Rapport 2024 sur les pertes hivernales en apiculture
Mortalité hivernale des colonies d’abeilles en 2024
En 2023-2024, le taux de mortalité hivernale estimé des abeilles mellifères chez les apiculteurs commerciaux ayant une exploitation en Ontario s’est chiffré à 50 % – une hausse par rapport à l’estimation de 36 % durant l’hiver 2022-2023.
La mortalité hivernale estimée chez les apiculteurs commerciaux ontariens a été d’environ 8 % supérieure aux pertes estimées qu’ont signalées les apiculteurs à petite échelle (43 %).
Enfin, la moyenne des pertes estimées d’abeilles mellifères en 2024 dans l’ensemble du Canada a été de 35 %.
Apiculteurs sondés
Au printemps 2024, on a envoyé le questionnaire du sondage par courriel à :
- 182 apiculteurs commerciaux inscrits (s’entend d’apiculteurs exploitant 50 colonies ou plus)
- 2 327 apiculteurs à petite échelle inscrits (s’entend d’apiculteurs exploitant 49 colonies ou moins)
On a acheminé le sondage par voie électronique à tous les apiculteurs inscrits (commerciaux et à petite échelle) qui avaient fourni leur adresse de courriel au ministère de l'Agriculture, de l'Alimentation et de l’Agroentreprise (MAAAO).
Les apiculteurs ont répondu au sondage sur une base volontaire et ont communiqué eux-mêmes leurs réponses. Ces renseignements ne sont pas vérifiés par le MAAAO. L’Association canadienne des professionnels de l'apiculture utilise ces renseignements ainsi que ceux recueillis par les autres provinces en vue de les réunir dans un rapport national.
On a reçu des réponses de :
- 105 apiculteurs commerciaux
- 726 apiculteurs à petite échelle
Il s’agit de 33 % des apiculteurs à qui l’on a fait parvenir le sondage (tableau 1).
En examinant les réponses reçues de l’ensemble des apiculteurs inscrits en Ontario au 31 décembre 2023, on constate ce qui suit :
- 58 % proviennent d’apiculteurs commerciaux représentant 50 803 colonies
- 31 % proviennent d’apiculteurs à petite échelle représentant 5 787 colonies
Les réponses combinées représentent 56 % du nombre total de colonies inscrites en 2023 (tableau 2).
Région apicole | Apiculteurs commerciaux – nbre de répondants | Apiculteurs commerciaux – % de répondants | Apiculteurs commerciaux – mortalité hivernale (%) | Apiculteurs à petite échelle – nbre de répondants | Apiculteurs à petite échelle – % de répondants | Apiculteurs à petite échelle – mortalité hivernale (%) |
---|---|---|---|---|---|---|
Centre | 39 | 37 | 51,2 | 237 | 33 | 48,0 |
Est | 19 | 18 | 47,6 | 205 | 28 | 42,7 |
Nord | 7 | 7 | 33,7 | 97 | 13 | 40,4 |
Sud | 33 | 31 | 54,9 | 138 | 19 | 36,5 |
Sud-Ouest | 7 | 7 | 25,5 | 49 | 7 | 40,3 |
Total | 105 | 58 | 50,4 | 726 | 31 | 42,6 |
Type d’apiculteurs | Nbre de colonies complètes hivernées à l’automne 2023 | Nbre de colonies hivernantes viables au 15 mai 2024 | Nbre de colonies non viables au 15 mai 2024 | Mortalité durant l’hiver (%) |
---|---|---|---|---|
Commercial | 50 803 | 25 192 | 25 611 | 50,4 % |
À petite échelle | 5 787 | 3 324 | 2 463 | 42,6 % |
Résultats
La mortalité hivernale estimée des abeilles mellifères et le nombre de répondants ont varié selon la région apicole. La majorité des apiculteurs commerciaux ayant répondu au sondage sont établis dans les régions apicoles du Centre et du Sud. C’est d’ailleurs dans ces régions que l’on trouve le plus grand nombre de colonies d'abeilles mellifères en Ontario. Les réponses reçues des apiculteurs à petite échelle provenaient principalement des régions apicoles du Centre et de l’Est (tableau 1).
Les apiculteurs commerciaux ont déclaré les pertes les plus importantes dans la région du Sud, tandis que les apiculteurs à petite échelle ont déclaré les pertes les plus élevées dans la région du Centre (tableau 1). On a constaté un écart du taux de mortalité durant l’hiver 2023-2024 entre les deux groupes d’apiculteurs, lequel a été de 7,8 points de pourcentage plus élevé chez les apiculteurs commerciaux que chez ceux à petite échelle (tableau 2).
Lorsque l’on groupe les répondants selon la taille de leur exploitation (nombre de colonies dans l’exploitation), la mortalité des abeilles mellifères durant l’hiver 2023-2024 varie de 30,9 % à 59,4 % (tableau 3).
- Les apiculteurs dont l’exploitation compte entre 201 et 500 colonies ont déclaré moins de pertes de colonies d’abeilles mellifères (30,9 %) que tous les autres groupes d’exploitations apicoles.
- Les apiculteurs ayant plus de 1 000 colonies ont subi les pertes les plus importantes (59,4 %). (D’après seulement 9 réponses reçues.)
D’autres exploitations apicoles de différentes tailles ont également enregistré des pertes hivernales élevées :
- Les apiculteurs ayant moins de 10 colonies ont déclaré des pertes de 49,0 %.
- Les apiculteurs ayant entre 10 et 49 colonies ont déclaré des pertes de 39,3 %.
- Les apiculteurs ayant entre 50 et 200 colonies ont déclaré des pertes de 35,5 %.
- Les apiculteurs ayant entre 501 et 1 000 colonies ont déclaré des pertes de 43,1 %.
Nbre de répondants | Nbre de colonies déclarées à l’automne 2023 | Mortalité hivernale (%) |
---|---|---|
548 | moins de 10 | 49,0 |
178 | 10 à 49 | 39,3 |
68 | 50 à 200 | 35,5 |
11 | 201 à 500 | 30,9 |
17 | 501 à 1 000 | 43,1 |
9 | plus de 1 000 | 59,4 |
Bien que les résultats du sondage révèlent que les apiculteurs ontariens ont subi des pertes très élevées, certains apiculteurs ont réussi à maintenir des niveaux de mortalité hivernale très bas. D’après les résultats du sondage, 12 apiculteurs commerciaux ont déclaré des pertes hivernales inférieures à 10 % (les estimations se situaient entre 3 % et 9 %).
Principaux facteurs expliquant la mort des abeilles
Les apiculteurs ont indiqué quels principaux facteurs, selon eux, ont eu une incidence sur le taux de mortalité de leurs abeilles mellifères durant l’hiver. Ils pouvaient sélectionner toutes les raisons qui, à leur avis, étaient plausibles. Ces opinions peuvent être basées sur des symptômes observables, ou sur l’expérience, le jugement ou les hypothèses les plus probables des apiculteurs.
Les facteurs que les apiculteurs commerciaux ont déclarés les plus souvent comme influant sur la mortalité hivernale (tableau 4) sont les suivants :
- le varroa (et virus associés)
- les colonies faibles
- la mauvaise qualité des reines
Les facteurs que les apiculteurs à petite échelle ont déclarés les plus souvent comme influant sur la mortalité hivernale (tableau 4) sont les suivants :
- les colonies faibles
- les conditions météorologiques
- ne sait pas
Empoisonnement causé par des produits chimiques ou des pesticides
Un certain nombre d’apiculteurs ont sélectionné « autre » comme cause soupçonnée de perte de colonies, et plusieurs d’entre eux ont mentionné que la perte de colonies est sans doute attribuable à un empoisonnement causé par des produits chimiques ou des pesticides.
Apiculteurs commerciaux
- 24 % ont sélectionné « autre » comme cause soupçonnée de perte de colonies
- 68 % (17 apiculteurs) ayant répondu « autre » ont rapporté un empoisonnement causé par des produits chimiques ou des pesticides
Apiculteurs à petite échelle
- 10 % ont sélectionné « autre » comme cause soupçonnée de perte de colonies
- 24 % (17 apiculteurs) ayant répondu « autre » ont rapporté un empoisonnement causé par des produits chimiques ou des pesticides
En 2023, le MAAAO a reçu quatre rapports d’incident de mortalité saisonnière des abeilles mellifères :
- deux de ces rapports ont indiqué aucun incident dû à l’épandage de pesticides
- deux de ces rapports ont indiqué ignorer s’il y a eu un incident dû à l’épandage de pesticides
Il est surprenant de constater le nombre de répondants au sondage ayant déclaré un empoisonnement soupçonné dû aux pesticides comme facteur ayant entraîné la mortalité des colonies d’abeilles mellifères durant l’hiver. Les réponses au sondage laissent supposer que les apiculteurs ont observé un incident d’exposition aux pesticides ou d’épandage de pesticides et ne l’ont pas signalé au MAAAO. Ou il se peut qu’ils fassent des allégations non fondées ou des suppositions. Bien que les apiculteurs ne connaissent pas la cause ou ne l’aient pas observée, ils peuvent croire que les pesticides ont provoqué la mortalité de leurs abeilles mellifères s’ils n’ont remarqué aucune autre cause évidente.
Les apiculteurs qui présument que la mortalité des colonies est attribuable aux pesticides sans s’interroger sur les autres raisons possibles peuvent, à long terme, nuire à leur exploitation. En effet, il se peut qu’ils ignorent d’autres facteurs sous-jacents dont ils devraient se soucier, comme les lacunes dans la lutte contre le varroa.
Il est recommandé aux apiculteurs d’examiner régulièrement leurs pratiques de lutte, notamment les moments auxquels ils appliquent les traitements, les calendriers de contrôle, et les étapes de lutte contre les insectes nuisibles et les maladies. La lutte contre le varroa peut représenter un défi de taille, car l’omission d’une ou de deux étapes de lutte est susceptible d’entraîner la mort d’un grand nombre d’abeilles, voire de l’ensemble de la colonie.
Bien qu’il soit important de prendre connaissance des préoccupations relatives à un empoisonnement soupçonné causé par les pesticides, il est primordial de signaler de tels incidents au MAAAO. Les apiculteurs sont invités à se servir du formulaire en ligne de déclaration d’un incident majeur de mortalité des abeilles mellifères survenu au cours de la saison apicole active.
Cause soupçonnée de perte de colonies | % d’apiculteurs commerciaux ayant fait une déclaration | % d’apiculteurs à petite échelle ayant fait une déclaration |
---|---|---|
Mauvaise qualité des reines | 31 | 15 |
Colonies faibles | 38 | 26 |
Conditions météorologiques | 27 | 24 |
Famine | 23 | 9 |
Varroa (et virus associés) | 48 | 22 |
Autre | 24 | 10 |
Ne sait pas | 19 | 24 |
Nosémose | 7 | 1 |
Pratiques de lutte contre les insectes nuisibles et les maladies
Varroa (Varroa destructor)
Dans ce sondage, on a demandé aux apiculteurs comment ils surveillaient les infestations de varroa (figure 1), et quels traitements ils avaient utilisés tout au long de la saison apicole 2023, soit au printemps, à la mi-saison ainsi que de la fin de l’été à l’automne (tableau 5).
Proportion d’apiculteurs exerçant une surveillance du varroa
Parmi les apiculteurs qui ont répondu à la question concernant la détection du varroa, 92 % d’apiculteurs commerciaux et 66 % d’apiculteurs à petite échelle ont indiqué qu’ils surveillaient les infestations de varroa dans leurs colonies. Ces apiculteurs ont eu recours à plusieurs méthodes de détection, les plus fréquentes étant le lavage à l’alcool et les plaquettes adhésives (figure 1).
Certains apiculteurs ont dit utiliser plus d’une méthode pour détecter la présence de varroas. Parmi les apiculteurs ayant répondu « autre » aux questions de surveillance du varroa :
- 2 % ont mentionné faire une inspection visuelle de leurs colonies pour déceler la présence de varroas
- 7 % ont déclaré se servir de la méthode du saupoudrage de sucre
- 1 % ont indiqué se servir de la méthode du cylindre de CO2
Ces méthodes ne sont ni officiellement recommandées ni jugées efficaces dans la mesure où il n’est pas prouvé que la détection visuelle du varroa procure des renseignements précis et où la fiabilité des méthodes de saupoudrage de sucre et du cylindre de CO2 est douteuse, car aucun lien n’est établi entre ces méthodes et les seuils de traitement fixés pour l’Ontario.
La majorité des apiculteurs commerciaux (92 %) ayant participé à ce sondage exerce une surveillance du varroa. Ce nombre continue d’augmenter par rapport au pourcentage de 86 % en 2022-2023 et de 79 % en 2021-2022. Le nombre d’apiculteurs commerciaux qui ne procèdent pas à la détection du varroa a diminué de 6 % comparativement au sondage 2022-2023. Il convient de faire un rapprochement entre cette tendance positive et d’autres aspects de la lutte contre le varroa, comme la fréquence du prélèvement d’échantillons.
En comparaison, seulement 66 % des apiculteurs à petite échelle ont déclaré exercer une surveillance du varroa en 2023-2024, une diminution par rapport aux 69 % qui avaient indiqué le faire lors du sondage de l’année précédente (2022-2023).
Préoccupations relatives au manque de surveillance
Bien que le nombre d’apiculteurs commerciaux ayant répondu au sondage qui prélèvent des échantillons afin de détecter la présence du varroa augmente, il demeure alarmant que 8 % des apiculteurs commerciaux et 34 % des apiculteurs à petite échelle ont déclaré n’effectuer aucune activité de détection du varroa.
On peut supposer que les « autres » méthodes (8 % des apiculteurs commerciaux et 10 % des apiculteurs à petite échelle), qui sont insuffisantes pour exercer une surveillance fiable, haussent le niveau de surveillance nulle ou insuffisante dans les deux catégories d’apiculteurs.
Près de la moitié des apiculteurs à petite échelle n’exercent pas une surveillance adéquate ou n’exercent aucune surveillance, ce qui augmente le risque de propagation du varroa à d’autres colonies à proximité. Compte tenu de la menace considérable que le varroa fait peser sur l’industrie, il est possible que les récentes estimations élevées de pertes hivernales soient liées au manque de surveillance.
Importance de la surveillance
Une surveillance efficace combinée à des pratiques de lutte sont essentielles pour lutter contre le varroa.
- La surveillance, le prélèvement fréquent d’échantillons de varroa et l’application opportune de traitements contre le varroa sont indispensables pour lutter contre cet important ennemi des abeilles mellifères.
- Sans la mise en œuvre de mesures appropriées de lutte contre le varroa, les colonies sont exposées à un risque élevé de mortalité et de propagation du varroa à d’autres colonies situées à proximité.
- La recherche a révélé qu’une lutte inefficace contre le varroa est la première cause de mortalité hivernale au sein des colonies d'abeilles mellifères en Ontario
footnote 2 .
Fréquence de surveillance du varroa
Une proportion importante d’apiculteurs commerciaux et à petite échelle prélèvent des échantillons au moins deux fois par saison. Puisqu’il s’agit du strict minimum, il est encourageant de constater que certains d’entre eux le font même trois fois par saison (figure 2).
Une analyse plus détaillée (figure 3) de ces apiculteurs qui prélèvent des échantillons plus de trois fois par année montre que le prélèvement mensuel d’échantillons est effectué par :
- 44 % des apiculteurs commerciaux
- 51 % des apiculteurs à petite échelle
Les résultats du sondage révèlent que des progrès restent à faire concernant la fréquence de la surveillance du varroa chez les deux catégories d’apiculteurs. Le prélèvement mensuel d’échantillons de varroa (dans un certain nombre de colonies et de ruchers) est nécessaire pour lutter contre cet important insecte nuisible.
Une surveillance fréquente et après l’application d’un traitement, notamment à mesure que la saison apicole avance, constitue l’une des plus importantes pratiques de gestion que peuvent adopter les apiculteurs. Cette façon de faire contribue à s’assurer d’appliquer en temps opportun un traitement contre le varroa et d’empêcher celui-ci de causer trop de dommages.
Traitements utilisés pour lutter contre le varroa
Les apiculteurs ontariens ont recours à différents traitements pour lutter contre le varroa (tableau 5). À l’occasion du sondage, on leur a demandé quels traitements contre le varroa ils ont utilisés durant trois périodes de 2023. Ces périodes sont définies comme suit :
- printemps – de la fin de l’hiver au commencement de la miellée
- mi-saison – du commencement à la fin de la miellée
- fin de l’été à l’automne – de l’enlèvement des dernières hausses aux fins de la production de miel jusqu’à la préparation des colonies pour l’hiver
La plupart des apiculteurs commerciaux ont déclaré avoir utilisé l’acide oxalique (32 %) et ApivarMD (31 %) comme méthodes chimiques pour lutter contre le varroa au printemps 2023, alors qu’ils ont indiqué s’être servis de façon générale d’acide oxalique (60 %) et d’ApivarMD (42 %) de la fin de l’été à l’automne 2023. Les apiculteurs à petite échelle ont, pour leur part, dit avoir principalement eu recours à ApivarMD (24 %) et à Formic Pro (22 %) pour lutter contre le varroa au printemps 2023, tandis que de la fin de l’été à l’automne 2023, la majorité d’entre eux ont privilégié les traitements à l’acide oxalique (31 %) et à l’ApivarMD (30 %).
Traitement contre le varroa (ingrédient actif) | Printemps 2023 – % d’apiculteurs commerciaux | Printemps 2023 – % d’apiculteurs à petite échelle | Mi-saison 2023 – % d’apiculteurs commerciaux | Mi-saison 2023 – % d’apiculteurs à petite échelle | Fin de l’été/automne 2023 – % d’apiculteurs commerciaux | Fin de l’été/automne 2023 – % d’apiculteurs à petite échelle |
---|---|---|---|---|---|---|
ApistanMD (fluvalinate) | 4 | 5 | S.O. | S.O. | 4 | 5 |
CheckMite+MC (coumaphos) | 0 | 0 | S.O. | S.O. | 0 | 0 |
ApivarMD (amitraze) | 31 | 24 | S.O. | S.O. | 42 | 30 |
Thymovar (thymol) | 2 | 2 | S.O. | S.O. | 8 | 2 |
ApiLifeVar (thymol et huiles essentielles) | 0 | 1 | S.O. | S.O. | 3 | 1 |
BayvarolMD (fluméthrine) | 0 | 4 | S.O. | S.O. | 0 | 0 |
Acide formique 65 % – 40 ml, épandages multiples | 12 | 3 | S.O. | S.O. | 19 | 5 |
Acide formique 65 % – 250 ml, épandage unique | 4 | 3 | S.O. | S.O. | 3 | 2 |
Mite Away Quick StripMC (acide formique) | 3 | 3 | 6 | 4 | 3 | 3 |
Formic Pro (acide formique) | 18 | 22 | 31 | 24 | 14 | 18 |
Acide oxalique | 32 | 17 | S.O. | S.O. | 60 | 31 |
Hopguard II (composés de houblon) | 1 | 1 | 1 | 1 | 2 | 1 |
Autre | 8 | 2 | 13 | 7 | 3 | 0 |
Aucun | 15 | 24 | 42 | 54 | 4 | 8 |
Les résultats ont révélé que 15 % des apiculteurs commerciaux et 24 % des apiculteurs à petite échelle sondés n’appliquent pas de traitement contre le varroa au printemps. Cette constatation est préoccupante dans la mesure où le printemps est une période très propice à la lutte contre les populations de varroas afin de prévenir les dommages que celles-ci peuvent causer et la croissance de ces populations au commencement de la saison apicole.
À l’instar de ce qui précède, il est inquiétant de remarquer que 4 % des apiculteurs commerciaux et 8 % des apiculteurs à petite échelle n’ont utilisé aucun traitement de la fin de l’été à l’automne. Il s’agit d’une autre période clé de l’année pour traiter, puisque les niveaux d’infestation de varroa culminent (figure 4). Si l’on ne réduit pas les niveaux d’infestation dans les semaines qui précèdent l’arrivée de l’hiver, les colonies d'abeilles mellifères font face à un risque élevé de mortalité avant, pendant et après l’hiver.
Une grande proportion d’apiculteurs commerciaux (42 %) et à petite échelle (54 %) ont fait savoir qu’ils n’avaient pas appliqué de traitement contre le varroa pendant la mi-saison 2023. Quant aux apiculteurs des deux groupes qui ont appliqué un traitement au cours de cette période, ils ont communément arrêté leur choix sur Formic Pro.
Le recours à un traitement de mi-saison est désormais un volet important de la stratégie visant à prévenir la croissance des populations de varroas et les dommages que celles-ci sont susceptibles de causer. Il se peut que l’emploi de traitements de mi-saison soit nouveau pour bon nombre d’apiculteurs ontariens, mais il s’agit s d’une stratégie importante à intégrer aux pratiques de lutte saisonnière afin de garder une longueur d’avance sur la croissance de la population de varroas. Dans la mesure où les printemps plus hâtifs peuvent faire en sorte que les niveaux de varroas culminent plus tôt que les années précédentes, cette stratégie s’avère déterminante.
Certains renseignements fournis par les apiculteurs ayant sélectionné l’option « autre » indiquent l’utilisation de traitements de mi-saison non homologués pour l’usage durant une miellée. Il se peut que des apiculteurs aient utilisé ces traitements parce qu’ils avaient enlevé les hausses de leurs ruches ou qu’ils assuraient la gestion de colonies ne produisant pas de miel, comme des nuclei ou des unités de pollinisation. Les renseignements recueillis au cours de ce sondage n’ont pas permis de déterminer si des traitements de mi-saison ont été employés conformément aux instructions sur l'étiquette.
Les traitements que les apiculteurs commerciaux et à petite échelle ont le moins fréquemment utilisés ont été :
- CheckMite+MC
- BayvarolMD
- ApiLifeVar
- Hopguard II ou III
Résistance des varroas à l’amitraze
Il semble que les apiculteurs ontariens emploient en alternance différents acaricides, une stratégie préconisée pour retarder l’apparition de populations de varroas résistantes. Certaines indications montrent que l’industrie délaisse le recours à ApivarMD comme méthode de lutte contre le varroa. Ce virage peut s’expliquer par les préoccupations soulevées quant au fait que le varroa acquière une résistance à l’amitraze, l’ingrédient actif d’ApivarMD.
À l’automne 2023, le Programme d'apiculture de l’Ontario et le programme de transfert de technologie de l’Ontario Beekeepers’s Association ont mené une petite étude dans le but d’examiner la résistance à l’amitraze en Ontario. Les résultats ont révélé la grande efficacité de l’amitraze (90 % et plus) pour la plupart des échantillons prélevés. Bien que l’étude ne soit pas parvenue à la conclusion qu’il existe une résistance avérée et généralisée à l’amitraze au sein des populations de varroas en Ontario, une telle possibilité ne peut pas être écartée dans la mesure où ce ne sont pas toutes les exploitations apicoles qui ont subi un test.
Le varroa en Ontario a développé une résistance à d’autres composés (ou l’efficacité de ceux-ci est plus faible), y compris les suivants :
- coumaphos
- fluvalinate
- fluméthrine
ApivarMD (amitraze) semble demeurer une option utile et plus efficace que d’autres méthodes de lutte contre le varroa. Les apiculteurs doivent être conscients qu’il existe une possibilité de résistance ou de faible efficacité, en raison des conditions ambiantes, lorsqu’un traitement de lutte contre le varroa est sensible à la température. Les apiculteurs peuvent également envisager la possibilité d’utiliser un traitement éclair comportant un acide organique avant et après la période d’utilisation complète d’ApivarMD. Conformément au mode d’emploi sur l’étiquette, les apiculteurs ne doivent pas combiner ApivarMD à d’autres traitements afin de ne pas faire perdre ses qualités à ApivarMD ou de ne pas avoir une incidence sur les abeilles que le fabricant n’aurait pas examinée au moyen de tests. Puisqu’on a documenté des cas de résistance à l’amitraze dans des populations de varroas aux États-Unis et dans d’autres régions du Canada (certaines provinces des Prairies), il est important de surveiller leur capacité de résistance en Ontario.
Plusieurs traitements de lutte contre le varroa dûment homologués sont offerts aux apiculteurs ontariens. Chacun de ces traitements possède ses propres avantages et inconvénients, et les apiculteurs doivent prendre leur propre décision sur lesquels utiliser en tenant compte de ce qui suit :
- l’efficacité
- le seuil de température
- le prix
- le temps de manutention
- les méthodes d’application
Il n’est pas recommandé d’examiner les traitements en se demandant exclusivement lequel est le meilleur traitement. Il se peut que les exploitations apicoles doivent envisager la possibilité de modifier certaines de leurs méthodes de production ou pratiques de travail établies afin d’adopter de nouvelles façons de lutter contre le varroa. En définitive, les apiculteurs ontariens doivent se fier à plusieurs types de traitements à employer en alternance et dont ils font possiblement de multiples applications pendant la saison apicole, ainsi qu’aux prélèvements réguliers d’échantillons de varroa et à la croissance prévue de la population de varroas (figure 4).
À l’avenir, de nouveaux composés et méthodes de traitement seront indispensables pour lutter contre le varroa afin que les apiculteurs disposent d’un certain nombre de traitements fiables qu’ils peuvent employer en alternance. De cette façon, les apiculteurs pourront continuer d’adopter des pratiques efficaces de lutte intégrée contre les ennemis des cultures dans leur exploitation apicole et gérer les populations de varroas pour assurer la survie de leurs colonies. Malheureusement, la mise au point, la mise à l’essai et l’inscription officielle de nouveaux composés et traitements peuvent prendre de nombreuses années.
Pratiques de lutte des apiculteurs contre le varroa
Les résultats du sondage ont fait ressortir le besoin de sensibiliser et de former davantage les apiculteurs en vue d’améliorer les pratiques de lutte intégrée contre les ennemis des cultures. Les apiculteurs commerciaux et à petite échelle doivent effectuer un meilleur dépistage du varroa et plus particulièrement augmenter la fréquence des prélèvements d’échantillons. Il s’agit d’une pratique essentielle dans la mesure où elle contribue à évaluer l’état de santé des colonies et à en améliorer les chances de survie à l’approche de l’hiver.
Chaque apiculteur doit surveiller régulièrement une fraction de ses colonies d'abeilles mellifères et de ses ruchers afin d’y détecter la présence de varroas, même après les traitements. Traiter simplement les colonies sans connaître le niveau d’infestation de varroa ne suffit pas. Les apiculteurs qui se fient seulement aux traitements sans exercer une surveillance sont plus à risque de perdre une grande partie de leurs colonies à cause du varroa.
Enfin, les apiculteurs doivent effectuer un traitement à différentes périodes clés de la saison et au moins trois fois au cours de celle-ci.
En l’absence de surveillance et de traitement pendant ces périodes clés, les apiculteurs ontariens continueront de subir des pertes importantes de leurs colonies et compromettront du même coup la viabilité de l’industrie apicole ontarienne.
Nosémose causée par le champignon Nosema sp. (N. apis et N. ceranae)
Quelque 86 % des apiculteurs commerciaux et 82 % des apiculteurs à petite échelle ayant répondu au sondage ont indiqué n’avoir appliqué aucun traitement contre la nosémose au printemps 2023, alors que 77 % des apiculteurs commerciaux et 68 % des apiculteurs à petite échelle ayant répondu au sondage ont fait savoir qu’ils n’avaient pas appliqué de traitement contre la nosémose à l’automne 2023 (tableau 6).
La nosémose est une maladie qui peut retarder le développement des colonies d'abeilles mellifères au printemps et qui réduit la durée de vie des abeilles mellifères. Elle ne s’est pas révélée un facteur de mortalité des colonies durant l’hiver
Traitement contre la nosémose | Printemps 2023 – % d’apiculteurs commerciaux | Printemps 2023 – % d’apiculteurs à petite échelle | Automne 2023 – % d’apiculteurs commerciaux | Automne 2023 – % d’apiculteurs à petite échelle |
---|---|---|---|---|
Fumagilline | 5 | 5 | 7 | 5 |
Autre | 3 | 1 | 3 | 0 |
Aucun | 86 | 82 | 77 | 68 |
Loque américaine (Paenibacillus larvae)
Moins de la moitié des apiculteurs commerciaux ayant répondu à cette question du sondage ont appliqué un traitement à l’oxytétracycline contre la loque américaine au printemps 2023 (46 %) et à l’automne 2023 (38 %). Par comparaison, 16 % des apiculteurs à petite échelle ont déclaré avoir appliqué un traitement contre la loque américaine au printemps et à l’automne (tableau 7).
Bien que l’utilisation préventive d’antibiotiques puisse protéger les abeilles de la propagation de la phase végétative de la loque américaine, elle ne les protège pas de la phase de sporulation de cette dernière. Par conséquent, les apiculteurs doivent procéder à des examens fréquents de leurs colonies pour observer les symptômes de la loque américaine et recourir à des pratiques en matière de biosécurité qui contribuent à atténuer la propagation possible des spores de la loque américaine dans et entre les exploitations.
Traitement contre la loque américaine | Printemps 2023 – % d’apiculteurs commerciaux | Printemps 2023 – % d’apiculteurs à petite échelle | Automne 2023 – % d’apiculteurs commerciaux | Automne 2023 – % d’apiculteurs à petite échelle |
---|---|---|---|---|
Oxytétracycline | 46 | 16 | 38 | 16 |
Tylosin | 1 | 0 | 1 | 0 |
Lincomycine | 0 | 0 | 0 | 0 |
Autre | 0 | 0 | 0 | 0 |
Aucun | 50 | 62 | 57 | 61 |
Mortalité hivernale en Ontario
L’Association canadienne des apiculteurs professionnels compile des données sur la mortalité hivernale que lui transmet chaque province et publie un rapport annuel sur les pertes de colonies d’abeilles mellifères à l’échelle nationale. La figure 5 présente une comparaison des niveaux de mortalité hivernale en Ontario et au Canada. Il est intéressant de constater que les pertes d’abeilles estimées en 2024 chez les apiculteurs commerciaux ontariens (50,4 %) sont approximativement 16 % supérieures à l’estimation des pertes moyennes d’abeilles pour l’ensemble du Canada (34,6 %).
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Figure 1. Différentes méthodes de détection du varroa utilisées par les apiculteurs commerciaux et à petite échelle en 2023. Les répondants pouvaient sélectionner plus d’une méthode de surveillance lorsqu’ils répondaient au sondage.
La figure 1 montre les différentes méthodes de détection du varroa qu’ont utilisées les apiculteurs commerciaux et à petite échelle en 2023. Chez les apiculteurs commerciaux, 8 % ont déclaré utiliser la méthode de la plaquette adhésive, 68 % la méthode du lavage à l’alcool, 8 % la méthode de la plaquette adhésive et du lavage à l’alcool, 8 % une autre méthode, et 8 % ont dit ne pas procéder à la détection du varroa. Chez les apiculteurs à petite échelle, 27 % ont déclaré utiliser la méthode de la plaquette adhésive, 24 % la méthode du lavage à l’alcool, 6 % la méthode de la plaquette adhésive et du lavage à l’alcool, 10 % une autre méthode, et 34 % ont dit ne pas procéder à la détection du varroa.
Figure 2. Fréquence de surveillance du varroa par les apiculteurs commerciaux et à petite échelle en 2023.
La figure 2 montre la fréquence de surveillance du varroa par les apiculteurs commerciaux et à petite échelle en 2023.
Apiculteurs commerciaux :
- 56 % ont déclaré surveiller au moins trois fois par année
- 16 % ont déclaré surveiller au printemps et à l’automne
- 4 % ont déclaré surveiller seulement au printemps
- 15 % ont déclaré surveiller seulement à l’automne
- 9 % n’ont pas répondu à cette question
Apiculteurs à petite échelle :
- 25 % ont déclaré surveiller au moins trois fois par année
- 21 % ont déclaré surveiller au printemps et à l’automne
- 5 % ont déclaré surveiller seulement au printemps
- 15 % ont déclaré surveiller seulement à l’automne
- 34 % n’ont pas répondu à cette question
Figure 3. Fréquence de surveillance du varroa par les apiculteurs commerciaux et à petite échelle ayant déclaré exercer une surveillance au moins trois fois par année en 2023. Les participants au sondage pouvaient donner plus d’une réponse.
La figure 3 montre la fréquence de surveillance du varroa par les apiculteurs commerciaux et à petite échelle qui ont déclaré exercer une surveillance au moins trois fois par année en 2023.
Apiculteurs commerciaux :
- 12 % ont dit surveiller toutes les deux semaines
- 44 % ont dit surveiller tous les mois
- 27 % ont dit surveiller moins souvent que tous les mois
- 17 % ont dit surveiller avant et après chaque traitement
- 3 % n’ont pas répondu à la question
Apiculteurs à petite échelle :
- 10 % ont dit surveiller toutes les deux semaines
- 51 % ont dit surveiller tous les mois
- 27 % ont dit surveiller moins souvent que tous les mois
- 11 % ont dit surveiller avant et après chaque traitement
- 1 % n’a pas répondu à la question
Figure 5. Mortalité hivernale déclarée (en %) par les apiculteurs commerciaux de l’Ontario (bleu) et du Canada (gris) de 2006-2007 à 2023-2024.
La figure 5 montre le pourcentage de mortalité hivernale déclarée par les apiculteurs de l’Ontario et du Canada de 2007 à 2024. Les taux de mortalité hivernale déclarés en Ontario et au Canada (respectivement) sont les suivants :
- 2007 – 37 % et 29 %
- 2008 – 33 % et 35 %
- 2009 – 31 % et 34 %
- 2010 – 22 % et 21 %
- 2011 – 43 % et 29 %
- 2012 – 12 % et 15 %
- 2013 – 38 % et 29 %
- 2014 – 58 % et 25 %
- 2015 – 38 % et 16 %
- 2016 – 18 % et 17 %
- 2017 – 27 % et 25 %
- 2018 – 46 % et 33 %
- 2019 – 23 % et 26 %
- 2020 – 19 % et 30 %
- 2021 – 18 % et 23 %
- 2022 – 49 % et 46 %
- 2023 – 36 % et 32 %
- 2024 – 50 % et 35 %
Notes en bas de page
- note de bas de page[1] Retour au paragraphe Certains apiculteurs ayant répondu « autre » ont indiqué plusieurs causes soupçonnées de mortalité. Chaque apiculteur ayant répondu « autre » n’est compté qu’une seule fois.
- note de bas de page[2] Retour au paragraphe 1. Guzman-Novoa, E., L. Eccles, Y. Calvete, J. McGowan, P. Kelly et A. Correa-Benitez. « Varroa Destructor is the Main Culprit for Death and Reduced Populations of Overwintered Honey Bee (Apis Mellifera) Colonies in Ontario, Canada », Apidologie, vol. 41, no 4, 2010, p. 443-450.
- note de bas de page[3] Retour au paragraphe Emsen, B., E. Guzman-Novoa, M. M. Hamiduzzaman, L. Eccles, B. Lacey, R. A. Ruiz-Pérez et M. Nasr. « Higher prevalence and levels of Nosema ceranae than Nosema apis infections in Canadian honey bee colonies », Parasitol Res, vol. 115, no 1, 2016, p. 175-181.
- note de bas de page[4] Retour au paragraphe Emsen, B., A. De La Mora, B. Lacey, L. Eccles, P. G. Kelly, C. A. Medina-Flores, T. Petukhova, N. Morfin et E. Guzman-Novoa. « Seasonality of Nosema ceranae infections and their relationship with honey bee populations, food stores, and survivorship in a North American region », Veterinary Sciences, vol. 7, no 3, 2020, p. 131.