Le gaz méthane dans les porcheries
Apprenez comment gérer les risques d’accumulation de méthane dans les porcheries. Ces renseignements techniques sont destinés aux éleveurs de porcs ontariens.
ISSN 1198-7138, Publié mai 2025
Introduction
L’accumulation de méthane peut être et est, quoique rarement, la cause d’explosions et d’embrasements éclair dans les porcheries. Divers facteurs opérationnels et conceptuels font augmenter le risque d’incendies ou d’explosions découlant de l’accumulation de méthane dans les installations porcines. La présente fiche technique traite de la gestion du risque d’accumulation de méthane dans ces installations.
Méthane
Le méthane est produit par une famille de bactéries dites méthanogènes. Il est inodore, incolore et non toxique. Toutefois, si la concentration de méthane dans l’air ambiant dépasse 50 %, il devient un asphyxiant simple (c’est-à-dire qu’il provoque la suffocation).
Le méthane est légèrement soluble dans les liquides. En raison de sa faible solubilité dans l’eau, on peut présumer que le fumier ne contiendra pas de méthane alors qu’il est en phase liquide (lisier). Sachez toutefois qu’une quantité suffisante de méthane peut se fixer aux particules du lisier sous forme de petites bulles et peut s’en échapper facilement lorsque le lisier est déplacé ou agité.
Dans une fosse à lisier, vous devez toujours présumer que du gaz méthane est présent. Des recherches ont révélé que, même par temps froid, les bactéries méthanogènes produisent jusqu’à 16 L de méthane/m3 de lisier par jour. Par temps chaud, elles peuvent en produire plus de 30 L/m3.
Le gaz méthane a une densité relative de 0,5 par rapport à l’air. D’un poids deux fois moindre que celui de l’air, il monte et se loge dans l’espace vide situé dans le haut des structures de stockage et dans des endroits non ventilés.
Dans un endroit non ventilé (placard, salle de préparation des aliments, bureau ou couloir) qui contient du gaz méthane, une source d’inflammation (interrupteur, moteur, soudeuse, meuleuse, flamme pilote) peut déclencher un embrasement éclair ou une explosion et occasionner un incendie. Pour limiter le risque d’accumulation du méthane et éviter que celui-ci n’atteigne la concentration à laquelle il prendra feu, vous devez assurer la ventilation continue de chaque bâtiment, local ou lieu doté de fosses de stockage ou de transfert de lisier.
Gestion de l’accumulation du méthane
Dans la majorité des installations porcines en Ontario, on stocke le lisier sur de longues périodes à l’intérieur des bâtiments, lesquels sont souvent divisés en locaux ou en sections. On laisse le lisier accumulé sur place même après le départ des animaux, jusqu’au moment d’utiliser à nouveau les locaux ou sections.
Ventilation et limites d’inflammabilité
Le méthane s’accumule dans les endroits non ventilés sus-jacents ou contigus aux structures de stockage du lisier (salles d’entreposage, couloirs, salles de préparation des aliments, ensemble d’un local ou d’une section de bâtiment) à moins que ces endroits ne soient correctement ventilés (figure 1).
Le méthane qui s’accumule sous le plafond des endroits susmentionnés peut se situer dans l’une des trois catégories d’inflammabilité suivantes :
- au-delà de la fourchette d’inflammabilité, soit à plus de 15 % de méthane + air ambiant
- à l’intérieur de la fourchette d’inflammabilité, soit entre 5 % et 15 % de méthane + air ambiant
- en deçà de la fourchette d’inflammabilité, soit à moins de 5 % de méthane + air ambiant
Toute source d’inflammation représente un risque, mais le risque augmente dans la zone critique, soit dans la fourchette d’inflammabilité se situant entre 5 % et 15 %. La pratique la plus efficace consiste à assurer une ventilation continue de l’ensemble du bâtiment. Même si le bâtiment a été vidé de ses animaux, dès que du lisier est présent, il faut au moins deux renouvellements d’air uniforme par heure pour assurer une ventilation appropriée.
Stockage du lisier
Toute libération soudaine de gaz méthane peut submerger le système de ventilation d’un bâtiment.
Dans les bâtiments dotés de doubles fosses, la structure de stockage à court terme se trouve au‑dessus de la structure de stockage à long terme; le lisier est évacué périodiquement vers la structure de stockage inférieure par des orifices de vidange gravitaire. Si la structure de stockage inférieure n’est pas ventilée, le méthane s’accumule dans l’espace vide situé dans le haut de la structure. Lors de l’évacuation du lisier de la structure de stockage à court terme supérieure vers la structure sous‑jacente, le méthane accumulé se trouve déplacé par le lisier entrant et remonte ainsi vers la structure de stockage à court terme.
Si les couvercles des orifices de vidange gravitaire ne sont pas remis en place, tout le méthane monte dans la pièce du dessus et peut causer une explosion ou un incendie (figure 2). La solution la plus simple, dans le cas des bâtiments à doubles fosses, consiste à mettre la fosse inférieure à l’air libre afin que le méthane soit évacué vers l’extérieur à mesure qu’il se forme.
Déplacement du lisier
Dans certaines installations, le lisier transite par une fosse de transfert, située sous un couloir, vers une fosse de vidange extérieure. Dans d’autres installations, un déflecteur plein sépare la fosse de transfert et la fosse de vidange, et la fosse de transfert n’est pas mise à l’air libre.
Dès que le lisier atteint le bas du déflecteur, la fosse de transfert non mise à l’air libre se scelle hydrauliquement (figure 3). Tout ajout de lisier entraîne alors une accumulation de pression dans l’espace vide situé dans le haut de la fosse de transfert. S’il y a un orifice de drainage, une plaque‑couvercle ou un avaloir de sol, sous l’effet de la pression, le méthane présent dans l’espace vide est évacué par l’orifice ou les orifices vers le couloir ou le local au-dessus. Lorsque le système de ventilation ne peut expulser cet afflux soudain de gaz, la fourchette d’inflammabilité est rapidement atteinte.
Dans tous les cas, il faut augmenter les taux de ventilation au maximum chaque fois que le lisier est déplacé ou agité.
Formation de mousse dans le lisier
La mousse qui se forme dans le lisier est une combinaison de gaz, de bulles de méthane, d’un agent tensioactif, de mousse et d’un stabilisateur : les bactéries méthanogènes filamenteuses.
M. Bo Hu, de l’Université du Minnesota, étudie cette question depuis 2010. Une théorie veut que la mousse se forme à partir de graisses partiellement digérées par les porcs. Ces graisses forment des acides gras à longue chaîne, qui sont transformés en agents tensioactifs, puis en mousse par les bactéries présentes dans le lisier. On pense que l’utilisation de drêches de distillerie avec solubles (DDS) pour l’alimentation des animaux pourrait être la cause de ce phénomène, quoiqu’une enquête menée en Ontario ait révélé que certains bâtiments ont connu des problèmes de formation de mousse avant que l’utilisation de drêches de distillerie devienne courante.
Le méthane représente entre 50 % et 70 % du volume total de la mousse. La mousse proprement dite peut atteindre plusieurs pieds d’épaisseur (figure 4). Si la mousse est brisée soudainement par une forte agitation ou par des opérations de lavage sous pression, le méthane se libère rapidement, et le système de ventilation ne suffit pas à évacuer le gaz dégagé. De nombreux incendies de porcheries dans le midwest américain ont été causés par de la mousse qui s’était formée dans le lisier.
Résumé
Les pratiques exemplaires suivantes permettront de réduire considérablement le risque d’accumulation de méthane dans les installations porcines :
- Toujours présumer que du gaz méthane est présent lorsqu’un bâtiment est doté d’un système de stockage du lisier.
- S’assurer que l’ensemble du bâtiment est suffisamment ventilé, y compris ses locaux individuels.
- Mettre toutes les fosses de stockage et de transfert à l’air libre pour assurer l’évacuation du méthane à mesure qu’il se forme et prévenir l’accumulation d’une pression dans l’espace vide situé dans le haut des fosses.
- Traiter tout signe de formation de mousse dans le lisier avec une extrême prudence. Ne jamais agiter ou rabaisser énergiquement la mousse.
Rédaction
La présente fiche technique a été mise à jour par Steve Beadle, ingénieur, équipement et structures pour porcs et moutons, Ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et de l’Agroentreprise (MAAAO). La fiche technique originale a été rédigée par Robert Chambers, ingénieur, équipement et structures pour porcs et moutons, MAAAO, et revue par Terrence Sauvé, ingénieur, optimisation et sécurité des exploitations agricoles, MAAAO.