Type de document : Directive sur les poursuites
Date d’entrée en vigueur : 14 novembre 2017

L'accès du public au système judiciaire est une caractéristique de la société démocratique. Les audiences publiques permettent à tous de constater que la justice est administrée de manière raisonnée conformément à la primauté du droit.

Le recours à des interdictions de publication et à des ordonnances de mise sous scellés constitue une exception au principe de la publicité des débats judiciaires. Les interdictions de publication empêchent de publier de l’information dans tout document, de la diffuser ou de la transmettre de quelque façon que ce soit. Les ordonnances de mise sous scellés limitent l’accès aux tribunaux et aux documents judiciaires dans certaines circonstances.

L’utilisation appropriée des interdictions de publication, des demandes d’interdiction ou de restriction de l’accès aux pièces du tribunal et d’exclusion du public peut être nécessaire pour préserver l’intégrité du processus, assurer la sécurité, protéger la vie privée ou prévenir le traumatisme ou l’intimidation des témoins. Une ordonnance de mise sous scellés peut être nécessaire pour protéger les intérêts essentiels à l’administration de la justice, comme l’intégrité des enquêtes policières en cours ou des renseignements confidentiels.

Les interdictions de publication peuvent être automatiques, obligatoires sur demande ou ordonnées à la discrétion du tribunal. Les ordonnances de mise sous scellés peuvent être automatiques ou faites à la discrétion du tribunal.

Facteurs à prendre en considération

La poursuivante devrait tenir compte de l’ensemble des circonstances pour déterminer s'il faut demander une interdiction de publication, une ordonnance de mise sous scellés ou l'exclusion du public. Les facteurs pertinents peuvent comprendre les éléments suivants :

  • favoriser la dénonciation des infractions et la participation des victimes et des témoins au système de justice pénale
  • protéger les intérêts des témoins de moins de 18 ans
  • permettre aux témoins de donner un compte rendu complet et franc lorsqu’ils témoignent
  • protéger les témoins contre l’intimidation ou les représailles
  • s’il existe des solutions de rechange efficaces à la prise d’une ordonnance
  • les effets négatifs possibles d’une ordonnance.

Interdictions de publication

Infractions d’ordre sexuel

Identité de la victime

Suivant le Code criminel, dans les cas d'infractions d’ordre sexuel, le tribunal rend une ordonnance interdisant la publication de toute information pouvant identifier la victime (ou un témoin de moins de 18 ans) sur demande de la poursuivante, de la victime ou de tout témoin.

La poursuivante doit demander une ordonnance interdisant la publication de toute information pouvant identifier une victime (ou un témoin de moins de 18 ans) le plus tôt possible. Si la victime d’une infraction d’ordre sexuel souhaite que son identité soit connue, la question de la révocation de l’interdiction de publication peut être réexaminée à n’importe quel stade de l’instance.

Antécédents sexuels

Le Code criminel interdit la publication d’informations et de preuves portant sur une demande d’admission de la preuve des antécédents sexuels d’une victime dans les cas d’infractions d’ordre sexuel. La publication de la décision et des motifs du tribunal est également interdite à moins que le juge ordonne qu’ils soient publiés, après avoir tenu compte du droit de la victime à la vie privée et de l’intérêt de la justice, ou s’il est établi que la preuve est jugée recevable.

Production de documents privés (dossiers de tiers)

Le Code criminel interdit la publication de renseignements et de preuves portant sur une demande de production de dossiers renfermant des renseignements personnels à l'égard d'une victime ou d'un témoin dans des cas d'infractions d’ordre sexuel. La publication de la décision et des motifs du tribunal est également interdite, à moins que le juge ordonne qu’ils soient publiés, après avoir tenu compte de l’intérêt de la justice et des intérêts personnels de la personne à laquelle le document se rapporte.

Il faut se reporter à la directive intitulée Infractions d’ordre sexuel contre les adultes.

Pornographie juvénile

Conformément au Code criminel, le tribunal rend une ordonnance interdisant la publication de tout renseignement pouvant identifier un témoin qui est âgé de moins de 18 ans ou toute personne faisant l’objet d’une représentation, d’un document écrit ou d’un enregistrement qui constitue de la pornographie juvénile. Les poursuivantes doivent présenter une demande de mise sous scellés à l'égard d'une pièce qui contient des documents présumés être de la pornographie juvénile. Il faut se reporter à la directive intitulée Exploitation des enfants par Internet.

Justice pénale pour les adolescents

La Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents interdit la publication de toute information pouvant identifier un jeune accusé de moins de 18 ans. La Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents interdit également la publication de toute information permettant d’identifier une personne de moins de 18 ans qui a été victime d’une infraction prétendument commise par un jeune ou qui a comparu comme témoin en lien avec une telle infraction. Il faut se reporter à la directive intitulée Justice pénale pour les adolescents.

Victime âgée de moins de 18 ans

Aux termes du Code criminel, dans toutes les infractions mettant en cause une victime qui est âgée de moins de 18 ans, le tribunal rend une ordonnance interdisant la publication de toute information pouvant identifier la victime, sur demande de la poursuivante ou de la victime.

La poursuivante doit demander dès que possible une ordonnance du tribunal interdisant la publication de toute information permettant d'identifier une victime qui a moins de 18 ans.

Il faut se reporter à la directive intitulée Infractions contre les enfants.

Mise en liberté provisoire par voie judiciaire

Le Code criminel prévoit que sur demande de l'accusé, le tribunal rend une ordonnance interdisant la publication de la preuve, des observations faites et de la décision du tribunal jusqu'à ce que l'accusé ait été libéré à l’enquête préliminaire ou que le procès de l'accusé ait pris fin.

Le Code criminel prévoit que sur demande de la poursuivante, le tribunal peut rendre une ordonnance interdisant la publication de la preuve, jusqu'à ce que l'accusé ait été libéré à l'enquête préliminaire ou jusqu’à la fin du procès de l'accusé.

Enquête préliminaire

Le Code criminel interdit la publication de la preuve relative à l’existence ou à la nature de toute admission ou confession produite lors d’une enquête préliminaire jusqu’à ce qu’un accusé ait été libéré après l’enquête préliminaire ou le procès.

Le Code criminel prévoit que sur demande de l'accusé, le tribunal rend une ordonnance interdisant la publication de la preuve, jusqu'à ce que l'accusé ait été libéré à l'enquête préliminaire ou que le procès de l'accusé ait pris fin.

Le Code criminel prévoit que sur demande de la poursuivante, le tribunal peut rendre une ordonnance interdisant la publication de la preuve, jusqu'à ce que l'accusé ait été libéré à l'enquête préliminaire ou jusqu’à la fin du procès de l'accusé.

Procès devant jury

Le Code criminel interdit la publication de la preuve entendue en l’absence du jury avant le début des délibérations du jury.

Sur demande de la poursuivante ou de sa propre initiative, le tribunal peut interdire la publication de l’identité d’un juré ou de toute information pouvant révéler l’identité du juré.

Interdiction de publication discrétionnaire

Dans le cas de toutes les autres infractions, le Code criminel permet au tribunal d'envisager d'interdire la publication de toute information pouvant identifier une victime de plus de 18 ans et un témoin de tout âge à n'importe quelle étape de la poursuite. De plus, des interdictions de publication peuvent aussi être prises en ce qui concerne les participants au système de justice dans des affaires touchant une organisation criminelle, le terrorisme et certaines infractions à la Loi sur la protection de l’information.

Avant de demander une interdiction de publication discrétionnaire en vertu des dispositions du Code criminel, la poursuivante devrait tenir compte du principe de la publicité des débats judiciaires et des facteurs énoncés dans le Code criminel. Les interdictions de publication discrétionnaires ne sont demandées que dans des circonstances exceptionnelles, dans lesquelles les motifs peuvent être clairement énoncés.

La poursuivante, la victime ou le témoin doit présenter une demande écrite, avec avis à l'accusé, aux médias et à toute autre personne touchée. Le tribunal peut rendre l'ordonnance s’il est d'avis que l'ordonnance est dans l'intérêt de la bonne administration de la justice.

De même, avec avis aux médias et à toute autre personne touchée, des demandes écrites d’interdiction de publication peuvent également être faites en vertu de la common law.

Demandes de la victime de révoquer l’interdiction de publication

Il peut arriver qu'une victime de plus de dix-huit ans veuille révoquer l'interdiction de publication. Un juge a le pouvoir de lever l'interdiction de publication seulement lorsque la poursuivante et la victime consentent à révoquer l'interdiction. Avant de consentir à la révocation d’une interdiction de publication, la poursuivante devrait tenir compte de toutes les circonstances, notamment :

  • la nature de l’interdiction de publication et les circonstances de l’affaire
  • les souhaits de la victime
  • la question de savoir si la victime a eu l’occasion d’évaluer toutes les ramifications de la publication de son identité
  • la publication du nom de la victime pourrait avoir faciliter l’identification d’autres victimes ou témoins qui veulent bénéficier de la protection de l’interdiction de publication
  • la publication de l’identité de la victime pourrait nuire à la poursuite ou par ailleurs avoir un effet négatif sur l’administration de la justice.

Ordonnances de mise sous scellés

Une ordonnance de mise sous scellés interdit l'accès à l'information par quiconque, autre que les parties désignées dans l'ordonnance. Une ordonnance de mise sous scellés peut être imposée par le Code criminel ou à la discrétion du tribunal.

Le Code criminel prévoit que tous les documents relatifs à une demande d’autorisation d’écoute électronique sont visés par une ordonnance de mise sous scellés obligatoire. Le Code criminel prévoit que le tribunal qui décerne un mandat de perquisition ou une autre ordonnance judiciaire peut sceller les documents à l’appui.

Pour déterminer si une ordonnance de mise sous scellés devrait être demandée ou si une ordonnance de mise sous scellés existante devrait être levée, la poursuivante doit déterminer si l'ordonnance est nécessaire pour :

  • protéger une enquête policière en cours
  • protéger l’identité d’un dénonciateur confidentiel (il faut se reporter à la directive intitulée Indicateurs confidentiels)
  • protéger les techniques de collecte de renseignements
  • protéger les intérêts des parties innocentes
  • protéger les intérêts personnels.

La poursuivante doit également déterminer si une mise sous scellés partielle ou limitée dans le temps serait appropriée.

Pièces de la cour

Les documents judiciaires et les pièces du tribunal, y compris les déclarations des victimes, sont généralement accessibles au public [lien]. La poursuivante devrait chercher à restreindre l'accès chaque fois que l’accès du public aux pièces peut porter atteinte au droit à un procès équitable, violer la vie privée ou nuire à l'administration de la justice. Une ordonnance de mise sous scellés doit être demandée pour limiter l’accès aux pièces contenant de la pornographie juvénile.

Exclusion du public

Le Code criminel permet au tribunal d'ordonner l'exclusion du public de la salle d'audience pour la totalité ou une partie de l’instance criminelle. Pour déterminer si le public devrait être exclu de la salle d’audience, le tribunal est tenu d’envisager toutes les circonstances, y compris l’intérêt de la société à favoriser la dénonciation des infractions et la participation des victimes et des témoins à l’instance criminelle et la capacité du témoin de donner un compte rendu complet et franc.

Avant de demander une ordonnance d’exclusion du public, la poursuivante devrait déterminer si des solutions de rechange à l’ordonnance efficaces sont disponibles dans les circonstances. Il faut se reporter à la directive intitulée Aides au témoignage et accessibilité.