Enjeu

L'exploitation minière souterraine est une industrie de haute technologie complexe. Les nouvelles technologies ont éliminé une grande partie du travail exigeant beaucoup de main-d'œuvre qui faisait auparavant partie intégrante des activités minières et, dans certains cas, ces mêmes technologies ont également amélioré la sécurité. En 2003, dans le cadre de la réunion annuelle de l'Association internationale de l'inspection du travail tenue à Toronto, un comité tripartite a établi trois facteurs clés permettant d'améliorer la sécurité dans les mines de l'Ontario et de réduire les taux de blessures avec interruption de travail  : les technologies améliorées, la formation obligatoire et la création de mécanismes tripartites, comme le Comité d'examen des textes de loi relatifs à l'exploitation minière, et l'élaboration tripartite des normes de formation du ministère de la Formation et des Collèges et Universités.

Les nouvelles technologies peuvent jouer un rôle significatif dans l'amélioration du rendement et des processus. À l'heure de perpétuelles percées technologiques, les exploitants de mines sont bien conscients du potentiel d'accroissement de la productivité et de diminution des coûts d'exploitation. Toutefois, chaque nouvelle technologie représente un changement au sein d'une mine et exige une gestion adéquate des stratégies de changement. Une gestion efficace des changements peut contribuer à déterminer et éliminer les dangers, améliorer le rendement du matériel et accroître les résultats, alors qu'une gestion inadéquate du changement peut créer de nouveaux dangers au sein du lieu de travail. Le rapport de la Commission Ham (1976) indiquait que les compromis entre la productivité et les risques en milieu de travail sont inhérents et sont rarement faits consciemment. Il faut donc absolument que le secteur minier établisse un moyen d'évaluer et de comprendre les conséquences des changements sur la santé et la sécurité, en plus de mettre en place des stratégies d'atténuation adéquates.

Ce que nous avons entendu

Durant l'Examen, les intervenants ont discuté de leurs préoccupations au sujet des répercussions des nouvelles technologies et de la gestion inadéquate des changements sur la santé et la sécurité des travailleurs. Ils ont souligné l'importance cruciale d'une gestion appropriée des changements, comprenant notamment des évaluations des risques, lorsqu'on met en place de nouvelles technologies ou de nouveaux procédés. Ils ont parlé du besoin d'une participation accrue des travailleurs dans les processus d'évaluation des risques et de changement, et d'une orientation plus claire sur la façon d'impliquer davantage et de manière significative les travailleurs et les comités mixtes sur la santé et la sécurité au travail plutôt que de simplement les tenir au courant. Ils ont également insisté sur l'importance du partage de l'information sur les nouvelles technologies introduites sur le lieu de travail et de la mise au point d'une méthode de communication pour toutes les questions opérationnelles liées à une nouvelle technologie.

Analyse

Au cours des dernières décennies, le secteur minier de l'Ontario a été l'objet d'importantes percées technologiques dans des domaines tels que les communications souterraines, l'ergonomie, les systèmes d’extinction d’incendie, l'automatisation des treuils, le contrôle des pressions de terrains, les explosifs, les dispositifs antichute, la lutte contre la poussière et la prestation de la formation. Lorsqu'elles sont introduites adéquatement, les améliorations technologiques peuvent permettre de réduire toutes les blessures, les taux de blessures avec interruption de travail et les décès.

Dans le cadre de l'Examen, des experts mondiaux en matière de processus de gestion des risques et de gestion des changements se sont prononcés sur la question des répercussions de l'introduction de nouvelles technologies dans les mines souterraines. Des ressources représentant des syndicats, des employeurs, des universités et des partenaires du système de santé et de sécurité ont également fait part de leur opinion. On a demandé aux sociétés minières de l'Ontario de soumettre leurs politiques portant sur la gestion des changements. L'Examen a également permis de passer en revue les pratiques exemplaires utilisées en Ontario et par d'autres chefs de file mondiaux dans le secteur minier, le secteur des produits chimiques et le secteur nucléaire. Les taux de diffusion des nouvelles technologies n'étaient pas facilement accessibles au moment où cette question a été étudiée dans le cadre de l'Examen.

Percées technologiques

Une panoplie de nouvelles technologies visant à rendre les mines plus sécuritaires sont en cours d'élaboration, y compris, sans toutefois s'y limiter  :

  • des moteurs de niveau quatre qui réduisent les émissions
  • des systèmes de ventilation sur demande qui permettent d'améliorer la qualité de l'air
  • des systèmes d’extinction d’incendie permettant de réduire les risques associés aux incendies survenant dans les mines exploitées à très grande profondeur ou aux incendies causés par de nouvelles technologies
  • des dispositifs de surveillance de l'emplacement et du positionnement de l'équipement mobile visant à faciliter le contrôle de la circulation et à prévenir les collisions impliquant des véhicules
  • des dispositifs et des caméras de détection de proximité installés sur l'équipement afin de réduire les risques associés à l'équipement mobile et à tout autre équipement

Bien que l'introduction de technologies relatives à la sécurité soit généralement très prometteuse, les recherches portant sur certaines de ces technologies destinées au secteur minier demeurent insuffisantes. Il s'avère donc impératif de réaliser des études et des évaluations des risques complètes et adéquates de manière à assurer qu'aucun nouveau danger non contrôlé ne soit introduit par suite de la mise en œuvre de nouvelles technologies dans le milieu de travail.

Gestion du changement

Le changement peut jouer un rôle important dans l'amélioration du rendement et des processus. Le changement, qui peut provenir de l'interne ou de l'externe par les tendances du secteur, peut également engendrer de nouveaux dangers, sauf si des personnes qui connaissent très bien le domaine, comme les spécialistes de l'équipement, les spécialistes du système de gestion, les ingénieurs et le personnel assigné à l'exploitation et à l'entretien, en effectuent l'examen. Dans un processus de gestion du changement efficace, les experts collaborent afin de justifier la raison d'être du changement. Ensuite, ils vérifient que le changement réduit ou élimine le risque actuel et qu'il n'introduit pas de nouveaux risques.

Le changement peut également être dangereux lorsqu'il n'est pas communiqué clairement aux personnes qui doivent être informées, par exemple les conducteurs et le personnel d'entretien. La communication est essentielle afin de prévenir les dangers qui découlent du manque d'information. Pour communiquer efficacement, il faut tenir le personnel informé et le mettre en cause. Il faut également mettre à jour les documents, comme les procédures opérationnelles, les modules de formation et les plans d'entretien.

Au cours de l'Examen, des parties intéressées ont demandé de décrire les circonstances qui enclencheraient l'application d'une politique de gestion du changement. Les responsables de l'Examen ont convenu que la politique serait appliquée selon les circonstances et son application serait déterminée par toutes les parties du lieu de travail, notamment les travailleurs à risque, ainsi que les superviseurs et les gestionnaires concernés. Ces concepts de gestion du changement semblent être raisonnablement simples. Toutefois, d'après l'analyse menée par l'Examen, la compréhension et l'application de ces concepts varient dans le secteur minier. Ces différences existent peut-être parce que les exigences ou les principaux éléments d'un processus de gestion du changement ne sont pas stipulés dans les règlements actuels applicables aux mines et aux installations minières. Par exemple, le Règlement 854 stipule que l'employeur doit aviser le comité mixte sur la santé et la sécurité au travail ou le délégué à la santé et à la sécurité lorsqu'une procédure ou lorsque la composition, la conception, les dimensions ou la disposition d’un matériau, d’un objet, d’un dispositif ou d’une chose est modifiée. Toutefois, le règlement ne prévoit pas l'obligation de faire participer des personnes averties et les travailleurs concernés par le changement proposé au processus de gestion du changement. Il prévoit uniquement l'exigence de les aviser du changement.

Le règlement stipule également qu'une déclaration écrite décrivant l’aménagement, la construction, l’adoption, la modification ou l’utilisation projetée doit être remise au comité mixte sur la santé et la sécurité au travail ou au délégué à la santé et à la sécurité. Toutefois, le règlement ne prévoit pas l'obligation de consulter les travailleurs concernés et leurs représentants dans le cadre de l'examen du changement projeté afin de détecter les dangers et de s'assurer que ces dangers seront atténués.

D'après les conclusions tirées par l'Examen, voici les principaux éléments d'un processus de gestion du changement efficace.

  1. Soutien de la direction : Le soutien de la direction est essentiel à une gestion du changement efficace. Pour offrir un soutien, les nouveaux dirigeants doivent comprendre les initiatives et les programmes courants de la mine, et la logique derrière ceux-ci. De plus, un changement organisationnel serait étudié au même titre qu'un changement de technologie ou de processus.
  2. Participation des travailleurs : Les travailleurs et leurs représentants doivent participer de façon significative à la planification ou à l'introduction d'un changement. Sans l'appui du syndicat et du comité mixte sur la santé et la sécurité au travail, les processus de gestion du changement ne seront pas efficaces.
  3. Soutien organisationnel : Un processus de gestion du changement ne peut s'effectuer sans un soutien organisationnel et une structure. Ce soutien signifie fournir une orientation adéquate afin de définir les divers niveaux de changement. Par exemple, il faut communiquer si le changement projeté est un changement de nature, un changement substantiel ou un changement d'urgence / une mesure prise à court terme. L'organisation doit également s'assurer qu'un changement d'urgence ou une mesure prise à court terme ne demeure pas en place après le délai approprié. En outre, le soutien organisationnel comprend un système pour vérifier la mise en œuvre et le succès du processus de gestion du changement dans le cadre de l'amélioration continue de la qualité.
  4. Formation des participants : Un processus de gestion du changement efficace exige une formation propre à chaque rôle sur la mise en œuvre du changement. Par exemple, le modérateur de l'équipe d'examen du processus de gestion du changement doit suivre une formation sur la manière d'assurer le respect de la marche à suivre et la suffisance de l'analyse. Les personnes qui sont responsables de gérer le processus de changement ainsi que les participants devront suivre une formation. Les travailleurs qui peuvent être concernés par le changement pourraient également suivre une formation.
  5. Démarche claire : La manière optimale d'introduire une nouvelle technologie et de nouveaux processus dans le secteur minier s'inscrit dans le cadre d'une démarche de gestion du changement claire. Une démarche bien définie aborde adéquatement tout changement projeté à la technologie, aux processus et au plan d'exploitation minière ou tout changement à la direction ou à l'organisation de tout site minier. La démarche doit être fondée sur le risque et tenir compte de la technologie actuelle et de la nouvelle technologie. Les membres de l'équipe d'examen du processus de gestion du changement doivent posséder les connaissances et l'expérience nécessaires pour effectuer un examen détaillé. Les parties du lieu de travail doivent également élaborer une politique claire décrivant les circonstances qui enclencheraient la démarche de gestion du changement.

Recommandation

  • 2.1 Le ministère du Travail devra obliger les exploitants de mines à mettre sur pied et à mettre en œuvre une démarche de gestion du changement écrite qui mettra en cause les travailleurs et le comité mixte sur la santé et la sécurité au travail ou le délégué à la santé et à la sécurité.