Introduction

Les pratiques de gestion utilisées par l’apiculteur ont un effet sur la santé, la productivité et les populations des colonies d’abeilles mellifères. Ces pratiques varient selon la spécialisation de l’exploitation apicole (comme la production de miel, la production de reines et de nuclei, ou d’abeilles destinées à la pollinisation), mais toute exploitation devrait recourir à des mesures de biosécurité de base, des méthodes de lutte intégrée et des pratiques de gestion optimales (PGO).

Pratiques de gestion optimales

Les pratiques de gestion optimales (PGO), en ce qui a trait à l’industrie apicole, regroupent diverses pratiques efficaces qui favorisent la santé des abeilles mellifères en atténuant les risques associés aux ravageurs et aux maladies. Voici des exemples de PGO générales que tout apiculteur devrait adopter :

Bonne connaissance des environs

Il est important que l’apiculteur soit au courant de l’activité de nature apicole qui se déroule dans la région où se trouvent ses colonies d’abeilles. Pour ce faire, il peut adhérer à une association locale d'apiculteurs et nouer des liens avec les apiculteurs des environs. Il est également utile de savoir s’il existe des ruchers exploités par d’autres apiculteurs des environs et qui se trouvent suffisamment près (3 km) pour que les abeilles des deux exploitations interagissent. Les ravageurs et les maladies peuvent circuler d’un rucher à l’autre, par eux-mêmes ou en raison de l’activité des abeilles ou de l’apiculteur. Avant d’utiliser le matériel d’un autre apiculteur, comme un extracteur à miel, on doit s’assurer de bien connaître les pratiques apicoles et l’état de santé des abeilles de cet apiculteur.

Compréhension des notions élémentaires sur la gestion des colonies, la biologie des abeilles mellifères ainsi que la biologie des ravageurs et des agents pathogènes responsables des maladies des abeilles

Il est utile de savoir à quoi ressemble une colonie d’abeilles saine et de pouvoir reconnaître les signes et les symptômes indiquant la présence de ravageurs ou de maladies qui affectent les abeilles mellifères des ruchers ontariens. De telles connaissances sont indispensables pour détecter les problèmes et comprendre comment y remédier.

Surveillance et inspection régulières des colonies afin de vérifier leur santé et leur production et de détecter les ravageurs et les maladies

Surveiller le développement de la population des colonies, la production de couvains, l’état de la reine, ainsi que les ravageurs et les maladies. Un contrôle régulier de l’état sanitaire des colonies ainsi que des signes de la présence de ravageurs ou de maladies permettra à l’apiculteur de détecter tôt les problèmes et d’y remédier rapidement, avant que la situation s’aggrave, afin de mettre en place une stratégie efficace de lutte intégrée (LI).

Méthodes pour obtenir des colonies vigoureuses et une reine productive

Les colonies faibles et sans reine peuvent présenter un risque élevé d’infestation ou d’infection par des ravageurs ou des maladies.

Essaimages

Gérer efficacement les colonies afin de prévenir les essaimages. Une colonie qui essaime perd une proportion importante de sa population et de sa production. De plus, l’essaim peut devenir une source de ravageurs et de maladies s’il devient une colonie sauvage et non gérable.  

Pratiques de gestion optimales sur les préparatifs avant l’hiver

Les colonies d’abeilles mellifères des régions tempérées du globe sont gérées de manière à traverser une période d’inactivité durant les mois d’hiver. Afin d’optimiser les taux de survie, il est important de s'assurer que les abeilles restent vigoureuses et en bonne santé durant cette période et qu'elles disposent de suffisamment de magasins à miel. Les pertes hivernales sont inévitables en apiculture, mais pour assurer la survie de l'exploitation il faut tenter de minimiser ces dernières afin de les maintenir idéalement sous la barre du 15 pour cent.

Une gestion attentive des colonies d’abeilles mellifères est nécessaire pour assurer la réussite de leur hivernage. Les apiculteurs sont invités à recourir aux pratiques de gestion optimales suivantes pour l’hivernation de ces colonies en Ontario, à l’intérieur comme à l’extérieur :

Les colonies d’abeilles mellifères doivent avoir suffisamment de nourriture. Voir à ce qu'il y ait suffisamment de magasins à miel pour minimiser les risques de famine dans les colonies saines et populeuses.

  • Avant l'hiver, les colonies devraient peser au moins 32 kilogrammes (70 livres) pour une chambre à couvain unique et 45 kilogrammes (100 livres) pour une chambre à couvain double.
  • Une colonie complète a habituellement besoin de 15 litres (4 gallons) de nourriture additionnelle.
  • Les colonies doivent être nourries immédiatement après la récolte automnale de miel.
  • Donner aux colonies du sirop épais composé soit de sucre blanc et d'eau selon une proportion de 2:1, ou d'une solution à 70 pour cent de sucrose.

Les colonies d’abeilles mellifères doivent être populeuses avant l’hiver. Les abeilles utilisent leur propre corps pour se protéger du froid; par conséquent, une grosse grappe d'abeilles sera en mesure de se garder au chaud durant l'hiver sans dépenser trop d'énergie et de nourriture. Plus la colonie est peuplée, meilleures sont ses chances de survivre jusqu'au printemps.

  • De sept à huit cadres d'abeilles pour une grosse colonie conviennent très bien dans les régions froides de l'Ontario.

Lutte contre les ravageurs et les maladies des abeilles mellifères. Surveiller les colonies durant la saison apicole, surtout pour le varroa, et voir avant l'hiver à ce que les populations de ravageurs et les maladies soient au-dessous des seuils d'intervention.

  • Faire les traitements tôt. Pour optimiser les taux de survie hivernale, il est très important que les niveaux d'infestation par le varroa soient inférieurs au seuil de trois pour cent à la fin de l'été et au début de l'automne.
  • Pour plus de renseignements sur les méthodes de surveillance, les traitements et le moment pour les administrer, se référer aux Traitements recommandés contre les maladies et les acariens chez les abeilles domestiques en Ontario.

Hivernage à l’extérieur

Les ruches des colonies d'abeilles mellifères hivernées à l'extérieur doivent être isolées.

  • Envelopper ou isoler les ruches des colonies pour l'hiver en utilisant l'un des matériaux suivants ou une combinaison de ceux-ci : papier, carton, plastique isolant, styromousse ou boîtes de bois remplies de copeaux.
  • Placer le matériel sur l'extérieur de la ruche ou autour de celle-ci pour l'isoler et la protéger du vent ; réduire l'entrée de la colonie et voir à ce que la ventilation soit adéquate.

Hivernage à l’intérieur

La chambre d'hivernage d'une colonie d'abeilles mellifères doit être dotée d'un système de réglage de la température.

  • La température à l'intérieur de la chambre d'hivernage des colonies doit être maintenue à environ 5 °C, plus ou moins 1 °C. En deçà de ces températures, les abeilles risquent de surconsommer leurs réserves de nourriture et au-dessus de ces températures, elles risquent d'être hyperactives.
  • Il est recommandé d'utiliser un système de réglage de la température pour garder la température intérieure au degré voulu à l'intérieur de la chambre d'hivernage et de prévoir une source d’alimentation électrique de secours en cas d’urgence.

La chambre d’hivernage intérieur doit être bien ventilée. Les colonies d'abeilles mellifères dégagent de grandes quantités d'humidité, de chaleur et de dioxyde de carbone durant la respiration. Quand de nombreuses colonies sont hivernées à l'intérieur, la chambre d'hivernage doit être adéquatement ventilée afin d’éliminer l’excès d’humidité, de chaleur et de dioxyde de carbone.

Les abeilles mellifères étant stimulées par la lumière, la chambre d’hivernage intérieur doit rester le plus possible dans l’obscurité. Il est également important de réduire le bruit, les vibrations et les autres stimuli afin de ne pas les déranger. Atténuer ou éliminer les sources de lumière par l’un des moyens suivants, ou une combinaison de ceux-ci :

  • Bloquer la lumière autour des ouvertures, comme les évents d’aération.
  • Prévoir deux portes successives pour entrer dans le bâtiment (vestibule).
  • Poser des lumières rouges à l’intérieur (à utiliser au besoin seulement).
  • Recouvrir les fenêtres.

Lutte intégrée

Suivre les pratiques de lutte intégrée (LI) propres aux conditions de l’Ontario. L’objectif de la lutte intégrée est de lutter contre les ravageurs et les maladies de sorte qu’ils demeurent en deçà des seuils préjudiciables (selon la pression exercée par le ravageur ou la maladie). La lutte intégrée peut comprendre des méthodes chimiques ou des méthodes non chimiques et la méthode choisie doit être homologuée (dans le cas d’un traitement chimique ou d’un médicament), efficace, documentée par des sources fiables et adaptée aux conditions géographiques de l’exploitation. Voir à ce que tout traitement soit utilisé conformément aux directives de l’étiquette.

Pour les méthodes de traitement, voir les traitements recommandés contre les maladies et les acariens chez les abeilles domestiques en Ontario.

Pratiques de biosécurité

La biosécurité consiste en l’application de mesures ou de pratiques visant à réduire les risques attribuables aux agents pathogènes auxquels sont exposées les abeilles mellifères. Dans certains cas, ces mesures peuvent aussi correspondre à des pratiques de gestion optimales et inversement. 

  1. Respecter toutes les exigences en matière de permis au moment de l’achat ou transfert de propriété d’abeilles ou de matériel apicole usagé en Ontario ou au moment d’importer des abeilles de l’extérieur de la province.

    S'informer sur les permis et les exigences pour vendre ou donner des abeilles mellifères et pour utiliser du matériel apicole usagé en Ontario.

    Se renseigner sur les exigences à respecter pour faire passer en transit des abeilles par l'Ontario et pour importer dans la province des abeilles ou du matériel apicole usagé provenant d'autres provinces canadiennes ou de l'extérieur du pays.
  2. Tenir des registres sur la gestion des ruchers, les déplacements de matériel et l’état des colonies. Ce sont là des moyens qui peuvent s’avérer efficaces pour retracer et suivre des infections ainsi que pour contrôler l’état de santé et la production des colonies.
  3. Les essaimages peuvent être une source de ravageurs et de maladies, d’où l’importance d’inspecter les essaims avant d’introduire une colonie d’essaimage dans un rucher établi. Les apiculteurs devraient placer les nouveaux essaims dans une ruche dotée d’une nouvelle fondation, traiter de manière préventive les abeilles avec des antibiotiques et garder cette colonie dans un rucher distinct jusqu’à ce que son état de santé soit confirmé.
  4. Faire preuve de vigilance au moment de diviser ou de renforcer des colonies avec des cadres de couvain provenant d’autres colonies, en raison du risque de propager des maladies. Surveiller attentivement tout signe indiquant la présence de ravageurs ou de maladie.
  5. Éviter que les colonies d'abeilles mortes et les rayons exposés puissent être pillés par des abeilles. Les colonies mortes sont souvent une source de loque américaine. Le contenu des colonies mortes doit être entreposé dans un endroit sûr inaccessible aux abeilles.
  6. Garder le rucher propre. Nettoyer régulièrement les débris provenant des panneaux inférieurs des ruches. Conserver le rucher exempt de résidus de cire issus de cadres brisés ou de raclages de cire. Garder les colonies et le matériel du rucher en bon état. Retirer et remplacer les rayons et le matériel désuets ainsi que les colonies mortes.
  7. Les apiculteurs doivent prendre soin de ne pas favoriser le pillage dans les ruchers, en appliquant les mesures suivantes :
    • Éviter de faire produire du miel (en ouvrant ou parcourant une colonie) par les colonies durant une pénurie de nectar.
    • Voir à ce que les colonies aient suffisamment de nourriture en période de pénurie de nectar.
    • Limiter les entrées dans les colonies durant une pénurie majeure de nectar.
    • Retirer du rucher le miel et les rayons qui ont été retirés des ruches. Nettoyer immédiatement les déversements de miel ou de sirop.
    • Veiller à ce que toutes les colonies soient en santé et très peuplées.
    Les apiculteurs doivent bien reconnaître les signes de pillage (comme une augmentation rapide de comportements agressifs, souvent entre différentes colonies, ou entre les abeilles à l’entrée des colonies, dans les fissures et sur les lieux des sources de miel ou de sucre) et éviter d’ouvrir les colonies quand de tels comportements se manifestent.
  8. Voir à ce que le matériel apicole usagé, le miel et les sources de nourriture soient entreposés dans des installations ou structures inaccessibles aux abeilles. Si du matériel usagé se trouve dans le rucher, s’assurer qu’il n’est pas accessible aux abeilles.

Mesures de biosécurité au cours de la manipulation directe des colonies d’abeilles mellifères

Afin de prévenir la propagation de la loque américaine ou d’autres agents pathogènes, stériliser régulièrement le matériel, y compris les outils utilisés pour les ruches, les gants et les enfumoirs.

  • Brosse à abeilles : La brosse à abeilles peut propager des spores bactériennes (et transmettre ainsi des maladies comme la loque américaine) d’une colonie à l’autre. Au lieu d’utiliser une brosse, retirer les abeilles du cadre en le secouant ou, au besoin, utiliser de longues herbes qui se trouvent dans le rucher pour déplacer doucement les abeilles.
  • Habit et voile d’apiculteur : Ces articles doivent normalement être lavés régulièrement.
  • Gants : La cire et la propolis adhèrent aux gants de cuir, et il est parfois très difficile de les déloger complètement. Puisque ces substances peuvent aussi contenir des agents pathogènes, comme des spores bactériennes, les apiculteurs ne devraient pas réutiliser leurs gants, comme des gants de cuir. Si l’on choisit de porter des gants, utiliser des gants jetables comme des gants en nitrile ou des gants à vaisselle.
  • Lavage des mains : Les apiculteurs doivent se laver les mains entre la visite de deux ruchers et avant de manipuler des abeilles ou du matériel apicole.
  • Outils apicoles : Les outils apicoles doivent être raclés afin d’en retirer la cire et la propolis. Les extrémités des outils qui ont été en contact avec les colonies d’abeilles doivent être désinfectées, soit à l’aide d’un chalumeau au propane, ou les outils doivent être placés dans un enfumoir dont l’apiculteur agite vigoureusement le soufflet pendant au moins 30 secondes. Appliquer cette mesure minimalement entre les visites de ruchers. Si une colonie présente des symptômes de loque américaine, les outils apicoles devraient être stérilisés avant utilisation auprès d’une autre colonie.
  • Enfumoir : La principale source de préoccupation est la partie supérieure du soufflet qui permet de tenir et d'actionner l'enfumoir. Si le dessus du soufflet est en bois, le stériliser en le chauffant légèrement à l'aide d'un chalumeau. Si le dessus est en plastique, le couvrir de ruban adhésif. Au moment d'utiliser le soufflet, retirer le ruban pour obtenir une surface propre. Par ailleurs, on peut frotter le soufflet, qu'il soit en bois ou en plastique, avec de l'eau savonneuse afin de déloger les spores.