Qualité de l’air à l’intérieur des poulaillers pour poulets à griller : comparaison entre la litière de paille et la litière de mousse de tourbe
Apprenez-en davantage sur la comparaison de l’utilisation de la tourbe et de la paille comme litière dans les poulaillers à poulets de chair. Ces renseignements techniques sont destinés aux producteurs avicoles de l’Ontario.
ISSN 1198-7138, Publié février 2025
Introduction
Cette fiche d’information présente les résultats d’un projet de recherche mené sur le terrain en Ontario pour évaluer et analyser la qualité de l’air dans deux poulaillers commerciaux de poulets à griller en comparant l’utilisation d’une litière de mousse de tourbe et d’une litière de paille. Le projet a permis d’évaluer la concentration en poussières à l’intérieur des poulaillers, ses répercussions sur la santé des volailles et les risques pour les travailleurs.
Au début des années 2020, plusieurs producteurs de poulets à griller en Ontario ont commencé à utiliser de la mousse de tourbe comme litière au lieu de la paille ou des copeaux de bois traditionnels (figure 1). Ce changement a été motivé par la difficulté de s’approvisionner en matériaux de litière et parce qu’on croyait que la mousse de tourbe était un matériau plus absorbant. On croyait qu’il y aurait moins de risques que la litière produise de l’ammoniac durant le cycle de production des oiseaux si on parvenait à maintenir les poulaillers dans un état plus sec.
Peu de temps après l’adoption de la mousse de tourbe, plusieurs équipes chargées d’attraper la volaille ont commencé à signaler que leurs employés tombaient malades après avoir manipulé des oiseaux dans ces poulaillers (essoufflement, symptômes grippaux, irritation oculaire). On a commencé à suspecter que la litière de mousse de tourbe pourrait produire des particules de poussière plus petites que celles des litières traditionnelles. Ces particules pourraient alors contourner les mécanismes normaux de filtration pulmonaire des oiseaux et des mammifères, et pénétrer plus profondément dans leurs poumons, causant ainsi des maladies ou des effets indésirables. Cependant, il était impossible de confirmer ou d’infirmer cette théorie en l’absence de données.
Production de poulets à griller et matériaux de litière couramment utilisés
En Ontario, la production de poulets à griller fonctionne selon un système « tout plein/tout vide ». Avant l’arrivée d’un nouveau troupeau, le plancher en béton nu est recouvert de quelques centimètres de litière propre, le poulailler est préchauffé à une température de 30 °C à 32 °C, puis le personnel du couvoir y introduit les nouveaux poussins. Les oiseaux ont libre accès à la nourriture et à l’eau et peuvent se déplacer librement dans l’espace. Les poulaillers sont équipés d’un système de ventilation mécanique qui permet d’introduire de l’air frais dans le bâtiment et d’évacuer l’humidité, le dioxyde de carbone et d’autres aérocontaminants. Les volailles y restent jusqu’à ce qu’elles atteignent le poids requis pour l’expédition (après environ 30 à 45 jours), selon ce qu’exige l’entreprise de transformation. À ce moment, des équipes viennent les capturer et les charger dans des camions de transport pour les livrer à l’entreprise de transformation. Après avoir retiré les animaux du bâtiment, le producteur retire toute la litière et prépare le poulailler pour le nouveau troupeau.
La litière (tableau 1) remplit plusieurs fonctions importantes. Elle constitue une couche isolante et confortable au sol pour les poussins lorsqu’ils entrent dans le poulailler. Mais, surtout, c’est un matériau absorbant qui retient l’humidité. La production de poulets à griller est considérée comme un système à base de litière, car les volailles y déposent leurs excréments partout dans le bâtiment.
Type de litière | Disponibilité | Coût | Absorbabilité | Ressource renouvelable |
---|---|---|---|---|
Paille de céréales hachées | Oui | Raisonnable | Moins que la mousse de tourbe, mais similaire aux copeaux | Oui |
Copeaux de bois tendre séchés au séchoir | Plus difficile à obtenir ces dernières années | Variable | Moins que la mousse de tourbe, mais similaire à la paille hachée | Oui |
Tourbe de mousse en balles | Oui | Raisonnable | La meilleure | Non |
Paille en granulats | Oui | Option plus coûteuse | Moins que la mousse de tourbe, mais similaire aux copeaux | Oui |
Si la litière est trop sèche, davantage de poussières pourraient être libérées dans l’air quand les oiseaux se déplacent dans le poulailler. Par contre, si la litière devient trop humide pendant la période de croissance, la décomposition des composés azotés dans l’air peut engendrer de l’ammoniac.
Pendant les périodes les plus froides de l’année, le producteur fait fonctionner le système de ventilation afin d’introduire de l’air frais dans le poulailler et d’évacuer la vapeur d’eau. Il veut ainsi maintenir un taux d’humidité relative ne dépassant pas 70 % à l’intérieur du poulailler. Si le poulailler se trouve dans une humidité relative supérieure à 70 % pendant une période prolongée ou s’il y a un incident, comme une fuite d’eau dans la ligne d’abreuvement, la litière pourrait devenir plus humide que souhaité.
Dans un scénario idéal, le matériau de litière serait suffisamment absorbant pour retenir l’excès d’humidité et pour fournir une surface sèche sur laquelle les oiseaux peuvent marcher, mais suffisamment humide pour limiter la production de poussière lorsque les oiseaux se déplacent. Selon les recherches
Propriétés et mesure des poussières
Dans un poulailler de poulets à griller, la poussière est composée de matières fécales séchées, de peau morte, de matériaux de litière et de contaminants biologiques. La poussière est une forme de matière particulaire (PM). Ce terme désigne les matières microscopiques en suspension dans l’air ou dans l’eau. Les particules en suspension dans l’air sont désignées sous le nom d’aérosols. Les PM10 comprennent les particules dont le diamètre est inférieur à 10 micromètres (µm), tandis que les PM2,5 ont un diamètre inférieur à 2,5 µm.
À titre de comparaison, un cheveu humain a une largeur d’environ 100 µm; il faudrait donc 40 particules PM2,5 pour obtenir la même largeur. Ces particules sont invisibles à l’œil nu. De plus, elles ont tendance à se maintenir plus longtemps en suspension dans l’air du poulailler.
L’exposition professionnelle à des PM2,5 est particulièrement inquiétante, car ces particules sont si petites qu’elles peuvent pénétrer profondément dans les poumons. Les particules qui ont un diamètre de 0,5 µm et moins peuvent pénétrer dans la circulation sanguine et provoquer diverses maladies cardiovasculaires et respiratoires.
Pendant la période d’étude, on a mesuré, toutes les cinq minutes, les particules en suspension fractionnées par taille dans l’air du poulailler de chaque troupeau. Pour ce faire, un analyseur de matières particulaires TSI DustTrak a été utilisé. L’appareil a été installé au milieu de chaque poulailler. Chaque analyseur de PM se trouvait dans une boîte suspendue au plafond du poulailler et était muni d’une ligne d’échantillonnage qui pendait à mi-hauteur entre le plancher et le plafond afin de recueillir des échantillons d’air.
Compte tenu de la quantité importante de poussière dans les poulaillers, l’équipe de recherche a rencontré des problèmes de calibration des instruments de mesure des PM. Le niveau de poussière a aussi eu comme effet de bloquer l’unité de filtrage des instruments de mesure à quelques occasions. En se fondant sur une expérience antérieure de mesure de la poussière dans des poulaillers commerciaux, il a été décidé de visiter les poulaillers deux fois par semaine pour procéder à l’entretien et à l’étalonnage des instruments de mesure pendant les périodes de surveillance des troupeaux, ainsi que pour veiller à leur bon fonctionnement. Cependant, malgré ces visites bihebdomadaires, il est arrivé à plusieurs reprises que les instruments de mesure ne fonctionnaient pas correctement et ne receuillaient donc pas les données recherchées.
Conception expérimentale du projet de recherche
Mise en place dans une ferme/un poulailler
L’endroit choisi pour réaliser le projet de recherche sur le terrain comprenait deux étables de plain‑pied. La disposition des équipements (lignes d’alimentation, lignes d’abreuvement, emplacement du chauffage par tube radiant, emplacement des ventilateurs) était identique dans les deux bâtiments. Les deux bâtiments étaient ventilés de façon transversale au moyen de ventilateurs d’extraction situés sur chaque mur de l’axe long. Il y avait le même nombre de ventilateurs d’extraction dans les deux bâtiments et ces ventilateurs étaient de même taille. Les ventilateurs brasseur d’air intérieurs des deux bâtiments procédaient à la distribution de l’air de façon identique. Le même contrôleur de ventilation Genius était utilisé dans chaque poulailler.
Pour tenir compte des variations saisonnières dans les taux de ventilation dans les poulaillers et leurs conséquences sur les concentrations et les émissions de matières particulaires, quatre troupeaux ont été suivis tout au long de l’année (2022) :
- troupeau 1 — de la mi-février à la fin mars
- troupeau 3 — du 1er juillet au début du mois d’août
- troupeau 4 — du 31 août au début du mois d’octobre
- troupeau 5 — du 4 novembre au début décembre
Le troupeau 2, qui a eu lieu entre avril et juin, n’a pas été suivi dans le cadre du projet de recherche en raison de la présence de l’influenza aviaire hautement pathogène en Ontario. Les chercheurs ont préféré ne pas visiter l’exploitation avicole durant cette période à haut risque.
Les poussins de tous les troupeaux ont été placés dans les deux poulaillers le même jour et selon la même densité. Ils ont été nourris selon la même ration alimentaire et expédiés à des fins de transformation vers le 34e jour du cycle de production.
Le type de litière a été alterné pour chaque troupeau placé dans un poulailler (c’est-à-dire que, si une litière de mousse de tourbe avait été utilisée dans le poulailler 1 pour le troupeau 1, on a ensuite utilisé une litière de paille pour le prochain troupeau placé dans le poulailler 1).
En plus des mesures de poussières PM10 et PM2,5 recueillies au cours du projet de recherche, des données sur d’autres paramètres environnementaux ont également été recueillies toutes les cinq minutes dans les poulaillers, soit la température et l’humidité relative.
Collecte d’échantillons de litière
Au cours du projet d’étude, des échantillons de litière ont été prélevés dans chaque poulailler deux fois par semaine afin de vérifier le taux d’humidité, le pH et les concentrations de nutriments. Parmi les facteurs qui influent sur la formation d’ammoniac gazeux à partir du fumier et de la litière de volaille, on retrouve des concentrations élevées d’ammonium (NH4+), des températures élevées et des taux d’humidité élevés dans l’air, ainsi qu’un taux d’humidité et un pH élevés dans le fumier et la litière
Humidité
L’eau est un réactif nécessaire à la production d’ammoniac (NH3) durant la décomposition microbienne des composés azotés présents dans le fumier de volaille. Une litière ayant un taux d’humidité plus élevé génère plus de NH3. Si le fumier peut atteindre un taux de matière sèche de 60 % dans les 50 premières heures, cela limite les émissions d’ammoniac
Production des troupeaux
Durant le projet de recherche, on a également enregistré, pour chaque poulailler, des données relatives à la production, comme le poids d’expédition moyen, la mortalité quotidienne et les condamnations.
Au Laboratoire d’hygiène vétérinaire de l’Université de Guelph, quatre séries d’examens postmortem ont été effectuées pour chaque troupeau suivi. Cinq oiseaux ont été prélevés dans chaque poulailler aux moments suivants :
- arrivée des poussins
- après 7 à 10 jours
- après 20 à 22 jours
- à l’âge d’expédition
Ces différents moments ont été choisis pour évaluer la santé globale des volailles, les éventuelles maladies et les problèmes de production. On a aussi accordé une attention particulière à la santé pulmonaire des oiseaux dans le contexte de leur exposition à l’environnement du poulailler.
Résultats de l’étude
Litière
Pour tous les troupeaux, la litière du poulailler où l’on avait mis de la litière de mousse de tourbe était plus sèche que celle du poulailler où l’on avait mis de la litière de paille hachée. La seule exception à cette observation a été observée dans le troupeau 1, pour lequel le producteur a utilisé des granulés de paille Straw Boss au lieu de la paille hachée. Dans les deux poulaillers, le taux d’humidité de la litière a augmenté au fil du cycle de production, au fur et à mesure que les oiseaux grandissaient (figure 2).
Pour tous les troupeaux, la litière de mousse de tourbe affichait initialement un pH plus bas que la litière de paille, car la mousse de tourbe est récoltée dans un environnement acide. Cependant, au fil du cycle de production dans les deux poulaillers, à mesure que les oiseaux déposaient davantage d’excréments sur la litière, le pH de la litière a commencé à dépasser le niveau neutre pour atteindre la plage alcaline (> pH 7) (figure 3).
Le pH a augmenté plus rapidement dans le cas de la mousse de tourbe que dans celui de la paille hachée. Cela indique que la paille hachée est un meilleur tampon pour maintenir le pH que la mousse de tourbe.
Matières particulaires
Chacun des graphiques pour les troupeaux affiche des tendances dans les pics et creux recensés en ce qui concerne les taux quotidiens de PM. Les pics se produisent normalement pendant les périodes où les oiseaux se déplacent, mangent et boivent activement (lumières allumées), et les creux se produisent souvent au milieu de la nuit (lumières éteintes), lorsque les oiseaux se reposent sur la litière.
Les relevés de PM étaient toujours plus élevés dans le poulailler doté d’une litière de mousse de tourbe, quelle que soit la fraction mesurée dans les quatre troupeaux surveillés.
C’est pour le troupeau 4 que l’on a obtenu l’ensemble de données le plus complet en ce qui a trait aux PM, tant pour les PM10 que pour les PM2,5. Les figures 4 et 5 sont des graphiques représentatifs pour chaque type de litière.
Ces graphiques révèlent une tendance intéressante : dans les deux poulaillers, les niveaux de poussière augmentent beaucoup au cours des 10 derniers jours du cycle de production. Cela se produit à un moment où la température extérieure descend de 10 °C à 20 °C en deçà de la température de consigne du poulailler à certains moments de la journée (figure 6). Cela amènerait le contrôleur de ventilation à arrêter plusieurs ventilateurs d’extraction dans chaque poulailler afin de maintenir la température de consigne dans le poulailler, ce qui réduirait le renouvellement de l’air dans le poulailler et entraînerait une augmentation des niveaux de PM. Pendant les 20 à 25 premiers jours du cycle de production, les températures ambiantes étaient assez chaudes, égalant ou dépassant parfois la température de consigne pour le poulailler. Par conséquent, le contrôleur de ventilation aurait fait fonctionner les ventilateurs davantage pour éviter que la température à l’intérieur du poulailler augmente encore plus. Cette capacité de ventilation supplémentaire permettrait d’évacuer davantage de matières particulaires du poulailler, ce qui se traduirait par une réduction des matières particulaires enregistrées.
Le tableau 2 présente les pics de PM enregistrés pour chaque troupeau et chaque poulailler, et une comparaison entre les PM10 et les PM2,5. Certains ensembles de données n’étaient pas complets en raison de problèmes d’équipement; il se peut donc que des pics plus élevés n’aient pas été enregistrés.
Troupeau | Pic PM10 – Paille (mg/m3) | Pic PM10 – Mousse de tourbe (mg/m3) | Pic PM2,5 – Paille (mg/m3) | Pic PM2,5 – Mousse de tourbe (mg/m3) |
---|---|---|---|---|
Troupeau 1 18 févr.–25 mars | 1,8 | 8,3 | 0,7 | 3,0 |
Troupeau 3 1er juill.–6 août | 0,5 | 3,7 | 0,3 | 1,0 |
Troupeau 4 31 août–4 oct. | 2,8 | 4,7 | 0,9 | 1,1 |
Troupeau 5 4 nov.–8 déc. | 2,1 | 5,5 | 0,7 | 1,3 |
Les taux de PM les plus élevés qui ont été enregistrés durant l’ensemble du projet de recherche, tant pour les PM10 que pour les PM2,5, ont été relevés dans le poulailler du troupeau 1, dont le plancher était recouvert d’une litière de mousse de tourbe, au cours des deux premiers jours suivant l’arrivée des poussins. Cela était probablement dû à un taux de ventilation très bas (mélange minimal d’air frais) pour ces jeunes oiseaux pendant la période la plus froide de l’année combiné et à une litière de mousse de tourbe très sèche, puisque des balles gelées avaient été apportées dans le poulailler chauffé plusieurs jours avant l’arrivée des poussins, afin qu’elles dégèlent.
Les taux de PM10 et de PM2,5 les plus bas ont été observés dans les deux poulaillers où se trouvait le troupeau d’été (troupeau 3). Cela peut s’expliquer par des taux de renouvellement de l’air beaucoup plus élevés, car tous les ventilateurs d’extraction fonctionnaient afin de contrôler la température des poulaillers pour les oiseaux pendant cette période où les températures ambiantes étaient plus élevées.
Résultats concernant le rendement des troupeaux
Durant le projet de recherche, le pourcentage de mortalité enregistré pour chaque troupeau comprenait tous les oiseaux morts dans le poulailler durant le projet, plus les oiseaux qui n’ont pas été expédiés et qui ont été euthanasiés par le producteur. L’examen des données sur le rendement de chaque troupeau (tableau 3) a révélé ce qui suit :
- dans chaque troupeau, le poids moyen des oiseaux au moment de l’expédition était plus élevé dans le poulailler dont le plancher était recouvert de litière de tourbe
- dans trois des quatre troupeaux suivis, le taux de mortalité était plus élevé dans le poulailler dont le plancher était recouvert de litière de tourbe
Troupeau | Poids moyen d’expédition Poulailler 1 | Poids moyen d’expédition Poulailler 2 | Mortalité (%) (y compris les oiseaux qui n’ont pas été emmenés lors de l’expédition) Poulailler 1 | Mortalité (%) (y compris les oiseaux qui n’ont pas été emmenés lors de l’expédition) Poulailler 2 | Condamnations au moment de la transformation (%) Poulailler 1 | Condamnations au moment de la transformation (%) Poulailler 2 |
---|---|---|---|---|---|---|
Troupeau 1
18 févr.–25 mars | 2,41 kg (tourbe) | 2,37 kg (paille) | 7,8 (tourbe) | 4,1 (paille) | 1,50 (tourbe) | 1,50 (paille) |
Troupeau 3
1er juill.–6 août | 2,45 kg (paille) | 2,50 kg (tourbe) | 3,6 (paille) | 6,6 (tourbe) | 2,23 (paille) | 3,52 (tourbe) |
Troupeau 4
31 août–4 oct. | 2,32 kg (tourbe) | 2,30 kg (paille) | 5,6 (tourbe) | 6,3 (paille) | 1,84 (tourbe) | 3,98 (paille) |
Troupeau 5
4 nov.–8 déc. | 2,18 kg (paille) | 2,22 kg (tourbe) | 4,1 (paille) | 5,4 (tourbe) | 1,01 (paille) | 0,90 (tourbe) |
Répercussions sur la santé
Chez les humains, l’exposition à court et à long terme aux matières particulaires peut causer des problèmes de santé, notamment l’asthme, la bronchite chronique, l’irritation des voies respiratoires, la diminution des fonctions respiratoires, l’augmentation de l’incidence du cancer du poumon et la mort prématurée chez les personnes ayant des antécédents de maladies pulmonaires ou cardiaques
En Ontario, le Règl. de l’Ont. 833 — Contrôle de l’exposition à des agents biologiques ou chimiques, pris en application de la Loi de 1990 sur la santé et la sécurité au travail, fixe des limites d’exposition pour les travailleurs exposés aux poussières de volaille. La réglementation définit la « limite moyenne pondérée dans le temps » (LMPT) comme la moyenne pondérée dans le temps des concentrations dans l’air d’un agent biologique ou chimique auquel un travailleur peut être exposé pendant une journée ou une semaine de travail. La LMPT fixée pour les poussières de volaille (poussières totales) est de 5 mg/m3.
Le Règl. de l’Ont. 833 — Contrôle de l’exposition à des agents biologiques ou chimiques, prévoit des limites d’exposition professionnelle pour les matières particulaires :
- Norme LMPT pour la fraction inhalable des matières particulaires : 10 mg/m3
- Norme LMPT pour la fraction respirable des matières particulaires : 3 mg/m3 (Règl. de l’Ont. 833)
La fraction inhalable correspond aux PM10 et la fraction respirable correspond aux PM2,5.
Les oiseaux sont considérés comme les vertébrés ayant le système d’échange gazeux respiratoire le plus efficace (figure 7). L’adaptation au vol les a dotés d’un système d’échange d’air plus efficace. Les parabronches (les plus petits organes d’échanges gazeux chez les oiseaux) ont un diamètre de 3 à 10 µm, comparativement aux plus petites alvéoles chez les mammifères (35 µm chez les musaraignes). L’épaisseur de leur membrane alvéolocapillaire correspond à environ un tiers de celle des mammifères
Toutes les parties du système respiratoire (sinus nasaux, trachée, bronches primaires et secondaires des poumons) possèdent un épithélium cilié et des glandes qui produisent du mucus. Cela permet de capter les matières étrangères dans la couche de mucus et de les éliminer grâce au mouvement des cils. Toutefois, ces barrières physiques ont leurs limites. Lorsque ces barrières sont contournées ou endommagées, les particules peuvent pénétrer dans le système respiratoire.
Les particules inhalables lors de l’inspiration atteignent les sinus nasaux, la trachée et les grosses bronches. Chez les humains, les particules inhalables sont celles ayant un diamètre de <10 µm
Les particules respirables peuvent rentrer profondément dans les zones d’échange gazeux des poumons des humains (alvéoles, <4-5 µm) et des volailles (parabronches et capillaires aériens, <2,5 µm), ce qui signifie que le diamètre des poussières respirables est plus petit chez les oiseaux que chez les mammifères
Le gaz ammoniac peut affecter la fonction des cils, ralentir l’élimination des particules étrangères, augmenter le risque d’inflammation et accroître le risque d’infection. Cependant, des particules plus grosses peuvent pénétrer plus profondément dans le système respiratoire en cas de respiration par la bouche
Les poulaillers sont connus pour avoir des concentrations plus élevées de particules dans l’air que les porcheries ou les étables. Parmi les différents systèmes d’élevage de volailles, les concentrations de PM mesurées sont plus élevées dans les bâtiments dotés de litière (poulets à griller) que ceux dotés de cages (poules)
Dans l’étude réalisée en Ontario, nous avons comparé l’exposition à la poussière chez les oiseaux élevés sur des copeaux comparativement à ceux élevés sur des litières de mousse de tourbe. Des particules végétales se sont infiltrées dans les poumons et les sacs aériens de tous les oiseaux, peu importe le matériau de litière se trouvant dans le poulailler. Lors de l’examen microscopique des échantillons de tissus prélevés durant les trois périodes établies (c’est-à-dire entre 7 à 10 jours, entre 20 à 22 jours et au moment de l’expédition), pour chaque troupeau, les éléments suivants ont été constatés le plus souvent :
- augmentation des concentrations de particules végétales dans les systèmes respiratoires supérieurs et inférieurs des oiseaux élevés dans des poulaillers dont le plancher était recouvert de mousse de tourbe
- présence de particules végétales incrustées dans le système respiratoire inférieur d’oiseaux élevés dans des poulaillers dont le plancher était recouvert de mousse de tourbe
Ces particules incrustées sont souvent associées à l’inflammation des bronches secondaires ou observées dans les macrophages des parabronches. Il est établi que l’exposition aux particules fines (≤ 2,5 µm) a des effets sur la santé qui, chez les poulets à griller, peuvent causer une inflammation des poumons et perturber le microbiote pulmonaire
L’examen de la concentration de PM dans l’air des poulaillers a permis de constater que les PM diminuent de manière directement proportionnelle à la distance avec le sol
Conclusion
Le projet de recherche a révélé que la litière de mousse de tourbe dans les poulaillers pour poulets à griller demeure légèrement plus sèche que la litière de paille. Pour les quatre troupeaux étudiés, une concentration de poussière beaucoup plus élevée a été enregistrée dans le poulailler doté d’une litière de mousse de tourbe.
Les poulets à griller commerciaux utilisés pour ce projet de recherche avaient une durée de vie relativement courte, puisqu’ils étaient expédiés pour être transformés après 34 jours dans le poulailler. On ne connaît pas les effets de l’élevage sur une litière de mousse de tourbe sur la santé des oiseaux ayant une plus longue durée de vie (dindes, poules pondeuses ou coqs reproducteurs). La durée de l’exposition à cet environnement et les comportements des oiseaux (bains de poussière) pourraient contribuer à augmenter les problèmes de poussière. Cela poserait également un problème pour la santé des producteurs et du personnel de soutien (travailleurs qui attrapent les volailles, équipes de vaccination, équipes d’insémination artificielle) qui travaillent dans ces poulaillers pendant des périodes prolongées.
Les concentrations d’aérosols se situant dans la fourchette de dimensions des PM10 et des PM2,5, soit les particules les plus dangereuses, étaient proches des limites de la LMPT spécifiées dans le Règl. de l’Ont. 833. Par conséquent, toute personne travaillant dans un tel environnement devrait utiliser un masque ou un respirateur N95 bien ajusté afin d’éviter d’inhaler ces particules.
Rédaction
Cette fiche d’information a été rédigée par Al Dam, spécialiste de l’aviculture, Ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et de l’Agroentreprise (MAAAO); Daniel Ward, ingénieur, équipement et structures pour volaille et autres animaux, MAAAO; et Dre Emily Martin, D.M.V., M. Sc., membre agréée de l’ACPV, Laboratoire d’hygiène vétérinaire, Université de Guelph. Nous remercions le Dr Bill Van Heyst et son étudiant de maîtrise, Seif Ali, de l’Université de Guelph, pour la réalisation de ce projet de recherche.
Texte en format accessible
Figure 2. Taux d’humidité enregistrés pour la litière du troupeau 5.
Un graphique linéaire dont l’axe horizontal est le temps exprimé en jours et l’axe vertical est le taux d’humidité de la litière exprimé en pourcentage. Le graphique contient deux lignes parallèles qui montent en diagonale depuis la partie inférieure gauche du graphique vers la partie supérieure droite du graphique. Cela démontre que les deux types de litière sont devenus plus humides au fur et à mesure que les oiseaux grandissaient. La ligne rouge inférieure représente la litière de mousse de tourbe, laquelle est demeurée plus sèche tout au long du cycle de croissance, tandis que la ligne bleue supérieure représente la litière de paille.
Figure 3. pH enregistré pour les matériaux de litière du troupeau 5.
Un graphique linéaire dont l’axe horizontal représente le nombre de jours et l’axe vertical représente le pH de la litière sur une échelle de 1 à 14. Le graphique présente deux lignes qui montent en diagonale depuis la partie inférieure gauche du graphique vers la partie supérieure droite du graphique. La ligne rouge inférieure représente la litière de mousse de tourbe, tandis que la ligne bleue représente la litière de paille. La pente de la ligne rouge est beaucoup plus forte que celle de la ligne bleue, ce qui indique que le niveau de pH de la litière de tourbe augmente plus rapidement que celui de la litière de paille.
Figure 4. Données relatives aux PM10 pour le troupeau 4.
Deux graphiques côte à côte. Dans les deux graphiques, l’axe horizontal indique le nombre de jours et l’axe vertical indique la concentration horaire de PM10 mesurée en milligrammes par mètre cube de volume. Le graphique de gauche montre, au moyen d’une ligne bleue continue, les mesures enregistrées dans le poulailler muni d’une litière de paille, tandis que le graphique de droite montre, au moyen d’une ligne rouge, les mesures enregistrées dans le poulailler muni d’une litière de mousse de tourbe. Les deux graphiques montrent une série de pics et de creux, car la concentration de poussières varie quotidiennement en fonction de l’activité des oiseaux. Les pics se produisent pendant la journée, lorsque les oiseaux se déplacent activement, et les creux se produisent la nuit, lorsque les oiseaux ne se déplacent pas.
Figure 5. Données relatives aux PM2,5 pour le troupeau 4.
Deux graphiques côte à côte. Dans les deux graphiques, l’axe horizontal indique le nombre de jours et l’axe vertical indique la concentration horaire de PM2,5 mesurée en milligrammes par mètre cube de volume. Le graphique de gauche montre, au moyen d’une ligne bleue continue, les mesures enregistrées dans le poulailler muni d’une litière de paille, tandis que le graphique de droite montre, au moyen d’une ligne rouge, les mesures enregistrées dans le poulailler muni d’une litière de mousse de tourbe. Les deux graphiques montrent une série de pics et de creux, car la concentration de poussières varie quotidiennement en fonction de l’activité des oiseaux. Les pics se produisent pendant la journée, lorsque les oiseaux se déplacent activement, et les creux se produisent la nuit, lorsque les oiseaux ne se déplacent pas.
Figure 6. Température à l’intérieur du poulailler comparativement à la température ambiante pour le troupeau 4.
Un graphique linéaire où le temps, en jours, est représenté sur l’axe horizontal et la température, en degrés Celsius, est représentée sur l’axe vertical. Le graphique comporte trois lignes : la ligne rouge correspond à la température à l’intérieur du poulailler muni d’une litière de mousse de tourbe, la ligne bleue représente la température à l’intérieur du poulailler muni d’une litière de paille, et la ligne verte représente la température ambiante extérieure.
Les lignes rouges et bleues montrent une progression vers le bas de gauche à droite, puisque la température de consigne du poulailler est réduite au fur et à mesure que les oiseaux grandissent. La ligne verte présente davantage de pics et de creux, car elle représente les températures pendant le jour (pics) et pendant la nuit (creux).
Figure 7. Système respiratoire des oiseaux (adapté de The Poultry Site).
Une coupe transversale d’une volaille montrant les différentes parties de son système respiratoire, l’emplacement des organes et la taille relative de chaque organe. Le système respiratoire se compose de la trachée, du sac aérien cervical, du sac aérien claviculaire, du sac aérien thoracique caudal, du sac aérien thoracique crânien et des sacs aériens abdominaux.
Notes en bas de page
- note de bas de page[1] Retour au paragraphe Carey, J.B., Lacey, R.E., & Mukhtar, S. (2004). « A Review of Literature Concerning Odors, Ammonia, and Dust from Broiler Production Facilities: 2. Flock and House Management Factors ». The Journal of Applied Poultry Research, 13(3), 509–513.
- note de bas de page[2] Retour au paragraphe Meisinger, J.J., & Jokela, W.E. (2000). « Ammonia Volatilization from Dairy and Poultry Manure ». Obtenu auprès du Natural Resource, Agriculture, and Engineering Service.
- note de bas de page[3] Retour au paragraphe Groot Koerkamp, P., Metz, J., Uenk, G., Phillips, V., Holden, M., Sneath, R., Short, J.L., White, R.P.P., Hartung, J., Seedorf, J. (1998). « Concentrations and emissions of ammonia in livestock buildings in Northern Europe ». Journal of Agricultural Engineering Research, 70(1), 79–95.
- note de bas de page[4] Retour au paragraphe Maliselo, P.S., & Nkonde, G.K. (2015). « Ammonia Production in Poultry Houses and Its Effect on the Growth of Gallus Gallus Domestica (Broiler Chickens): A Case Study of a Small Scale Poultry House in Riverside, Kitwe, Zambia ». International Journal of Scientific & Technology Research, 141–145.
- note de bas de page[5] Retour au paragraphe Viegas, S., Faisca, V.M., Dias, H., Clérigo, A., Carolino, E., & Viegas, C. (2013). « Occupational exposure to poultry dust and effects on the respiratory system in workers ». Journal of Toxicology and Environmental Health, 230–239.
- note de bas de page[6] Retour au paragraphe King, A.S., McLelland, J. « Birds – their structure and function ». London, Bailliere Tindall, 1984: 110–144.
- note de bas de page[7] Retour au paragraphe Hofstetter, D., Lorenzoni, G. « Poultry Dust – What You Need to Know About Impact on Bird Health ». PennState Extension, 2023.
- note de bas de page[8] Retour au paragraphe Parkes, W.R. « Aerosols: their definition and clearance ». Occupational lung disorders, 3e éd. Butterworths-Heinemann, London. pp. 35–49. 1994.
- note de bas de page[9] Retour au paragraphe Wang, K., Shen, D., Dai, P., Li, C. « Particulate Matter in Poultry House on Poultry Respiratory Disease: A Systematic Review ». Poultry Science, volume 102, numéro 4, 2023.
- note de bas de page[10] Retour au paragraphe David, B., Moe, R.O., Michel, V., Lund, V., & Mejdell, C. (2015). « Air Quality in Alternative Housing Systems May Have an Impact on Laying Hen Welfare. Part I-Dust ». Animals: An Open Access Journal from MDPI, 5(3), 495–511. doi:10.3390/ani5030368
- note de bas de page[11] Retour au paragraphe Wang, L., Cheng, H., Wang, D., Zhao, B., Zhang, J., Cheng, L., Yao, P., Di Narzo, A., Shen, Y., Yu, J., 2019. « Airway microbiome is associated with respiratory functions and responses to ambient particulate matter exposure ». Ecotoxicol. Environ. Saf. 167, 269–277.
- note de bas de page[12] Retour au paragraphe Riddell, C., Schwean, K., & Classen, H.L. (1998). « Inflammation of the Bronchi in Broiler Chickens, Associated with Barn Dust and the Influence of Barn Temperature ». Avian Diseases, 42(2), 225–229.
- note de bas de page[13] Retour au paragraphe Corbanie, E.A., Matthijs, M.G.R., van Eck, J.H.H., Remon, J.P., Landman, W.J.M., & Vervaet, C. (2006) « Deposition of differently sized airborne microspheres in the respiratory tract of chickens ». Avian Pathology, 35:6, 475–485.
- note de bas de page[14] Retour au paragraphe Cambra-López, M., Aarnink, A., Zhao, Y., Calvet, S., Torres, A. « Airborne particulate matter from livestock production systems: A review of an air pollution problem ». Environmental Pollution, volume 158, numéro 1, 2010, pages 1–17, ISSN 0269-491.
- note de bas de page[15] Retour au paragraphe Wang, K., Shen, D., Dai, P., Li, C. « Particulate Matter in Poultry House on Poultry Respiratory Disease: A Systematic Review ». Poultry Science, volume 102, numéro 4, 2023.
- note de bas de page[16] Retour au paragraphe Madelin, T.M., Wathes, C.M. « Air hygiene in a broiler house: Comparison of deep litter with raised netting floors ». Br. Poult. Sci. 1989, 30, 23–37.