Introduction

En Ontario, les producteurs de volaille aux prises avec des oiseaux morts ont le choix de plusieurs modes d’élimination. Ils peuvent faire affaire avec des entreprises de ramassage de cadavres d’animaux titulaires de permis ou enfouir, incinérer ou composter les cadavres. Le Règl. de l’Ont. 106/09, pris en application de la Loi de 2002 sur la gestion des éléments nutritifs stipule les distances de retrait à respecter en ce qui concerne le compostage de cadavres d’animaux, par rapport aux utilisations des terres voisines et d’éléments vulnérables, comme des puits et des eaux de surface.

Cette fiche technique présente les règles qu’il est crucial de suivre pour l’efficacité du compostage en andain des cadavres de volaille. Un andain de compost est un amas allongé et étroit formé de matière organique biodégradable et caractérisé par une aire superficielle importante qui favorise l’infiltration de l’oxygène (figure 1).

Retourneuse d’andains de compost de marque Brown Bear en opération. L’andain créé est composé de cadavres de volaille et de substrat.
Figure 1. Retourneuse d’andains de marque Brown Bear et andain de compost composé de cadavres de volaille et de substrat.

Le compost obtenu est le résultat de la décomposition de matière organique biodégradable par des microorganismes aérobies (c'est-à-dire qui ont besoin d’oxygène pour survivre) dans un substrat stable qui fait penser à de la terre et qu’on appelle de l’humus. Pour favoriser une décomposition rapide, il faut procurer à ces microorganismes un milieu optimal où ils pourront être efficaces et se multiplier.

Composition du compost

Pour jouer leur rôle, les microorganismes ont besoin d’un juste équilibre entre carbone, azote, oxygène et humidité. Le dosage des matières premières au moment de la création des andains est l’une des étapes clés d’un compostage réussi.

Le mélange optimal se caractériserait par un rapport carbone-azote (C:N) allant de 20:1 à 30:1. Cela signifie, qu’en poids, il faut de 20 à 30 unités de carbone pour chaque unité d’azote présente. Quant à la teneur en humidité, l’idéal serait qu’elle se situe dans la fourchette de 40-60 %. Les matières premières doivent être mélangées ou empilées de manière à favoriser la pénétration de l’oxygène dans l’andain, d’où la nécessité de toujours éviter le compactage du compost.

Substrats

Un cadavre de volaille frais renferme approximativement 80 % d’humidité, 12 % de carbone et 2,4 % d’azote. Il affiche, en poids, un rapport C:N de 5:1. Sans ajout de substrat, les cadavres renferment trop peu de carbone et trop d’humidité pour se transformer en compost; il faut leur ajouter un substrat riche en carbone. Les différents substrats utilisés n’ont pas tous les mêmes caractéristiques chimiques et physiques (tableau 1). On tire parti de ces différences en dosant les divers substrats de manière à obtenir le milieu optimal pour la décomposition des cadavres.

Tableau 1. Principales matières premières utilisées comme substrat et leurs caractéristiques chimiques et physiques.
Matière% Carbone% AzoteRapport C:NMatière sècheDensité
Sciure56,20,1511:161 %417 kg/m3 (26 lb/pi3)
Paille560,780:182 %80 kg/m3 (5 lb/pi3)
Ensilage de maïs43,81,044:130 %688 kg/m3 (43 lb/pi3)
Fumier de cheval44,31,530:139 %592 kg/m3 (37 lb/pi3)
Litière de volaille1208,015:160 %320 kg/m3 (20 lb/pi3)

Par exemple, pour composter 908 kg (2 000 lb) de cadavres de volaille, il faudrait idéalement obtenir un rapport C:N de 30:1, ce qui obligerait à utiliser au moins 336 kg (740 lb) de sciure ou 2 636 kg (5 800 lb) d’ensilage de maïs, soit un volume presque 5 fois plus grand d’ensilage de maïs que de sciure.

Les Calculs à faire pour déterminer la quantité de substrat à utiliser présentent la formule utilisée pour calculer les quantités idéales des différents substrats servant au compostage en andain.

La quantité de substrat utilisée dans l’andain est déterminée par la quantité nécessaire pour obtenir le bon rapport C:N. Dans le cas des substrats possédant des rapports C:N supérieurs à 80:1, comme la sciure, la quantité utilisée est normalement celle qui permet de bien recouvrir les cadavres.

Le surplus de carbone dans le mélange n’est pas nuisible à l’environnement. Il se traduira cependant par des coûts plus élevés, étant donné que davantage de substrat est utilisé.

À retenir au sujet du carbone : il vaut toujours mieux en avoir plus que moins.

Andain de compost

L’andain doit avoir une forme conique, mesurer 2,4–3,6 m (8–12 pi) de largeur à sa base et présenter une crête haute de 1,2–1,8 m (4–6 pi) (figure 2). Comme aucun cadavre de volaille ne doit être visible dans l’andain une fois celui-ci formé, il est important, pendant la création de l’andain, de disposer les cadavres à au moins 15 cm (6 po) à l’intérieur de l’andain. La couche de recouvrement de l’andain est extrêmement importante, car elle sert de biofiltre qui atténue les odeurs dégagées par la décomposition des cadavres ou les retient à l’intérieur de l’andain.

Schéma de la coupe transversale d’un andain de compostage de cadavres de volaille formé par la méthode multicouche. L’illustration montre les couches successives de substrat et de cadavres à l’intérieur de l’andain, ainsi que les dimensions approximatives de celui-ci.
Figure 2. Coupe transversale d’un andain de compostage de cadavres de volaille formé par la méthode multicouche.

Les mauvaises odeurs ne font pas que déranger les voisins; elles attirent aussi les charognards, tels que moufettes, ratons laveurs, rats et coyotes. Lorsqu’il est bien réalisé, le processus de compostage détruit la plupart, sinon la totalité, des organismes pathogènes contenus dans les cadavres, en exposant ces derniers à une chaleur prolongée. Si, avant la fin du processus, un charognard devait retirer de l’andain un cadavre partiellement composté, des organismes pathogènes encore actifs pourraient être libérés dans l’environnement avoisinant (bâtiments d’élevage, fermes). Aussi, pour des raisons de biosécurité, il faut empêcher les charognards d’accéder aux andains.

Méthode multicouche

Voici comment former un andain suivant cette méthode :

  • une couche de substrat d’une épaisseur de 20-30 cm (8-12 po) procurant une base convenable
  • une couche de cadavres de volaille
  • une deuxième couche de substrat, de 10‑15 cm (4-6 po) d’épaisseur
  • une deuxième couche de cadavres, possiblement une troisième couche de substrat et une troisième couche de cadavres (selon la machinerie utilisée pour le retournement de l’andain)
  • une dernière couche de substrat recouvrant l’ensemble de l’andain sur une épaisseur de 60 cm (24 po) (figure 2)

Méthode du mélange préalable

Voici comment former l’andain suivant cette méthode :

  • une couche de substrat d’une épaisseur de 20-30 cm (8-12 po) pour la base
  • formation, à côté de l’emplacement réservé à l’andain, d’un tas dans lequel on mélange les cadavres à la quantité nécessaire de substrat, à l’aide d’une chargeuse frontale
  • soulèvement des matériaux par la chargeuse frontale qui les dépose ensuite sur la base
  • recouvrement de la totalité de l’andain par une couche de substrat comme dans la méthode multicouche

Teneur en humidité

L’humidité est l’autre ingrédient clé du mélange. Les microorganismes prospèrent si la teneur en humidité se situe autour de 40 à 60 %. Si l’andain est trop sec pour offrir un milieu optimal, on peut y ajouter de l’humidité. Si un andain est trop mouillé, on peut soit ajouter davantage de substrat « sec » pour absorber l’excédent d’humidité, soit aérer l’andain.

Quand un andain est détrempé, du lixiviat ou des mauvaises odeurs peuvent s’en échapper (comme les microorganismes aérobies ne survivent pas sous de telles conditions, les bactéries anaérobies prennent le dessus et engendrent des odeurs désagréables). L’utilisation d’ensilage de maïs peut avoir cet effet, puisqu’il renferme une forte teneur en humidité. Si on l’utilise avec des cadavres frais, le mélange risque de renfermer une teneur en humidité de 65-75 % (la fourchette idéale étant de 40-60 %).

Quand on utilise des cadavres de volaille frais, il n’est habituellement pas nécessaire d’ajouter de l’humidité, puisque les oiseaux en renferment déjà beaucoup. On ajoute seulement de l’humidité si le substrat est extrêmement sec (que sa teneur en matière sèche est supérieure à 85 %) ou si les cadavres se sont déshydratés avant la formation des andains.

Le compostage peut être réalisé à l’intérieur d’un bâtiment ou à l’extérieur. Toutefois, il est plus facile de maîtriser le processus si l’andain est protégé des précipitations par une toiture.

S’il n’est pas possible de situer l’andain sous une toiture, le situer à distance des éléments vulnérables de l’environnement (tableau 2) et utiliser un substrat plus sec pouvant absorber un éventuel surplus d’humidité. On qualifie de « vulnérables » des éléments tels que puits, eau de surface ou autre utilisation du terrain (maisons avoisinantes, par exemple).

Tableau 2. Exigences minimales concernant l’emplacement de l’andain de compost.
Élément sensibleDistance
Puits foré à la sondeuse15 m
Puits creusé30 m
Tuyau de drainage souterrainm
Eau de surface (cours d’eau, fossé de drainage)voie d’écoulement de 50 mfootnote 1
Habitation voisine100 m
Zone résidentielle200 m
Limite du lot15 m
Route30 m

Gestion de l’andain de compost

Si toutes les matières sont présentes dans les bonnes proportions, les microorganismes auront tôt fait de décomposer la matière organique et de générer de la chaleur. On peut mesurer la température à l’aide d’un thermomètre ou d’un thermocouple. La surveillance de la température interne d’un andain est l’un des meilleurs moyens de s’assurer que le processus suit son cours normal (figure 3).

Thermomètre à longue tige inséré dans l’andain de compost et affichant une température de 51 °C (124 °F)
Figure 3. Thermomètre à longue tige inséré dans le compost et affichant une température de 51 °C (124 °F).

Il n’est pas rare que le cœur de l’andain atteigne des températures de 50-65 °C ou plus. Cette chaleur est indispensable à la destruction des organismes pathogènes qui se trouvent dans la matière organique. Des recherches ont montré que le virus de la grippe aviaire (A) peut être inactivé en aussi peu que 10 minutes à 60 °C ou en 90 minutes à 56 °C (Lu et coll., 2003). Ces températures élevées découragent également les insectes, comme les asticots ou les staphylins, d’envahir les andains.

Il est important de réintroduire périodiquement de l’oxygène dans l’andain en le retournant. Cette opération entretient des conditions aérobies propices à l’activité des microorganismes. Le retournement a aussi pour effet de mélanger les matériaux afin d’encourager la décomposition rapide de la matière organique restante. En général, après la formation initiale de l’andain, la température à l’intérieur de celui-ci grimpe rapidement, puis redescend graduellement. L’abaissement de la température est normalement une indication que les organismes commencent à être privés de l’un des ingrédients, le plus souvent d’oxygène. En mélangeant le compost, on l’aère, ce qui réactive les microorganismes, dont l’activité fait à nouveau monter la température (figure 4).

Graphique de la température en fonction du temps d’un andain de compost. Le graphique montre que la température à l’intérieur de l’andain grimpe rapidement après sa formation, jusqu’à environ 70 °C, avant de redescendre graduellement. Après le retournement de l’andain, la température remonte rapidement à 70 °C, puis s’abaisse à nouveau graduellement.
Figure 4. Évolution de la température en fonction du temps à l’intérieur de l’andain (retourné au jour 13).

Le matériel utilisé pour retourner les andains va de la retourneuse à compost spécialisée (figure 1) à la chargeuse frontale qui sert aussi à reformer l’andain.

Dans le cadre d’une recherche menée en Ontario, on a composté en andain des cadavres de poules pondeuses parvenues à la fin de leur période de production. Les températures à l’intérieur des andains ont culminé 5-10 jours après la formation des andains, selon le substrat utilisé (5 jours avec de la paille), puis ont graduellement décliné. La plupart des mélanges ont été retournés pour la première fois après 12-21 jours. Les températures ont alors à nouveau grimpé avant de redescendre peu à peu.

Trente jours après la formation des andains, la partie la plus active du processus de compostage était terminée. Les restes des cadavres avaient pratiquement disparu, sauf pour les gros éléments du squelette (crâne, hanche), que le processus avait rendus extrêmement friables du fait de la chaleur élevée à laquelle il les avait exposés. Il ne restait plus de traces de plumes ni de chair dans le compost, dont l’aspect s’apparentait davantage à un terreau qu’au substrat employé au départ.

Le compost a continué de dégager de la chaleur, ce qui indique qu’il a continué de mûrir. Un second retournement de l’andain peut contribuer à accélérer ce mûrissement en réintroduisant de l’oxygène. Le produit fini peut être épandu sur des terres agricoles comme amendement de sol, au même titre que le fumier d’élevage qu’on utilise pour fertiliser les cultures.

Vous pouvez obtenir d’autres renseignements sur les exigences visant les différents modes d’élimination des cadavres d’animaux en consultant la page Web Gestion des cadavres d’animaux d’élevage en Ontario.

Avis de non-responsabilité

Les renseignements dans ce document sont fournis à titre d’information seulement et ne devraient pas être utilisés pour déterminer vos obligations légales. Pour ce faire, consultez la loi pertinente. Si vous avez besoin de conseils juridiques, consultez un avocat. En cas de contradiction entre l’information fournie dans la fiche technique et toute loi applicable, la loi a préséance.

La version anglaise de la présente fiche technique a été rédigée par Al Dam, spécialiste provincial de l’aviculture, ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et des Affaires rurales (MAAARO), Bill Groot Nibbelink, spécialiste de la réglementation des élevages, MAAARO, et Daniel Ward, ing., ingénieriste – logement et équipement pour la volaille et autres animaux d’élevage, MAAARO.