Recommandations regroupées
Recommandations relatives à la collecte de données et la divulgation de renseignements
Je recommande la restructuration des pratiques de collecte de données du ministère liées à la violence dans les établissements correctionnels afin de favoriser la création de réponses ciblées et opportunes en matière de politique.
L’Unité de la gestion de l’information, le personnel des services correctionnels et les analystes de données doivent être consultés pour veiller à ce que toute nouvelle plateforme créée permette de saisir les renseignements nécessaires aux fins d’analyse actuelle et future de la violence dans les établissements correctionnels. À tout le moins, la nouvelle plateforme doit permettre de saisir de multiples variables, notamment des populations carcérales précises, l’identité des employés des services correctionnels, l’heure et le lieu des incidents, ainsi que les établissements correctionnels ou les régions de la province, afin de cerner des tendances émergentes liées à violence dans les établissements correctionnels.
Je recommande que le ministère effectue une analyse détaillée de la violence dans chaque établissement correctionnel de l’Ontario. La méthodologie appliquée dans l’Étude de cas : Centre de détention du Sud de Toronto devrait servir de modèle pour une analyse locale préliminaire dans chaque établissement correctionnel.
Cela assurera la prise en considération appropriée des écarts entre les établissements correctionnels attribuables notamment aux données démographiques sur les détenus, à l’effectif ainsi qu’à la culture et aux pratiques de supervision. Il faudra élargir la méthodologie afin d’y intégrer d’autres aspects de la violence dans les établissements correctionnels, y compris les incidents de violence commis par un détenu à l’endroit d’un détenu, par un membre du personnel à l’endroit d’un détenu et par un membre du personnel à l’endroit d’un autre membre du personnel.
Je recommande que la surveillance des incidents de violence signalés dans les établissements correctionnels se fasse à intervalles réguliers et, dans la mesure du possible, en temps réel, afin de permettre une analyse des tendances faisant ressortir rapidement les développements ou les anomalies.
La Loi de 2018 sur les services correctionnels et la réinsertion sociale crée un poste d’inspecteur général pour la surveillance continue des établissements correctionnels de l’Ontario. Le contrôle de la violence dans les établissements correctionnels doit être une responsabilité clé de ce poste.
- Je recommande que les gestionnaires et les cadres supérieurs des établissements correctionnels effectuent des vérifications courantes des incidents de violence signalés dans les établissements correctionnels et des documents connexes afin d’assurer la conformité aux politiques ministérielles et aux lois. La réalisation de ces vérifications en temps opportun devrait devenir un critère de rendement.
- Je recommande que le ministère crée une nouvelle politique qui normalise à quel moment et de quelle façon il faut remplir un rapport d’incident déclenché par un détenu à la suite de la rédaction d’un rapport d’incident par un employé des services correctionnels.
- Je recommande que les sergents et les gestionnaires reçoivent une formation sur l’utilisation de la nouvelle plateforme numérique de signalement des incidents de la Division de la modernisation, y compris l’orientation stratégique suivant la mise en œuvre de la recommandation 1.5. du document Violence dans les établissements correctionnels in Ontario : Rapport final. Cette formation doit être suivie avant le déploiement de la nouvelle plateforme.
- Je recommande l’intégration des données du Système informatique de suivi des contrevenants et celles de la nouvelle plateforme numérique de production des rapports d’incident déclenché par un détenu de la Division de la modernisation afin de permettre une analyse de la violence dans les établissements correctionnels en fonction de plusieurs variables.
Je recommande la surveillance régulière des données et des tendances liées aux incidents de violence signalés aux échelons institutionnel, régional et ministériel.
Jusqu’à ce que le poste d’inspecteur général des services correctionnels soit créé, les tendances doivent être analysées au sein du MSCSC en temps réel, dans la mesure du possible, et transmises rapidement entre les échelons institutionnel, régional et ministériel pour contribuer à l’élaboration d’interventions opérationnelles appropriées.
Recommandations relatives à la culture et à la dotation en personnel des établissements :
- Je recommande au ministère d’établir une stratégie globale en matière de santé mentale du personnel afin d’offrir des services d’auto-évaluation, d’autogestion de la santé et de soutien externe aux employés des services correctionnels pour les aider à composer avec le stress et les blessures professionnelles.
- Je recommande au ministère d’élaborer un modèle de gestion prévoyant un cadre décisionnel fondé sur les soins, l’éthique et l’empathie pour les interactions quotidiennes avec le personnel de première ligne qui aura une incidence positive sur les interactions entre le personnel et les détenus, améliorera le bien-être des agents et renforcera la sûreté et la sécurité des établissements.
- Je recommande au ministère d’effectuer des vérifications annuelles de la « qualité de l’environnement » ou du « rendement sur le plan moral » de tous les établissements correctionnels par rapport aux pratiques exemplaires internationales et fondées sur des données probantes.
- Je recommande au ministère d’entreprendre un examen du Modèle de recours à la force des Services correctionnels du MSCSC actuellement utilisé en Ontario et de l’efficacité de la formation sur le recours à la force par rapport aux pratiques correctionnelles exemplaires fondées sur des données probantes. Cet examen doit tenir compte de la perception quotidienne du risque et du danger auxquels font face les employés des services correctionnels, plutôt que des facteurs de stress professionnel périodiques auxquels sont exposés les agents de police.
- Le ministère pourrait envisager d’examiner le nouveau Modèle d’engagement et d’intervention du Service correctionnel du Canada ainsi que les pratiques exemplaires utilisées pour gérer la violence dans d’autres milieux clos comme les unités médico-légales de santé mentale ou de démence dans les établissements de soins de longue durée.
- Je recommande au ministère de revoir le libellé de la politique actuelle en matière de recours à la force pour qu’il soit conforme aux normes internationales relatives au traitement des détenus qui permettent de recourir à la force uniquement en conformité avec les objectifs de sûreté et de sécurité. Je recommande également l’inclusion d’une définition du terme « discipline » afin d’éviter toute ambiguïté avec le terme « peine » qui figure dans la politique sur le recours à la force du MSCSC.
- Je recommande au ministère d’accélérer la mise en œuvre de ses plans prévus pour examiner et mettre à jour le Programme de formation et d’évaluation des agents des services correctionnels (Programme FEASC) existant. Au moment de réviser le programme, le ministère doit y intégrer des compétences de base et souligner l’importance de favoriser une culture institutionnelle fondée sur la légalité, la dignité et le respect. La formation doit toujours aborder la double nature du travail en établissement correctionnel qui englobe la sécurité et les soins.
- Je recommande que la restructuration du Programme FEASC mette en évidence la formation sur les techniques de désescalade verbales et autres, notamment une orientation circonstancielle précise pour la gestion des détenus vulnérables ou ayant des besoins élevés.
- Je recommande au ministère de collaborer avec les partenaires et les intervenants du milieu judiciaire afin de mettre au point une formation s’adressant aux employés des services correctionnels qui traite du droit pénitentiaire, du droit en matière de droits de la personne et de la procédure criminelle. La formation nouvellement mise au point doit être intégrée au curriculum du Programme FEASC.
- Je recommande au ministère d’établir une politique relative aux programmes de mentorat locaux qui peut être mise en œuvre dans chaque établissement correctionnel. Ces programmes doivent décrire les exigences minimales auxquelles doivent satisfaire les mentors et être accessibles à tous les membres du personnel et les gestionnaires correctionnels.
- Je recommande au ministère de collaborer avec ses partenaires des services de police à l’élaboration d’une politique commune pour les employés des services correctionnels. Je lui recommande également de fournir des séances de formation communes qui favoriseront une meilleure compréhension du rôle de la police dans les affaires correctionnelles ainsi que des exigences juridiques qui s’appliquent aux procédures criminelles pour engager des poursuites lorsque des détenus se livrent à des activités criminelles.
- Je recommande au ministère de resserrer sa collaboration avec les services de police provinciaux et locaux en vue de créer des unités policières spécialisées dans les enquêtes menées sur les incidents qui se produisent dans les établissements correctionnels de l’Ontario.
- Je recommande que des pratiques exemplaires sur la rédaction de rapports soient immédiatement élaborées, puis intégrées au Programme FEASC et à la formation continue du personnel, en mettant l’accent sur l’équité procédurale et les normes minimales en matière de preuves pour ce qui est des poursuites judiciaires externes.
- Je recommande qu’un système de localisation par alarme personnel soit mis en œuvre au Centre de détention du Sud de Toronto après la mise à niveau du système électronique de sécurité en 2019. Une évaluation, y compris une analyse coûts-avantages, doit être entreprise dans l’année suivant la mise en œuvre du système de localisation par alarme personnel.
- Je recommande que toute personne qui pénètre dans la zone sécurisée d’un établissement correctionnel soit soumise à un contrôle de sécurité (c.-à-d. détecteurs de métal manuels/portiques de détection de métal et appareils à rayons X pour les colis) dans les établissements qui disposent de l’espace et des technologies nécessaires.
- Il est nécessaire d’imposer le contrôle de sécurité à toutes les personnes qui franchissent les zones sécurisées des établissements correctionnels de l’Ontario pour accroître la sécurité du personnel et des détenus, de même que pour maintenir la confiance du public au moyen de la détection et de la saisie d’objets de contrebande.
- Je recommande au ministère de s’engager avec le ministère du Procureur général à établir des lignes directrices qui reconnaissent la nécessité d’adopter rapidement certaines peines pour les détenus reconnus coupables d’agression grave commise à l’endroit du personnel des services correctionnels.
- Je recommande au ministère d’examiner la création d’un poste d’agent des services correctionnels responsable de la supervision (c.-à-d. un agent des services correctionnels 3) pour faciliter l’offre de mentorat au personnel et aider à assurer la conformité et la sécurité préventive. La création d’un poste d’agent des services correctionnels responsable de la supervision dépend de l’examen de tous les postes d’agent des services correctionnels et de leur possible reclassification en fonction des exigences relatives aux postes.
- Je recommande que des compétences appropriées en ce qui concerne le rôle d’agent soient établies pour chacune des classifications d’agent des services correctionnels (du poste d’agent des services correctionnels 1 au poste d’agent des services correctionnels 3) et que les postes soient pourvus en fonction de la capacité d’un candidat à démontrer ces compétences.
Recommandations relatives aux pratiques opérationnelles
- Je recommande au ministère de mettre en œuvre un outil d’attribution de la cote de sécurité dans les établissements qui est fondé sur des données probantes et a été validé pour l’identité de genre, les populations ethniques et les personnes autochtones. Cet outil devrait être utilisé dès l’admission de tous les nouveaux détenus afin d’identifier les personnes qui ont tendance à commettre des actes de violence dans les établissements correctionnels, de sorte que le personnel et les gestionnaires puissent disposer de mesures préventives ciblées.
- Je recommande que la politique et les pratiques opérationnelles correspondent au principe du recours aux mesures les moins restrictives en s’assurant que tous les détenus sont hébergés dans des établissements à sécurité minimale, sauf si l’outil d’attribution de la cote de sécurité confirme que des mesures de sécurité supplémentaires s’imposent.
- Je recommande que les détenus soient avisés par écrit et qu’ils reçoivent des explications concernant l’attribution de leur première cote de sécurité et que cette cote soit de nouveau évaluée au moins tous les 30 jours.
- Je recommande au ministère d’adopter des mesures normalisées et validées pour cerner les caractéristiques des détenus qui justifient l’ajout d’alertes dans le Système informatique de suivi des contrevenants. Les alertes liées au comportement d’un détenu qui sont susceptibles d’indiquer des symptômes de problèmes de santé physique ou mentale doivent être vérifiées par des cliniciens.
- Je recommande au ministère de créer des aires de détention à sécurité minimale, moyenne et maximale spéciales dans chaque établissement correctionnel de l’Ontario et de définir les conditions de l’isolement et les procédures opérationnelles dans ces types de détention.
- Je recommande que les établissements qui n’ont pas l’espace nécessaire pour créer des unités séparées aménagent une « aire de logement parallèle » où ils pourront instaurer des conditions de détention conformes à la liste exhaustive de types d’unités de logement parallèles que décrit la politique du ministère intitulée Placement des détenus ayant des besoins spéciaux en matière de gestion, qui a été récemment révisée en juillet 2018.
- Je recommande au ministère d’établir des normes minimales relatives à la détention en isolement et des opérations courantes dans chacune des unités de logement parallèles d’ici six mois. Ces normes doivent correspondre au principe du recours aux mesures les moins restrictives et être élaborées avec la participation de l’unité de négociation des services correctionnels.
- Je recommande que des mesures de surveillance soient mises en place pour veiller à ce que les politiques mises à jour relativement au logement parallèle, lesquelles établissent les définitions normalisées des unités parallèles, soient mises en œuvre comme il se doit et que ce secteur de la pratique correctionnelle fasse partie des préoccupations de l’inspecteur général des services correctionnels, comme le prévoit la Loi de 2018 sur la transformation des services correctionnels.
- Je recommande que des garanties de procédures et des mécanismes de surveillance soient appliqués à toutes les unités de logement parallèles où le temps passé hors des cellules est plus restreint que celui de la population carcérale générale.
- Je recommande au ministère de veiller à ce que le personnel et les gestionnaires des services correctionnels affectés à des postes dans les unités parallèles soient soigneusement recrutés, dûment choisis, adéquatement formés et entièrement aptes à s’acquitter de leurs fonctions dans ces environnements spécialisés. Ces postes devraient d’abord être pourvus au moyen d’une déclaration d’intérêt et ne pas reposer uniquement sur l’ancienneté.
- Je recommande au ministère d’établir ou de donner en sous-traitance les programmes, la prestation des programmes et les activités enrichissantes dans le cadre desquels toutes les personnes en détention peuvent travailler et étudier ou auxquels elles peuvent participer, et que les programmes de réadaptation répondent aux besoins cernés dans les évaluations personnelles.
- Je recommande au ministère de collaborer avec ses partenaires et les intervenants de la collectivité en vue de déterminer comment mettre à profit les services et les programmes communautaires existants afin de favoriser la remise en liberté d’une personne de façon graduelle et sécuritaire.
- Je recommande au ministère d’accorder les ressources et les mesures de soutien appropriées pour faire en sorte que des programmes de réadaptation fondés sur des données probantes soient régulièrement prévus et toujours offerts dans chaque établissement selon les évaluations personnelles du risque et des besoins.
- Je recommande que toutes les personnes en détention classées dans une unité ou une aire de logement parallèle soient confiées à un gestionnaire de cas attitré et bénéficient d’un plan de soins et (ou) de traitement personnalisé comprenant des programmes de réadaptation le cas échéant.
- Je recommande que le Centre de détention du Sud de Toronto entreprenne une étude pilote d’un an visant à mettre en œuvre une unité de soins comportementaux, comme le prévoit la politique du ministère de juillet 2018 intitulée Placement des détenus ayant des besoins spéciaux en matière de gestion, à l’aide des critères suivants :
- l’effectif doit être élargi pour faciliter le temps passé hors des cellules et permettre aux gestionnaires de cas attitrés de s’assurer qu’un plan de soins a été élaboré pour chaque détenu logé dans l’unité et que ce plan est suivi comme il se doit;
- les agents des services correctionnels doivent remplir le rôle de gestionnaires de cas dans l’unité et le travailleur social de l’unité doit fournir un soutien clinique au besoin;
- des listes permanentes des membres du personnel des services correctionnels qui ont d’abord été sélectionnés au moyen de déclarations d’intérêt doivent être établies;
- les agents des services correctionnels doivent avoir la possibilité de faire des quarts de travail de huit heures s’ils sont affectés à l’unité de soins comportementaux pendant la durée de l’étude pilote;
- des employés en santé mentale attitrés (personnel infirmier autorisé, travailleur social et psychologue) doivent être affectés à la prestation du traitement et des programmes aux détenus logés dans l’unité de soins comportementaux;
- le poste d’agent des services correctionnels 3 pourvu au moyen d’une déclaration d’intérêt doit être mis à l’essai en fonction des compétences que requiert le poste. La personne qui occupera le poste d’agent des services correctionnels 3 doit être soigneusement recrutée, dûment choisie, adéquatement formée et suffisamment expérimentée pour pouvoir aider sur le plan de la conformité, de la sécurité préventive et des exigences accrues du travail dans cette unité où le taux de stress est élevé.
Je recommande au ministère de mettre à l’essai des trappes sécurisées pour passer les repas dans les portes des cellules pendant une période de six mois dans les trois établissements où le nombre d’incidents liés aux trappes est le plus élevé. Ces trappes spéciales doivent être en nombre limité et être uniquement utilisées dans les unités de soins comportementaux après la mise en œuvre de procédures opérationnelles claires et l’élaboration de mécanismes de surveillance précis.
Le ministère devra effectuer une analyse plus approfondie pour déterminer les lieux qui conviennent le mieux à l’étude pilote. De plus, une évaluation de chaque lieu où a été menée l’étude pilote doit être effectuée dans les trois mois suivant la fin de l’étude de six mois, et cette évaluation doit tenir compte des données démographiques sur les détenus dont la porte de la cellule est dotée de ces trappes spéciales pour passer les repas, des autres interventions mises de l’avant parallèlement à l’utilisation de ces trappes spéciales et des résultats obtenus lorsque la trappe spéciale est utilisée et lorsqu’elle ne l’est pas.
Je recommande que le Centre de détention du Sud de Toronto soit l’un des lieux où sera menée l’étude pilote conformément à la recommandation 3.16.
Quarante-trois pour cent des incidents commis par des détenus à l’endroit du personnel (à l’exclusion des menaces) qui ont été signalés aux CDST en 2017 se sont produits par les trappes pour passer les repas dans les portes des cellules. Étant donné que la majorité de ces incidents se produisent dans une unité d’isolement, une unité spéciale de détention ou une unité d’évaluation de la santé mentale, je recommande que le CDST mette à l’essai ces trappes spéciales dans l’unité de soins comportementaux. Cette étude pilote devrait durer six mois et être immédiatement suivie d’une évaluation, conformément à la recommandation 3.16.