Introduction

La plupart des membres de la famille des noyers (Juglandaceae) produisent une substance chimique appelée « juglone » (5 hydroxy-1, 4 napthoquinone) que l'on retrouve naturellement dans toutes les parties de ces plantes. Le noyer noir, le pacanier, le caryer et d'autres genres de cette famille, incluant Carya, Engelhardtia, Juglans, Platycarya et Pterocarya peuvent produire de la juglone.

Ce sont les noyers noirs et les noyers cendrés qui produisent la plus grande quantité de juglone et ces arbres peuvent causer des réactions toxiques sur un certain nombre d'autres espèces végétales poussant dans leur voisinage. D'autres espèces productrices de juglone comme le noyer commun, le pacanier, le caryer lacinié, le caryer ovale ou le caryer cordiforme produisent de si petites quantités de juglone qu'on n'observe que rarement des réactions toxiques chez les plantes situées dans leur voisinage. Des cultivars de noyer commun et de noyer de Siebold portant un nom ou un numéro précis qui sont utilisés dans des vergers commerciaux ou pour l'aménagement paysager sont souvent greffés sur des porte-greffes de noyer noir indigène.

Bien que bon nombre de plantes soient tolérantes à la juglone et se développent bien même à proximité des noyers, il existe certaines espèces végétales qui peuvent être affectées par ces derniers. L'observation et l'expérience ont permis de classer de nombreuses espèces végétales comme étant soit « sensibles » soit « tolérantes » aux membres de la famille des noyers. On appelle « allélopathie » les interactions naturelles entre des plantes lorsque l'une d'entre elles produit une substance qui a un effet sur la croissance de l'autre.

On a démontré, expérimentalement, que la juglone est un inhibiteur de la respiration qui soutire aux plantes sensibles l'énergie qui leur est nécessaire pour assurer leur métabolisme. Les plantes touchées ne peuvent pas transformer le dioxyde de carbone et l'oxygène de manière adéquate. Dans le cas des tomates, les vaisseaux du xylème sont bouchés par du tissu calleux, ce qui obstrue la circulation ascendante de l'eau dans le plant.

Les symptômes de toxicité attribuable au noyer peuvent se manifester par une interruption de la croissance, un flétrissement partiel ou total ou la mort des plants touchés. La réaction toxique se produit parfois rapidement. Des plantes sensibles saines peuvent mourir en un ou deux jours. Bon nombre de jardiniers s'inquiètent et croient souvent que le flétrissement est causé par un champignon ou une maladie bactérienne. Une fois que la plante a commencé à flétrir, le processus est irréversible. La gravité des symptômes toxiques peut varier selon l'espèce végétale qui est en contact avec la juglone.

On peut reconnaître les racines de noyer par leur écorce relativement épaisse et par le bois qui vire rapidement au jaune foncé lorsque l'écorce est retirée. Les racines coupées dégagent par ailleurs une odeur âcre caractéristique. La juglone provenant des racines du noyer noir en décomposition peut persister dans le sol pendant plus d'un an après que les noyers ont été enlevés. Les racines de noyer peuvent s'étendre dans un rayon de 15 à 18 mètres (50 à 80 pieds) de l'extrémité de la frondaison d'un arbre mature. Les jeunes noyers ne semblent pas causer de réactions toxiques aux plantes sensibles avant d'atteindre l'âge de sept à huit ans.

Les feuilles ramassées au râteau, les petites branches et les écales provenant des noyers devraient être compostées pendant un an afin que l'on puisse s'assurer que la juglone s'est décomposée, avant d'étendre le compost obtenu dans les jardins ou de l'utiliser comme paillis autour de plantes vulnérables.

Les potagers doivent être placés à l'écart des noyers noirs et des noyers cendrés afin de prévenir les dommages aux plantes sensibles. Lorsqu'il est impossible d'éviter la proximité de ces arbres (si un arbre est dans la cour du voisin, par exemple), on peut utiliser des boîtes surélevées afin d'obtenir une certaine protection contre la toxicité de la juglone. Il faut prendre soin toutefois d'empêcher le plus possible les racines des noyers de pénétrer dans les lits de semence surélevés. On peut aussi recouvrir le sol du potager avec une pellicule plastique ou en tissu contre les mauvaises herbes durant la construction des boîtes afin de prévenir les racines des arbres d'y pénétrer.

Un sol très bien drainé contribuera aussi à réduire les problèmes de toxicité, même chez les espèces végétales sensibles. Dans les sols bien drainés, les réactions toxiques se produisent uniquement par contact direct entre les racines des noyers et celles des espèces sensibles. Dans les sols mal drainés, des réactions toxiques peuvent se produire même en l'absence de contact direct entre les racines, car la juglone circule dans l'eau du sol. On croit que les plantes qui possèdent des systèmes racinaires peu profonds sont plus tolérantes à la juglone que les celles dont les racines s'enfoncent en profondeur. La tolérance à la juglone chez les espèces ayant des racines peu profondes peut aussi être attribuée au meilleur drainage du sol dans les couches supérieures.

Autres problèmes

Les chevaux et les poneys peuvent présenter des signes de fourbure aiguë, c'est-à-dire une inflammation des pattes, lorsque des copeaux ou de la sciure de noyer noir sont utilisés comme litière. Des cas de fourbure aiguë et de fréquence respiratoire élevée chez les chevaux et les poneys ont également été signalés lorsque les écuries et les paddocks sont situés à proximité de noyers. La dissémination du pollen des noyers peut causer des réactions allergiques chez les humains et les chevaux.

Les écales provenant des noix peuvent être toxiques pour les animaux d'élevage et mortelles pour les chiens, si elles sont ingérées, en raison d'une mycotoxine appelée Penitrem A, produite par une moisissure de type Penicillium. Par conséquent, les noix provenant de noyers qui présentent des symptômes de décomposition, par la présence de pourriture brune ou noir sur les écales, peuvent dégager des toxines qui les rendent impropres à la consommation humaine.

Sensibilité des différentes espèces

Les tableaux ci-dessous contiennent la liste des espèces végétales qui sont tolérantes et celles qui sont sensibles à la juglone.

Plantes tolérantes à la juglone

Nom communNom latin
Actinide denticuléeActinidia arguta
Agrostide blancheAgrostis gigantea
AnémoneAnemone apennia
AsiminierAsimina sp.
Athyrie fougère-femelleBulbinopsis bulbosa
AubépineCrataegus sp.
BetteraveBeta vulgaris
BléTriticum sp.
Bugle rampanteAjugia pyramidalis
Carotte sauvageDaucus carota
CaryerCarya sp.
Catalpa du sudCatalpa bignonioides
Cèdre rougeJuniperus virginiana
Cerisier acidePrunus cerasus
Chalef en ombellesElaeagnus umbellata
ChêneQuercus sp.
ChèvrefeuilleLonicera sp.
Ciguë maculéeConium maculatum
ClématiteClematis sp.
CognassierPseudocydonia oblonga
CyclamenCyclamen persicum
Dactyle pelotonnéDactylis glomerata
Érables (la plupart des espèces)Acer sp.
Érythrone d'AmériqueErythronium americanum
FétuqueFestuca sp.
ForsythieForsythia sp.
Fougère-à-faucillesPolystichum sp.
Fougère-à-l'autrucheMaltcuria struthiopteris
Fusain ailéEuonymus alatus
Fusain ailé, « Gaiety »Euonymus alatus 'Gaiety'
Gainier rougeCercis canadensis
GenévrierJuniperus sp.
Genévrier ArcadiaJuniperus arcadia
Grande margueriteLeucanthemum sp.
Haricot (lima, mange-tout)Phaseolus sp.
HémérocalleHemerocallis sp.
Herbe à la puceRhus radicans
HeuchèreHeuchera sp.
HostaHosta sp.
Hydrangée sauvageHydrangea sp.
IrisIris x germanica
Lierre terrestreGlechoma hederacea
LilasSyringa sp.
LiriopeLiriope sp.
Maïs sucréZea mays
Morelle des oiseauxSolanym aviculare
MûrierRubus occidentalis
NarcisseNarcissus sp.
Narcisse des présNarcissus pseudonarcissus
NoyerJuglans sp.
OignonAllium cepa
OrmeUlmus sp.
Oxalide cornueOxalis corniculata
PachysandrePachysandra sp.
PanaisPastinaca sativa
Pâturin des présPoa pratensis
Petit prêcheurArissema triphyllum
Petite pervencheVinca minor
Phléole des présPhleum pratense
PhloxPhlox sp.
PigamonThalictrum sp.
Pissenlit officinalTaraxacum officinale
Plaqueminier de VirginieDiospyros virginiana
PlatanePlatanus occidentalis
Podophylle peltéPodophyllum emodi
PrimevèrePrimula vulgaris
Pruche du CanadaTsuga sp.
Robinier faux-acaciaRobinia pseudoacacia
Rosier sauvageRosa sp.
Sceau de SalomonPolygonatum odoratum
SeringuaPhiladelphus sp.
SoyaGlycine max.
Stellaire moyenneStellaria media
Trèfle blancTrifolium repens
TrilleTrillium sp.
UvulaireUvularia sp.
Véronique filiformeVeronica filiformis
VigneVitis sp.
Vigne vierge communeParthenocissus quinquefolia
ViorneViburnum sp.
ZinniaZinnia elegans

Plantes sensibles à la juglone

Nom communNom latin
AspergeAsparagus officinalis
AubergineSolanum melongena
AulneAlnus sp.
AzaléeRhododendron sp.
BleuetVaccinium sp.
Bouleau blancBetula papyrifera
Chèvrefeuille de MaackLonicera maackii
ChouBrassica oleracea
ChrysanthèmeChrysanthemum sp.
ColchiqueColchicum autumnale
CotonéasterCotoneaster sp.
Épinette de NorvègePicea abies
Érable argentéAcer saccharinum
Kalmia à feuilles largesKalmia latifolia
Lespédéza du JaponLespedeza striata
LuzerneMedicago sativa
Magnolia de SoulangeMagnolia x soulangiana
Mélèze du JaponLarix kaempferi
Micocoulier du MississippiCeltis laevigata
MyrtilleGaylussacia sp.
Pin à encensPinus taeda
Pin rougePinus resinosa
Pin sylvestrePinus sylvestris
Pine blancPinus strobus
PivoinePaeonia sp.
Poivron et pimentCapsicum annuum
Pomme de terreSolanum tuberosum
Pommier/pommetierMalus sp.
PotentillePotentilla neumanniana
Potentille frutescentePotentilla fruticosa
RhododendronRhododendron
RonceRubus sp.
TabacNicotiana tabacum
Tilleul d'AmériqueTilia americana
TomateLycopersicon esculentum
Trèfle incarnatTrifolium incanatum
Troène communLigustrum vulgare