Introduction

La Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail a fait l’objet de plusieurs études indépendantes au fil des ans. Les rapports qui en ont découlé ont fourni une base solide sur laquelle s’appuyer et ceux ci comprennent, notamment, des descriptions détaillées de la genèse de la WSIB et de son évolution de 1914 à nos jours.

Les lecteurs désireux d’en savoir plus sur les hauts et les bas historiques de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail devraient consulter des rapports antérieurs tels que Reshaping Workers’ Compensation for Ontario (en anglais seulement)footnote 2, Un financement équitable : Rapport sur le régime de sécurité professionnelle et d’assurance contre les accidents du travail de l’Ontariofootnote 3, Une tarification équitable : Un cadre réalisable de répartition équitable des coûts d’assurance de la WSIBfootnote 4, et le Comité consultatif d’experts de la santé et de la sécurité au travailfootnote 5. La totalité de ces rapports — en particulier le rapport intitulé Un financement équitable produit par l’ancien doyen de la faculté de droit Osgoode Hall, Harry Arthurs — fournit une description utile des tendances, des développements et des choix stratégiques qui ont contribué aux problèmes et aux circonstances auxquels la WSIB fait actuellement face.

Le présent rapport ne reviendra pas sur cette analyse historique en détail. Il n’y a pas grand chose à ajouter qui permettrait de compléter ces excellentes ressources ou d’accroître la sensibilisation des intervenants à l’évolution historique de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail. Il est également vrai que les occasions et les défis auxquels la WSIB doit faire face à court, moyen et long terme justifient une attention particulière, surtout à la lumière des attentes croissantes du public envers nos institutions publiques.

La présente section du rapport fournit un aperçu de base de l’état actuel de la situation financière, du modèle d’assurance et des opérations de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail ainsi que de ses liens avec l’écosystème plus vaste de la sécurité en milieu de travail en Ontario. Cette section présente également des comparaisons avec d’autres compétences et assureurs privés, le cas échéant. L’objectif fondamental est de donner aux Ontariennes et aux Ontariens un aperçu indépendant de la position actuelle de la WSIB sur les apports et les facteurs clés qui influent sur sa capacité de servir les travailleurs et les employeurs de la province et, ce faisant, de jeter les bases de l’analyse prospective et des recommandations énoncées dans la section suivante.

1.1 Élimination du passif non provisionné de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail

De nombreux lecteurs savent que la situation financière de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail a été marquée par un déficit de financement structurel pendant des décennies. Il en a découlé un passif non provisionné qui représentait un « montant par lequel le total des actifs, moins les participations ne donnant pas le contrôle, [était] inférieur au total des passifs »footnote 6. Autrement dit, la WSIB affichait un déficit constant entre les ressources nécessaires pour payer les prestations futures et l’argent dans sa caisse d’assurance.

Le passif non provisionné était attribuable à divers facteurs, mais le principal facteur qui y contribuait était l’incapacité persistante de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail de prendre en compte de manière adéquate les coûts des nouvelles demandes de prestations lors de la tarification. C’est à dire que les taux de prime de la WSIB étaient inférieurs à ce qu’ils auraient dû être pour couvrir intégralement les coûts des prestations pendant plusieurs années. En termes simples : la WSIB percevait environ 80 % chaque dollar versé en prestations.

Cet écart était en grande partie dû au contexte politique. Les gouvernements de diverses allégeances politiques ont souvent augmenté les prestations ou limité l’augmentation des primes sans tenir dûment compte des conséquences de ces changements sur la caisse d’assurance de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail. Comme l’a fait observer le vérificateur général dans un rapport de 2009 : « [l] a résistance des parties intéressées est la moins grande lorsque la Commission et le gouvernement prélèvent des primes modestes (à la satisfaction des employeurs) et versent des prestations élevées (à la satisfaction des travailleurs). Cette façon de faire risque de provoquer à long terme une importante dette non provisionnée »footnote 7.

Le déficit de financement a été exacerbé par la crise financière de 2007 2008 puisque celle ci a nui aux rendements des placements de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail et a aggravé sa situation financière. Le montant du passif non provisionné a presque doublé entre 2006 et 2008 seulementfootnote 8. Il a atteint un sommet en 2011 alors qu’il s’élevait à 14,2 milliards de dollarsfootnote 9.

Une autre façon de concevoir le passif non provisionné est de le voir comme une expression du ratio de suffisance de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travailfootnote 10. Un ratio de suffisance de 100 % signifie que le total des actifs (moins les participations ne donnant pas le contrôle) et le total des passifs sont égaux. Un ratio de suffisance de 150 % signifie que le total des actifs est 50 % plus élevé que le total des passifs. Au dernier sommet atteint par le passif non provisionné, le ratio de suffisance de la WSIB était tombé bien en deçà de 60 % (voir la figure 1.1). Harry Arthurs a qualifié ce niveau de financement de « point de bascule » potentiel, qui pourrait remettre en question la capacité de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail de générer des fonds suffisants pour couvrir le coût des prestations versées aux travailleursfootnote 11.

Figure 1.1 : Ratio de suffisance et ratio de provisionnement de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail (%), de 2000 à 2019

2000

66,8 %

2001

67,2 %

2002

63,8 %

2003

62,4 %

2004

68,0 %

2005

69,1 %

2006

73,2 %

2007

66,4 %

2008

53,5 %

2009

54,2 %

2010

54,5 %

2011

52,2 %

2012

56,5 %

2013

66,0 %

2014

71,6 %

2015

77,9 %

2016

87,4 %

2017

95,8 %

2018

108,0 %

2019

111,0 %

Source des données : Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail de l’Ontario.

En 2013, le gouvernement de l’Ontario a réagi à la détérioration de la situation financière de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail en adoptant une directive réglementaire qui prévoyait une voie vers une plus grande suffisance de la caisse d’assurance à moyen terme. Le Règlement de l’Ontario 141/12 exigeait que la WSIB atteigne un ratio de suffisance prescrit selon l’échéancier suivant :

  • 60 % du financement d’ici la fin de 2017
  • 80 % du financement d’ici la fin de 2022
  • 100 % du financement d’ici la fin de 2027

En réponse à la directive réglementaire du gouvernement, la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail a mis en œuvre un Plan de suffisance du financement pour atteindre les objectifs prescrits ainsi qu’une nouvelle Politique de financement pour orienter ses propres décisions en matière de tarification et de financementfootnote 12. Ces politiques ont servi de base au plan de financement de la WSIB au cours des dernières années.

L’une des principales conséquences du plan de financement est qu’une partie des taux de prime était consacrée aux « coûts des demandes passées » pour rembourser le passif non provisionné. Autrement dit, la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail a perçu plus de recettes auprès des employeurs que ce qui était nécessaire pour couvrir les coûts liés aux nouvelles demandes de prestations et à l’administration et a utilisé les recettes supplémentaires pour réduire le passif non provisionné.

La part des recettes provenant des primes qui a été consacrée aux coûts des demandes passées a été considérable. Pour bien le comprendre, on peut ventiler le taux de prime moyen (pour chaque tranche de 100 dollars de gains assurables) pour voir la part relative consacrée aux frais d’administration, aux coûts des nouvelles demandes de prestations et aux coûts des demandes passées. La composante consacrée aux coûts des demandes passées a atteint un sommet de 1,10 dollar ou de 42,3 % du taux moyen des primes en 2016 (voir la figure 2.1). L’inclusion d’une composante consacrée aux coûts des demandes passées a contribué à ce que la WSIB impose l’un des taux de prime les plus élevés au paysfootnote 13.

Figure 2.1 : Ventilation du taux de prime moyen de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail (en $) de 2009 à 2019

Graphique - Ventilation du taux de prime moyen de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail (en $) de 2009-2019

Source des données : Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail de l’Ontario

Une combinaison de facteurs — notamment les coûts des demandes passées (qui étaient, selon la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail, le « plus grand contributeurfootnote 14 »), le rendement élevé des placements, l’amélioration de la durée des périodes d’indemnisation et le nombre moins élevé de demandes de prestations avec arrêt de travail — a contribué à faire progresser régulièrement l’élimination du passif non provisionné plus rapidement que prévufootnote 15. En 2018, la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail a annoncé qu’elle avait, en fait, atteint un ratio de suffisance supérieur à 100 % et qu’elle avait ainsi éliminé son passif non provisionnéfootnote 16.

En conséquence, elle a réduit les primes des employeurs de 29,8 % en 2019footnote 17. et a annoncé une autre réduction de 17 % en 2020 (voir la figure 3.1).footnote 18. Cette réduction marquée est principalement due à la disparition de la composante des taux de prime relative aux coûts des demandes passées. L’an prochain, les taux de prime ne comporteront plus de composante relative aux coûts des demandes passées.

Figure 3.1 : Taux de prime moyen de la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail de 2009 à 2020

Année et taux de prime moyen

Source des données : Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail de l’Ontario

Le Règlement de l’Ontario 141/12, qui stipule que la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail doit atteindre un ratio de suffisance de 100 % d’ici 2027, ne donne pas d’orientation sur le plan de financement que celle ci doit adopter après avoir rempli cet objectif. Le fait que la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail ait atteint un ratio de suffisance de 100 % plusieurs années plus tôt que prévu a créé une incertitude sur le plan stratégique pour les employeurs, les travailleurs et pour la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail elle même.

Comme nous le verrons dans la section 2, il reste à présent une question en suspens à savoir, dans l’avenir, quel est le bon objectif à adopter par rapport au ratio de suffisance de la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail pour s’assurer que (1) celle ci dispose de ressources suffisantes pour s’acquitter de ses obligations et faire face aux éventuelles perturbations économiques et que (2) celle-ci n’est pas indûment en train d’extraire des ressources de l’économie au détriment de l’investissement et de l’emploi.

1.2 Politique de financement et ratio de suffisance de la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail par rapport aux autres provinces

La Loi de 1997 sur la sécurité professionnelle et l’assurance contre les accidents du travail (LSPAAT) exige que la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail maintienne une caisse d’assurance suffisante pour s’acquitter de ses obligations en vertu de la Loi et pour payer les prestations actuelles et futuresfootnote 19.

Le ratio de suffisance est donc une mesure permettant d’évaluer la capacité de la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail de s’acquitter de ses obligations et, ce faisant, de se conformer à la LSPAAT. Le ratio de suffisance est défini comme le total des actifs (moins les participations ne donnant pas le contrôle) moins le total des passifs de la WSIB. Ces calculs, y compris le traitement des actifs et des passifs, sont effectués conformément aux principes comptables reconnusfootnote 20.

Comme nous l’avons vu plus haut, le ratio de suffisance de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail a atteint son niveau le plus bas en 2011, lorsqu’il est tombé bien en dessous de 60 %. Il a augmenté depuis lors, puisque le passif non provisionné a été réduit et est maintenant éliminé. À la fin du deuxième trimestre de 2019, le ratio de suffisance de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail était de 110,2 %footnote 21.

Le processus d’établissement des taux de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail et l’obligation de respecter le ratio de suffisance prescrit ont été intégrés au Règlement de l’Ontario 141/12 et à la Politique de financement de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail. Approuvée en juin 2013 et revue en 2015, la Politique de financement décrit le rôle des acteurs de la WSIB dans la détermination de son plan de financement et l’établissement des taux de prime. La mise en œuvre de la Politique de financement harmonise de façon générale la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail avec les autres grandes commissions d’indemnisation des accidents du travail au Canadafootnote 22.

La Politique de financement actuelle repose sur cinq principes : (1) la responsabilité collective; (2) la répartition équitable et raisonnable des coûts globaux; (3) la stabilité des primes; (4) la transparence et la compréhension; (5) la sécurité financièrefootnote 23. Les hypothèses de base de la politique et les processus que la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail a utilisés pour la rendre opérationnelle lors de la prise de décisions relatives à l’établissement des taux ont été des facteurs clés de l’amélioration de la situation financière de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail.

Bien que le plan de financement de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail ait été guidé par le gouvernement au moyen du Règlement de l’Ontario 141/12, il est, somme toute, le seul responsable des décisions relatives à l’établissement des taux, comme l’exige la Loi de 1997 sur la sécurité professionnelle et l’assurance contre les accidents du travail. Cette responsabilité comprend « l’approbation du niveau cible de financement recommandé et nécessaire pour obtenir une assurance accrue à l’égard du maintien d’un ratio de suffisance de 100 %... » (italique ajouté pour mettre en évidence)footnote 24.

Le conseil d’administration de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail détient le pouvoir d’approbation finale des décisions relatives à l’établissement des taux après avoir examiné les recommandations de l’actuaire en chef ainsi que les conseils et les justifications de la direction de la WSIB. Le conseil d’administration est censé tenir compte du Règlement de l’Ontario 141/12, de la Politique de financement, de l’analyse et de l’information fournies par l’actuaire en chef, ainsi que de tout autre renseignement jugé pertinent pour la prise de décisions relatives à l’établissement des tauxfootnote 25.

Comme nous l’avons mentionné, la Politique de financement et le conseil d’administration de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail exigent actuellement une « assurance accrue » pour atteindre l’objectif de suffisance de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail et ne pas tomber en dessous d’un ratio de suffisance de 100 %. L’assurance accrue « représente un haut degré de confiance dans la satisfaction des exigences réglementaires en matière de ratio de suffisance et le maintien du financement intégral une fois celui ci atteint, comme déterminé par des études bilancielles périodiques »footnote 26.

De façon générale, ce modèle n’est pas propre à la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail. Le concept de ratio de suffisance ou de ratio de provisionnement est commun à tous les organismes d’indemnisation des travailleurs du pays. Pourtant, il peut être quelque peu difficile de comparer leurs ratios de suffisance et leur expérience globale en raison de diverses différences contextuelles — notamment les différences touchant la protection des employeurs, la générosité des prestations et la composition de l’économie. À ce titre, chaque administration doit déterminer le niveau de financement approprié selon ses propres circonstances.

Néanmoins, il est possible, dans une certaine mesure, de comparer les ratios de suffisance actuels entre les provinces et les différents régimes en place pour orienter leurs plans de financement. À l’heure actuelle, chaque province s’est fixé un objectif relatif à l’état de suffisance égal à 100 %, supérieur à 100 %, ou dans une fourchette supérieure à 100 % (voir le tableau 1.1). Comme nous le verrons plus loin, certaines provinces ont également mis en place des politiques pour orienter la « répartition des surplus » lorsque leur niveau de financement dépasse le ratio cible.

Tableau 1.1: Ratio de suffisance et fourchette cible par province, 2017
ProvinceTaux 2017 (fin d’exercice)Fourchette cible
Terre Neuve et Labrador131,6 %100 à 120 %
Île du Prince Édouard165,4 %100 à 110 %
Nouvelle Écosse89,4%Financement intégral
Nouveau Brunswick102,2 %110%
Québec111.1 %100 %
Ontario95,8 %null
Manitoba148,8 %130 %
Saskatchewan139,9 %105 à 120 %
Alberta127,3 %114 à 128 %
Colombie Britannique153,1 %150 %

Source des données : Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail de l’Ontario

Le point important à retenir est que la Politique de financement, le processus d’établissement des taux et le ratio de suffisance actuel de la WSIB sont globalement semblables à ce que l’on observe dans les autres provinces. Pour l’avenir, les principaux enjeux sont les suivants : (1) éviter le retour au sous financement et (2) gérer les risques de surfinancement.

1.3 Modernisation du cadre de tarification de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail

Même si le processus d’établissement des taux de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail demeure inchangé, son cadre de tarification plus vaste est en voie d’être modernisé de façon importante. Le processus de réforme du cadre de tarification a véritablement commencé en 2014.

Les arguments en faveur d’une réforme ont été exposés dans deux rapports externes intitulés Un financement équitable et Une tarification équitable entre 2012 et 2014. L’argument de base était que les processus utilisés par la WSIB pour la classification des employeurs, l’établissement des taux de prime et la tarification par incidence étaient complexes, opaques et imprévisibles.

Le système de classification utilisé jusqu’alors, par exemple, n’était pas harmonisé au Système de classification des industries de l’Amérique du Nord et utilisait plutôt 155 groupes de taux distincts. Il y avait également trois programmes distincts de tarification par incidence pour promouvoir la sécurité au travail dans diverses industries et dans les entreprises de différentes tailles. Et la conjugaison des deux pourrait avoir amené certaines entreprises à verser des primes trop importantes pour assumer leur responsabilité collective par rapport à leur rendement en matière de sécurité au travail, tandis que, par moment, d’autres entreprises pourraient avoir versé une quantité insuffisante de primes en fonction de leurs profils de risque. Cette situation a fait en sorte que le cadre était déroutant pour les intervenants, injuste pour certaines industries et certains employeurs ainsi qu’inefficace aux fins administratives de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail.

L’initiative de modernisation du cadre de tarification a donc été un exercice pluriannuel visant à améliorer le processus actuel de la WSIB en ce qui a trait à la classification des employeurs, à l’établissement des taux de prime et aux programmes de tarification par incidence. Les objectifs de l’initiative étaient :

  • d’établir un modèle de classification normalisé plus cohérent pour classer les employeurs et fixer leurs taux de prime
  • d’intégrer des mesures de stabilité pour limiter l’exposition et la volatilité des taux de prime et de prévoir une transition progressive vers le nouveau cadre
  • de reconnaître que les différents employeurs d’une même industrie représentent des niveaux de risque différents en raison des investissements faits dans la santé et la sécurité au travail
  • de fournir une approche plus simple et plus transparente pour l’établissement des taux de prime

Le conseil d’administration de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail a approuvé le nouveau cadre de tarification à l’automne 2016. Sa mise en œuvre devrait être achevée en janvier 2020.

Le nouveau cadre de tarification remplace le système de classification actuel par un nouveau modèle de classification fondé sur le Système de classification des industries de l’Amérique du Nord et, ce faisant, réduit le nombre de groupes de taux qui passe de 155 à 34. Les taux pour les entreprises individuelles sont établis selon une approche en deux étapes :

  • La première étape consiste à établir un taux moyen pour chaque catégorie d’industrie en fonction du profil de risque de la catégorie et de sa part de responsabilité dans le maintien de la caisse d’assurance
  • La deuxième étape consiste à rajuster le taux pour les entreprises individuelles en fonction de leurs antécédents en matière d’indemnisation par rapport aux autres entreprises du même groupe de taux

L’objectif de cette approche en deux étapes est de s’assurer que les entreprises paient un taux équitable qui tient compte à la fois de leur industrie et de leurs antécédents individuels. L’on pourrait y voir un équilibre entre la responsabilité collective et les profils de risque au niveau de l’entreprise.

Le modèle présente certaines similitudes avec plusieurs des modèles utilisés dans d’autres provinces, dont l’Alberta, la Colombie Britannique, le Manitoba, le Nouveau Brunswick, l’Île du Prince Édouard et la Saskatchewan. Ces provinces fixent également les primes de chaque employeur selon la catégorie d’industrie à laquelle ils appartiennent ainsi que leur tarification par incidence individuelle par rapport aux autres employeurs de la même catégorie d’industriefootnote 27.

Le nouveau cadre de tarification sera mis en œuvre lors d’une période de transition pluriannuelle. Cela permettra d’atténuer les répercussions sur la minorité d’entreprises qui verront leur taux augmenter à la suite de leur classification dans un nouveau groupe de tauxfootnote 28. Des dispositions relatives à la transition distinctes ont été prises pour les organismes sans but lucratif et les agences de placement temporairefootnote 29. Le cadre de tarification sera donc pleinement mis en œuvre pour la plupart des employeurs dans un délai de trois ans et, d’ici 2029, pour tous les employeurs touchés.

Le processus pour parvenir à la mise en œuvre du cadre de tarification n’a pas été sans heurts. Il y a eu des retards et une certaine confusion quant à la façon dont il touchera les différents travailleurs et employeurs. Les intervenants essaient toujours de comprendre comment le nouveau cadre de tarification (y compris le nouveau modèle de tarification par incidence) les affectera.

Comme nous le verrons dans la prochaine section, la WSIB et le gouvernement devront maintenant surveiller attentivement le processus de transition pour s’assurer qu’il est mis en œuvre sans heurts et qu’il ne produit pas de conséquences involontaires, comme une plus grande incidence de la suppression des demandes de prestations.

1.4 La protection offerte par la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail par rapport à celle qui est offerte dans les autres provinces

Le cadre de tarification est lié à l’étendue de la protection offerte par la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail dans l’économie de l’Ontario. La question de la protection obligatoire reçoit beaucoup d’attention et fait l’objet de débats entre les différents intervenants. Cette question devrait recevoir une attention croissante puisque le marché du travail délaisse de plus en plus les emplois du secteur industriel au profit de ce que l’on appelle « l’économie à la demande » en particulier et de nouveaux arrangements informels en matière d’emploi en général. Il convient d’examiner la situation actuelle de la protection offerte par la WSIB et la manière dont elle se compare à celles qui sont offertes dans les autres provinces.

Environ 77 % de la population active de la province est assujettie à une combinaison de protections obligatoires et optionnellesfootnote 30. Les employeurs et les travailleurs couverts se répartissent en deux catégories : ceux relevant de l’annexe 1 et ceux relevant de l’annexe 2.

Les employeurs de l’annexe 1 sont assujettis à la responsabilité collective, font partie d’une caisse d’assurance collective et versent des primes à la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail. En retour, ils sont déchargés de la responsabilité individuelle d’assumer le coût réel des demandes de prestations, puisque la WSIB verse des prestations aux travailleurs souffrant de blessures ou de maladies professionnelles.

Les employeurs de l’annexe 2 sont assujettis au régime de responsabilité individuelle et paient le coût total des prestations de chaque demande à titre d’obligation continue ainsi que les coûts administratifs liés au traitement et à la gestion des demandes. Le modèle de l’annexe 2 s’applique à un nombre limité d’industries, notamment : les chemins de fer; les compagnies de téléphone qui relèvent du gouvernement fédéral; les compagnies aériennes; les municipalités; les conseils scolaires; le gouvernement provincialfootnote 31.

La grande majorité des employeurs et des travailleurs couverts par la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail entrent donc dans la catégorie de l’annexe 1 (voir le tableau 2.1).

Tableau 2.1 : Nombre d’employeurs de l’annexe 1 et de l’annexe 2 en Ontario de 2009 à 2018
Type d’annexe2009201020112012201320142015201620172018
Employeurs de l’annexe 1249 162250 536251 827255 474287 195299 339307 959311 922316 387318 726
Employeurs de l’annexe 2634611606600602600579581581590

Source des données : Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail de l’Ontario

Globalement, la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail couvre environ 5,6 millions des 7,4 millions de travailleurs que compte la provincefootnote 32. Sur les 5,6 millions de travailleurs couverts, 4,8 millions travaillent pour des employeurs de l’annexe 1 (voir le tableau 3.1).

Tableau 3.1 : Nombre de travailleurs visés par l’annexe 1 et l’annexe 2 en Ontario de 2009 à 2018
Type d’annexe2009201020112012201320142015201620172018
Travailleurs visés par l’annexe 13 932 2414 009 2014 128 9394 239 4404 361 0294 431 6744 556 8884 621 9294 719 1834 840 081
Travailleurs visés par l’annexe 2700 205702 383695 358694 335698 452690 942700 153714 636730 604751 971

Source des données : Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail de l’Ontario

Les autres employeurs et travailleurs appartiennent à ce que l’on appelle parfois des « industries à protection non obligatoire ». Mais ce n’est pas tout à fait exact. Il est plus exact de les décrire comme des activités commerciales non couvertes dans les 34 industries couvertes.

Nous savons certaines choses concernant ces quelque 1,7 million de travailleurs. Près de 60 % d’entre eux, par exemple, sont employés dans les domaines de la finance et de l’assurance, des soins de santé et de l’assistance sociale, ainsi que dans les services professionnels, scientifiques et techniquesfootnote 33. Cependant, nous n’avons pas beaucoup de données sur le nombre d’entre eux qui adhèrent à un régime d’assurance de remplacement en milieu de travail, sur les modalités relatives et la générosité de ces régimes, ou sur le bilan global en matière de santé et de sécurité de ces milieux de travail.

Cela dit, nous savons comment la protection de la WSIB se compare à celle qui est offerte dans d’autres provinces. L’Ontario affiche le troisième plus bas niveau de couverture au pays. Son taux de couverture est d’environ dix points de pourcentage inférieur à la moyenne nationale (voir le tableau 4.1).

Tableau 4.1 : Pourcentage de travailleurs couverts par des commissions des accidents du travail par province ou territoire, 2017
Province ou territoirePopulation active couverte (pourcentage)
Terre Neuve et Labrador97,4 %
Île du Prince Édouard97,7 %
Nouvelle Écosse74,9 %
Nouveau Brunswick91,4 %
Québec92,6 %
Ontario76,5 %
Manitoba78.8%
Saskatchewan75,8 %
Alberta82,6 %
Colombie-Britannique97,2 %
Yukon96,4 %
Territoires du Nord-Ouest et Nunavut97,0 %

Source des données : Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail de l’Ontario

Pour bien comprendre la source des différents niveaux de protection offerts en Ontario par rapport aux autres provinces, il convient de faire une brève mise en contexte historique. Bon nombre des industries à protection non obligatoire n’étaient pas incluses dans la protection obligatoire lors de la création de la WSIB. Il est difficile d’en connaître la raison d’être à ce stade. Toutefois, il semblerait que Sir William Meredith et le gouvernement de l’époque croyaient qu’un régime complet se heurterait à une trop grande opposition politiquefootnote 34.

Le modèle de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail a donc été créé à partir de ce qu’on appelle un « cadre administratif inclusif », ce qui signifie que les industries doivent être activement incluses dans la réglementation afin d’être assujetties à une protection obligatoire et qu’une politique au niveau du conseil d’administration doit identifier chaque activité commerciale visée. La responsabilité de la WSIB est de classer les employeurs conformément au Règlement de l’Ontario 175/98 qui prescrit le statut de protection des industriesfootnote 35. Dans le Manuel de la classification des employeurs de la WSIB, chaque activité commerciale est donc inscrite comme étant à protection obligatoire, à protection non obligatoire (peut faire une demande de protection) ou non admissible à la protection (par exemple les équipes sportives ou les cirques)footnote 36.

1.5 État actuel des demandes de prestations, types de demandes et périodes d’indemnisation

La fonction principale de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail est de régler et de gérer les demandes de prestations d’assurance présentées par les travailleurs et les employeurs. Il est donc utile de tenter de comprendre l’état actuel des demandes de prestations, y compris le nombre et le type de demandes de prestations et leur durée.

Depuis 2009, la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail reçoit en moyenne près de 240 000 nouvelles demandes de prestations par année. Plus de 80 % d’entre elles proviennent d’employeurs de l’annexe 1 (voir le tableau 5.1).

Tableau 5.1 : Nombre de demandes enregistreés par type d’annexe de 2009 à 2018
Type d’annexe2009201020112012201320142015201620172018
Demandes enregistrées de l’annexe 1207 296198 617196 449195 128194 393195 495192 077193 214199 870210 828
Demandes enregistrées de l’annexe 240 56639 78139 36638 10837 85638 15037 24737 71939 17543 163

Source des données : Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail de l’Ontario

Pour mettre ces chiffres en perspective, 767 146 demandes de prestations ont été présentées dans les provinces et les territoires en 2017. Le tiers de ces demandes avaient été présentées en Ontario (voir le tableau 6.1).

Tableau 6.1 : Nombre de demandes de prestations présentées par province et territoire, 2017
Province et territoireDemandes présentées (#)
Canada767 146
Terre Neuve et Labrador12 254
Île du Prince Édouard3 875
Nouvelle Écosse24 552
Nouveau Brunswick22 659
Québec116 685
Ontario239 045
Manitoba35 931
Saskatchewan28 650
Alberta125 432
Colombie-Britannique152 912
Yukon1 727
Territoires du Nord-Ouest et Nunavut3 424

Source des données : Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail de l’Ontario

Il convient de noter que le nombre de demandes de prestations présentées à la WSIB augmente depuis 2015. Ce nombre a augmenté de plus de 10 % au cours de cette période, et ce, après 7 ans de changements minimes d’une année à l’autre. La cause de cette augmentation est difficile à saisir pleinement. Il n’y a pas eu de hausse marquée d’un type particulier de demandes de prestations.

La durée des périodes d’indemnisation a également augmenté depuis 2015. Au troisième trimestre de 2019, 5,9 % des « demandes de prestations avec arrêt de travail » recevaient toujours des prestations après 12 mois, ce qui représente une hausse de 3,7 % par rapport à 2015. De plus, le nombre de personnes ayant fait des demandes de prestations avec arrêt de travail toujours indemnisées après 24 et 48 mois a également augmenté au cours de cette périodefootnote 37.

Il convient de souligner ici que toutes les demandes ne sont donc pas égales en ce qui concerne le temps et les coûts associés à leur administration ou leur durée éventuelle. Il ne faut pas oublier qu’en cas de lésion professionnelle, l’employeur couvert et ses travailleurs doivent enregistrer cette dernière auprès de la WSIB, quelle que soit la nature de l’incident ou de la blessure subie.

La plupart des demandes de prestations sont appelées des demandes de prestations « sans interruption de travail ». Cela signifie qu’un incident ou une blessure a été enregistré, mais que le travailleur touché n’a pas manqué de travail en conséquence. Par exemple, on peut penser à quelqu’un qui a besoin d’un petit nombre de points de suture, mais qui peut retourner au travail le lendemain. Plus des deux tiers des demandes de prestations sont des demandes de prestations sans interruption de travail. Dans 16 % des cas, les demandes de prestations concernent des arrêts de travail inférieurs à 5 jours. En gros, 85 % des demandes de prestations concernent des cas où les travailleurs sont retournés au travail après moins d’une semaine avec un soutien minimal. La WSIB considère ces cas comme « à faible risque ».

Les cas jugés « à haut risque » sont ceux qui entraînent un arrêt de travail de plus d’un mois en raison d’un incident ou d’une blessure. Ces cas représentent environ 7 % de l’ensemble des cas. Ils ont besoin d’un éventail beaucoup plus large de mesures de soutien, notamment des services de santé et des programmes de retour au travail (voir la figure 4.1).

Figure 4.1 : Demandes de prestations annuelles de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail selon la durée de l’arrêt de travail (%), 2018

Sans interruption de travail

67 %

1 à 5 jours

16 %

6 à 14 jours

5 %

15 jours à 1 mois

3 %

1 à 3 mois

4 %

plus de 3 mois

3 %

Source : Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail de l’Ontario

Depuis 2009, la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail approuve en moyenne environ 78 % des demandes de prestations annuelles. Certains intervenants ont eu l’impression que davantage de demandes de prestations étaient rejetées en raison des efforts visant à réduire le passif non provisionné. Toutefois, les données indiquent que le taux d’approbation est demeuré relativement le même au cours de cette période. Les deux tiers de ces demandes sont des demandes de prestations sans interruption de travail; celles ci ont représenté, pour l’essentiel, une part constante des demandes de prestations approuvées depuis7nbsp;2009 (voir le tableau 7.1)footnote 38.

Tableau 7.1 : Demandes de prestations avec arrêt de travail et sans interruption de travail approuvées de 2009 à 2018
Prestations2009201020112012201320142015201620172018
Demandes de prestations avec arrêt de travail approuvées64 84360 20056 67255 52554 43053 68851 57057 36859 52964 855
Demandes de prestations sans interruption de travail approuvées131 843123 852123 675124 019125 328125 524122 133121 505126 251129 759
Total196 686184 052180 347179 544179 758179 212173 703178 873185 780194 614

Source des données : Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail de l’Ontario

Le bilan de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail en ce qui a trait à l’atteinte de ses objectifs en matière de respect des délais de traitement des demandes est relativement bon. La WSIB s’est fixé comme objectif d’arriver à une décision initiale sur l’admissibilité dans les 10 jours suivant l’enregistrement d’une demande et l’organisation rapporte qu’elle atteint cet objectif dans 86 % des casfootnote 39. Bien entendu, ce résultat est positif, mais il est faussé par la nature des demandes de prestations qu’il englobe. Les résultats relatifs à cet objectif sont artificiellement gonflés par la forte proportion de demandes de prestations sans interruption de travail.

En vérité, le bilan de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail en ce qui concerne les demandes de prestations avec arrêt de travail en général et les dossiers complexes, en particulier, est plus mitigé. Cela représente un défi, d’autant plus que les demandes complexes comme les maladies professionnelles et les allégations de santé mentale sont de plus en plus courantes. Les cas de stress mental, par exemple, ont plus que doublé entre 2016 et 2018footnote 40. Il est donc essentiel que la WSIB améliore ses processus afin d’accorder une plus grande part de son attention et de ses ressources au nombre relativement faible de cas qui sont responsables d’une part disproportionnée des coûts.

Comme l’a fait remarquer la Christian Labour Association of Canada dans une observation écrite : [traduction] « le plus grand problème du système de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail aujourd’hui est le retard dans le traitement des demandes ». Ce sentiment a été exprimé par divers intervenants de tous horizons. Il ressort clairement des consultations menées dans le cadre de l’étude qu’il n’y a pas d’enjeu plus fondamental pour la WSIB que d’améliorer sa capacité de mieux s’acquitter de sa principale fonction, à savoir le règlement et l’administration des demandes de prestations. La prochaine section du rapport traitera cette question plus en détail.

1.6 Processus de règlement et demandes de prestations de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail

Le thème ou l’enjeu le plus fréquemment soulevé lors des consultations menées dans le cadre de l’étude concernait les préoccupations relatives au processus de règlement et aux demandes de prestations de la WSIB. Voici certaines frustrations courantes exprimées par les intervenants :

  • il est difficile de naviguer dans la WSIB en raison de sa complexité
  • les canaux de communication sont limités et unidirectionnels
  • la technologie utilisée est dépassée
  • une trop grande importance est accordée aux politiques et aux procédures ainsi qu’à l’application stricte de celles ci
  • les délais sont longs

Ces préoccupations étaient pratiquement universelles. Tout le monde, de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante à la Fédération du travail de l’Ontario, est d’accord. Cette réalité se manifeste dans les données comparant le rendement des services des commissions d’indemnisation des accidents du travail de l’ensemble des provinces. En voici un exemple : les Ontariennes et les Ontariens attendent plus longtemps pour recevoir un paiement après une blessure que n’importe où ailleurs au pays, sauf au Nouveau Brunswickfootnote 41.

La Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail reconnaît que le modèle qu’elle utilise pour le traitement et le règlement des demandes de prestations doit être modernisé. Il s’agit d’un système très archaïque qui est non seulement loin derrière le secteur privé, mais qui accuse aussi un retard par rapport aux autres organismes provinciaux.

Par conséquent, les processus de présentation et de règlement des demandes de prestations sont inefficaces, coûteux et, surtout, difficiles pour les personnes touchées. Songez seulement au fait que la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail a reçu 5,8 millions d’appels téléphoniques et 1,9 million de télécopies en 2018. Cela représente en moyenne 21 385 appels téléphoniques et 7 057 télécopies par jourfootnote 42. Il devrait être inacceptable que, en 2019, les travailleurs et les employeurs soient encore obligés de soumettre leurs documents par télécopieur et de ne communiquer avec la WSIB que par téléphone.

Ces appels téléphoniques et ces télécopies proviennent généralement de personnes qui se trouvent dans des circonstances où elles sont très vulnérables puisqu’elles ont été blessées et ont besoin d’aide. Ces personnes peuvent être en proie à une grave insécurité financière ou à des problèmes de santé mentale. Malgré cela, pour obtenir des réponses à de simples questions comme « avez vous reçu ma demande? » ou « quel est le délai de paiement? », il faut appeler la WSIB pendant les heures de travail.

Comme l’a noté le Bureau du conseiller des travailleurs dans les observations qu’il a présentées aux fins de l’étude :

[traduction] « Lors de l’examen des activités de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail, il est également important de tenir compte de la situation unique des travailleurs blessés. Par définition, ils sont blessés. Leur santé, leurs moyens de subsistance et leur estime de soi sont souvent en jeu lorsqu’ils font une demande de prestations. La plupart des travailleurs blessés sont en proie à une forme ou une autre de détresse financière, émotionnelle ou psychologique. En outre, les travailleurs blessés considèrent, à juste titre, le système d’assurance contre les accidents du travail comme un système de justice avec toutes les garanties que cela implique. Aucun d’entre eux n’a choisi de prendre part à ce système. »

L’initiative de modernisation des services de base de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail vise à surmonter ces défis et, ce faisant, à mieux répondre aux besoins des personnes qui doivent composer avec les circonstances décrites ci dessus. Il s’agit d’une solution essentiellement technologique aux problèmes actuels liés aux demandes de prestations et au règlement de celles ci. Le plan consiste à transformer la plateforme de base pour les demandes de prestations et leur règlement au cours des trois prochaines années et, en fin de compte, à fournir un modèle plus simple, plus réactif et individualisé pour les travailleurs et les employeurs. Il s’agit d’un projet pluriannuel qui nécessitera une grande attention et un investissement important de ressources. Le conseil d’administration de la WSIB devra approuver le financement du projet et assurer une surveillance continue de ce dernier.

Le modèle de laCommission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail est actuellement très exigeant sur le plan de la main d’œuvre et, malgré cela, l’organisation traite moins de demandes de prestations par employé que pratiquement toutes les autres commissions d’indemnisation des accidents du travail du pays. Cette situation est principalement attribuable à une incapacité à tirer parti de la technologie et, ce faisant, à mieux affecter les ressources afin de traiter les types de cas les plus complexes.

Comme on l’a déjà noté, 67 % des demandes de prestations de la WSIB sont des demandes de prestations sans interruption de travail. Dans 16 % des cas, les demandes de prestations concernent des arrêts de travail inférieurs à 5 jours. Seulement 7 % des demandes de prestations sont décrites comme des « demandes de prestations à haut risque », ce qui signifie qu’elles impliquent un arrêt de travail d’un mois ou plusfootnote 43.

Pourtant, à l’heure actuelle, les modèles utilisés par la WSIB pour le traitement et le règlement des demandes de prestations abordent essentiellement toutes les demandes de la même façon. L’objectif de la modernisation des services de base est d’automatiser et de fournir des services en libre service pour les cas représentant un risque jugé de faible à modéré. Ensuite, l’organisation pourra consacrer des ressources — y compris son personnel le plus expérimenté — au nombre relativement faible de demandes de prestations à haut risque qui, somme toute, entraînent le plus de coûts pour l’organisation et attirent l’attention du public et des politiciens.

La voie dans laquelle la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail engage est globalement logique. Toutefois, les changements technologiques et de processus ne suffiront peut être pas à répondre pleinement aux préoccupations des intervenants. Des réformes organisationnelles et structurelles pourraient également être nécessaires.

Un domaine qui pourrait bénéficier d’une telle réforme est le processus de contestation. Il existe actuellement à la fois un processus de réexamen informel et un processus de contestation officielle à la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail, ainsi qu’un dernier niveau d’appel au TASPAAT (décrit plus en détail ci dessous). Si une partie n’est pas d’accord avec une décision, elle peut demander que la décision soit réexaminée par le personnel de la WSIB au niveau opérationnel où la décision initiale a été prise. Si la décision initiale est confirmée, une partie peut la contester devant la Division des services d’appel, qui est le niveau officiel de contestation de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail. Les décisions à ce niveau sont supervisées et prises par un commissaire aux appels et sont indépendantes du réexamen effectué au niveau opérationnel. Environ 15 à 18 % des cas de contestation présentés à la Division des services d’appel se font par l’intermédiaire d’une audience orale.

Le nombre de cas de contestation présentés à la Division des services d’appel a augmenté de 5 % l’an dernierfootnote 44. Au cours d’une année donnée, il y a de 6 000 à 7 000 nouveaux cas de contestation au sein de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travailfootnote 45.

Ces processus internes de réexamen et de contestation à la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail ne sont pas assujettis aux mêmes normes en matière de délais que les décisions initiales sur l’admissibilité. Le processus peut être lent et compliqué, et l’étude a permis de constater que le dénouement d’un processus de contestation n’est généralement pas très différent de la décision initiale. Le taux d’acceptation des contestations de la Division des services d’appel est d’environ 33 %, ce taux est stable depuis 2014. Cette année, la Division a accepté 20,5 % des contestations en totalité et 12,8 % des contestations en partiefootnote 46.

On a souvent entendu le commentaire suivant lors des consultations menées durant l’étude : « lenteur de justice vaut déni de justice ». Les multiples niveaux de réexamen et de contestation qui, à la fois, sont lents et ne produisent généralement pas de résultats différents pour les travailleurs et les employeurs peuvent ne pas administrer la justice aussi rapidement que les intervenants le souhaitent. Comme nous le verrons dans la prochaine section, la rationalisation du processus de contestation au sein de la WSIB et l’augmentation des ressources allouées au TASPAAT afin de lui permettre d’entendre plus de cas pourraient être un modèle plus efficace et, tout compte fait, plus juste.

De façon plus générale, l’initiative de modernisation des services de base devra être gérée avec soin et de façon transparente afin de réduire au minimum les risques de dépassement de coûts ou de perturbation des services et, en dernier lieu, dans le but d’obtenir l’adhésion des intervenants. À l’heure actuelle, il existe un certain degré de soutien théorique, mais un certain scepticisme pratique demeure quant à la capacité de la WSIB d’offrir ses services et aux avantages qui découleront du nouveau système. La section 2 abordera ces questions plus en détail.

1.7 Activités de vérification de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail

Le processus de règlement des demandes est lié à la question de la suppression des demandes et aux activités de vérification de la WSIB. La suppression des demandes de prestations se rapporte aux [traduction] « mesures prises par un employeur qui entravent le signalement approprié de la blessure ou de la maladie d’un travailleur due à son travailfootnote 47. De telles mesures peuvent prendre la forme de mesures incitatives, telles que des congés payés de courte durée, ou de mesures dissuasives, telles que des menaces de sanction ou de licenciement.

Certains intervenants — en particulier les syndicats — estiment que la suppression des demandes de prestations est un vrai problème dans le modèle de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail. Ils estiment que l’utilisation croissante de la tarification par incidence incite les employeurs à sous déclarer les incidents survenant sur leur lieu de travail.

Divers rapports et études ont cherché à comprendre l’ampleur du phénomène de la suppression des demandes de prestations dans la province. Il est difficile de le quantifier, mais il semble y avoir des preuves indiquant qu’il s’agit bien d’un phénomène qui a cours dans le système. Un rapport de 2013, produit en réponse à l’étude de Harry Arthurs, par exemple, concluait que [traduction] « la suppression des revendications semble être un réel problème » et [traduction] « qu’il est peu probable que la suppression des demandes de prestations soit limitée à un petit nombre de cas anecdotiques »footnote 48.

En supposant que cette conclusion soit exacte, il s’agit d’un problème pour diverses raisons, mais surtout parce que la suppression des demandes de prestations contrevient à la prémisse de base du modèle d’assurance sans égard à la responsabilité de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail. Par principe, les travailleurs blessés devraient avoir accès aux prestations et aux services de la WSIB. C’est la raison d’être du modèle de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail.

En décembre 2015, le projet de loi 109 a modifié la Loi de 1997 sur la sécurité professionnelle et l’assurance contre les accidents du travail afin de conférer de nouveaux pouvoirs permettant de faire enquête sur les cas de suppression des demandes de prestations et de les sanctionner. Plus particulièrement, il a accordé le pouvoir légal de mettre en place un nouveau système de sanctions administratives pécuniaires en cas de suppression des demandes de prestationsfootnote 49, notamment  :

  • 5 000 dollars pour chacune des première, deuxième et troisième infractions
  • 7 500 dollars pour chacune des quatrième, cinquième et sixième infractions
  • 10 000 dollars pour chaque infraction subséquente

Ces nouvelles sanctions, décrites dans le Règlement de l’Ontario 175/98footnote 50, ont été élaborées en 2016 et sont entrées en vigueur en janvier 2018. La WSIB a mis au point un modèle de vérification fondé sur le risque pour enquêter sur les employeurs qui sont les plus susceptibles de s’adonner à la suppression des demandes de prestations. Afin de cibler ses activités de vérification, le modèle tient compte de différents facteurs, tels qu’un pourcentage élevé de demandes de prestations sans interruption de travail ayant des coûts de soins de santé élevés ou un faible taux de blessures par rapport à la moyenne du groupe de taux de l’employeur.

La Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail prévoit regrouper ses vérifications liées aux recettes et celles liées à la suppression des demandes de prestations au cours des deux prochaines années dans le but de créer un nouveau « modèle à contact unique » permettant aux vérificateurs d’effectuer les deux types de vérifications simultanément. Ce nouveau modèle devrait leur permettre d’augmenter le nombre de vérifications de la suppression de demandes.

Pour 2019, l’objectif global est d’effectuer 2 500 vérifications. Il s’agit d’une baisse considérable par rapport au nombre de vérifications que la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail effectuait auparavant. Pour le justifier, l’organisation fait valoir que le modèle fondé sur le risque est plus ciblé. Cependant, le nombre de vérifications de la suppression des demandes de prestations (ce que la WSIB appelle les « vérifications des avis d’accident des employeurs ») sera encore beaucoup moins élevé que les vérifications des recettes (ce que la WSIB appelle les « vérifications des recettes des employeurs »).

Comme nous le verrons dans la prochaine section, il est possible de mettre en œuvre le modèle fondé sur le risque, qui est plus efficace que les pratiques de vérification antérieures de la WSIB, tout en renforçant sa capacité à relever et à sanctionner les cas de suppression des demandes de prestations. Cela sera particulièrement important lorsque le modèle de tarification par incidence du nouveau cadre de tarification sera mis en œuvre.

1.8 Écosystème étendu de santé et de sécurité au travail

La Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail n’est qu’une composante de l’écosystème étendu de santé et de sécurité au travail de la province. D’autres organisations, dont le ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences, un réseau d’ASST, des associations industrielles, des syndicats, des chercheurs et des groupes de la société civile, participent également à la promotion de la sécurité sur le lieu de travail et appuient les travailleurs et les employeurs du système.

La Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail est un rouage important de cet écosystème, en partie en raison de ses activités de promotion (y compris les mesures incitatives inhérentes à ses programmes de tarification par incidence et à son nouveau Programme d’excellence en santé et sécurité) et aussi parce que les primes qu’elle perçoit financent, en fin de compte, une grande partie des autres organisations et activités qui appuient les objectifs généraux du gouvernement de l’Ontario en matière de santé et de sécurité au travail. La WSIB est à la fois une actrice de l’écosystème de santé et de sécurité et son plus grand bailleur de fonds.

On ne peut donc pas évaluer la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail sans tenir compte de l’écosystème étendu et vice versa. Les deux sont inextricablement liés en raison de la relation entre les programmes de santé et de sécurité, l’application de la loi, le modèle d’assurance de la WSIB ainsi que le rôle du financement systémique fondé sur les primes.

Il peut être compliqué pour les travailleurs et les employeurs de comprendre cet écosystème et de s’y repérer. Le ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences appelle chacun des acteurs de cet écosystème des « partenaires du système ». Cela dit, chacune des organisations est indépendante et a son mandat et ses intervenants propres. Il est donc essentiel de comprendre l’écosystème et ses composantes pour déterminer comment le système fonctionne de concert, s’il est suffisamment financé et s’il existe des lacunes qui nécessitent des ajustements ou des réformes.

Bureaux des conseillers des travailleurs et le Bureaux des conseillers des employeurs

Le Bureaux des conseillers des travailleurs (BCT) et le Bureaux des conseillers des employeurs (BCE) sont des organismes opérationnels du ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences qui fournissent un soutien aux travailleurs et aux employeurs, respectivement, qui naviguent dans le système de santé et de sécurité au travail.

Le Bureaux des conseillers des travailleurs fournit des services de représentation, de conseil et de formation aux travailleurs non syndiqués relativement à leurs dossiers de la WSIBfootnote 51. Le BCE offre des services semblables, en mettant l’accent sur les employeurs dont l’organisation compte 100 employés ou moinsfootnote 52. Le mandat statutaire du premier est axé sur les travailleurs non syndiqués. Tandis que le mandat statutaire du deuxième met l’accent sur les petites entreprises — bien qu’environ 10 % de ses clients soient des organisations comptant plus de 100 employésfootnote 53.

En 2018, le Bureaux des conseillers des travailleurs avait un budget annuel qui s’élevait à 11,39 millions de dollars et comptait 97footnote 54 employés, tandis que le Bureaux des conseillers des employeurs avait un budget de 3,7 millions de dollars et comptait 28 employésfootnote 55. Les deux organismes sont financés par les primes de la WSIB et leurs budgets sont évalués annuellement par le ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences. Tous deux disposent également d’un personnel spécialisé, notamment une combinaison d’avocats et de parajuristes répartis dans divers centres de la province.

Le Bureaux des conseillers des travailleurs et le Bureaux des conseillers des employeurs ont tous deux observé une hausse de la demande pour leurs services. En 2018, le nombre de dossiers traités par le BCT s’élevait à 2 535footnote 56. Il a accepté environ 60 % des demandes de représentationfootnote 57. En 2018, le nombre de dossiers traités par le BCE s’élevait à 1 178footnote 58. Ce dernier n’a pas, dans la même mesure, à relever le défi de devoir refuser des clients en raison de ressources limitées. Cette différence est en partie due au fait que les employeurs de l’Ontario connaissent mal ses services et qu’il existe un solide marché privé de représentation juridique pour les employeurs. Il existe néanmoins des preuves qui indiquent que les services du Bureaux des conseillers des travailleurs et du Bureaux des conseillers des employeurs sont très sollicités sur le marché.

Il convient de noter, par exemple, que le Bureau du conseiller des travailleurs et le Bureaux des conseillers des employeurs bénéficient d’un large appui parmi les intervenants. Le BCT fait état d’un taux de satisfaction des clients de 97 %footnote 59 et le BCE de 99 %footnote 60. Ces taux sont conformes aux commentaires reçus lors des consultations des intervenants et aux observations fournies par ces derniers dans le cadre de la présente étude. Les intervenants s’entendent rarement sur les questions liées à la WSIB, mais il est presque universellement reconnu que le BCT et le BCE fournissent des services utiles pour aider les travailleurs non syndiqués et les petits employeurs à s’y retrouver dans les processus de règlement et de contestation de la WSIB et dans l’écosystème étendu de santé et de sécurité au travail.

Tribunal d’appel de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail

Le Tribunal d’appel de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail est un organisme indépendant relevant du ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences qui examine les contestations des décisions finales prises par la WSIB. Le paragraphe 123 (1) de la Loi de 1997 sur la sécurité professionnelle et l’assurance contre les accidents du travail confère au tribunal le pouvoir de statuer sur les questions relatives à l’admissibilité — c’est à dire, le droit d’un travailleur à une indemnisation donnée — et les questions relatives au revenu — c’est à dire, à savoir si un employeur donné devrait être visé par une annexe particulière ou être inclus dans un groupe de taux spécifique et avoir un taux de prime particulierfootnote 61.

L’Ontario n’est pas la seule province à disposer d’un tel tribunal d’appel. La plupart des provinces canadiennes ont des organismes d’appel externes semblables qui agissent comme arbitre final sur les questions d’indemnisation des accidents du travailfootnote 62.

Le budget annuel du TASPAAT est d’environ 22 millions de dollarsfootnote 63. Il est dirigé par un président et compte 53 vice présidents nommés par décret pour un mandat de 10 ans, ainsi que 20 représentants des travailleurs et des employeurs, dont le rôle est d’équilibrer le processus d’audiencefootnote 64. Le budget du Tribunal d’appel de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail est également financé par les primes versées à la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail.

Les appels interjetés auprès du Tribunal d’appel de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail peuvent être déposés par les travailleurs ou les employeurs et peuvent porter sur des questions telles que les décisions relatives à l’admissibilité, les taux de prime et les groupes de taux. Les appels entendus par le TASPAAT doivent d’abord être soumis aux processus de contestation de la WSIB décrits précédemment. Bien que le TASPAAT soit tenu d’appliquer la politique de la WSIB dans ses décisionsfootnote 65, il s’agit d’un organisme distinct et indépendant doté d’un pouvoir décisionnaire, de sorte qu’il n’est pas lié par les décisions initiales de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail ni par ses décisions d’appel subséquentes.

Les audiences du Tribunal d’appel de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail se déroulent habituellement sous la présidence d’un vice président, mais elles peuvent aussi faire appel à des groupes tripartites composés d’un vice président et de représentants des travailleurs et des employeurs, selon le cas et les circonstances. Environ 60 % des audiences se déroulent sous la présidence d’un vice président et les 40 % restants font appel à des groupes tripartitesfootnote 66.

Actuellement, plus de 70 % des audiences se déroulent en personnefootnote 67. Le Tribunal d’appel de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail met actuellement à l’essai des téléconférences et des « audiences sans papier » pour réduire au minimum le fardeau qui pèse sur les travailleurs et les employeurs (en particulier pour ceux qui sont établis à l’extérieur des grands centres) et pour permettre au tribunal de réaliser des gains en matière d’efficience.

À la fin de 2018, le Tribunal d’appel de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail gérait 4 018 dossiers actifs, soit une réduction d’un tiers par rapport à l’année précédente. Au cours de cette période, le délai moyen pour obtenir une audience est également passé de 16,6 à 10,9 moisfootnote 68. Cette tendance traduit un processus continu visant à réduire l’arriéré important du TASPAAT, qui avait atteint un sommet en 2015, avec plus de 9 000 dossiers.

L’un des facteurs qui contribuent à l’arriéré du Tribunal d’appel de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail est la longueur des délais avant la tenue d’une audience. Pour ceux qui interjettent appel devant le TASPAAT, il faut prévoir en moyenne 28 mois entre le dépôt d’une demande initiale auprès de la WSIB et la tenue d’une audience devant le Tribunal d’appel de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail. De tels délais peuvent représenter un véritable défi pour ceux qui sont en situation d’insécurité financière.

Les demandeurs disposent d’un délai maximum de 24 mois entre la première présentation d’un avis d’appel au Tribunal d’appel de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail et la présentation d’un formulaire de confirmation d’appel qui permet de fixer une date d’audience. Ce délai offre au demandeur une période de deux ans pour rassembler et fournir les documents nécessaires à son audience. Toutefois, il contribue aussi à retarder la procédure d’appel. Cette situation est unique parmi les tribunaux d’appel au Canada. Le British Columbia Workers’ Compensation Appeal Tribunal (tribunal d’appel des accidents du travail de la Colombie Britannique), par exemple, a des délais d’attente beaucoup plus courts pour les demandes de renseignements — aussi peu que 21 joursfootnote 69.

Il ressort des consultations menées dans le cadre de l’étude que ces retards sont dus en grande partie à la capacité de ceux qui représentent les travailleurs et les employeurs dans le système. Des délais plus serrés pour les appels (y compris pour la présentation de documents justificatifs) exerceraient une pression sur les avocats, les parajuristes, les représentants syndicaux et les autres personnes qui agissent à titre de représentants dans ces processus. Il doit donc y avoir un équilibre entre une prise de décision rapide et une possibilité équitable pour les individus de faire valoir leur point de vue devant le tribunal.

Il est à noter que le taux d’annulation des décisions de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail par le Tribunal d’appel de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail est élevé. Les données fournies par la WSIB indiquent que le taux d’acceptation des contestations pour les décisions du TASPAAT est d’environ 55 à 66 % : de 33 à 38 % des contestations sont acceptées en totalité, tandis que de 20 à 33 % d’entre elles sont acceptées en partiefootnote 70. Les raisons qui expliquent pourquoi le taux d’annulation des décisions est aussi élevé sont multiples. Il s’explique en partie par le fait que le TASPAAT et la WSIB interprètent différemment diverses questions. Un autre facteur est que, au moment où le Tribunal d’appel de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail entend un cas, il se peut que de nouveaux renseignements (y compris, par exemple, de nouveaux diagnostics médicaux) qui ne faisaient pas partie de l’évaluation initiale soient présentés. Quelle qu’en soit la cause, cet écart est une source d’inefficacité pour la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail, le Tribunal d’appel de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail ainsi que les travailleurs et les employeurs impliqués. La prochaine section fournira une analyse plus approfondie sur la façon de s’assurer que la WSIB intègre les décisions clés du TASPAAT dans ses directives relatives au règlement des demandes.

Bureau du directeur général de la prévention

Le Bureau du directeur général de la prévention a été créé au sein du ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences en 2012 afin de superviser et de coordonner les activités de prévention à l’échelle de la province. Le bureau est dirigé par un directeur général de la prévention dont le poste est équivalent à celui de sous ministre adjoint. Il est conseillé par un conseil de la prévention représentant certains des principaux intervenants du système de santé et de sécuritéfootnote 71.

Le mandat du Bureau du directeur général de la prévention, qui consiste à promouvoir et à soutenir la prévention des blessures, est principalement exécuté par le versement de paiements de transfert à six ASST. La prochaine sous section fournit de plus amples détails sur les Associations de santé et de sécurité au travail et sur le rôle qu’elles jouent dans la prévention.

Les activités du Bureau du directeur général de la prévention — y compris les paiements de transfert aux Associations de santé et de sécurité au travail (décrits ci dessous) — sont financées par les primes de la WSIB. En 2018-2019, les dépenses totales consacrées à la prévention se sont élevées à environ 113 millions de dollars (voir la figure 5.1). Environ 80 % de ce montant est destiné aux Associations de santé et de sécurité au travail. Les fonds restants couvrent les frais de fonctionnement du Bureau du directeur général de la prévention et financent certains travaux de recherche sur la santé et la sécurité.

Figure 5.1 : Dépenses du ministère du travail, de la formation et du développement des compétences pour la prévention des accidents du travail, de 2012-1013 à 2019-2020 (en millions de dollars)footnote 72.

2012-13

100,7 $

2013-14

114,6 $

2015-16

113,7 $

2016-17

116,1 $

2017-18

118,6 $

2018-19

113,4 $

2019-20

103,5 $

Ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences de l’Ontario

Les dépenses de l’Ontario en matière de santé et de sécurité au travail (y compris la prévention) sont comparables à celles des autres provinces et territoires. La plupart d’entre eux sont regroupés autour du même niveau de dépenses mesuré en part de 100 dollars par masse salariale cotisable. La moyenne nationale est de 0,10 dollar. L’Ontario se situe à 0,11 dollar (voir la figure 6.1). Ce regroupement à l’échelle de la province n’est pas unique au Canada non plus. Les recherches menées par l’Institut de recherche sur le travail et la santé en 2010 ont montré que la plupart des pays développés consacrent à peu de choses près la même proportion aux activités de préventionfootnote 73. On a constaté que la fourchette allait de 10,40 à 13,70 dollars par travailleur en Grande-Bretagne, à 37 dollars par travailleur en Allemagne et que l’Ontario se situait légèrement à l’extrémité supérieure du spectre, à 33 dollars par travailleur.

Figure 6.1 : Dépenses en matière de santé et de sécurité au travail par 100 dollars de masse salariale cotisable par province et territoire, 2017

Canada

0,10 $

Terre Neuve et Labrador

0,11 $

Île du Prince Édouard

0,06 $

Nouvelle Écosse

0,12 $

Québec

0,13 $

Ontario

0,11 $

Manitoba

0,10 $

Saskatoon

0,12 $

Alberta

0,07 $

Colombie-Britannique

0,09 $

Yukon

0,22 $

Territoires du Nord-Ouest et Nunavut

0,14 $

Source : Association des commissions des accidents du travail du Canada

Il convient de noter que les activités du ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences en matière de santé et de sécurité — y compris en matière d’application de la loi — sont également financées par les primes de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail. Le ministère devrait recouvrer plus de 100 millions de dollars auprès de la WSIB pour les activités de prévention et 230 millions de dollars dans l’ensemble en 2019-2020. Ces activités ne sont pas visées par la présente étude. Il est toutefois important que le budget du ministère soit soumis au même examen interne par le ministère des Finances et le Secrétariat du Conseil du Trésor que s’il était entièrement prélevé sur les recettes générales.

De façon plus générale, des questions se posent au sujet de l’efficacité du modèle de prévention de la province. La fonction est passée de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail au ministère avant d’être de nouveau confiée à la WSIB à divers moments au fil des ans et a fait l’objet d’examens indépendants en cours de route. La principale difficulté réside dans le fait que les différentes composantes ont leurs propres missions et mandats ainsi que des intervenants uniques, et il peut donc être difficile d’assurer la cohérence du système. Ces dernières années, le Bureau de la prévention s’est efforcé d’améliorer la coordination, mais dans le cadre des consultations menées et des observations écrites fournies lors de l’étude, les intervenants ont fait remarquer que certains problèmes persistent en ce qui concerne la « concertation [des différents organismes] ».

On s’interroge également sur la responsabilité financière et l’utilisation des primes de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail pour financer l’ensemble du système de prévention. Le fait de compter sur les primes plutôt que sur les recettes générales peut théoriquement faire en sorte que l’on ne tienne pas compte des considérations de compromis budgétaires typiques ou de l’orientation axée sur les résultats qui guide la gestion des dépenses publiques. Un intervenant s’est dit préoccupé par le fait que la WSIB soit traitée comme une « tirelire » sans qu’il y ait un rôle adéquat relatif à l’évaluation et aux résultats. La relation entre les dépenses en matière de prévention et les résultats en milieu de travail est essentiellement qualitative, par opposition aux mesures fondées sur les résultats liées au bilan de l’Ontario en matière de sécurité au travail.

Cette préoccupation est exacerbée par le fait que, même si les activités de santé et de sécurité du ministère (y compris la prévention) couvrent l’ensemble des secteurs de l’économie, seuls les employeurs assujettis à la protection obligatoire de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail paient pour ces activités. En fait, 77 % des employeurs paient 100 % des coûts. Ce problème a été relevé dans le rapport de 2010 présidé par Tony Dean et dans le rapport de 2012 produit par Harry Arthurs et a souvent été évoqué lors des consultations menées et des observations écrites fournies dans le cadre de l’étude, y compris par des groupes allant du Compensation Employees Union à l’Ontario Business Coalitionfootnote 74.

Cela ne veut évidemment pas dire que les activités de prévention ne sont pas utiles ou ne devraient pas faire partie d’un système global de santé et de sécurité au travail. Néanmoins, comme nous le verrons dans la section 2, il est nécessaire d’améliorer la mesure et la transparence pour s’assurer que ces activités produisent des résultats et que le système est, somme toute, plus responsable.

Associations de santé et de sécurité au travail et prévention des blessures en milieu de travail en Ontario

Comme nous l’avons vu plus haut, la WSIB joue un rôle considérable dans la prévention des blessures grâce à son nouveau Programme d’excellence en santé et en sécurité et au financement qu’elle octroie à l’écosystème en général. Cela dit, la plupart des travaux sont actuellement effectués par six ASST au nom du directeur général de la prévention. Ces organismes indépendants et sans but lucratif jouent un rôle si important dans les activités de prévention de la province qu’il est utile de présenter leurs modèles et leurs fonctions.

Il y a quatre Associations de santé et de sécurité au travail qui concentrent leurs efforts sur des secteurs précis de l’économie de l’Ontario. Ces associations offrent aux employeurs de leurs secteurs respectifs des services de formation, de sensibilisation et de consultation en matière de santé et de sécurité au travail. Ces ASST sont les suivantes :

  • Association de santé et sécurité dans les infrastructures (IHSA) – vise les secteurs de la construction, de l’électricité, des services publics, des agrégats, du transport, du béton préparé et du gaz naturel.
  • Association de santé et sécurité des services publics (ASSSP) – vise les secteurs de la santé et des soins communautaires, de l’éducation et de la culture et de la sécurité publique ainsi que les gouvernements provinciaux et les administrations municipales.
  • Sécurité au travail du Nord (STN) – vise les secteurs de la foresterie, de l’exploitation minière, des pâtes et papiers et de l’impression.
  • Workplace Safety and Prevention Services (WSPS) – vise les secteurs industriels ainsi que les secteurs de l’agriculture, de la fabrication et des services.

Il y a aussi deux Associations de santé et de sécurité au travail qui ne visent pas des secteurs particuliers :

  • Centre de santé des travailleurs(ses) de l’Ontario (OHCOW) – axé sur l’étude, le traitement et l’identification des maladies professionnelles en milieu de travail.
  • Centre de santé et sécurité des travailleurs et travailleuses de l’Ontario (CSSTTO) – axé sur la formation des travailleurs, des superviseurs et des employeurs en matière de santé et sécurité au travail.

Le financement public versé aux six Associations de santé et de sécurité au travail est déterminé chaque année par le Bureau du directeur général de la prévention et est octroyé par l’intermédiaire d’ententes de transfert. Ce processus annualisé n’offre pas beaucoup de marge de manœuvre pour la planification pluriannuelle (notamment pour l’acquisition de matériel de formation ou d’autres immobilisations) et exige des ASST qu’elles consacrent des ressources considérables à la gestion du processus de renouvellement du financement. Il s’agit d’un modèle de financement inefficace.

Au total, les six Associations de santé et de sécurité au travail ont reçu 80 millions de dollars de financement provincial en 2019-2020. Cela représente environ 12 millions de dollars de moins que la moyenne globale depuis 2012-2013 (voir la figure 7.1).

Figure 7.1 : Financement provincial annuel pour les associations de santé et de sécurité au travail, de 2012-2013 à 2019-2020 (en millions de dollars)

2012-13

91,5 $

2013-14

93,4 $

2014-15

93,1 $

2015-16

90,8 $

2016-17

92,0 $

2017-18

94,7 $

2018-19

90,7 $

2019-20

80,9 $

Source: Ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences de l’Ontario

Les Associations de santé et de sécurité au travail sont une importante source de formations en matière de santé et de sécurité au travail en Ontario. Selon l’estimation la plus récente (fondée sur un échantillon de certaines certifications de santé et de sécurité), elles fournissent 53,2 % de toutes ces formations dans la province grâce à une combinaison de financement public et privéfootnote 75. En fait, l’OHCOW est la seule ASST qui ne récupère pas certains revenus au moyen d’un modèle de rémunération à l’acte. La répartition des fonds publics varie selon les organismes (figure 8.1).

Figure 8.1 : Financement annuel versé par le ministère du travail, de la formation et du développement des compétences aux associations de santé et sécurité, 2018-2019 (en millions de dollars)

Association de santé et sécurité dans les infrastructures

22,65 $

Association de santé et sécurité des services publics

9,17 $

Sécurité au travail du Nord

12,07 $

Workplace Safety and Prevention Services

29,09 $

Centre de santé des travailleurs(ses) de l’Ontario

8,48 $

Centre de santé et sécurité des travailleurs et travailleuses de l’Ontario

9,24 $

Source : ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences de l’Ontario

En plus de leurs services de base, certaines Associations de santé et de sécurité au travail telles que STN et L’OHCOW ont également assumé des responsabilités à l’égard d’autres initiatives mandatées par le gouvernement et ont conclu des ententes de transfert distinctes avec le ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences ou d’autres parties du gouvernement. Le Programme de sauvetage minier de Sécurité au travail du Nord, qui fournit de l’équipement aux employeurs et de la formation pour les sauvetages miniers et qui organise un concours annuel de sauvetage minier, est maintenant une exigence réglementaire pour les sociétés minières qui exercent leurs activités dans la province. Par ailleurs, l’STN et L’OHCOW participe à deux enquêtes financées par le gouvernement : une enquête sur les conditions sanitaires à l’usine de General Electric à Peterborough en raison de l’apparition de plusieurs maladies chez ses travailleurs et le projet de la poudre McIntyre qui identifie les personnes souffrant des effets de l’inhalation de poussière d’aluminium.

Par ailleurs, comme nous l’avons vu, les ASST comptent également sur des activités rémunérées à l’acte réalisées pour le compte de clients du secteur privé. Les consultations menées dans le cadre de l’étude ont permis de constater que les Associations de santé et de sécurité au travails’appuient de plus en plus sur ce modèle pour compenser la stagnation ou la diminution du financement public. Cela démontre que la demande pour leurs services est dictée par le marché.

Toutefois, il est également important de noter qu’il existe une offre de plus en plus solide d’autres services de consultation et de formation en matière de santé et de sécurité à la disposition des employeurs ontariens. Des rapports précédents ont mis en évidence le rôle émergent de fournisseurs de services de substitution, tels que des consultants privés, des associations industrielles ou même des syndicats sur le marchéfootnote 76. Ces acteurs offrent actuellement une part considérable des activités de formation en matière de santé et sécurité dans la province. La recherche semble montrer que les petits et moyens employeurs, en particulier, semblent enclins à recourir à ces fournisseurs de services de substitution pour répondre à leurs besoins en matière de santé et de sécurité. Comme le souligne le rapport O’Grady de 2015 :

[traduction] « Dans l’ensemble, les consultants privés semblent être à peu près aussi nombreux que les Associations de santé et de sécurité au travail en ce qui concerne le nombre d’employés de première ligne disponibles pour fournir des services de santé et de sécurité au travail et le nombre d’employeurs auxquels les services sont fournis. Les données d’enquête indiquent que les consultants privés jouent un rôle important dans le segment des petits employeurs du marché des services de santé et de sécurité au travail. Cela pourrait être un facteur à considérer important lors de l’élaboration d’une stratégie visant à accroître la disponibilité des services pour ces employeursfootnote 77. »

Cela ne doit pas être interprété comme une critique du modèle des Associations de santé et de sécurité au travail. Les consultations menées dans le cadre de l’étude ont montré que les ASST ont un personnel hautement qualifié et fournissent des services hautement spécialisés dans différents secteurs. Toutefois, comme nous le verrons dans la section suivante, ils fournissent aussi des services plus généraux là où il semble y avoir une offre de plus en plus robuste fondée sur le marché et pour laquelle un monopole assuré par le gouvernement (qui est fonction des ententes de transfert) peut être difficile à justifier. Le défi pour les dirigeants politiques consiste à déterminer quels aspects du modèle d’affaires des ASST comblent une « lacune du marché » et quelles parties de celui ci pourraient être servies par un marché plus ouvert et plus concurrentiel.

Conclusion

Dans la section 1, nous nous sommes largement abstenus d’analyser ou de formuler des recommandations. Nous nous sommes surtout efforcés de décrire les tendances et les enjeux actuels auxquels fait face la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail. L’objectif était de donner aux lecteurs une idée indépendante des progrès accomplis par la WSIB au cours des dix dernières années, mais aussi de commencer à attirer l’attention sur les occasions et les défis qui se présenteront à l’organisation au cours des prochaines années. Le temps n’est pas quelque chose de figé; la WSIB non plus.


Notes en bas de page