douce froide. Il convient donc à l’aquaculture en Ontario. L’espèce offre une occasion de diversification du secteur provincial de l’aquaculture et répond aux demandes futures du marché.
Références
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Rédaction
La version anglaise de la présente fiche technique a été rédigée par Madeline Borland, M. Sc., stagiaire, analyse documentaire en matière d’aquaculture, et révisée par Michael McQuire, spécialiste de l’aquaculture et de l’aquaponie du MAAARO. L’équipe tient à remercier particulièrement Marcia Chiasson, chef, Centre ontarien de recherche en aquaculture — Alma pour sa contribution.
ISSN 1198-7138, Publié Décembre 2023.