Synthèse

Nous sommes tous touchés par le système de sécurité du revenu de l’Ontariofootnote 1. Quels que soient nos antécédents, nos réussites ou nos difficultés, il est dans notre intérêt collectif d’appuyer la capacité des gens à prospérer de même qu’à contribuer au tissu social de nos collectivités et au mieux-être économique de notre province.

Nous avons constaté que les insuffisances du système actuel, notamment la privation, le désespoir et les occasions perdues par les particuliers et les familles qui vivent dans la pauvreté, ont occasionné de graves conséquences sur le plan humain. La hausse des coûts des soins de santé, des services sociaux et du système de justice et la baisse des recettes fiscales s’ensuivent comme rappel des piètres résultats qu’obtiennent les gens. Au bout du compte, la pauvreté est onéreuse et nous en payons tous le prix.

De nombreux rapports ont préalablement documenté les problèmes éprouvés dans le système de sécurité du revenu de l’Ontario; il est désormais temps de passer à l’action. Voilà pourquoi le gouvernement provincial a invité trois groupes de travailfootnote 2 à recommander une feuille de route décennale en vue d’une réforme de la sécurité du revenu en Ontario.

L’objet de la présente feuille de route consiste à indiquer clairement la voie à suivre, dans laquelle sont énoncées des étapes concrètes sur plusieurs années dans l’optique d’en arriver à un système moderne, adaptable et performant.

Sécurité Du Revenu : Situation Future

Sécurité Du Revenu : Situation Future

Tous les particuliers sont traités avec respect et dignité, outillés pour atteindre leur plein potentiel et inspirés à le faire. Les gens bénéficient d’un accès équitable à un système de soutien du revenu et en nature complet et axé sur la responsabilisation; ce système procure un niveau suffisant d’aide financière et favorise l’inclusion sociale et économique, tout en prêtant une attention particulière aux besoins et au vécu des Autochtones.

Thèmes principaux

Dans la conception de la feuille de route, les groupes de travail devaient prendre en compte trois thèmes principaux :

  1. Investir dans les gens – Les gens sont la ressource la plus importante de l’Ontario. Tous les éléments du système de sécurité du revenu doivent collaborer efficacement pour satisfaire à une gamme variée de besoins et de vécus, à l’appui de l’amélioration de la stabilité financière, de la santé et du mieux-être des particuliers et des familles. Les liens des gens avec le système de sécurité du revenu sont trop souvent axés sur les activités transactionnelles et l’application des règlements, tout particulièrement dans le cadre de l’aide sociale. Il est crucial de changer la façon dont les programmes sont conçus, la façon dont ils se recoupent, et leur façon de mettre les gens en lien avec le soutien pertinent à partir du tout premier point d’accès.
  2. Se préoccuper de la suffisance – Il est inacceptable que tant de gens vivent dans la pauvreté extrême et soient plongés dans le besoin en Ontario. Il est vital que le gouvernement provincial détermine un seuil au-delà duquel personne ne devrait se trouver et qu’il prenne des engagements en ce sens. La réussite passe par l’effet concerté des composantes du système de sécurité du revenu ainsi que des prestations et soutiens de revenu fédéraux, provinciaux et municipaux combinés en vue d’améliorer la vie des gens. Il faut prendre des mesures urgentes et immédiates et consentir d’importants investissements dans le système de sécurité du revenu, dont l’aide sociale, pour concrétiser ce programme au cours des dix prochaines années.
  3. Prendre conscience du vécu des Autochtones – La réforme de la sécurité du revenu doit s’inscrire dans les engagements du gouvernement provincial quant à la réconciliation avec les Autochtones au moyen de son cadre « Cheminer ensemble », et contribuer à rétablir les liens avec les Autochtones. Pour ce faire, le système de sécurité du revenu devra s’attaquer énergiquement et parer au racisme systémique et institutionnel, puis prendre conscience des profondes répercussions de la colonisation, des pensionnats indiens et du traumatisme intergénérationnel. La réforme doit respecter le droit des Premières Nations à l’autonomie gouvernementale et s’adapter aux besoins et points de vue exceptionnels des Autochtones, y compris ceux qui ne sont pas membres d’une Première Nation. À cause de problèmes liés à la collecte des données au sein et à l’extérieur des communautés des Premières Nations, il est difficile d’évaluer avec exactitude le nombre d’Autochtones qui habitent les villes et villages de l’Ontario. D’après un document du ministère des Finances de l’Ontario intitulé « Faits saillants de l’Enquête nationale auprès des ménages de 2011 : Les peuples autochtones de l’Ontario », environ 84 %footnote 3  des Autochtones vivent à l’extérieur des communautés des Premières Nations. Les Premières Nations font remarquer que ces données sont biaisées, car de nombreuses personnes des Premières Nations ne participent ni à la collecte des données, ni à l’enquête.

Sommaire des recommandations

Parvenir à la suffisance du revenu

Adopter une définition de la suffisance du revenu et s’engager publiquement à atteindre cet objectif en dix ans.

1. Adopter un niveau minimum de revenu en Ontario auquel se conformer au cours des dix prochaines années au moyen de soutiens combinés dans l’ensemble du système de sécurité du revenu.

  • Le gouvernement provincial devrait s’engager publiquement à concrétiser en dix ans un niveau minimum de revenu (d’ici 2027-2028).
    • Le niveau minimum de revenu devrait au départ correspondre à la mesure de faible revenu (MFR) actuellement employée par la Stratégie ontarienne de réduction de la pauvreté (c.-à-d. la MFR 50 de la SORP couplée à l’année de référence 2012), à bonifier de 30 % pour les personnes handicapées, étant donné l’augmentation du coût de la vie qu’occasionne une invalidité. Consultez l’annexe B pour connaître les niveaux de MFR de la SORP en lien avec différents types de famille.
  • Amorcer sans tarder le travail à la définition d’une mesure ontarienne du panier de consommation englobant un panier de produits modernes, dont le prix reflète les coûts réels et qui est rajusté pour toutes les régions de la province, dont les régions éloignées du Nord. Cette mesure servira à évaluer les progrès vers le niveau minimum de revenu; elle permettra peut-être de voir ou de remplacer la MFR de la SORP comme mesure d’établissement du niveau. La mesure ontarienne du panier de consommation pourrait également servir à orienter et à évaluer les décisions d’investissement à long terme.
  • Instaurer les recommandations dans la feuille de route pour progresser vers la suffisance dans le système de sécurité du revenu d’ici 2027-2028.

Mobiliser tout le système de sécurité du revenu

Tirer parti de tout le système de sécurité du revenu, actuellement et à l’avenir, afin que les programmes fonctionnent de concert pour faciliter l’inclusion sociale et économique des personnes à faible revenu.

Une prestation de logement en Ontario

2. Instaurer une prestation de logement pour aider les personnes à faible revenu à composer avec la hausse du coût de la vie, qu’elles soient prestataires de l’aide sociale ou non, afin qu’elles n’aient pas à choisir entre un domicile et d’autres biens de première nécessité.

  • Confirmer les détails de la conception et de l’instauration d’une prestation de logement universelle, fondée sur le revenu et transférable aux gens qui louent leur domicile.
  • Instaurer la prestation de logement transférable en 2019-2020 à titre de modeste « comblement de l’écart » de 25 %, l’écart correspondant à la différence entre le coût réel du logement et une contribution minimale du ménage en fonction du revenu de celui ci.
  • Hausser le comblement de l’écart pour qu’il se situe à 35 % en 2020-2021, puis continuer de le hausser jusqu’à ce qu’il atteigne 75 % d’ici 2027-2028 ou avant.
  • Dans la prestation de logement, il faut vraiment prendre en compte les Premières Nations, qui pourront nécessiter des modifications ou une prestation parallèle afin que cette mesure fonctionne dans le contexte des réserves.
Soutien du revenu aux enfants

3. Continuer de situer le soutien du revenu aux enfants à l’extérieur de l’aide sociale afin que toutes les familles à faible revenu puissent en tirer pleinement parti, quelle que soit la source du revenu. Voir à ce que les soutiens soient adaptés aux besoins des enfants et des jeunes qui éprouvent des difficultés dans leur vie familiale.

  • Fournir des suppléments de transition pour enfants dans le contexte de l’aide sociale afin que la situation des familles ne se détériore pas durant cette transition, où la structure de l’aide sociale sera transformée pour englober les taux forfaitaires.
  • Modifier l’image de marque du programme Aide pour soins temporaires afin que celui ci porte sur le mieux-être des enfants, hausser le montant du soutien de revenu fourni pour qu’il soit en phase avec les niveaux de placement familial, puis donner aux administrateurs d’Ontario au travail une marge de manœuvre claire pour en déterminer le meilleur point d’accès.
  • Transférer les montants restants versés en lien avec les besoins essentiels des enfants dans l’aide sociale à la Prestation ontarienne pour enfants à titre de supplément destiné aux familles ayant les revenus les plus faibles.
  • Exiger des sociétés d’aide à l’enfance qu’elles placent les versements de l’allocation spéciale pour enfants dans un programme d’épargne destiné aux jeunes de 15 ans et plus pris en charge afin que les fonds leur soient consentis dans leur transition à la fin de la prise en charge.
  • Fournir du soutien à toutes les personnes à faible revenu, y compris celles qui vivent dans les communautés des Premières Nations, afin que les prestations versées par le truchement du système fiscal soient accessibles et reçues de façon équitable.
Prestation fiscale pour le revenu de travail

4. Collaborer avec le gouvernement fédéral à l’augmentation de l’efficacité de la Prestation fiscale pour le revenu de travail (PFRT) afin qu’elle joue un rôle accru dans la suffisance du revenu chez les travailleurs à faible revenu en Ontario.

  • Le gouvernement fédéral augmente la PFRT afin qu’elle reflète bien les réalités auxquelles font face les travailleurs à faible revenu en Ontario. Cette mesure devrait englober l’examen des points suivants :
    • le niveau de gains auquel un particulier se met à recevoir la PFRT et le mode de rajustement de la PFRT lorsque les gains augmentent, dont le seuil à partir duquel la PFRT se met à diminuer;
    • le montant global de soutien fourni au moyen de la PFRT;
    • le revenu net à partir duquel les particuliers n’ont plus droit à la PFRT;
    • l’action directe, le soutien et tout autre mode de prestation parallèle requis afin que les particuliers des Premières Nations aient accès à la PFRT.
Prestations pour soins de santé de base

5. Mettre les prestations pour soins de santé essentiels à la disposition des personnes à faible revenu, et voir en premier lieu à ce que ceux dans la pauvreté extrême aient accès aux services dont ils ont besoin.

  • Élargir l’accès aux prestations pour soins de santé de base obligatoires à tous les adultes prestataires du programme Ontario au travail et les enfants d’âge adulte des familles prestataires du POSPH, puis étendre la couverture relative aux prothèses dentaires (y compris les mises au point initiales et de suivi) à tous les prestataires de l’aide sociale.
  • Développer les prestations de soins de santé de base et en instaurer de nouvelles à l’intention des adultes au faible revenu a cours des dix prochaines années, en commençant par l’élargissement de la couverture des médicaments sur ordonnance aux adultes de 25 à 65 ans, suivi de :
    • l’élargissement du programme Beaux sourires Ontario aux adultes de 18 à 65 ans et l’ajout des prothèses dentaires dans le cadre de la prestation;
    • la conception et l’instauration d’une nouvelle prestation pour soins de la vue et de l’ouïe aux particuliers et aux familles à faible revenu;
    • l’élargissement de l’accès aux prestations de transport pour raisons médicales.
  • Revoir le Programme d’appareils et accessoires fonctionnels pour en optimiser la portée chez les personnes à faible revenu, tant en ce qui touche la liste des appareils et accessoires couverts que la couverture maximale.
Accès à la justice

6. L’équité procédurale doit être intégrée à tous les aspects du système de sécurité du revenu par des politiques, procédures et pratiques appropriées ainsi que des mécanismes d’appel rapides.

  • Demander à un organisme de recherche comme la Commission du droit de l’Ontario ou un établissement universitaire d’examiner le processus actuel d’appel relatif aux prestations versées par le truchement du système fiscal, puis élaborer des recommandations en vue de mécanismes améliorés ou nouveaux à l’appui d’un accès juste, transparent et efficace à ces prestations et aux processus d’appel.

Transformer l’aide sociale

Simplifier l’aide sociale et abroger les règles et politiques coercitives. Voir à ce que l’attention soit particulièrement prêtée à l’aide aux personnes pour qu’elles surmontent les obstacles pour sortir de la pauvreté et participer à la société.

Cadre législatif

7. Changer fondamentalement le cadre législatif des programmes d’aide sociale pour jeter les bases d’une culture axée sur la confiance, la collaboration et la résolution de problèmes.

  • Concevoir et instaurer une nouvelle législation pour régir le programme Ontario au travail et en modifier l’image de marque. Comme point de départ du changement législatif, pendant la première année des réformes, rédiger un nouvel énoncé de mission faisant l’objet de consultations publiques et qui reconnaît et appuie explicitement :
    • le choix et le mieux-être de chacun;
    • la diversité des besoins de même que l’objectif d’inclusion sociale et économique pour tous.
  • Discerner et modifier le Règlement au titre de la Loi de 1997 sur le programme Ontario au travail et de la Loi de 1997 sur le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées avant l’entrée en vigueur de la nouvelle législation du programme Ontario au travail pour donner le coup d’envoi à une culture positive axée sur la confiance, la collaboration et la résolution de problèmes et renforcer celle-ci.
  • Donner aux Premières Nations l’occasion de concevoir et d’instaurer leurs propres modèles communautaires d’aide au revenu en vertu de la législation provinciale.
Une culture axée sur la confiance, la collaboration et la résolution de problèmes

8. Instaurer une philosophie de service aux prestataires du programme Ontario au travail et du POSPH propice à une culture axée sur la confiance, la collaboration et la résolution de problèmes en priorité, et qui débouche sur une bonne qualité de vie pour les personnes de toutes les communautés, y compris les Autochtones.

  • Demander aux travailleurs de première ligne d’agir comme collaborateurs de cas, ayant pour rôle principal de régler les problèmes dans un esprit coopératif et de cheminer dans les services avec humanité, de telle sorte que les personnes pourront communiquer de l’information sans crainte de représailles. Ce rôle englobe le travail auprès des particuliers dans un cadre individuel ou collectif.
  • Instaurer un outil d’évaluation complet pour discerner les besoins et les obstacles en matière d’inclusion sociale et économique, au moyen d’une démarche sensible à l’équité et aux traumatismes afin de mettre les personnes en lien avec les soutiens appropriés.
  • Se servir de projets pilotes pour mettre à l’essai l’outil d’évaluation complet et le rôle de collaborateur, compte tenu avant tout des personnes qui cherchent à accéder au POSPH au moyen du programme Ontario au travail, des prestataires d’aide sociale à long terme, des jeunes et des personnes handicapées.
  • Éliminer les sanctions financières en lien avec les efforts de recherche d’emploi et les exigences rigides de déclaration afin d’appuyer une nouvelle démarche axée sur la personne, de promouvoir la confiance et le respect entre travailleurs de première ligne et demandeurs d’aide, et de privilégier avant tout la résolution de problèmes et le traitement des besoins urgents en premier lieu (p. ex., le risque d’itinérance). Cette démarche englobe l’examen des politiques qui font obstacle à la sécurité et au mieux-être (p. ex., fuir un domicile non sécuritaire).
  • Voir à ce que les travailleurs de première ligne aient les aptitudes et connaissances nécessaires pour faire fonction de collaborateurs de cas par les moyens suivants :
    • l’apprentissage et le perfectionnement professionnel obligatoire, dont les aptitudes en travail social (c.-à-d. l’action contre le racisme, le perfectionnement professionnel contemporain et la pratique anti oppressive), ainsi qu’une formation liée à la sécurité culturelle et à la sensibilisation des Autochtones;
    • des normes et mesures de contrôle de la qualité établies et régies par le gouvernement provincial, en lien avec les plans de rendement du personnel.
  • Mettre en place fréquemment des collaborateurs de cas du programme Ontario au travail et du POSPH dans les bureaux de prestation de services aux Autochtones afin de rehausser la sensibilisation et la compréhension culturelles et d’appuyer l’amélioration des rapports entre organismes.
  • Reconnaître clairement le droit des Autochtones de choisir le lieu qu’ils préfèrent pour obtenir des services.
  • Faire en sorte que la dotation, tous niveaux confondus, témoigne de la diversité de l’Ontario, et modéliser des bureaux vraiment propices à l’inclusion, qui sont accueillants et reflètent la multitude des cultures et communautés servies en Ontario, dont la diversité au sein des communautés autochtones et entre celles-ci.
  • Revoir et rajuster continuellement la philosophie de service, le perfectionnement professionnel, de même que les outils et ressources en fonction de la rétroaction reçue des partenaires et des gens qui ont accès aux programmes.
  • Instituer un programme conçu et mis en œuvre par les Premières Nations, fondé sur l’auto-identification, la conscience de leur propre valeur et un véritable esprit de réconciliation, et qui débouche sur la stabilisation de la vie.
  • Procéder à des analyses des politiques et services actuels ou proposés afin que ceux-ci n’occasionnent pas de vulnérabilité et qu’ils ne fragilisent pas la sécurité des personnes qui reçoivent de l’aide. Cette démarche doit englober une analyse culturelle et comparative entre les sexes pour garantir la sécurité des femmes autochtones.
Soutenir les personnes handicapées

9. Maintenir et raffermir le POSPH comme un programme distinct pour les personnes handicapées. Voir à ce que le POSPH et le programme Ontario au travail soient bien outillés pour soutenir les personnes handicapées dans l’atteinte d’objectifs individuels en vue de l’inclusion sociale et économique.

  • Reconnaître le besoin continu d’un programme distinct de soutien du revenu pour les personnes handicapées.
  • Conserver la définition d’invalidité actuellement dans le POSPH.
  • Continuer la collaboration avec le Groupe de travail sur la détermination de l’admissibilité des personnes handicapées en vue de simplifier et d’améliorer le processus de présentation de demande et de détermination de l’admissibilité dans le POSPH.
  • Fournir à l’échelle provinciale un soutien et des mesures d’accommodement aux personnes qui ont besoin d’aide dans le processus de présentation d’une demande au POSPH, à partir des leçons tirées des groupes communautaires.
  • Inclure un examen particulier auprès des partenaires de prestation de services aux Premières Nations et aux Autochtones en milieu urbain afin que le soutien et les mesures d’accommodement témoignent du vécu exceptionnel des Autochtones.
  • Veiller à ce que le POSPH et le programme Ontario au travail répondent aux besoins des personnes handicapées dans le cadre d’une démarche axée sur la personne et la collaboration afin de soutenir les aspirations et buts individuels.
Une formule de revenu assuré pour les personnes handicapées

10. Concevoir en collaboration une formule de « revenu assuré » pour les personnes handicapées.

  • Concevoir en collaboration un mécanisme de revenu assuré servant à la prestation d’un soutien financier aux personnes conformes à la définition de l’invalidité dans le POSPH. La consultation des personnes des Premières Nations est essentielle.
  • Inclure les composantes suivantes dans le mécanisme de revenu assuré :
    • fondé sur le revenu seulement (c.-à-d. pas sur les actifs);
    • le cumul des prestations de revenu pour arriver à la suffisance;
    • une définition fiscale du revenu (c.-à-d. sans tenir compte de l’aide financière [sous forme de cadeaux] apportée par la famille ou les amis);
    • la responsabilité continue du gouvernement provincial quant à la détermination de l’invalidité, avec le droit d’interjeter appel au Tribunal de l’aide sociale de l’Ontario;
    • une marge de manœuvre en vue de rajustements selon les variations du revenu au cours de l’année;
    • la garantie de pouvoir réintégrer le programme après avoir occupé un emploi.
  • Fournir un revenu assuré initial au moins aussi élevé que le taux forfaitaire normal pour personne handicapée du POSPH au moment de la transition, puis fournir des hausses continues jusqu’à ce que le niveau minimum de revenu soit atteint, en combinaison avec d’autres composantes de sécurité du revenu.
  • Voir à ce que les personnes qui reçoivent le revenu assuré aient pleinement accès aux services et au soutien d’un chargé de cas du POSPH.
  • Donner aux Premières Nations la capacité d’appliquer le POSPH et d’en assurer la prestation dans leurs propres communautés, tout comme le programme Ontario au travail.
Une structure d’aide sociale transformée

11. Reconcevoir la structure tarifaire de l’aide sociale, afin que tous les adultes aient accès à un niveau constant de soutien, quelle que soit leur situation de vie (c.-à-d. locataire, propriétaire, gîte et couvert, sans adresse fixe, domicile en fonction du loyer indexé sur le revenu, centre subventionné par l’État).

  • Transformer la structure tarifaire de l’aide sociale comme suit :
    • les adultes célibataires reçoivent un taux forfaitaire normal dans lequel les besoins de base et le logement ne sont pas différenciés;
    • les couples reçoivent un taux forfaitaire normal pour couples qui est 1,5 fois plus élevé que le taux forfaitaire normal;
    • étant donné l’augmentation du coût de la vie qu’occasionne une invalidité, les adultes célibataires handicapés reçoivent un taux forfaitaire normal supérieur – invalidité pendant que les couples reçoivent un taux forfaitaire normal pour couples – invalidité qui est 1,5 fois plus élevé que le taux forfaitaire normal – invalidité. Les enfants d’âge adulte de 18 à 24 ans (sans invalidité) qui habitent chez leurs parents prestataires de l’aide sociale reçoivent un taux forfaitaire pour personne à charge (75 % du taux forfaitaire normal pour la première personne à charge et 35 % pour chaque personne à charge subséquente). Les enfants d’âge adulte de 24 ans et plus (sans invalidité) qui habitent chez leurs parents reçoivent le taux forfaitaire normal complet. Les personnes handicapées continuent d’être admissibles de plein droit au POSPH à 18 ans.
  • Harmoniser la définition de conjoint aux termes de l’aide sociale avec la Loi sur le droit de la famille (c.-à-d. considéré comme conjoint après trois ans).
  • Dans le passage à une structure de taux forfaitaire normal, éliminer les échelles de loyer actuellement utilisées pour les prestataires de l’aide sociale. Exiger des gestionnaires des services municipaux de logement qu’ils investissent les revenus accrus tirés de l’élimination des échelles de loyer indexé sur le revenu (en raison de la transformation de la structure tarifaire) dans des mesures prioritaires locales de logement et d’aide aux sans-abri.

12. Améliorer les règles de l’aide sociale et reconcevoir les prestations afin que les personnes puissent se consacrer facilement à leurs objectifs d’emploi et réaliser les avantages que procure le travail.

  • Reconcevoir, par un processus de conception en collaboration, les prestations actuelles en lien avec l’emploi (sauf la Prestation liée à l’emploi du POSPH) en une seule prestation, en tenant compte du caractère obligatoire ou discrétionnaire à donner à la prestation, du niveau de prescription dans les activités que la prestation peut soutenir, et du niveau de soutien fourni pour combler une vaste gamme de besoins. Mettre la prestation à l’essai avant de la déployer à l’échelle provinciale.
  • Faire passer de trois mois à un mois la période d’attente pour l’exemption des gains d’emploi dans le programme Ontario au travail.
  • Désigner des agents de prestation des Premières Nations dans le programme Ontario au travail pour assurer la prestation et l’application du programme d’aide à l’emploi d’Emploi Ontario, de façon à bien aider les membres de leur communauté à devenir aptes au travail par une série de prestations et de programmes auxquels ils n’ont pas accès pour diverses raisons, y compris sans s’y limiter la grande distance les séparant des municipalités ou centres urbains où se déroulent les programmes d’Emploi Ontario, le manque de services axés sur l’acquisition d’aptitudes au travail dans le programme Ontario au travail, et le retrait récent de programmes d’aide (p. ex., le Fonds pour l’emploi des Premières Nations).
  • Soutenir la collaboration aux cas, tant en contexte individuel que collectif.

13. Moderniser les règles régissant le revenu et les actifs, afin que les personnes puissent optimiser les sources de revenu dont elles disposent et épargner pour l’avenir.

  • Exempter à titre d’actifs les fonds détenus dans les comptes d’épargne libres d’impôt et les régimes enregistrés épargne-retraite afin que les personnes ne soient pas tenues d’épuiser les ressources destinées à leurs années de retraite.
  • Au départ, exempter de l’aide sociale 25 % des versements au titre du Programme de prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada, de assurance-emploi et de la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (c.-à-d. l’aide sociale sera réduite de 75 cents pour chaque dollar de revenu provenant de ces sources plutôt que retranchée intégralement).
  • Hausser l’exemption du revenu en lien avec les versements au titre du Programme de prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada, de assurance-emploi et de la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail au même niveau que l’exemption de gains actuelle d’ici 2022-2023.

14. Garantir l’accès continu aux indemnités et prestations ciblées d’ici à ce que la suffisance soit atteinte. Déterminer les coûts extraordinaires qui demeurent inabordables pour les personnes, même une fois atteinte la suffisance, puis maintenir les prestations s’y rapportant.

  • Conserver les indemnités et prestations suivantes à des fins spéciales et les revoir au fur et à mesure que des progrès vers la suffisance sont réalisés et que les revenus des personnes sont bien compris :
    • l’Allocation pour régime alimentaire spécial;
    • les Prestations obligatoires pour les nécessités spéciales et les prestations de transport pour raisons médicales;
    • l’Allocation nutritionnelle en période de grossesse et d’allaitement;
    • la Prestation liée à l’emploi du POSPH.
  • Réviser les règles du transport pour raisons médicales afin d’y inclure et de soutenir un accès élargi aux guérisseurs traditionnels.
  • Revoir les critères d’admissibilité à l’Allocation pour les collectivités éloignées et les élargir pour bien répondre aux besoins des communautés du Nord et éloignées.
  • Reconcevoir les prestations discrétionnaires du programme Ontario au travail au fur et à mesure que d’autres recommandations sont instaurées (p. ex., rendre obligatoires les prestations pour soins de santé de base et l’aide relative aux frais de funérailles et d’enterrement), puis songer à les rendre accessibles à l’ensemble de la population à faible revenu.
Aider ceux dans la pauvreté extrême

Prendre des mesures précoces et urgentes pour hausser le niveau de soutien du revenu à la disposition des personnes dans la pauvreté extrême.

15. Aider ceux dans la pauvreté extrême en augmentant immédiatement le soutien du revenu offert par l’aide sociale comme moyen facilement accessible de progrès précoce et absolument critique vers la suffisance.

  • Instaurer des changements qui résultent en des progrès significatifs dans le rehaussement des revenus les plus à l’écart du niveau minimum de revenu par le truchement de l’aide sociale comme moyen le plus facilement accessible et rajusté par les mesures suivantes (à l’automne 2018) :
    • fixer le taux forfaitaire normal à 794 $/mois (une hausse de 10 % par rapport aux taux maximaux pour les besoins de base et le logement dans le programme Ontario au travail à l’automne 2017);
    • fixer le taux forfaitaire normal – invalidité à 1 209 $/mois (une hausse de 5 % par rapport aux taux maximaux pour les besoins de base et le logement dans le POSPH à l’automne 2017).
  • Instaurer des hausses au taux forfaitaire normal et au taux forfaitaire normal – invalidité à l’automne 2019 :
    • hausser le taux forfaitaire normal pour le faire passer à 850 $/mois (une hausse de 7 % par rapport à la première année);
    • hausser le taux forfaitaire normal – invalidité pour le faire passer à 1 270 $/mois (une hausse de 5 % par rapport à la première année.
  • Instaurer d’autres hausses au taux forfaitaire normal et au taux forfaitaire normal – invalidité à l’automne 2020 :
    • hausser le taux forfaitaire normal pour le faire passer à 893 $/mois (une hausse de 5 % par rapport à la deuxième année);
    • hausser le taux forfaitaire normal – invalidité pour le faire passer à 1 334 $/mois (une hausse de 5 % par rapport à la deuxième année).
  • Continuer de hausser le niveau de soutien du revenu accessible par le programme Ontario au travail (dont l’image de marque est modifiée) d’ici à ce que le niveau minimum de revenu soit atteint, en combinaison avec d’autres composantes de sécurité du revenu, en 2027 2028.
Autonomie Gouvernementale Et Respect Des Compétences Des Premières Nations

16. Prendre des mesures afin qu’en bout de ligne, les services sociaux soient contrôlés et déterminés par les Premières Nations et propres à ces dernières.

  • À partir du droit inhérent dont elles disposent, les Premières Nations doivent avoir la possibilité de concevoir et de contrôler leurs propres programmes de services sociaux.
  • Reconnaître l’autorité des Premières Nations dans la création et l’instauration de leur propre modèle d’aide au revenu.
  • Établir des liens avec le gouvernement fédéral et les Premières Nations dans une entente tripartite afin que les nouvelles démarches souples et adaptables bénéficient d’un soutien financier continu.
  • Respecter l’autonomie des Premières Nations et collaborer avec ces dernières à l’élaboration d’une option de retrait qui reconnaît explicitement leur droit de se retirer des dispositions du cadre législatif du programme Ontario au travail pour favoriser leurs propres modèles. Mettre en place des processus de communication pour renseigner les Premières Nations sur les dispositions et possibilités de retrait afin de diriger directement la prestation des programmes.
  • Discerner des démarches ou modèles de service davantage souples et adaptables, et que les Premières Nations pourraient adapter, comme :
    • la règle relative aux personnes vivant avec le père ou la mère;
    • la période d’admissibilité aux exemptions de gains;
    • les règles de non-conformité;
    • un revenu locatif pour les prestataires du programme Ontario au travail;
    • la définition de conjoint, à établir aux termes de la Loi sur le droit de la famille;
    • les exigences de participation (à titre volontaire);
    • les coûts maximaux de logement, à partir des montants réels.
  • Déterminer et communiquer des lignes directrices claires à observer par le personnel du gouvernement provincial dans l’accès aux données que possèdent les Premières Nations, suivant le protocole de propriété, de contrôle, d’accès et de possession avalisé par l’Assemblée des Premières Nations.
  • S’engager à collaborer avec les Premières Nations à la conception et au lancement de projets pilotes de prestation directe des programmes, dont le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées, Emploi Ontario, le programme Aide à l’égard d’enfants qui ont un handicap grave et le Programme de services particuliers à domicile, dans l’optique à long terme d’une prestation par les Premières Nations, selon leur volonté.
  • Soutenir la mise au point de formulaires et processus administratifs, ainsi que d’une formation destinée au personnel des services sociaux des Premières Nations, pour appuyer la nouvelle démarche souple et adaptable.
  • S’engager à collaborer avec les Premières Nations (par le truchement des organisations provinciales et territoriales [OPT), des conseils tribaux ou de certaines Premières Nations) à l’instauration d’un plan de mise en œuvre afin que les Premières Nations acceptent la responsabilité de concevoir et de fournir les programmes suivants aux communautés des Premières Nations : le programme Ontario au travail; le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées; le programme Aide à l’égard d’enfants qui ont un handicap grave; le Programme de services particuliers à domicile; et le programme Aide pour soins temporaires.
  • Prendre des mesures afin que les Premières Nations demeurent admissibles au nouveau financement des nouveaux programmes que le gouvernement de l’Ontario pourrait créer après qu’une Première Nation a assumé l’autonomie gouvernementale dans l’aide sociale.

17. Élargir les résultats des programmes pour englober l’inclusion sociale. Simplifier les processus et fournir des outils en vue d’une démarche globale et personnalisée qui propose des services complémentaires.

  • Il faut reconnaître les divers objectifs, besoins et trajectoires des particuliers pour encourager et promouvoir la réussite personnelle, notamment élargir les résultats des programmes pour y intégrer la mobilisation communautaire et l’inclusion sociale, de même que soutenir les particuliers qui améliorent leur aptitude à l’emploi.
  • Il faut reconnaître et soutenir la capacité des programmes de services sociaux des Premières Nations à fournir ce qui suit :
    • une aide au revenu à l’intention des célibataires, des couples et des familles;
    • des activités préalables à l’emploi, y compris sans s’y limiter l’alphabétisation, la mise à niveau, une expérience de travail, une formation professionnelle propre à l’emploi, des initiatives destinées aux jeunes, des ressources d’aide à l’entreprise sociale et au travail indépendant;
    • les aiguillages et interventions précoces ayant trait à la santé mentale et à la toxicomanie;
    • les initiatives communautaires propres à la langue, à la culture, à la tradition ainsi qu’au contexte économique et éducatif de la communauté;
    • la prestation de tous les services susmentionnés selon une démarche globale des Premières Nations.
  • Une formation en développement communautaire et sociale destinée au personnel des Premières Nations.
  • Il faut reconnaître le ressourcement pour le mieux-être, la stabilisation de la vie, l’inclusion sociale, les activités préalables à l’emploi et l’acquisition des aptitudes essentielles comme d’importantes réalisations dans la trajectoire vers la réussite.
  • Il faut harmoniser les règles du travail indépendant dans le programme Ontario au travail avec le POSPH afin d’englober les travailleurs à temps partiel et saisonniers. Il faut simplifier et réviser les règles, les lignes directrices et les évaluations d’admissibilité en lien avec le travail indépendant.
  • Favoriser le travail indépendant et les entreprises sociales comme options viables pour les peuples et communautés des Premières Nations.
  • Collaborer avec les Premières Nations à la promotion des renseignements et à la création de possibilités en lien avec l’offre de microprêts, le lancement de petites entreprises, et les programmes fédéraux et provinciaux.
  • Les administrateurs des services sociaux des Premières Nations doivent continuer de fournir des services liés à l’emploi pour promouvoir une démarche globale qui soutient les membres des communautés.
  • Les administrateurs des services sociaux des Premières Nations doivent fournir et superviser les services et soutiens en matière d’emploi du programme Emploi Ontario dans leur communauté.
  • Les jeunes des Premières Nations sont l’avenir des communautés des Premières Nations et nécessitent l’accès aux services et soutiens dès le début de leur vie pour parvenir à la réussite dans leur emploi, leurs études et leur transition vers l’âge adulte :
    • les jeunes de 14 ans et plus doivent avoir accès aux soutiens à l’emploi du programme Ontario au travail et du POSPH;
    • la prestation d’un financement de soutien aux programmes, à l’inclusion sociale, à l’apprentissage culturel et à la transmission des connaissances entre aînés et jeunes.
  • En reconnaissance du fait que les Premières Nations doivent assurer la prestation du POSPH, briser les entraves au POSPH par les moyens suivants :
    • financer le personnel de soutien afin qu’il fasse une gestion de cas intensive et veille à la tenue d’évaluations pour aider les particuliers à cheminer dans le POSPH;
    • soutenir un accès élargi aux professionnels de la santé dans les communautés des Premières Nations pour aider à remplir la Trousse de documents et de formules sur la détermination de l’invalidité (TDFDI) par le recours à la vidéo ou aux services de télésanté;
    • augmenter l’aide relative aux frais de transport pour raisons médicales et en accélérer la prestation;
    • donner un soutien continu aux prestataires et groupes de prestataires du POSPH;
    • fournir une prestation supplémentaire destinée aux personnes handicapées prestataires du POSPH;
    • prolonger les délais d’achèvement des étapes dans le processus de présentation de demandes, si nécessaire.
  • Des outils, ressources, fonds et formations doivent être en place pour soutenir le perfectionnement professionnel continu des Premières Nations.
  • Promouvoir et soutenir le ressourcement pour le mieux-être parmi le personnel des services sociaux.
  • Il faut bien reconnaître les capacités, les aptitudes et le perfectionnement professionnel des administrateurs des services sociaux des Premières Nations et souligner leur rôle crucial quant à leur incidence sur la vie et les résultats des particuliers des Premières Nations qui sont prestataires de l’aide sociale.
Financement Suffisant Pour Les Premières Nations

Le système de sécurité sociale doit bien s’adapter à la situation économique et géographique locale des communautés des Premières Nations afin que les gens obtiennent l’aide nécessaire pour maintenir un niveau de vie suffisant et s’extirper de la pauvreté.

  • Les programmes, services et soutiens fournis par le truchement de l’aide sociale doivent bien témoigner des réalités de la vie dans les communautés des Premières Nations.
  • Le financement discrétionnaire doit s’appuyer sur le remboursement des dépenses réelles.
  • Les taux doivent refléter les coûts supplémentaires de la vie dans les communautés des Premières Nations, y compris celles qui sont éloignées et isolées (p. ex., l’achat d’aliments nutritifs, les frais de transport).
  • Se pencher sur les pratiques de fixation du prix des aliments, des produits et des services dans les communautés du Nord (p. ex., le Northern Store).
  • Élargir les critères d’admissibilité à l’Allocation pour les collectivités éloignées à une superficie d’une ampleur accrue.
  • Reconnaître et mettre en application un concept de quotient d’éloignement mis au point par les Premières Nations et qui témoigne du coût de la vie accru chez les Premières Nations en milieu éloigné.
  • Mettre au point une formule de financement du Fonds de soutien à la transition (FST) qui s’appuie sur les dépenses réelles.
  • Fournir un financement supplémentaire pour soutenir les frais d’administration, tout particulièrement chez les communautés où le nombre de clients est moindre.
  • Concevoir un outil et une technologie supplémentaires en lien avec le nombre de clients pour saisir avec exactitude les données sur le nombre réel de clients dont témoignent les frais d’administration et les prestations discrétionnaires.
  • Financer les solutions technologiques des Premières Nations.
Instaurer et mesurer le changement

18. La réforme en matière de sécurité du revenu doit aller de pair avec un plan rigoureux de gestion et de mise en œuvre du changement.

Faire Rapport Des Progrès

L’instauration de la présente feuille de route doit être suivie d’un rapport transparent sur les résultats et indicateurs connexes que le gouvernement provincial doit actualiser chaque année et rendre public.

  • Instaurer un rapport annuel public dans lequel seront décrits les progrès quant aux recommandations de la feuille de route, dont les progrès par rapport aux résultats.
  • Mettre en place un organisme tiers qui examinera le rapport annuel sur les progrès puis formulera à ce sujet des commentaires qu’il présentera au Conseil des ministres.
  • Exiger que le rapport annuel et les commentaires de l’organisme tiers soient déposés à l’Assemblée législative.

Mise en séquence des réformes

La feuille de route recommande un ensemble de changements et d’améliorations tangibles au système de sécurité du revenu de l’Ontario afin qu’il soutienne bien les diverses personnes qui s’en servent, et elle décrit une mise en séquence des réformes sur dix ans.

Les éléments sont mis en séquence au fil du temps pour permettre la tenue de processus cruciaux de conception en collaboration, de façon à ce que les leçons tirées au début de la mise en œuvre puissent éclairer les mesures à prendre aux stades avancés de même que les réalités fiscales. De plus, les efforts portent sur les mesures clés des trois premières années qui sont cruciales pour donner l’impulsion voulue, cibler ceux qui présentent les besoins les plus urgents, et jeter d’importantes bases propices aux changements. Il ne faut envisager les changements proposés ni isolément, ni comme un menu d’options.

Pour mettre en œuvre la feuille de route, il faudra amplifier le travail à la définition des détails et à la création des plans sur la façon d’instaurer les changements. Suivant ce qui est mentionné au préalable, il importe que le gouvernement provincial fasse appel à une vaste gamme de points de vue dans une démarche de conception en collaboration quant à certains éléments cruciaux, dont les personnes touchées par les changements, les travailleurs de première ligne, les gestionnaires de services et partenaires de prestation, les porte-parole, les peuples et organisations autochtones, et de nombreux autres experts. Il importe également de donner l’occasion de mettre à l’essai ou de diriger le changement, de telle sorte que des leçons puissent être tirées et des rajustements, apportés, avant l’instauration généralisée. Il est crucial que les projets pilotes tiennent compte de la diversité des communautés afin que les répercussions différentielles sur l’adoption et les résultats puissent être évaluées et servir à éclairer la conception et le déploiement définitifs. Pour ce faire, il faut rechercher intentionnellement à diversifier les participants, y compris sans s’y limiter les particuliers racialisés, les personnes handicapées, les Autochtones, les femmes, les groupes victimes d’hétérosexisme, d’homophobie et de transphobie, et les nouveaux arrivants au Canada.

La pleine participation du gouvernement fédéral est requise si les particuliers et familles à faible revenu doivent réaliser leur potentiel et toucher un revenu suffisant. Le gouvernement fédéral est également appelé à travailler directement d’égal à égal avec les Premières Nations pour traiter les carences importantes dans l’infrastructure physique et sociale des communautés des Premières Nations.

Nos Points De Vue : Les Groupes De Travail S’expriment

Message du Groupe de travail sur la réforme en matière de sécurité du revenu

Nous provenons de différentes couches de la société, sur les plans personnel et professionnel, et nous partageons des valeurs et convictions quant à la nécessité d’apporter des changements et investissements fondamentaux au système de sécurité du revenu. Selon nous, il y a matière à amélioration dans la capacité du système à aider les gens à s’extirper de la pauvreté et les personnes à faible revenu à améliorer leur vie. C’est dans cet esprit que nous avons collaboré durant la dernière année, à l’invitation du gouvernement, à l’élaboration d’une feuille de route décennale pour la réforme de la sécurité du revenu en Ontario.

Nous n’avons pas tardé à nous rendre compte qu’il ne suffit pas d’apporter de simples retouches au système. La feuille de route décrite dans les pages suivantes se veut transformationnelle, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’aide sociale. Elle prend en considération la mutation du monde du travail ainsi que le nombre croissant de personnes qui peinent à joindre les deux bouts. Elle tient également compte du fait que les personnes appartenant à certains groupes risquent davantage de connaître la pauvreté que d’autres. Elle recommande des moyens par lesquels soutenir efficacement les personnes qui ont accès au système de sécurité du revenu, que ce soit pour une longue ou une courte durée, des stratégies pour parvenir à la suffisance du revenu à long terme, ainsi que des changements immédiats pour aider les personnes dans la pauvreté extrême.

La seule mise en œuvre de la feuille de route ne permettra pas d’éradiquer la pauvreté en Ontario. Toutefois, elle permettra d’améliorer la vie des personnes à faible revenu, dont un grand nombre se demandent chaque matin à quand ira leur prochain repas ou s’ils auront un toit au dessus de leur tête. La transformation que nous envisageons ne pourra réussir que si le gouvernement collabore activement avec les partenaires, dont ceux directement touchés par le système, à la conception et à l’instauration des éléments clés du changement.

Nous recommandons que le gouvernement provincial s’engage à concrétiser un niveau minimum de revenu et qu’il tende constamment vers cet objectif d’ici les dix prochaines années. Nous avons recommandé, entre autres, l’instauration précoce de changements pour traiter les niveaux insuffisants de soutien aux célibataires prestataires du programme Ontario au travail et du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées (POSPH) : ces derniers accusent un retard considérable depuis 20 ans. Nous avons été aux prises avec la cadence à laquelle le gouvernement doit extirper les personnes de la pauvreté extrême, car l’écart entre leur situation actuelle et celle dans laquelle ils doivent se trouver est considérable. Les réformes que nous avons recommandées au cours des quelques premières années constituent, à notre sens, les premières étapes minimales vers un système de soutiens suffisants aux adultes à faible revenu et en âge de travailler. Ces réformes permettent également d’instaurer de nouveaux éléments fondamentaux à l’ensemble du système de sécurité du revenu, comme une prestation de logement transférable.

À deux autres groupes de travail et à nous, le gouvernement a demandé de créer une feuille de route, avec le soutien du personnel du ministère des Services sociaux et communautaires. Nous avons rempli notre mandat. En retour, nous exhortons le gouvernement provincial à se rallier à la vision que nous avons proposée, à consacrer un financement approprié à l’instauration de la feuille de route, et à envisager sérieusement de accélérer l’atteinte de la suffisance du revenu. Nous lançons également un appel aux autres ordres de gouvernement afin qu’ils jouent un rôle actif.

Nous sommes fiers de la feuille de route que nous avons contribué à créer. Nous présentons celle-ci, convaincus que nous sommes que les gens, tout particulièrement ceux qui ont vécu la pauvreté et en ont souffert le plus, devraient avoir l’occasion de vivre sans pénurie ni peur, d’atteindre leur potentiel, et de contribuer à leur propre croissance de même qu’à la prospérité de toutes nos communautés.

Message du Groupe de travail sur la réforme en matière de sécurité du revenu pour les Premières Nations

Le Groupe de travail sur la réforme en matière de sécurité du revenu pour les Premières Nations a fait bon accueil à l’occasion de contribuer à la réflexion incarnée dans cette feuille de route en faveur du changement, une occasion que les Premières Nations attendent depuis longtemps. En 1991, peu après la publication de « Transitions », un examen du système d’aide sociale paru à la fin des années 1980, les Premières Nations de l’Ontario ont adopté la résolution 91/34 qui énonce des principes de développement de services sociaux déterminés et contrôlés par les Premières Nations et propres à ces dernières, suivant ce qui avait été recommandé au préalable dans le rapport « Transitions ». Cette recommandation a également été admise dans le rapport Améliorer les perspectives : Réforme de l’aide sociale en Ontario [Lankin et Sheikh (2012)] et s’harmonise avec le Rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones paru en 1996. La résolution 91/34 met en relief l’attente des Premières Nations de voir les gouvernements fédéral et provinciaux reconnaître ces principes et appuyer des démarches souples envers les services sociaux autodéterminés par les Premières Nations à l’aide d’exemptions législatives et d’ententes financières parallèles, entre autres options.

Dans le court délai de six mois qui était imparti, dix réunions ont eu lieu sur le territoire traditionnel des Mississaugas de New Credit.

Il y avait peu de plateformes concrètes en faveur d’un dialogue entre les Premières Nations et le gouvernement provincial à propos de la réforme sociale avant 2015, année où la première ministre et les Premières Nations de l’Ontario ont signé un accord politique qui engage le gouvernement provincial et les Premières Nations dans des liens gouvernementaux officiels d’égal à égal encadrés par la reconnaissance des traités des Premières Nations. C’est également en 2015 que le gouvernement fédéral s’est engagé à mettre en œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Celle-ci énonce les droits individuels et collectifs des Autochtones, comme le droit de prendre part activement à l’élaboration et à la détermination des programmes de soins de santé et sociaux et, le plus possible, de gérer ces programmes par le truchement d’institutions autochtones. La Déclaration admet que les Autochtones ont le droit de faire valoir leur consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause avant l’adoption et l’application de mesures législatives ou administratives susceptibles de les concerner. À la suite du rapport final de la Commission de vérité et réconciliation du Canada, le gouvernement de l’Ontario a annoncé en 2006 un engagement officiel de réconciliation avec les Autochtones, intitulé Cheminer ensemble.

Dans le contexte de ces droits et rapports exceptionnels, le Groupe de travail sur la réforme en matière de sécurité de revenu pour les Premières Nations a fait part de ses observations relativement aux répercussions des pensionnats indiens, à la portée du traumatisme intergénérationnel et de la pauvreté qui existe chez les communautés des Premières Nations, de même qu’à la nécessité de programmes d’aide sociale qui donnent aux Premières Nations la capacité de surmonter ces épreuves. Au sein de nos Premières Nations, nous sommes conscients de l’ampleur du désespoir, de la détresse et de l’isolement. Chaque jour, les effets de la pauvreté se font sentir chez nous, ou chez quelqu’un que nous connaissons et aimons. Ces effets englobent l’insécurité alimentaire, de piètres conditions de logement, de faibles niveaux d’alphabétisation, des taux élevés de décrochage en éducation, une surreprésentation dans le système de justice, ou une sous- représentation dans les programmes pour lesquels nous sommes qualifiés mais qui sont difficiles d’accès, comme le POSPH et le programme Aide à l’égard d’enfants qui ont un handicap grave (AEHG), le coût de la vie élevé dans les régions isolées et éloignées, les pertes de contrôle de nos territoires traditionnels et ressources naturelles et d’accès à ceux-ci, le manque de développement économique (lequel a été touché par la colonisation, y compris les politiques de la Loi sur les Indiens et les restrictions s’y trouvant quant à l’utilisation des terres dans les réserves), le manque d’infrastructure (notamment les services Internet), le surpeuplement, un taux de chômage élevé, le sous-financement, de faibles salaires et le manque de perspectives d’emploi appropriées.

La dépendance des communautés des Premières Nations envers le système d’aide sociale s’est enracinée depuis des générations. Les prestataires d’aide sociale chez les Premières Nations comptent parmi les personnes les plus vulnérables en Ontario. Ils nécessitent de solides soutiens pour faire renaître l’espoir et la confiance en leurs moyens et acquérir les aptitudes pour établir des objectifs et surmonter les obstacles en lien avec la santé mentale, la toxicomanie et les crises familiales, ce qui leur permettra de devenir résilients et autosuffisants. De plus, les Premières Nations nécessitent un soutien à l’échelle communautaire dans son ensemble pour en arriver à des perspectives de développement économique et d’éducation et promouvoir le ressourcement. À l’heure où l’Ontario songe à donner une nouvelle orientation à la sécurité du revenu, les Premières Nations ont souligné le concept clé d’inclusion sociale, étant donné les perspectives restreintes d’emploi, d’éducation et de ressourcement chez les communautés des Premières Nations. La réforme de la sécurité du revenu doit faire en sorte que les programmes d’aide sociale améliorent la vie des particuliers et des familles dans leur cheminement vers l’emploi, ou vers la mobilisation sociale dans les cas où l’obtention d’un emploi n’est pas réaliste.

Il faudra mettre au point une démarche appropriée de sécurité du revenu chez les communautés des Premières Nations, sans qu’il n’y ait de laissés pour compte. La hausse des niveaux de revenu des prestataires de l’aide sociale ne constitue qu’un aspect de l’éradication de la pauvreté. Les communautés des Premières Nations proposent une démarche humaniste et globale envers ceux qui cherchent à obtenir de l’aide face aux effets de la pauvreté; cette démarche peut-être considérée comme une valeur fondamentale des Autochtones et il faut la promouvoir afin que la réforme de la sécurité du revenu soit réussie

Bien que des progrès intéressants aient été réalisés au moyen des discussions dans la désignation d’une feuille de route réaliste en vue de la réforme, la priorité cruciale aux yeux des Premières Nations consiste à exercer leur compétence dans les services sociaux. À titre d’étape intérimaire, l’Ontario doit accorder une exemption législative qui procure aux Premières Nations une marge de manœuvre dans la conception et le contrôle de l’aide sociale. Il faut continuer le travail vers l’instauration de la pleine reconnaissance de l’autonomie gouvernementale des Premières Nations dans ce domaine.

En tant que membres du Groupe de travail sur la réforme en matière de sécurité du revenu pour les Premières Nations, nous reconnaissons les mérites de cette première étape vers de nouvelles stratégies de collaboration et de partenariat, suivant l’orientation de notre leadership. Le caucus des Premières Nations de ce groupe de travail continuera de prendre part aux réunions techniques comme moyen d’établir des partenariats qui seront bénéfiques à l’examen par les Premières Nations de leurs propres pratiques en matière de services sociaux et d’élaboration de modèles. Nous tenons à remercier les représentants du gouvernement provincial qui nous ont traités avec le plus grand respect, et à les saluer pour leur travail acharné et leur dévouement dans le cadre de ce processus.

Message de la Table de concertation sur la réforme en matière de sécurité du revenu pour les Autochtones en milieu urbain

La Table de concertation sur la réforme en matière de sécurité du revenu pour les Autochtones en milieu urbain a présenté ses commentaires au ministère des Services sociaux et communautaires pour tracer la voie vers la réforme du système de sécurité du revenu de l’Ontario, de façon à accroître la sécurité économique et le mieux-être global des communautés autochtones en milieu urbain et métisses à l’échelle de la province.

Il est essentiel d’admettre que 84,1 % des Autochtones en Ontario vivent à l’extérieur des réserves et obtiennent des services dans les villes et villages de la province, et que les communautés autochtones en milieu urbain comptent parmi les groupes les plus à risque de l’Ontario.

La Nation métisse de l’Ontario (NMO), la Fédération des centres d’amitié autochtones de l’Ontario (FCAAO) et l’Association des femmes autochtones de l’Ontario (AFAO) plaident depuis longtemps en faveur d’un système de sécurité du revenu qui donne accès à des perspectives économiques significatives et préserve la dignité des membres de la communauté qui accèdent aux services d’aide au revenu.

L’engagement de réconciliation du gouvernement envers les communautés autochtones, décrit dans le document Cheminer ensemble, est un principe directeur qui fait partie intégrante de la feuille de route. Si la réconciliation est prise en compte à chaque stade de l’initiative, notamment dans l’amélioration des normes de prestation de services chez les communautés autochtones en milieu urbain, nous estimons qu’un changement mesurable peut-être concrétisé.

À titre de partenaires, la NMO, la FCAAO et l’AFAO ont coordonné en 2014 des séances de discussion avec les Autochtones en milieu urbain afin de discerner les écarts et difficultés que les communautés autochtones en milieu urbain ont subis dans le système d’aide sociale actuel, et de proposer des moyens par lesquels le système pourrait être transformé pour en rehausser les résultats, dont des recommandations se situant au-delà de l’aide sociale.

Tout au long de la feuille de route, on fait référence aux « peuples et communautés autochtones en milieu urbain ». Ce concept englobe la diversité des personnes des Premières Nations (inscrites et non inscrites), métisses et inuites qui habitent des collectivités urbaines et rurales en Ontario à l’extérieur des réserves. Sur le plan géographique, le concept d’« Autochtone en milieu urbain » décrit non seulement les Autochtones qui habitent de grands centres de population urbains, mais les personnes et les communautés composées de, ou situées dans de, petits centres de population urbains et ruraux. Jusqu’à présent, les Autochtones ont coutume de migrer au sein de la province, ainsi qu’entre les provinces et territoires, dans une quête culturelle, de possibilités et de mieux-être. En Ontario, diverses organisations soutiennent les Autochtones en milieu urbain dans les villes et villages par la prestation de programmes et services culturels. Il importe de souligner que si les recommandations dans la section de la feuille de route portant sur les Premières Nations émanent de certaines analyses et délibérations du Groupe de travail sur la réforme en matière de sécurité du revenu pour les Premières Nations, une grande partie des difficultés discernées et du contexte historique touchent les communautés autochtones en milieu urbain, et de nombreuses recommandations auraient des répercussions favorables aux Autochtones, quel que soit l’endroit où ils vivent.

Les membres des communautés ont souligné l’importance d’écouter le point de vue des Autochtones en milieu urbain en ce qui touche les besoins et difficultés qui leur sont propres, ainsi que les carences dans les services, puis de progresser en fonction des conseils prodigués. Entre autres préoccupations, selon ce que nous avons appris, les communautés jugent que le niveau des prestations est insuffisant et qu’il est particulièrement difficile de cheminer dans l’administration des programmes. Nous avons également appris que les répercussions continues du colonialisme, notamment la discrimination systémique et le racisme, se sont traduites par un milieu inapproprié en ce qui touche l’accès aux services d’aide sociale.

Le colonialisme, y compris les répercussions des pensionnats indiens, du racisme systématique et du traumatisme intergénérationnel, a comporté de nombreuses répercussions importantes et destructrices chez les communautés autochtones en milieu urbain. De plus, il existe des obstacles à l’accès aux services qui sont propres à l’expérience vécue par les particuliers, parce que le système de sécurité du revenu actuel fait abstraction de l’importance de la santé mentale, de la culture et du mieux-être, et néglige souvent les besoins particuliers des femmes, des jeunes, des aînés et des membres de la communauté LGBTQ2S parmi les Autochtones. De tels facteurs ont donné forme à un milieu où les communautés autochtones continuent de vivre d’importantes disparités relatives à l’éducation, au revenu et à la santé. Les Autochtones en milieu urbain ont donc besoin de soutiens de sécurité du revenu qui ne sont pas tous coulés dans le même moule. Les diverses cultures autochtones façonnent les besoins, priorités et conceptions du mieux-être des communautés autochtones en milieu urbain partout en Ontario.

La culture est un élément crucial de la manière d’être des Autochtones, un élément que doivent fondamentalement comprendre la fonction publique de l’Ontario et quiconque donne des services aux communautés autochtones. Il importe que cette feuille de route s’adapte à l’histoire, à la diversité et à la culture exceptionnelles des communautés autochtones en milieu urbain partout dans la province, et qu’elle continue de s’appuyer sur les principes recensés dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA) ainsi que dans le rapport et les appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation (CVR) du Canada. À partir de l’engagement de réconciliation du gouvernement envers les Autochtones dans le document Cheminer ensemble, la feuille de route cherche à combler l’écart dans les résultats qu’obtiennent les communautés autochtones en milieu urbain et à créer un changement transformationnel, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’aide sociale.

À ce titre, la mise en œuvre d’un changement positif se produira seulement s’il y a des suites données aux points de vue des communautés autochtones en milieu urbain, lesquelles continuent de plaider en faveur d’un rehaussement de l’accès, de l’équité, de la transparence et de la responsabilisation dans le système de sécurité du revenu. Des avancées positives sont formulées dans la feuille de route, mais il faut continuer le travail transformationnel et les mesures en faveur du changement des systèmes durant de nombreuses années.

Dans le cadre de notre travail, la Table de concertation sur la réforme en matière de sécurité du revenu pour les Autochtones en milieu urbain a fait appel aux pratiques exemplaires, aux connaissances et à l’expérience de chaque organisme partenaire pour bien saisir les besoins exceptionnels des Métis et des Autochtones en milieu urbain partout en Ontario. Un grand nombre de nos recommandations en faveur de la réforme sont axées sur la nécessité de délaisser les démarches reposant sur des règles où dominent la surveillance et l’application de règlements, au profit de celles fondées sur les rapports positifs, l’inclusion sociale, et l’aide donnée aux personnes afin qu’elles parviennent à des résultats améliorés. Nous avons pris fait et cause pour les communautés autochtones en milieu urbain et souligné en quoi les répercussions du système actuel et des réformes potentielles doivent être soigneusement prises en considération. Nous avons hâte de poursuivre notre travail afin de mettre en œuvre le changement transformationnel demandé dans la présente feuille de route.

Introduction

Objet

Le Groupe de travail sur la réforme en matière de sécurité du revenu, le Groupe de travail sur la réforme en matière de sécurité du revenu pour les Premières Nations et la Table de concertation sur la réforme en matière de sécurité du revenu pour les Autochtones en milieu urbain comprenaient un groupe diversifié de personnes dont les points de vue, le savoir-faire et l’expérience variaient, et qui ont travaillé à l’atteinte d’un but commun : recommander des changements et améliorations tangibles au système de sécurité du revenu de l’Ontario afin d’en améliorer le soutien aux diverses personnes qui s’en servent, et décrire la mise en séquence des réformes sur dix ansfootnote 4. Les recommandations et la mise en séquence constituent une feuille de route servant à orienter le gouvernement dans les décisions prises et les investissements consentis qui nécessitent une collaboration continue avec autrui, ainsi que la reconnaissance des droits constitutionnels des Premières Nations dans la conception et l’instauration des réformes recommandées.

Bien que les trois groupes se soient rencontrés séparément, ils ont présenté des points de vue communs quant à la nécessité de changement. Les recommandations qui figurent dans la présente feuille de route ne sont pas incompatibles : par exemple, de nombreuses recommandations à la section portant sur les Premières Nations peuvent également s’appliquer au reste de la province.

Pourquoi est-ce important?

Nous sommes tous touchés par le système de sécurité du revenu de l’Ontario. Quels que soient nos antécédents, nos réussites ou nos difficultés, il est dans notre intérêt collectif d’appuyer la capacité des gens à prospérer de même qu’à contribuer au tissu social de nos collectivités et au mieux-être économique de notre province. Presque tout le monde connaît au moins un membre de la famille, un ami ou un voisin qui est aux prises avec la pauvreté. Pendant que vous lisez la feuille de route et que vous y réfléchissez, nous vous invitons à garder à l’esprit que la démarcation entre être pauvre et joindre les deux bouts est mince, et que de nombreuses personnes auraient besoin d’aide si elles en venaient à manquer un chèque de paye ou à vivre une urgence familiale.

Voici six raisons pour lesquelles la réforme de la sécurité du revenu concerne tout le monde :

1. Les personnes font face de plus en plus à un marché du travail instable, à une diminution de la sécurité d’emploi, et à un travail atypique ou précaire, ce qui complique l’atteinte d’un niveau de vie suffisant.

Tenez compte de ce qui suit :

  • Le nombre et les types d’emplois offerts changent en raison de facteurs comme la croissance économique, la technologie, les données démographiques et le comportement des consommateurs. Les emplois du secteur des services sont davantage répandus, tandis que les emplois à rémunération élevée dans le secteur manufacturier sont moins fréquentsfootnote 5. Les changements qui interviennent dans le marché du travail comportent des répercussions considérables sur la capacité des gens à gagner un revenu suffisant et viable afin d’améliorer leur situation.
  • De 1997 à 2015, l’emploi atypique a augmenté à un taux annuel moyen de 2,3 %, presque deux fois plus vite que l’emploi type (1,2 %)footnote 6 .
  • Le rapport des conseillers spéciaux chargés de l’Examen portant sur l’évolution des milieux de travail permet de recenser une vaste gamme de personnes qui occupent des emplois précaires, allant des nouveaux diplômés qui travaillent à temps partiel contre leur gré aux particuliers qui occupent plusieurs emplois pour joindre les deux boutsfootnote 7 .
  • L’emploi précaire risque de nuire à la qualité de vie d’une famille et d’accentuer le stress entourant les décisions financièresfootnote 8 .
  • Les taux de pauvreté des travailleurs occupant un emploi atypique sont de deux à trois fois plus élevés que ceux des travailleurs qui ont un emploi typefootnote 9 .
  • La prévalence de l’emploi atypique érode l’accès aux avantages fournis par les employeurs. En 2011, moins d’un quart des travailleurs qui occupaient un emploi atypique bénéficiaient d’avantages d’emploi tels que l’assurance médicale (23,0 %) ou de soins dentaires (22,8 %). Un pourcentage encore moindre de ces travailleurs avaient une assurance-vie ou invalidité (17,5 %) ou un régime de retraite d’employeur (16,6 %)footnote 10.

La réforme de la sécurité du revenu dans le contexte du Projet pilote portant sur le revenu de base

Les groupes de travail conviennent du fait que le Projet pilote portant sur le revenu de base, d’une durée de trois ans et actuellement en cours dans la province, constitue une expérience importante dans laquelle une nouvelle façon de fournir un soutien au revenu sera mise à l’essai. Un grand nombre des recommandations contenues dans la présente feuille de route sont complémentaires au Projet pilote portant sur le revenu de base; une fois combinées, les leçons tirées du Projet pilote portant sur le revenu de base et des trois premières années d’instauration de la feuille de route seront instructives et donneront l’occasion de peaufiner, voire de rajuster, la feuille de route à l’avenir.

  • En 2014 2015, 21,9 % de toutes les personnes sans emploi en Ontario ont connu une période de chômage de longue durée; cette situation était plus répandue chez les travailleurs âgés, ayant touché environ le tiers (32 %) des personnes de 45 ans et plus sans emploifootnote 11.
  • En 2016, le taux de chômage des Autochtones en Ontario vivant à l’extérieur des communautés des Premières Nations surpassait de 48 % celui des Ontariens non autochtones (8 % contre 5,4 %).
  • Chez les communautés des Premières Nations en Ontario, plus du tiers des adultes (38,2 %) étaient à la recherche d’un emploi entre 2013 et 2015. Moins de la moitié (44,7 %) occupaient un emploi, ce qui constitue un recul marqué par rapport au pourcentage de ces adultes (55,6 %) qui occupaient un emploi
  • de 2008 à 2010. La plupart des emplois déclarés de 2013 à 2015 (79,7 %) se trouvaient au sein d’une communauté des Premières Nationsfootnote 12.
  • Dans la recension des clients à qui est destinée la Stratégie de formation pour les compétences et l’emploi destinée aux Autochtones, le gouvernement fédéral précise que les jeunes Autochtones (c.-à-d. les 15-30 ans) forment le segment de la population qui affiche la croissance la plus rapide au Canada. Il s’agit d’une population importante qui sera prise en compte pour remplacer les travailleurs âgés qui prennent leur retraitefootnote 13.

2. Les besoins essentiels sont de plus en plus difficiles à combler pour de nombreuses personnes.

Tenez compte de ce qui suit :

  • D’après l’Indice du logement locatif canadien, 42 % des ménages locataires en Ontario ont consacré plus de 30 % de leur revenu avant impôt au loyer en 2011footnote 14. Ce pourcentage englobait les 20 % de ménages qui consacraient plus de 50 % de leur revenu avant impôt au loyer.
  • Selon des estimations, il y a en Ontario plus de 595 000 ménages souffrant d’insécurité alimentairefootnote 15. Une récente étude a permis de constater que le coût des soins de santé en Ontario pour les ménages ayant une insécurité alimentaire modérée était de 32 % supérieur à celui des ménages en sécurité alimentairefootnote 16.
  • Parmi les adultes des Premières Nations qui vivent dans les communautés des Premières Nations en Ontario, 84 % ont déclaré réduire leur portion alimentaire ou sauter des repas, faute de pouvoir s’offrir assez d’aliments au cours de la dernière annéefootnote 17.
  • Chez les communautés des Premières Nations de l’Ontario, le pourcentage d’adultes qui, parfois ou à l’occasion, ont manqué de nourriture sans pouvoir s’en acheter davantage a augmenté pour passer de 41,3 % entre 2008 et 2010 à 52,9 % entre 2013 et 15footnote 18.
  • Plus de la moitié des adultes des communautés des Premières Nations de l’Ontario (55,4 %) ont affirmé avoir eu peine à satisfaire à leurs besoins essentiels au cours de la dernière année. Plus du quart des adultes (27,8 %) n’avaient pas les moyens de payer les services publics (chauffage, électricité et eau courante)footnote 19. Le transport posait également problème, étant donné l’augmentation du coût de l’essence et la nécessité de se déplacer vers les épiceries et les autres commerces pour combler leurs besoins essentielsfootnote 20.
  • Les Autochtones risquent huit fois plus d’être itinérants dans les grands centres urbains que la population généralefootnote 21.
  • En 2014, les ménages à faible revenu ont consacré en moyenne 5,9 % de leur revenu avant impôt à l’énergie d’usage domestique; cette proportion s’est élevée à seulement 1,7 % chez les ménages à revenu élevéfootnote 22.

3. Il est de plus en plus difficile pour les gens de s’extirper de la pauvreté.

Tenez compte de ce qui suit :

  • Selon une définition fédérale du faible revenu (la mesure de faible revenu), il y avait 1,94 million de personnes à faible revenu en Ontario en 2015 (les données les plus récentes disponibles)footnote 23. La même année, 943 368 enfants et adultes en Ontario étaient prestataires de l’aide sociale : soit par le programme Ontario au travail, soit par le POSPHfootnote 24 . Autrement dit, plus de la moitié des personnes vivant dans la pauvreté n’étaient ni prestataires de l’aide sociale, ni ne pouvaient accéder aux indemnités et aux prestations offertes seulement par le truchement du programme Ontario au travail et du POSPHfootnote 25.
  • D’après une recherche du SPRC (conseil de recherche et de planification sociale) de Hamilton, parmi les adultes de cette ville qui vivent dans la pauvreté, les probabilités d’échapper à la pauvreté l’année suivante avaient reculé pour passer de 44 % en 1993 à 26 % en 2013footnote 26.
  • Une analyse faite en 2011 dans le cadre de l’initiative Renforcer les communautés rurales du Canada a révélé que les taux d’activité dans les régions éloignées sont inférieurs de 14 points de pourcentage à ceux des régions urbainesfootnote 27.
  • De plus en plus de gens estiment que le travail acharné et la motivation ne suffisent pas pour progresser. En 2015, 72 % des répondants à un sondage souscrivaient à l’idée qu’à Toronto, le travail acharné et la détermination ne garantissent pas la réussite d’une personne. De plus, 52 % des répondants étaient d’avis que dans 25 ans, les membres de la génération suivante seront dans une situation pire que celle de leurs homologues à l’heure actuellefootnote 28.
  • La prévalence du faible revenu chez les Autochtones qui vivent à l’extérieur des communautés des Premières Nations en Ontario est supérieure de 71 % à celle chez la population non autochtone (24 % contre 14 %)footnote 29.

Qu’est ce que la mesure de faible revenu (MFR)?

Fondée sur les niveaux de revenu après impôt des familles, après rajustement en fonction de la taille et de la composition du ménage, la mesure de faible revenu permet de discerner le nombre de familles ou de ménages dont les niveaux de revenu après impôt se situent en deçà de la moitié (50 %) du revenu médian rajusté des ménages.

Pour déterminer la MFR, le revenu familial est « rajusté » en ce sens que les besoins familiaux sont pris en compte. Les besoins sont déterminés en fonction du nombre de personnes dans le ménage; comme on peut s’y attendre, les besoins augmentent habituellement au fur et à mesure que le nombre de membres dans le ménage augmente, compte tenu de certaines économies d’échelle.

  • Les adultes célibataires de moins de 65 ans ont accès à des soutiens du revenu limités, de sorte qu’il leur est difficile de parvenir à la stabilité et à la sécurité puis de prêter attention au rehaussement de leurs résultats. Une fois combinées l’aide sociale et les prestations fiscales (ces dernières ne sont accessibles que si le particulier produit une déclaration de revenus) :
  • Les célibataires sans adresse fixe peuvent accéder à un montant maximal de 4 677 $ (81 % en deçà de la mesure de faible revenu [MFR] de la Stratégie ontarienne de réduction de la pauvreté [SORP]) s’ils n’ont pas d’invalidité, et à un montant de 8 577 $ (73 % en deçà de la MFR de la SORP, bonifié de 30 % étant donné l’augmentation du coût de la vie qu’occasionne une invalidité) s’ils ont une invalidité.
  • Les célibataires qui louent un logement peuvent accéder à un montant maximal de 9 604 $ (60 % en deçà de la MFR de la SORP) s’ils n’ont pas d’invalidité, et un montant de 14 884 $ (53 % en deçà de la MFR de la SORP, bonifié de 30 %) s’ils ont une invalidité.
  • Dans les communautés des Premières Nations de l’Ontario, 28 % des adultes ont déclaré un revenu du ménage annuel total inférieur à 20 000 $ de 2008 à 2010. Ce pourcentage s’est accru pour s’établir à 35,2 % de 2013 à 2015footnote 30.
  • Les administrateurs des Premières Nations ont remarqué que les Premières Nations dépendent de l’aide sociale depuis trois générations.

Les coûts supplémentaires de l’invalidité

Si la MFR est utile pour mesurer la prévalence du faible revenu, elle ne tient cependant pas compte du coût supérieur de la vie des personnes ayant une invalidité. Ces coûts supplémentaires varieront d’une personne à l’autre et en fonction des répercussions de l’invalidité sur leur vie. Il n’existe pas de méthodologie simple et convenue servant à évaluer les répercussions de l’invalidité, étant donné la forte variabilité entre le vécu des personnes. D’après un examen de la documentation, les coûts supplémentaires vont de moins de 10 % à plus de 100 %footnote 31. Pour cette raison, on a adopté aux fins de la feuille de route, à titre d’approximation générale, une augmentation du coût de la vie qu’occasionne une invalidité qui se situe à 30 % au-delà de la MFR de la SORP.

Il y a d’importantes considérations à ne pas oublier dans l’examen des données accessibles à propos de la pauvreté. L’Enquête canadienne sur le revenu (laquelle sert à déterminer le pourcentage de la population en deçà de la mesure de faible revenu) n’est pas menée dans les communautés des Premières Nations. De plus, en raison de facteurs historiques, les particuliers autochtones qui vivent à l’extérieur des communautés des Premières Nations ne peuvent pas indiquer leur appartenance aux Autochtones dans les formulaires de recensement et d’enquête du gouvernement fédéral. Selon toute vraisemblance, le taux réel de pauvreté que connaissent les Autochtones qui vivent à l’extérieur des communautés des Premières Nations est supérieur à celui qui est déclaré.

4. Un nombre accru de personnes ont une invalidité et font face à des obstacles à l’emploi et à l’inclusion sociale de même qu’à une hausse du coût de la vie.

Tenez compte de ce qui suit :

  • Actuellement, près d’un Ontarien sur sept a une invalidité. Au fur et à mesure que le pourcentage d’Ontariens de 65 ans et plus augmente au cours des
    20 prochaines années, ce ratio devrait s’établir à un Ontarien sur cinqfootnote 32.
  • Une hausse des coûts est liée au fait d’avoir une invalidité, quelle que soit la situation de l’emploi d’un particulierfootnote 33.
  • D’après les estimations de l’organisme Autism Ontario, un enfant sur 94 au Canada présente un trouble du spectre de l’autisme, et ce ratio devrait augmenter au fil du temps. Il ne s’agit que d’un exemple de la hausse de la prévalence et du diagnostic des invalidités permanentes.
  • Près d’un Ontarien sur deux ayant un trouble du développement a également une maladie mentalefootnote 34.
  • Chaque semaine, au moins 500 000 Canadiens ayant un emploi sont incapables de travailler à cause d’un problème de santé mentale. Ce nombre englobe environ 355 000 cas d’invalidité attribuables à un trouble mental ou comportemental ainsi que 175 000 travailleurs à temps plein absents du travail pour cause de maladie mentalefootnote 35.
  • Environ 30 % des Ontariens feront face à un problème de santé mentale ou de toxicomanie à un moment ou l’autre de leur viefootnote 36.
  • De 2011 à 2014, la fréquence des problèmes de santé chronique des personnes des Premières Nations vivant à l’extérieur des communautés des Premières Nations en Ontario a augmenté considérablement : le taux de diabète s’est accru de 11,2 %, le taux d’arthrite, de 15,2 % et le taux d’hypertension, de 15,9 %Source : Statistique Canada, Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes, 2007-2010, 2011-2014, profils d’indicateur de la santé, tableaux CANSIM 105 0512 http://www5.statcan.gc.ca/cansim/a05?lang=fra&id=1050512.
  • Le taux de chômage des personnes handicapées se fixe à environ 16 % ce qui  et nettement supérieur à celui des personnes non handicapées. Ce taux ne  tient cependant pas compte des personnes ayant cessé de chercher du travail. Autre point pertinent, le taux d’activité des adultes ontariens en âge de travailler (16 à 24 ans) et ayant une invalidité ne s’élève qu’à environ 52,7 %, comparativement au taux d’activité de 79 % des personnes sans invaliditéfootnote 38.
    Cet état de choses limite considérablement leur apport à la société et à l’économiefootnote 39.
  • Le nombre de clients du POSPH en 2016-2017 s’est accru de 3 % comparativement à l’exercice précédent, ce qui constitue une hausse supérieure à la croissance de 0,6 % du nombre de clients du programme Ontario au travail au cours de la même périodefootnote 40. En juin 2017, 58 % de tous les clients de l’aide sociale étaient prestataires du POSPH.
  • Une récente étude a révélé que l’arthrite ou les rhumatismes étaient presque 80 % plus fréquents chez les particuliers à faible revenu que chez ceux à revenu élevéfootnote 41 .
  • L’accès au dépistage du trouble du spectre de l’alcoolisation fœtale (TSAF) dans les municipalités, les centres urbains et les communautés des Premières Nations, ainsi que le financement des coûts élevés s’y rapportant font défaut.

La pauvreté et le faible revenu nuisent à la santé et au mieux-être des personnes.

Tenez compte de ce qui suit :

  • D’après une analyse de Statistique Canada, l’inégalité des revenus est la cause du décès prématuré de 40 000 Canadiens par année. Les hommes et les femmesfootnote 42 à faible revenu présentent 67 % et 52 % plus de risques, respectivement, de décéder chaque année que leurs homologues à revenu élevéfootnote 43.
  • Les maladies mentales et la toxicomanie grèvent l’économie canadienne d’au moins 50 G$/annéefootnote 44. D’après une récente étude, le fardeau des problèmes de santé mentale et de toxicomanie sur les Ontariens est supérieur de 1,5 fois à celui de toutes les formes de cancer combinées et supérieur de plus de sept fois à celui de toutes les maladies infectieusesfootnote 45. Le plus fort pourcentage de ces coûts se rapporte :
    • aux soins de santé;
    • aux coûts des services sociaux et du soutien du revenu;
    • à la productivité perdue (en raison de l’absentéisme et du roulement du personnel).
  • Le taux de suicide observé dans les quartiers où le niveau de revenu est le plus faible est presque deux fois plus élevé que celui constaté dans les quartiers les plus richesfootnote 46.
  • Des études révèlent également que les crises cardiaques et le diabète de type 2 sont beaucoup plus fréquents chez les Canadiens à faible revenufootnote 47. Le quintile le plus pauvre de la population canadienne présentait un taux de diabète et de crise cardiaque deux fois plus élevé que celui du quintile le plus riche, ainsi qu’un taux de 60 % supérieur relativement à deux problèmes de santé chroniques ou plusfootnote 48.
  • Le pourcentage des gens déclarant que leur état de santé est passable ou mauvais recule substantiellement lorsque le revenu du ménage passe de faible à élevé. Chez les Autochtones en Ontario, 34 % des personnes à faible revenu déclarent que leur état de santé est passable ou mauvais comparativement à 14 % des personnes à revenu élevéfootnote 49 . La situation sociale et économique intervient pour 50 % de l’état de santé global d’une personne, les groupes à faible revenu montrant des résultats inférieurs dans 20 des 34 indicateurs de l’état de santéfootnote 50.
  • Les emplois actuels exigent des travailleurs qui peuvent lire et écrire en fonction d’un niveau élevé d’alphabétisation et qui possèdent également des aptitudes en résolution de problèmes, en prise de décisions, en pensée critique et en matière d’organisation. Les niveaux d’alphabétisation sont liés à des problèmes sociaux et économiques urgents, dont le chômage, la pauvreté, l’itinérance, une mauvaise santé, l’emprisonnement, la dépendance à l’aide sociale, et les piètres résultats chez les enfantsfootnote 51.
  • Des données révèlent que les enfants des familles à faible revenu ont 50 % moins tendance à prendre part aux activités sportives, artistiques et culturelles organisées que ceux des familles à revenu élevé. Les frais d’usager, le coût de l’équipement, le manque de transport, le soutien familial, la connaissance des possibilités, l’isolement, le mauvais état ou l’absence d’installations dans leur milieu et le manque d’endroits sécuritaires où jouerfootnote 52 comptent parmi les obstacles à la participation.
  • De nombreuses femmes victimes de violence conjugale subissent également un niveau de stress quotidien élevé et des répercussions connexes. Au total, 53 % des femmes victimes de violence aux mains d’un conjoint au cours des
    12 mois précédents ont affirmé que la plupart de leurs journées étaient
    « très stressantes ou extrêmement stressantes », une proportion de beaucoup supérieure à celle des femmes victimes de violence aux mains d’une autre personne (41 %) et à celle des femmes non victimes de violence (23 %)footnote 53.
  • L’abandon des études secondaires comporte d’énormes implications, aux répercussions directes et indirectes sur les coûts de la santé, des services sociaux, de l’éducation, de l’emploi, de la criminalité et de la productivité économiquefootnote 54 .
  • Les enfants autochtones hors-réserve de moins de six ans vivent à 36 % dans la pauvreté, comparativement à 19 % des enfants non autochtonesfootnote 55.

Le racisme et la discrimination systémiques interviennent dans l’enracinement de l’inégalité.

Tenez compte de ce qui suit :

  • Les jeunes Autochtones des communautés éloignées du Nord n’ont d’autre choix que de déménager dans une municipalité ou un centre urbain pour mener à bien leurs études. Cette situation s’apparente à l’époque des pensionnats indiens, où les jeunes Autochtones étaient contraints de quitter leur famille afin d’assimiler un autre mode de vie. L’une des préoccupations liées au déménagement des enfants autochtones à l’extérieur de leur communauté, c’est qu’ils feront alors face à davantage de racisme et de discrimination dans une situation où ils sont isolés et ne disposent pas de soutiens suffisants.
  • Des écarts importants sont constatés sur les plans de l’éducation, du revenu et de la santé entre les Autochtones et les autres groupesfootnote 56. En 2016, le Tribunal canadien des droits de la personne a conclu que les Premières Nations ont subi une discrimination exercée par Affaires autochtones et Développement du Nord Canada dans la prestation des services à l’enfance et à la famille, après quoi il a ordonné la fin des pratiques discriminatoiresfootnote 57 .
  • Le Recensement de 2006 révélait que le taux global de pauvreté au Canada était de 11 %. Mais chez les personnes ethnicisées, il était de 22 % contre 9 % chez les personnes non ethniciséesfootnote 58 .

Les nouveaux arrivants en Ontario sont moins susceptibles d’accéder aux programmes d’aide sociale ou autres en raison de la stigmatisation perçue. Celle-ci réduit leur représentation dans ces programmes.

  • Les personnes racialisées comptent pour une part démesurée dans les statistiques sur la pauvreté, et elles se heurtent à des obstacles en matière d’emploifootnote 59 . Par exemple, plus de 60 % des personnes vivant dans la pauvreté à Toronto sont ethnicisées, et les femmes ethnicisées sont plus nombreuses à vivre dans la pauvreté que les hommes ethnicisésfootnote 60.
  • Les victimes du profilage racial, tout particulièrement les hommes de race noire, vivent des troubles de stress post-traumatique et d’autres pathologies liées au stress, ce qui restreint leur utilisation des ressources communautairesfootnote 61 .
  • Un groupe de travail des Nations Unies sur les problèmes qui touchent les personnes de race noire a tiré la sonnette d’alarme à propos de la pauvreté des Afro-Canadiens, de leur mauvaise santé, de leur faible niveau de scolarité et de leur surreprésentation dans le système judiciaire et les organismes de protection de la jeunessefootnote 62 .

L’inclusion sociale et économique ne peut-être pleinement concrétisée avant que les causes fondamentales du racisme systémique soient traitées.

Qu’est-ce que tous ces faits nous révèlent?

Ceux qui vivent dans la pauvreté ne forment pas un groupe homogène, et certaines populations présentent un risque accru de vivre dans la pauvreté et peuvent éprouver des vulnérabilités qui résultent de la pauvreté et du faible revenu. La démarche des soutiens « coulés dans le même moule » ne se traduira pas par des résultats optimaux. Le système doit être souple et capable de s’adapter aux besoins diversifiés et changeants des personnes. Nous devons tout particulièrement prêter attention à la cause et à l’ampleur de la pauvreté chez les Autochtones, les Noirs et les autres populations marginalisées afin que les interventions soient structurées pour cibler les obstacles auxquels ces populations font face et faire le suivi des résultats pour savoir si les interventions sont fructueuses.

Remarque sur les rapports précédents

Au cours des 30 dernières années, il y a eu de nombreux rapports au sujet de la pauvreté en Ontario et au Canada, rédigés à tous les niveaux de gouvernement ainsi que par des groupes de réflexion, des universitaires, des porte-parole et des militants. Dans l’ensemble, des recommandations en faveur d’une réforme du système de sécurité du revenu au sens large, y compris le système fiscal et les services sociaux, ont été formulées par milliers.

De nombreuses recommandations ont été mises en œuvre et des améliorations ont été apportées au fil des ans, ce qui s’est traduit par la diminution de la pauvreté, tout particulièrement chez les aînés et les enfants. Toutefois, un écart considérable demeure chez les adultes en âge de travailler qui continuent de vivre dans la pauvreté extrême, et ce, parce que de nombreux programmes conçus pour aider les adultes en âge de travailler (p. ex., l’assurance-emploi, la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail) dépendent du taux d’activité de ces derniers. Dans certains cas, les personnes cotisent aux programmes mais elles n’y ont pas droit lorsqu’elles nécessitent un soutien. Des problèmes d’accès demeurent même dans les cas où les personnes affichent une forte activité sur le marché du travail. Ces programmes sont habituellement d’une durée limitée et, dans tous les cas, ne permettent pas de répondre adéquatement aux besoins de sécurité du revenu des adultes à faible revenu. Il incombe donc à l’aide sociale de faire le « gros du travail », lequel se rapporte aux adultes à faible revenu, en âge de travailler et qui vivent dans la pauvreté.

C’est dans ce contexte global de rapports préalables que la présente feuille de route a été produite. Elle ne cherche pas à démontrer que le système de sécurité du revenu, dont l’aide sociale, pose problème ou se révèle inadéquat; elle prend plutôt comme point de départ l’affirmation bien documentée qui suit :

Le système actuel a échoué beaucoup plus manifestement en lien avec certaines personnes que d’autres : par exemple, les célibataires qui doivent s’en tirer avec un montant légèrement supérieur à celui d’un chèque d’aide sociale; les sans-abri qui, souvent, s’évertuent à trouver un refuge sécuritaire chaque soir; les nouveaux arrivants au Canada qui combattent les préjugés et un système qui semble conçu contre eux à bien des égards; les Afro-Canadiens qui continuent de faire face à du racisme anti-Noir enraciné; et les Autochtones qui font face au racisme, à l’inégalité et à la discrimination culturelle depuis longtemps.

La présente feuille de route témoigne d’un plan d’action global afin d’amener au cours des dix prochaines années, un changement fondamental, axé sur le besoin urgent de mesures immédiates de même que la synchronisation et l’ordre subséquents des réformes nécessaires pour parvenir à la suffisance du revenu.

Le Système De Sécurité Du Revenu De L’ontario

Aperçu

Le système de sécurité du revenu de l’Ontario procure une gamme de prestations aux particuliers et aux familles à faible revenu ou sans revenu, ou qui ont fait face à des obstacles à long terme au plein emploi. Il s’agit d’un système complexe comportant de nombreux programmes dont le financement, la supervision et la prestation relèvent des administrations municipales, des gouvernements provinciaux, fédéral et des Premières Nations, ainsi que du secteur non gouvernemental. Les programmes varient considérablement en ce qui touche l’objet, les groupes cibles, les règles d’admissibilité, les modes de prestation et les montants du soutien.

En règle générale, ces programmes peuvent être répartis entre les prestations monétaires et en nature ayant pour objet de contribuer à un ensemble d’objectifs principaux :

  • Faire en sorte que les gens ne régressent pas en deçà d’un certain niveau de revenu.
  • Appuyer la santé, le mieux-être et l’inclusion communautaire.
  • Mettre ou remettre les gens en lien avec les emplois.

Les prestations du revenu sont des sommes monétaires transférées directement aux gens et qui englobent habituellement :

  • Les montants fondés sur les cotisations versées afin de remplacer les gains. Par exemple, l’assurance-emploi, le Programme de prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada ou les prestations de retraite du Régime de pensions du Canada.
  • Les montants fournis durant les périodes de très faible revenu ou sans revenu pour aider à composer avec les coûts de la vie. Par exemple, les programmes d’aide sociale (Ontario au travail et le POSPH) et ceux destinés aux aînés (la Sécurité de la vieillesse, le Supplément de revenu garanti et le Régime de revenu annuel garanti).
  • Les montants qui bonifient d’autres revenus, parfois à une fin particulière. Par exemple, l’Allocation canadienne pour enfants, la Prestation ontarienne pour enfants, le programme Aide à l’égard d’enfants qui ont un handicap grave, le Programme de subventions accordées aux résidents du Nord de l’Ontario pour frais de transport à des fins médicales – Assurance-santé de l’Ontario, et la Prestation fiscale pour le revenu de travail.

Les prestations en nature fournissent aux gens un article ou un service qui est payé, en partie ou en tout, dans l’optique de rehausser leur niveau de vie en leur offrant cet article ou ce service à prix réduit ou gratuitement. Par exemple, les subventions des places en garderie, le logement dont le loyer est indexé sur le revenu, le Programme de médicaments de l’Ontario et le programme Beaux sourires Ontario.

Il y a également en Ontario une série de services d’emploi et de formation et de soutiens du revenu afin d’aider les gens à atteindre leurs objectifs en matière d’emploi et à réussir sur le marché du travail. Ces services et soutiens sont essentiellement fournis par le truchement d’Emploi Ontario, pendant que quelques-uns sont fournis au moyen de l’aide sociale et de programmes fédéraux.

Entre le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral (ainsi que les programmes à cotisation comme le RPC), des prestations de sécurité du revenu d’une valeur d’environ 65,7 G$ sont versées aux Ontariens.

Prestations fédérales et provinciales de sécurité du revenu versées aux Ontariens (en M$)

Prestations fédérales et provinciales de sécurité du revenu versées aux Ontariens (en M$)

Remarques :

  1. Estimations fondées sur les Comptes publics de l’Ontario 2015-2016, États des ministères et annexes, vol. 1, ministère des Finances de l’Ontario, Transparence fiscale – 2016.
  2. Versements de prestations réels en 2016, selon ce qui est relaté dans le Rapport statistique 2016 de la CSPAA.
  3. Estimations fondées sur les Comptes publics du Canada, vol. 1, section 3 - Revenus, charges et déficit accumulé, et sur le Rapport sur les dépenses fiscales fédérales : Concepts, estimations et évaluations 2016. Il est difficile d’accéder aux parts provinciales de certaines des dépenses fédérales. En de tels cas, la portion versée aux prestataires de l’Ontario a été évaluée à 40 % des dépenses fédérales totales.
  4. Les prestations du RPC imposables qui sont déclarées dans le feuillet de renseignements T4A(P), État des prestations du Régime de pensions du Canada pour 2014. Comprend les prestations de retraite, les prestations de survivant, les prestations d’invalidité, les prestations pour enfants, les prestations de décès et les prestations après-retraite.
  5. Montant réel de l’AE versé en 2015-2016, selon ce qui est déclaré dans le Rapport de contrôle et d’évaluation de l’assurance-emploi pour l’exercice financier 2015-2016.
  6. Les prestations destinées aux enfants de l’Ontario sont la Prestation ontarienne pour enfants, le programme Beaux sourires Ontario et les subventions des places en garderies.
  7. Le graphique n'englobe ni les dépenses municipales, ni les dépenses provinciales consacrées aux autres programmes qui influent sur la sécurité du revenu, dont les programmes de logement, le PMO pour aînés, les prestations du Programme de médicaments Trillium et le Programme d’appareils et accessoires fonctionnels. Le graphique n'englobe pas non plus les prestations pour anciens combattants.
  8. Les dépenses fédérales consacrées aux aînés englobent les versements de la Sécurité de la vieillisse à tous les prestataires.

De plus, les municipalités, les Premières Nations et les organismes sans but lucratif investissent dans des programmes communautaires de sécurité du revenu. L’investissement global des municipalités et des organismes sans but lucratif consacré aux programmes de sécurité du revenu n’est pas accessible, mais les municipalités de l’Ontario comptaient à elles seules des dépenses totales de plus de 7 G$ après rajustements aux services sociaux et à la famille en 2015footnote 63 . Une enquête menée en 2013 auprès du secteur sans but lucratif de base (à l’exclusion des universités et collèges, des écoles publiques et catholiques et leurs conseils, des bibliothèques publiques et des hôpitaux) a révélé que 18 % de ce secteur était axé sur les services sociauxfootnote 64 . Plus de 68 % des entreprises sociales sondées en Ontario ont affirmé qu’elles se penchent sur la réduction de la pauvretéfootnote 65. À titre d’exemple parmi d’autres, l’organisme United Way (Centraide) de la région de Toronto et York a consacré en 2015-2016 une somme de 86 M$ à des programmes et services communautaires, dont un montant de 15,5 M$ pour aider des gens à combler leurs besoins comme l’emploi, le logement et la nourriturefootnote 66.

Malgré les investissements considérables consacrés à l’ensemble du système de sécurité du revenu, le système ne fonctionne manifestement pas bien pour de nombreuses personnes, en grande partie parce qu’il est conçu pour donner des services à la main-d’œuvre de jadis. À l’exclusion de l’aide sociale, la plupart des programmes, y compris l’assurance-emploi, le Régime de pensions du Canada (les prestations de retraite et d’invalidité) et la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail, s’appuient sur l’hypothèse selon laquelle la majorité des gens ont un emploi à long terme et bien rémunéré. À partir de cette hypothèse, de tels programmes versent les prestations les plus élevées et dont la durée est la plus longue aux personnes ayant occupé des emplois à temps plein et bien rémunérés dans un passé récent. Cependant, ces programmes fonctionnent essentiellement pour les particuliers qui sont, par définition, prêts pour le marché du travail ou « aptes au travail ». Un besoin se fait sentir quant à des programmes qui portent sur l’aptitude à l’emploi et favorisent chez les particuliers l’acquisition d’aptitudes à la vie quotidienne et le perfectionnement professionnel pour les aider à devenir aptes à l’emploi plutôt que de les condamner à l’échec.

Les nombreuses personnes qui font face à des obstacles de longue durée à l’emploi ou qui travaillent d’arrache pied dans un monde où le travail est peu rémunéré, à temps partiel et de durée limitée vivent une réalité différente. De leur point de vue, l’ampleur et la complexité du système de sécurité du revenu signifient que le cheminement dans celui-ci risque d’être difficile et de prêter à confusion, ce qui complique l’accès aux programmes. Pour chacun des programmes, ces personnes doivent déterminer où aller, comment présenter une demande d’admission et quels sont les renseignements requis.

Souvent, les règles mises en place font en sorte que les travailleurs à faible revenu n’ont pas droit d’emblée à des programmes tels que l’assurance-emploi. De plus, s’ils obtiennent l’accès aux prestations, les périodes à cette fin sont arbitrairement courtes et les prestations, insuffisantes.

Le système peut également sembler inéquitable parce que les programmes fournissent des niveaux variables de soutien aux gens. Par exemple, une personne célibataire qui travaille à temps plein au salaire minimum pourrait avoir droit aux prestations d’assurance-emploi (AE) équivalentes à 478,50 $ aux deux semaines (ou 957 $ aux quatre semaines). La personne dont le nombre d’heures travaillées est en deçà du minimum requis ou qui n’a même pu dénicher un emploi peut recevoir 721 $/mois par le truchement du programme Ontario au travail, à savoir un montant inférieur de 25 % à celui des prestations d’AE versées sur à peu près quatre semaines à un travailleur au salaire minimum. Plus le salaire minimum augmentera, plus l’écart entre les prestations d’AE et celles du programme Ontario au travail s’accentuera, à moins qu’il n’y ait des hausses équivalentes apportées au programme Ontario au travail.

De plus, les règles entre programmes ne s’agencent pas toujours bien. Par exemple, le prestataire du POSPH qui habite un logement subventionné est généralement considéré comme en bonne posture comparativement à d’autres qui sont prestataires de l’aide sociale. Cependant, si le prestataire du POSPH trouve un emploi, le soutien qui lui est consenti au titre du POSPH risque de diminuer parallèlement à l’augmentation de son loyer, de sorte qu’il lui sera difficile de progresser davantage.

Du point de vue du système, une telle ampleur et complexité signifie qu’il faut réfléchir attentivement à la façon dont les programmes influent les uns sur les autres. Les changements apportés à un programme risquent d’avoir des conséquences sur un autre programme, ce qui au bout du compte touche les gens… favorablement et défavorablement. Par exemple, l’effritement de l’admissibilité à l’assurance-emploi du gouvernement fédéral au cours des années 1990, causé en partie par le resserrement des règles d’admissibilité, s’est traduit par une dépendance accrue aux programmes d’aide sociale des gouvernements provinciaux, lesquels fournissent habituellement (tel que relevé au préalable) un soutien moindrefootnote 67 . Les répercussions de ce changement ont été ressenties essentiellement par les célibataires sans emploi. En revanche, la Prestation ontarienne pour enfants (POE) a remplacé plusieurs prestations distinctes destinées aux enfants, dont un grand nombre en provenance de l’aide sociale, au moyen d’un programme simplifié fondé sur le revenu et qui traite les enfants de manière égale, quelle que soit la source du revenu familial. La POE est généralement considérée comme un cas de réussite dans les politiques.

L’Allocation canadienne pour enfants, versée par le gouvernement fédéral, permet, de concert avec la POE, d’accroître l’aide financière aux familles au-delà de l’aide sociale afin d’assumer les coûts liés à l’éducation des enfants, de sorte qu’un nombre moindre de chefs de famille monoparentale nécessitent un soutien par le truchement de l’aide sociale. La Prestation fiscale canadienne pour enfants, ainsi que d’autres facteurs tels qu’un accès élargi à des services de garde abordables, a eu pour effet de diminuer le pourcentage des familles monoparentales dans les clients du programme Ontario au travail, lequel est passé de 46 % en 1998-1999 à 28 % en 2016-2017. Les hausses substantielles apportées en juillet 2016 aux prestations fédérales pour enfants pourront se traduire par un autre amoindrissement du nombre de familles faisant appel au programme Ontario au travail pour obtenir de l’aide. Toutefois, il reste encore en à améliorer l’accès, tout particulièrement chez les communautés des Premières Nations où l’inscription aux prestations fondées sur le régime fiscal est limitéfootnote 68.

L’aide sociale dans le contexte de la sécurité du revenu

L’aide sociale forme une composante substantielle du système de sécurité du revenu en Ontario… et qui a joué un rôle accru au cours des dernières décennies.

Lorsque les programmes de sécurité du revenu ne s’agencent pas bien, il en résulte des conséquences, la principale étant qu’un nombre supérieur de personnes doivent dépendre de l’aide sociale comme « premier recours » pendant des périodes considérablement prolongées. Autrement dit, l’aide sociale est devenue le filet de sécurité non seulement des personnes qui sont incapables de travailler, mais de celles abandonnées par les programmes dont l’objet consiste à les protéger contre la perte d’un emploi et à les aider à rétablir le lien avec le marché du travail. En Ontario, il existe deux programmes d’aide sociale auxquels les gens font appel :

  • Le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées (POSPH) procure un soutien du revenu aux personnes handicapées, étant donné l’augmentation du coût de la vie qu’occasionne une invalidité ainsi que les obstacles économiques et sociaux qui peuvent en découler.
  • Le programme Ontario au travail, destiné aux autres personnes, est fondé sur l’hypothèse souvent fausse selon laquelle la plupart des gens ne nécessitent qu’un soutien du revenu temporaire d’ici à ce qu’ils puissent (très rapidement, en règle générale) réintégrer le monde du travail.

Compte tenu du rôle que ces programmes doivent jouer, il importe de prendre connaissance des limites qui nécessitent un changement :

  • En règle générale, le cadre législatif est axé sur le fait d’« éloigner les gens de l’aide sociale » plutôt que de les aider à atteindre leurs objectifs.
  • Le programme Ontario au travail ne parvient pas à déceler la complexité de la situation des personnes et leurs besoins diversifiés.
  • La philosophie de service est axée sur la gestion et la « surveillance » de l’admissibilité, à l’aide de nombreux processus sur support papier, de sorte que les chargés de cas consacrent beaucoup de temps à des tâches ayant de faibles répercussions plutôt que d’appuyer les personnes et de résoudre les problèmes.
  • Le manque de soutiens ainsi que les règles et processus compliqués relativement aux demandes d’admission au POSPH compliquent l’accès à ce programme.
  • Le contact avec les gens n’est pas constamment propice à la mise en relief de leur vécu individuel, notamment le traumatisme historique, la violence et la pauvreté intergénérationnelle.
  • Les obstacles comportementaux et sociétaux enracinés dans les programmes n’appuient ni les aptitudes, ni les capacités, ni les objectifs des personnes.

Envisager L’avenir

Vision

Tous les particuliers sont traités avec respect et dignité, outillés pour atteindre leur plein potentiel et inspirés à le faire. Les gens bénéficient d’un accès équitable à un système de soutien du revenu et en nature complet et axé sur la responsabilisation; ce système procure un niveau suffisant d’aide financière et favorise l’inclusion sociale et économique, tout en prêtant une attention particulière aux besoins et au vécu des Autochtones.

L’inclusion sociale s’appuie sur les notions d’appartenance, d’acceptation et de reconnaissance; elle fait intervenir la concrétisation d’une participation pleine et égale aux organisations économiques, sociales, culturelles et politiques. Elle consiste à reconnaître la diversité et lui accorder de l’importance, de même qu’à susciter un sentiment d’appartenance par un accroissement de l’égalité sociale et de la participation de diverses populations défavoriséesfootnote 69 .

Situation future

Situation future

Principes directeurs

Les principes suivants orientent les recommandations formulées dans la feuille de route. Ils doivent être adoptés par tous les partenaires et le gouvernement provincial dans les prises de décisions en lien avec la réforme de la sécurité du revenu. Une optique d’équité axée sur les droits de la personne doit être constamment mise en application, tout particulièrement en ce qui touche les besoins et le vécu des Autochtones, des personnes racialisées, des personnes handicapées, et des autres populations marginalisées.

Suffisance

La combinaison d’aide sociale et d’autres soutiens du revenu, en l’absence de gains et d’un revenu de source privée, doit fournir suffisamment de ressources pour couvrir les éléments essentiels du coût de la vie tels que le logement, les aliments nutritifs, le transport, les coûts relatifs à l’invalidité ainsi que d’autres biens de première nécessité, de telle sorte que les gens puissent éviter la pauvreté, protéger leur mieux-être et se concentrer sur leurs objectifs d’emploi et d’inclusion sociale.

Droits

Le système de sécurité du revenu respecte les droits des personnes comme en témoigne le droit inhérent des Premières Nations à l’autonomie gouvernementale et les droits issus de traitésfootnote 70 , l’arrêt Danielsfootnote 71 , le principe de Jordanfootnote 72 ,

la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées, et la Convention internationale sur l’élimination de toutes formes de discrimination raciale.

Reconciliation

Le système de sécurité du revenu s’inscrit dans, et donne suite à, l’esprit et l’intention du rapport de la Commission de vérité et réconciliation du Canada, y compris les engagements spécifiques pris par le gouvernement provincial dans le cadre de Cheminer ensemble pour en arriver à la réconciliation avec les Autochtones. Étant donné le lien intrinsèque entre l’appui à une amélioration des résultats sociaux et économiques chez les Autochtones et l’objectif de la réconciliation, tous les aspects de la transformation du système sont guidés par ce principe.

Accès Aux Services

Le système de sécurité du revenu est accessible et facile à comprendre. Les travailleurs de première ligne sont capables d’assurer la prestation de services performants, intégrés et modernes où sont prises en compte les réalités de la prestation de services dans toutes les communautés et auprès de diverses populations, à l’aide de techniques sécuritaires sur le plan culturel et sensibles aux traumatismes.
Favoriser L’inclusion Économique Et Sociale

Le système de sécurité du revenu aide les gens à atteindre leur plein potentiel en vue de l’inclusion économique et sociale. Les programmes sont conçus de façon à appuyer un sentiment d’appartenance et à donner l’occasion de participer de façon pleine et équitable à la communauté. Les soutiens à l’emploi et à la formation sont personnalisés et s’adaptent au marché du travail afin d’appuyer le plus efficacement ceux qui cherchent à participer au marché du travail.

Équité Et Justice

Le système de sécurité du revenu part du principe que toutes les personnes ne bénéficient pas de chances égales et cherche à contrer le désavantage systémique et le racisme structurel actuels et historiques afin de garantir des résultats équitables pour chacun. Ce point englobe un engagement envers l’équité procédurale au moyen de politiques, de procédures, de pratiques et de mécanismes d’appel appropriés footnote 73.

Viabilité

Le système de sécurité du revenu se fonde sur un investissement gouvernemental viable, un engagement envers l’efficience et l’efficacité, ainsi qu’une démarche respectueuse de responsabilisation.

Respect Et Dignité

Toutes les personnes sont traitées avec respect et dignité pour favoriser l’inclusion économique et sociale.

Pleins Feux Sur La Feuille De Route

Thèmes principaux

Dans la conception de la feuille de route, les groupes de travail devaient prendre en compte trois thèmes principaux :

  1. Investir dans les gens – Les gens sont la ressource la plus importante de l’Ontario. Tous les éléments du système de sécurité du revenu doivent collaborer efficacement pour satisfaire à une gamme variée de besoins et de vécus, à l’appui de l’amélioration de la stabilité financière, de la santé et du mieux-être des particuliers et des familles. Les liens des gens avec le système de sécurité du revenu sont trop souvent axés sur les activités transactionnelles et l’application des règlements, tout particulièrement dans le cadre de l’aide sociale. Il est crucial de changer la façon dont les programmes sont conçus, la façon dont ils se recoupent, et leur façon de mettre les gens en lien avec le soutien pertinent à partir du tout premier point d’accès.
  2. Se préoccuper de la suffisance – Il est inacceptable que tant de gens vivent dans la pauvreté extrême et soient plongés dans le besoin en Ontario. Il est vital que le gouvernement provincial détermine un seuil
    au-delà duquel personne ne devrait se trouver et qu’il prenne des engagements en ce sens. La réussite passe par l’effet concerté des composantes du système de sécurité du revenu ainsi que des prestations et soutiens de revenu fédéraux, provinciaux et municipaux combinés en vue d’améliorer la vie des gens. Il faut prendre des mesures urgentes et immédiates et consentir d’importants investissements dans le système de sécurité du revenu, dont l’aide sociale, pour concrétiser ce programme au cours des dix prochaines années.
  3.  Prendre conscience du vécu des Autochtones – La réforme de la sécurité du revenu doit s’inscrire dans les engagements du gouvernement provincial quant à la réconciliation avec les Autochtones au moyen de son cadre « Cheminer ensemble », et contribuer à rétablir des liens avec les Autochtones. Pour ce faire, le système de sécurité du revenu devra s’attaquer énergiquement et parer au racisme systémique et institutionnel, puis prendre conscience des profondes répercussions de la colonisation, des pensionnats indiens et du traumatisme intergénérationnel. La réforme doit respecter le droit des Premières Nations à l’autonomie gouvernementale et s’adapter aux besoins et points de vue exceptionnels des Autochtones, y compris ceux qui ne sont pas membres d’une Première Nation.

Objectifs et champs d’action clés

Dans ces thèmes figurent quatre objectifs comportant chacun des champs d’action clés :

Parvenir à la suffisance du revenu : Adopter une définition de la suffisance du revenu et s’engager publiquement à atteindre cet objectif en dix ans.

Champs d’action clés :

  • Établir un objectif en vue de la suffisance du revenu

Mobiliser tout le système de sécurité du revenu : Tirer parti de tout le système de sécurité du revenu, actuellement et à l’avenir, afin que les programmes fonctionnent de concert pour faciliter l’inclusion sociale et économique des personnes à faible revenu.

Champs d’action clés :

  • Une prestation de logement en Ontario
  • Soutien du revenu aux enfants
  • Prestation fiscale pour le revenu de travail
  • Prestations pour soins de santé de base
  • Accès à la justice

Transformer l’aide sociale : Simplifier l’aide sociale et abroger les règles et politiques coercitives. Voir à ce que l’attention soit particulièrement prêtée à l’aide aux personnes pour qu’elles surmontent les obstacles de sortie de la pauvreté et participent à la société.

Champs d’action clés :

  • Cadre législatif
  • Une culture axée sur la confiance, la collaboration et la résolution de problèmes
  • Soutenir les personnes handicapées
  • Un revenu assuré pour les personnes handicapées
  • Une structure d’aide sociale transformée
  • Un modèle propre aux Premières Nations

Aider ceux dans la pauvreté extrême : Prendre des mesures précoces et urgentes pour hausser le niveau de soutien du revenu à la disposition des personnes dans la pauvreté extrême.

Champs d’action clés :

  • Le besoin d’une mesure urgente

Il faut également prendre des mesures cruciales pour faire en sorte que les programmes de sécurité du revenu s’inscrivent dans le lien gouvernemental d’égal à égal entre les Premières Nations et le gouvernement provincial. Des recommandations propres aux communautés des Premières Nations sont décrites au sein d’un chapitre consacré à ce sujet (pages 150 à 171), dans l’attente que le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral travaillent avec les Premières Nations à titre de partenaires égaux afin de mener la réforme.

Pour mettre en œuvre la feuille de route, il faudra amplifier le travail à la définition des détails et à la création des plans sur la façon d’instaurer les changements. Dans certains cas, il importe que le gouvernement provincial fasse appel à une vaste gamme de points de vue dans une démarche de conception en collaboration, dont les personnes touchées par les changements, le personnel de première ligne, les gestionnaires de services et partenaires de prestations, les porte-parole, les peuples et organisations autochtones, ainsi qu’une gamme d’experts.

Parvenir À La Suffisance Du Revenu

OBJECTIF : Adopter une définition de la suffisance du revenu, établie au départ comme mesure de faible revenu utilisée par la Stratégie ontarienne de réduction de la pauvreté, et s’engager publiquement à atteindre cet objectif en dix ans.

L’un des éléments cruciaux dans la résolution de la pauvreté consiste à faire en sorte que les personnes disposent d’un revenu suffisant pour s’offrir les biens de première nécessité modernes de la vie : le nécessaire pour être en santé sur les plans émotif et physique et branché sur le monde. Pour ce faire, toutes les composantes du système de sécurité du revenu doivent agir de concert pour garantir un niveau minimum de revenu à chaque personne et famille, par des soutiens de grande portée à la disposition de toutes les personnes à faible revenu et des programmes qui font en sorte qu’il n’y ait pas de laissés pour compte.

Établir un but en vue de la suffisance du revenu

Recommandation 1 : Adopter un niveau minimum de revenu en Ontario auquel se conformer au cours des dix prochaines années au moyen de soutiens combinés dans l’ensemble du système de sécurité du revenu.

Il est crucial de définir la suffisance du revenu. Sans définition convenue de la suffisance, il est difficile de connaître la position des gens à ce sujet, de déterminer l’ampleur de leur défavorisation ou de mesurer leurs progrès. Le fait de définir la suffisance par l’établissement à l’échelle provinciale d’un niveau minimum de revenu qui est réalisable au fil du temps fournira au système de sécurité du revenu un objectif mesurable et transparent. Il s’agit d’utiliser ce niveau pour le comparer à la somme des soutiens du revenu auxquels ont accès les particuliers à partir de tous les programmes, sans se limiter à certains programmes, dont l’aide sociale. Ce niveau doit tenir compte du coût de la vie dans différentes régions, y compris celles qui sont éloignées. Dans la recherche d’un niveau de vie suffisant, l’attention sera prêtée à une série complète de réformes qui soutiennent l’inclusion sociale et économique.

Pour atteindre cet objectif de suffisance, il faut une vaste optique du soutien du revenu qui englobe la gamme de programmes municipaux, provinciaux et fédéraux auxquels les gens ont accès, dont la Prestation fiscale canadienne pour enfants, les soutiens au logement, les crédits d’impôt remboursables, l’aide sociale, et les prestations pour soins de santé de base.

Un coup d’œil aux prestations d’aide sociale et fiscales auxquelles ont accès les particuliers, par rapport à l’actuelle mesure du panier de consommationfootnote 74, révèle tout simplement la mesure dans laquelle de nombreuses personnes sont loin de pouvoir se procurer les produits et services nécessaires pour en arriver à un niveau de vie suffisant. Comme nous l’analyserons plus loin, il faut apporter des révisions à la mesure du panier de consommation pour en arriver à une comparaison tout à fait exacte du coût de la vie. Le graphique 3 fournit un point de départ à cette comparaison.

Une personne dont le revenu est insuffisant pour lui permettre de se procurer les biens essentiels les plus nécessaires de la vie, comme un domicile, un repas ou un moyen de se déplacer dans sa collectivité, ne peut presque pas améliorer sa situation. Selon toute vraisemblance, elle constatera que sa santé se dégrade, elle se trouvera de plus en plus en décalage avec le milieu du travail, et elle fera l’objet d’une stigmatisation et d’un isolement social accrus.

Il est plus que temps que des investissements soient consentis afin que tous les particuliers, nommément ceux qui vivent dans la pauvreté extrême, aient davantage de ressources pour assurer leur subsistance et de meilleures possibilités de s’investir dans leur collectivité.

Comparaison du revenu net d’un célibataire prestataire du programme Ontario au travail et de la mesure du panier de consommation (MPC)

Comparaison du revenu net d’un célibataire prestataire du programme Ontario au travail et de la mesure du panier de consommation (MPC)

Recommandations détaillées

1.1 Le gouvernement provincial devrait s’engager publiquement à concrétiser en dix ans un niveau minimum de revenu (d’ici 2027-2028).

  • Le niveau minimum de revenu devrait au départ correspondre à la mesure de faible revenu (MFR) actuellement employée par la Stratégie ontarienne de réduction de la pauvreté (c.-à-d. la MFR 50 de la SORP couplée à l’année de référence 2012), à bonifier de 30 % pour les personnes handicapées, étant donné l’augmentation du coût de la vie qu’occasionne une invalidité. Consultez l’annexe B pour connaître les niveaux de MFR de la SORP en lien avec différents types de famille.

1.2 Amorcer sans tarder le travail de définition d’une mesure ontarienne du panier de consommation englobant un panier de produits modernes, dont le prix reflète les coûts réels et qui est rajusté pour toutes les régions de la province, dont les régions éloignées du Nord. Cette mesure servira à évaluer les progrès vers le niveau minimum de revenu; elle permettra peut-être de revoir ou de remplacer la MFR de la SORP comme mesure d’établissement du niveau. La mesure ontarienne du panier de consommation pourrait également servir à orienter et à évaluer les décisions d’investissement à long terme.

1.3 Instaurer les recommandations dans la feuille de route pour progresser vers la suffisance dans le système de sécurité du revenu d’ici 2027-2028.

Mobiliser Tout Le Système De Sécurité Du Revenu

OBJECTIF : Tirer parti de tout le système de sécurité du revenu, à l’heure actuelle et à l’avenir, afin que les programmes fonctionnent de concert pour faciliter l’inclusion sociale et économique des personnes à faible revenu.

La prestation de soutiens à l’extérieur de l’aide sociale permet d’orienter les programmes vers les personnes qui en ont besoin… que ces dernières éprouvent des difficultés relatives à l’accessibilité au logement, qu’elles élèvent des enfants ou qu’elles assument des coûts élevés de soins de santé. Par l’instauration de nouveaux programmes, ou l’élargissement des programmes actuels qui fonctionnent bien, nous pouvons soutenir un nombre accru de personnes à faible revenu, qu’elles soient ou non prestataires de l’aide sociale. Des données révèlent qu’une telle démarche fonctionne, et il s’agit de tirer parti de la réussite liée aux prestations pour enfants et au programme Beaux sourires Ontario afin de joindre davantage de personnes dans le besoin, tout en tirant parti des répercussions attendues du programme Assurance santé Plus récemment annoncé à l’intention des enfants et des jeunes de moins de 24 ans et qui sera instauré en 2018. La mise en place progressive de changements sur dix ans rend possible le renouvellement d’un engagement envers la population à faible revenu et dont il sera possible de tirer parti à l’avenir. Tel est justement l’objectif des recommandations suivantes. Toutefois, il faudra prendre d’autres mesures qui se situent au delà du système de sécurité du revenu. Par exemple, les gouvernements fédéral et provincial, les administrations municipales et les partenaires du secteur privé doivent intensifier leurs efforts pour abaisser les coûts du transport, élargir l’accès au transport en commun, de même que régler les problèmes de sécurité alimentaire afin que les gens aient accès à une nourriture saine, abordable et adaptée aux particularités culturelles.

Certaines personnes des Premières Nations ne sont pas actuellement admissibles à certains des programmes fondés sur les déclarations de revenus. Dans d’autres cas, les personnes des Premières Nations sont admissibles mais font face à des obstacles d’accès et d’adhésion parce qu’elles n’ont pas accès habituellement au système fiscal. Il importe de mettre des mesures en place et de modifier les programmes, si nécessaire, afin que les Premières Nations aient accès à ces prestations et puissent dans les faits en être prestatairesfootnote 75.

Une prestation de logement en Ontario

Recommandation 2 : Instaurer une prestation de logement pour aider les personnes à faible revenu à composer avec la hausse du coût de la vie, qu’elles soient prestataires de l’aide sociale ou non, afin qu’elles n’aient pas à choisir entre un domicile et d’autres biens de première nécessité.

Le fait que les personnes à faible revenu aient besoin d’un nombre accru de logements est reconnu. Les seuls travaux de construction et de réparation ne suffiront pas à régler la crise du logement qui sévit en Ontario. S’il n’existe pas de solution unique à cet enjeu complexe, il doit manifestement y avoir des initiatives au delà du côté de l’offre afin d’aider directement les personnes à composer avec les coûts de logement auxquels elles font face.

Le logement constitue une pression financière énorme qui s’exerce sur de nombreuses personnes. Bien que le logement soit manifestement un bien de première nécessité, un grand nombre de particuliers et de familles n’ont pas les moyens de s’offrir un lieu sécuritaire et abordable où vivre.

Le gouvernement a fait un pas dans la bonne direction en donnant suite à ces besoins au moyen d’une prestation de logement transférable qui fournit une aide continue à environ 1 000 personnes survivantes de violence familiale chaque année. Toutefois, au sens large de la sécurité du revenu, il faut compléter le travail à ce chapitre par l’instauration d’une prestation de logement universelle, fondée sur le revenu et transférable comme moyen d’accroître les sommes monétaires dont disposent les gens pour composer avec des coûts de logement élevés et les rapprocher de l’objectif de la suffisance du revenu.

La prestation aux ménages d’une aide financière directe ayant trait au coût du logement est un point de départ dans l’amélioration du mieux-être d’un grand nombre de ménages ontariens; il s’agit également d’une importante étape pour répondre aux besoins impérieux en matière de logement dans l’immédiat.

D’après la définition de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL), un ménage éprouve des besoins impérieux en matière de logement si « son habitation n’est pas conforme à au moins une des normes d’acceptabilité (qualité, taille et abordabilité) et si 30 % de son revenu total avant impôt serait insuffisant pour payer le loyer médian des logements acceptables […] situés dans sa localité. » On décrit parfois les ménages qui doivent y consacrer 50 % ou plus de leur revenu total avant impôt comme ayant un besoin impérieux en matière de logement.

Dans la conception d’une prestation de logement transférable, des points importants sont à prendre en considération :

  • Les coûts et l’accessibilité du logement varient fortement au sein des régions géographiques et entre les frontières régionales. La prestation de logement abordable devra s’adapter à de telles variations pour orienter de façon optimale les ressources vers les personnes ayant les plus grands besoins.
  • Pour être performant et pertinent le plus possible, le processus de présentation d’une demande de prestation de logement doit être simple et celle-ci doit offrir une stabilité raisonnable. Le système fiscal est manifestement le moyen le plus pertinent d’exécuter cette prestation. Toutefois, des enjeux sont soulevés quant à sa capacité d’adaptation qu’il faudra traiter, notamment les changements soudains et draconiens au besoin de logement (p. ex., un changement catastrophique en matière de revenu, la fuite pour échapper à la violence au foyer ou familiale), et satisfaire aux besoins des personnes qui ne produisent pas de déclaration de revenus, qui sont sans abri ou qui risquent de le devenir. Quel que soit le mode d’exécution, il faut pouvoir compter sur un processus clair et facile à utiliser afin d’optimiser l’accès à cette importante prestation.
  • Une fois cette prestation instaurée, ces répercussions doivent être comprises dans l’ensemble et différents groupes doivent contribuer aux rajustements potentiellement nécessaires à la conception initiale afin que la prestation donne les résultats voulus.
  • Les gens doivent pouvoir accéder à un processus direct et performant de règlement des conflits, quel que soit le mode d’exécution utilisé.
  • Les gens ayant des besoins impérieux en matière de logement peuvent ou bien louer, ou bien posséder leur domicile. Dans certaines collectivités, comme celles en milieu rural, il n’existe pas de marché locatif vigoureux qui soit digne d’être mentionné, de sorte que les gens n’ont d’autre choix que de se tourner vers l’accession à la propriété. Il se peut que les prix du logement dans ces collectivités soient relativement inférieurs à ceux pratiqués dans les grands centres urbains, mais l’accessibilité pose encore problème lorsque d’autres coûts comme l’électricité, l’énergie et l’impôt foncier sont pris en compte. On croit qu’une prestation de logement transférable constitue un outil viable pour aider les locataires, mais il ne s’agit peut-être pas de la solution optimale pour combler les besoins des propriétaires. À ce titre, il faudra approfondir les travaux dans le secteur du logement afin d’étudier des démarches de soutien à l’accession à la propriété, le cas échéant.
  • La prestation de logement ne doit pas exclure les personnes des Premières Nations qui vivent la pauvreté dans les communautés des Premières Nations (au sein des réserves). Le manque d’accès à des logements adéquats dans les réserves constitue un problème critique. Le gouvernement de l’Ontario doit collaborer avec le gouvernement fédéral et les Premières Nations afin que ces dernières ne soient pas exclues de cette prestation (ou qu’elles aient accès à une solution de rechange fonctionnelle).

Compte tenu de ces prises en compte, il est recommandé que le gouvernement provincial commence par une prestation de logement transférable à l’intention des locataires et qui comble une partie de la différence (c.-à-d. « l’écart ») entre le revenu du ménage, la portion prévue qui sera consacrée au logement, et le coût réel du logement. L’importance de procéder rapidement pour venir en aide à ceux ayant des besoins impérieux en matière de logement est jugée primordiale. À ce titre, il est utile d’instaurer la prestation, même si celle-ci se situe au départ à un niveau très modeste.

Mode de fonctionnement de la prestation de logement transférable proposée

Cette illustration décrit la prestation de logement proposée en Ontario à l’aide d’un exemple quant à son fonctionnement éventuel dans un ménage en particulier.

Prestation Mensuelle = Comblement de l’ecart *

« Ça fait cinq ans que j’attends une aide au logement et on m’a dit que je devrai attendre encore dix ans. Toutes les sommes monétaires que je gagne vont au loyer. »
- Anonymefootnote 76

Il importe de ne pas oublier que le logement n’est pas strictement un enjeu provincial. Le gouvernement fédéral a procédé à des consultations dans le cadre d’une Stratégie nationale sur le logement et il s’est engagé récemment à consacrer au logement accessible plusieurs milliards de dollars sur dix ans. De plus, dans le récent rapport du Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées (HUMA) intitulé « Briser le cycle : Une étude sur la réduction de la pauvreté », il y a plusieurs recommandations ayant pour objet de traiter les problèmes de logement, y compris la création d’une prestation nationale de logement transférable en partenariat avec les gouvernements provinciaux et territoriaux.

Recommandations détaillées

2.1 Confirmer les détails de la conception et de l’instauration d’une prestation de logement universelle, fondée sur le revenu et transférable aux gens qui louent leur domicile.

2.2 Instaurer la prestation de logement transférable en 2019-2020 à titre de modeste « comblement de l’écart » de 25 %, l’écart correspondant à la différence entre le coût réel du logement et une contribution minimale du ménage en fonction du revenu de celui-ci.

2.3 Hausser le comblement de l’écart pour qu’il se situe à 35 % en 2020-2021, puis continuer de le hausser jusqu’à ce qu’il atteigne 75 % d’ici 2027-2028 ou avant.

2.4 Dans la prestation de logement, il faut vraiment prendre en compte les Premières Nations, qui pourront nécessiter des modifications ou une prestation parallèle afin que cette mesure fonctionne dans le contexte des réserves.

Soutien du revenu aux enfants

Recommandation 3 : Continuer de situer le soutien du revenu aux enfants à l’extérieur de l’aide sociale afin que toutes les familles à faible revenu puissent en tirer pleinement parti, quelle que soit la source du revenu. Voir à ce que les soutiens soient adaptés aux besoins des enfants et des jeunes les plus à risque.

La Prestation ontarienne pour enfants (POE) a révélé que le fait de fournir une aide financière liée à ce qu’il en coûte pour élever des enfants au moyen d’une prestation universelle et fondée sur le revenu dans laquelle aucune distinction n’est établie quant aux sources de revenu de la famille permet de joindre un nombre supérieur de personnes dans le besoin de façon simple, fiable et sans susciter de risque de stigmatisation.

Il est temps que l’Ontario prenne les dernières mesures de son cheminement vers l’intégration du soutien du revenu aux enfants de moins de 18 ans à la POE. Dans le contexte de la transformation de la structure d’aide sociale (voir la section Une structure d’aide sociale transformée, page 130), des suppléments distincts à l’intention des enfants seront nécessaires au cours des trois premières années, et ce, parce que les taux actuels d’aide sociale englobent encore les montants destinés aux enfants, ce qui ne sera toutefois par le cas du nouveau taux forfaitaire. Afin que la situation des parents ne se détériore pas, ces derniers auront besoin d’un supplément transitoire. À l’avenir, il y aura la possibilité de joindre le supplément restant à la POE de façon à orienter le soutien supplémentaire vers les familles ayant le plus faible revenu.

Si la POE fonctionne bien pour la plupart des enfants, l’accès à celle-ci par les familles ayant un statut d’immigrant précaire et ceux qui subissent des changements catastrophiques au revenu de l’année en cours pose problème. Il importe que ces problèmes soient traités par le gouvernement fédéral afin d’assurer un accès équitable à cette importante prestation.

Les enfants qui sont sous la garde d’une personne autre que leurs parents vivent souvent un bouleversement et un traumatisme émotionnel. Il est crucial de voir à ce que les fournisseurs de soins en de tels cas bénéficient d’un accès amélioré à une aide financière adaptable pour rétablir une certaine stabilité dans la vie des enfants. Le programme Aide pour soins temporaires (AST) sous sa forme actuelle dans le cadre de l’aide sociale apporte une aide financière aux enfants dans ces cas-là, mais il faut le renommer, en accroître l’efficacité et en améliorer l’harmonisation avec le soutien offert aux parents d’accueil.

Les partenaires locaux de prestation nécessitent une marge de manœuvre claire afin de déterminer le lieu optimal d’accès au programme AST. Ce pourrait être au moyen d’un bureau du programme Ontario au travail, ce qui est le cas actuellement, ou par l’intermédiaire de travailleurs des services aux familles ou de partenaires communautaires autres. Il convient d’offrir à intervalles réguliers aux fournisseurs du programme Ontario au travail et aux travailleurs des services aux familles des possibilités d’apprentissage et de perfectionnement afin de promouvoir l’accès à cette prestation au sein des communautés autochtones et autres.

On a récemment donné des précisions sur la politique pour tirer au clair le fait que les familles prestataires de l’aide sociale devraient continuer de recevoir un soutien au revenu ayant trait à leurs enfants dans les situations où le programme AST est fourni ou lorsque l’enfant est temporairement retiré de son domicile puis confié à la garde d’un proche parent, d’un autre fournisseur de soins ou d’une société d’aide à l’enfance. Voilà une mesure positive vers un soutien amélioré à la réunification familiale par l’accroissement de la suffisance du revenu. Cette mesure admet également que le racisme systémique dans le système de protection de l’enfance s’est traduit par le retrait des enfants autochtones de leur domicile parce que leur famille éprouvait des difficultés financières.

Les jeunes adultes qui sont passés par le système de protection de l’enfance sont particulièrement vulnérables lorsqu’ils effectuent la transition allant de la « tutelle de l’État » à l’âge adulte. Les jeunes qui vieillissent et cessent d’être pris en charge véhiculent constamment un message, corroboré par une analyse et des recherches poussées depuis de nombreuses années, comme quoi ils forment un groupe particulièrement à risque dont les membres sont démesurément représentés dans l’aide sociale. Selon une récente étude, le chômage et le sous- emploi sont plus marqués chez les jeunes qui vieillissent et cessent d’être pris en charge que chez leurs homologues et d’autres en provenance de milieux défavorisés. Des données semblent également indiquer que la majorité de ces jeunes vivent dans la pauvretéfootnote 77.

Les sociétés d’aide à l’enfance doivent être tenues de satisfaire à un niveau élevé de confiance lorsqu’elles assument la garde permanente d’un enfant et s’engagent à agir dans les meilleurs intérêts de ce dernier. Il faut notamment attendre de ces sociétés qu’elles déploient tous les efforts possibles afin que la transition vers l’âge adulte soit réussie. En vertu de la Loi de 2017 sur les services à l’enfance, à la jeunesse et à la famille, l’âge de protection sera relevé pour passer de 16 à 18 ans. C’est donc dire que de nombreux jeunes effectueront cette transition ultérieurement, après avoir acquis de la maturité, au moment où les possibilités de réussite seront supérieures. De plus, la loi exige des sociétés d’aide à l’enfance qu’elles continuent d’assurer la garde et le soutien, notamment par la mise en lien des jeunes avec les programmes d’aide à l’éducation, au logement et à l’emploi, aux particuliers au delà de leur 18e anniversaire. La réforme de la sécurité du revenu peut tirer parti de ces mesures positives en veillant à ce que ces jeunes adultes constituent une priorité dans la transformation des programmes d’aide sociale, et en exigeant des sociétés d’aide à l’enfance qu’elles placent les fonds provenant de l’allocation spéciale pour enfants (ASE) dans un programme d’épargne, une démarche déjà employée dans la Subvention équivalant à la Prestation ontarienne pour enfants (EPOE).

Compte tenu des antécédents du gouvernement en lien avec le traitement des enfants autochtones, et de la décision récemment rendue par le Tribunal canadien des droits de la personne au sujet de la discrimination contre les enfants des

Premières Nations dans les réserves, il faut prendre des mesures pour éviter que l’histoire se répète. L’histoire nous a montré que les enfants autochtones ont été retirés de leurs familles et communautés puis placés dans des pensionnats indiens (dirigés par l’Église) pour assimiler un mode de vie différent du leur. Les enfants autochtones ont également subi des mauvais traitements dans le domaine du mieux-être de l’enfance lorsque les programmes de prévention ont été sous-financés dans les réserves et que les enfants étaient trop souvent retirés de leur domicile pour être placés chez des personnes non autochtones.

Dans les communautés des Premières Nations, des ressources en service de garde d’enfants sont nécessaires lorsque les parents s’investissent dans des initiatives qui appuieront le cheminement de leurs enfants vers le mieux-être.

Lorsqu’un enfant est confié à la garde d’une société d’aide à l’enfance (SAE), les parents cessent de recevoir les versements de l’Allocation canadienne pour enfants (ACE) et la SAE en question peut présenter une demande d’allocation spéciale pour enfants (ASE) : ces versements sont équivalents à l’Allocation canadienne pour enfants et doivent être consacrés exclusivement aux besoins de l’enfant pour qui ils sont effectués. La SAE n’est pas tenue d’épargner les fonds obtenus pour appuyer les jeunes qui effectuent leur transition à partir de la prise en charge. Un versement semblable à l’ASE est consenti relativement à la prestation provinciale pour enfants; il s’agit de la Subvention équivalant à la Prestation ontarienne pour enfants (EPOE). En ce qui touche les jeunes de 15 ans et plus qui ont été pris en charge par une SAE pendant 12 mois consécutifs ou plus, les fonds de la Subvention EPOE doivent être investis dans un programme d’épargne puis consentis aux jeunes dans leur transition à la fin de la prise en charge.

Il est bon de continuer de situer les prestations pour enfants à l’extérieur de l’aide sociale, mais il reste encore du travail à faire pour éviter que les Premières Nations soient exclues. Lorsque les prestations ne sont plus fournies par le truchement de l’aide sociale, elles le sont habituellement par le truchement du système fiscal, de sorte que le bénéficiaire doit remplir une déclaration de revenus annuelle. Or, de nombreuses personnes des Premières Nations ne remplissent pas de telles déclarations parce que, dans bien des cas, si elles gagnent leur revenu dans la réserve, celui-ci est exonéré d’impôt. De plus, si la personne est prestataire de l’aide sociale, elle n’est peut-être pas consciente de l’avantage ou de la nécessité de remplir une déclaration de revenus. Un récent examen réalisé par le quotidien The Toronto Star a permis de constater que près de la moitié des prestataires des Premières Nations admissibles à l’Allocation canadienne pour enfants ne recevaient pas cette prestation parce qu’ils en ignoraient l’existence et n’avaient pas produit de déclaration de revenus afin de la recevoirfootnote 78. Ce problème touche également la POE. Une action directe constante auprès des communautés des Premières Nations et adaptée à leurs particularités culturelles est nécessaire, ainsi que des ateliers d’apprentissage et de perfectionnement donnés par du personnel compétent et une aide dans la production de déclarations de revenus, afin que tous les enfants admissibles reçoivent les prestations qu’ils sont censés toucher.

Recommandations détaillées

3.1 Fournir des suppléments de transition pour enfants dans le contexte de l’aide sociale afin que la situation des familles ne se détériore pas durant cette transition, où la structure de l’aide sociale sera transformée pour englober les taux forfaitaires.

3.2 Modifier l’image de marque du programme Aide pour soins temporaires afin que celui-ci porte sur le mieux-être des enfants, hausser le montant du soutien de revenu fourni pour qu’il soit en phase avec les niveaux de placement familial, puis donner aux administrateurs d’Ontario au travail une marge de manœuvre claire pour en déterminer le meilleur point d’accès.

3.3 Transférer les montants restants versés en lien avec les besoins essentiels des enfants dans l’aide sociale à la Prestation ontarienne pour enfants à titre de supplément destiné aux familles ayant les revenus les plus faibles.

3.4 Exiger des sociétés d’aide à l’enfance qu’elles placent les versements de l’allocation spéciale pour enfants dans un programme d’épargne destiné aux jeunes de 15 ans et plus pris en charge afin que les fonds leur soient consentis dans leur transition à la fin de la prise en charge.

3.5 Fournir du soutien à toutes les personnes à faible revenu, y compris celles qui vivent dans les communautés des Premières Nations, afin que les prestations versées par le truchement du système fiscal soient accessibles et reçues de façon équitable.

Prestation fiscale pour le revenu de travail

Recommandation 4 : Collaborer avec le gouvernement fédéral à l’augmentation de l’efficacité de la Prestation fiscale pour le revenu de travail afin qu’elle joue un rôle accru dans la suffisance du revenu chez les travailleurs à faible revenu en Ontario.

La Prestation fiscale pour le revenu de travail (PFRT) consiste en un crédit d’impôt remboursable fourni aux travailleurs à faible revenu admissibles. Elle compte deux objectifs stratégiques énoncés :

  1. aider les particuliers à faible revenu à effectuer la transition allant de l’aide sociale au marché du travail;
  2. donner aux travailleurs à faible revenu un incitatif supplémentaire pour raffermir leur participation au marché du travail.

Bien que la PFRT puisse jouer un rôle important dans le système de sécurité du revenu de l’Ontario, son importance a reculé au fil du temps parce que le programme est demeuré relativement statique, et ce, malgré les changements apportés à d’autres domaines du paysage et de la sécurité du revenu. De plus, sa portée est trop modeste pour qu’elle puisse jouer un rôle considérable permettant d’arrondir les gains des travailleurs à faible revenu.

En 2016, une personne célibataire sans enfant devait travailler environ 624 heures tout au long de l’année (ou 12 heures de travail/semaine) au salaire minimum afin de toucher suffisamment de gains pour parvenir au niveau maximum de la PFRT. Après un revenu net d’environ 11 675 $, le montant de la prestation régressait, jusqu’à disparaître une fois que le revenu net atteignait environ 18 529 $. La PFRT sera bonifiée pour aider à contrebalancer le coût des cotisations supplémentaires versées par les travailleurs à faible revenu en vue de la bonification du Régime de pensions du Canada, mais on pourrait faire beaucoup plus pour aider les particuliers au fur et à mesure qu’ils s’implantent solidement dans le marché du travail. Somme toute, malgré les objectifs énoncés de la PFRT, celle-ci n’aide pas beaucoup de particuliers à renoncer à l’aide sociale.

Pendant qu’on entrevoit d’autres changements qui influeront sur le système de sécurité du revenu (p. ex., les changements proposés à la structure tarifaire de l’aide sociale relevés dans la présente feuille de route de même que les augmentations du salaire minimum récemment proposées en Ontario), la nécessité de prendre des mesures quant à la PFRT prend une importance accrue. Le gouvernement de l’Ontario devrait collaborer avec le gouvernement fédéral, suivant les recommandations du Rapport HUMA mentionnées au préalable, à l’augmentation de la PFRT afin qu’elle réponde bien à ses objectifs dans le contexte du marché du travail actuel. Ces changements feront en sorte que la PFRT demeure une composante importante du système de sécurité du revenu.

De plus, certaines certaines personnes des Premières Nations risquent d’avoir peine à accéder à la PFRT parce que les particuliers doivent remplir une déclaration de revenus, de même que l’annexe de la PFRT, pour recevoir la prestation. Afin d’aider les personnes des Premières Nations à obtenir un accès amélioré aux soutiens du revenu comme la PFRT, une action directe et du soutien à propos des prestations offertes par le système fiscal sont requis. Il faut également envisager d’autres moyens d’assurer la prestation de la PFRT.

Recommandations détaillées

4.1 Le gouvernement fédéral augmente la PFRT afin qu’elle reflète bien les réalités auxquelles font face les travailleurs à faible revenu en Ontario. Cette mesure devrait englober l’examen des points suivants :

  • Le niveau de gains auquel un particulier se met à recevoir la PFRT et le mode de rajustement de la PFRT lorsque les gains augmentent, dont le seuil à partir duquel la PFRT se met à diminuer;
  • Le montant global de soutien fourni au moyen de la PFRT;
  • Le revenu net à partir duquel les particuliers n’ont plus droit à la PFRT;
  • L’action directe, le soutien et tout autre mode de prestation parallèle requis afin que les particuliers des Premières Nations aient accès à la PFRT.

Prestations pour soins de santé de base

Recommandation 5 : Mettre les prestations pour soins de santé essentiels à la disposition des personnes à faible revenu, et voir en premier lieu à ce que ceux qui vivent dans la pauvreté extrême aient accès aux services dont ils ont besoin.

Obtenir l’ordonnance d’un médicament pour régler un problème médical est inutile si cette ordonnance n’est pas remplie en raison du coût. Trouver un emploi ou avoir assez de confiance et d’estime de soi pour établir des liens avec les pairs et la communauté est difficile pour une personne à qui il a fallu arracher les dents et pour qui les prothèses dentaires coûtent trop cher. Ne pas être en mesure de s’offrir des lunettes ou des appareils auditifs risque d’occasionner l’isolement et l’incapacité à prendre part à la vie communautaire ou au marché du travail. Ne pas pouvoir assumer les coûts du déplacement afin de consulter un professionnel de la santé dresse un obstacle au diagnostic et au traitement.

Voilà quelques-unes des nombreuses raisons pour lesquelles le gouvernement provincial a mis en place des programmes tels que Beaux sourires Ontario et le Programme de médicaments de l’Ontario. Ceux-ci donnent accès respectivement aux soins dentaires pour les enfants et les jeunes et à la couverture des médicaments sur ordonnance pour les aînés, les enfants et les jeunes de moins de 24 ans ainsi que les prestataires de l’aide sociale. Voilà également pourquoi certaines municipalités réservent dans leur budget des fonds pour couvrir le coût des prothèses dentaires, et pourquoi les programmes d’aide sociale aident à assumer les coûts du transport pour raisons médicales.

Malheureusement, des milliers de personnes qui survivent au moyen d’un revenu faible, voire modéré, n’ont toujours pas, sinon peu, accès aux services de santé comme les soins dentaires ou de la vue. Quelques particuliers et familles craignent de renoncer à l’aide sociale et à la sécurité que leur procure l’accès aux prestations pour soins de santé qui sont strictement offertes dans l’aide sociale. Des mesures doivent être prises afin d’instaurer de nouvelles prestations pour soins de santé, de façon à ce que chaque particulier et famille à faible revenu puisse avoir accès aux services et produits de santé requis pour être en santé, avoir confiance et être en bonne position de s’investir activement dans leur communauté et leur emploi.

Les Premières Nations, qu’elles vivent au sein ou à l’extérieur d’une réserve, et nonobstant leur statut aux termes de la Loi sur les Indiens, doivent bénéficier d’un accès égal à toutes les prestations, actuelles ou nouvelles, fournies par le système de soins de santé de l’Ontario. Il faut éviter la discrimination dans tous les cas et, si un enfant est touché, le principe de Jordan doit s’appliquer pour éviter le refus, le retard ou la perturbation du service en raison de questions administratives.

Recommandations détaillées

5.1 Élargir l’accès aux prestations pour soins de santé de base obligatoires à tous les adultes prestataires du programme Ontario au travail et aux enfants d’âge adulte des familles prestataires du POSPH, puis étendre la couverture relative aux prothèses dentaires (y compris les mises au point initiales et de suivi) à tous les prestataires de l’aide sociale.

5.2 Développer les prestations de soins de santé de base et en instaurer de nouvelles à l’intention des adultes à faible revenu au cours des dix prochaines années, en commençant par l’élargissement de la couverture des médicaments sur ordonnance aux adultes de 25 à 65 ans, suivi de :

  • l’élargissement du programme Beaux sourires Ontario aux adultes de 18 à 65 ans et l’ajout des prothèses dentaires dans le cadre de la prestation;
  • la conception et l’instauration d’une nouvelle prestation pour soins de la vue et de l’ouïe aux particuliers et aux familles à faible revenu;
  • l’élargissement de l’accès aux prestations de transport pour raisons médicales.

5.3 Revoir le Programme d’appareils et accessoires fonctionnels pour en optimiser la portée chez les personnes à faible revenu, tant en ce qui touche la liste des appareils et accessoires couverts que la couverture médicale.

Accès à la justice

Recommandation 6 : L’équité procédurale doit être intégrée à tous les aspects du système de sécurité du revenu par des politiques, procédures et pratiques appropriées ainsi que des mécanismes d’appel rapides.

L’un des points forts clés des programmes actuels d’aide sociale en Ontario se rapporte aux droits d’appel clairs au Tribunal de l’aide sociale (ci-après le  « Tribunal ») : il s’agit d’un processus accessible, juste, transparent et, la plupart du temps, rapide. Des prestations provisoires sont offertes en attendant la décision du Tribunal, de sorte que les gens ne sont pas exposés à un risque accru si leur admissibilité aux prestations fait l’objet d’un litige. Il importe également de souligner que les décisions juridiques ont tiré au clair le point suivant : dans l’interprétation des lois sur l’aide sociale, une optique large et libérale est nécessaire et il y a lieu de dissiper l’ambiguïté en faveur de la personne qui cherche à obtenir des prestations. Le Tribunal met en application cette optique en examinant de façon globale la situation du particulier. Par exemple, le Tribunal peut prendre en compte les questions de préjudice et d’équité dans une ordonnance de non-recouvrement d’un paiement excédentaire.

Les prestations versées par le truchement du système fiscal, comme l’Allocation canadienne pour enfants ou la POE, ont élargi de façon positive le filet de sécurité du revenu en Ontario, mais il faut améliorer le processus de règlement des litiges ayant trait aux prestations versées par le truchement du système fiscal. Le processus d’opposition de l’Agence du revenu du Canada est contraignant et difficile à comprendre. La cour de l’impôt ne constitue pas un processus d’appel facilement accessible, et cette cour n’a pas non plus compétence pour proposer d’importantes corrections comme l’exonération du remboursement des paiements excédentaires ou le secours en cas d’urgence, quelle que soit la situation. Voilà qui est particulièrement éprouvant pour les gens qui dépendent peut-être du revenu provenant des prestations pour payer le loyer et acheter de la nourriture, ou qui sont victimes de fraude ou de mauvais traitements.

Puisque les prestations pour enfants forment désormais une proportion élargie du budget des familles à faible revenu et que la mise en œuvre du système fiscal est envisagée quant à de futures prestations possibles (voir la section Une prestation de logement en Ontario page 85), il est crucial de donner aux personnes à faible revenu qui dépendent de ces prestations du revenu pour combler leurs besoins essentiels l’accès à un processus d’appel juste, transparent et efficace.

Recommandations détaillées

6.1 Demander à un organisme de recherche comme la Commission du droit de l’Ontario ou un établissement universitaire d’examiner le processus actuel d’appel relatif aux prestations versées par le truchement du système fiscal, puis élaborer des recommandations en vue de mécanismes améliorés ou nouveaux à l’appui d’un accès juste, transparent et efficace à ces prestations et aux processus d’appel.

Un revenu assuré pour les personnes handicapées

La section suivante de la feuille de route, intitulée « Transformer l’aide sociale », comporte des recommandations visant à améliorer le soutien aux personnes handicapées. Voici les deux principales recommandations à ce chapitre :

Recommandation 9 : Maintenir et raffermir le POSPH comme programme distinct pour les personnes handicapées. Voir à ce que le POSPH et le programme Ontario au travail soient bien outillés pour soutenir les personnes handicapées dans l’atteinte d’objectifs individuels en vue de l’inclusion sociale et économique.

Recommandation 10 : Concevoir en collaboration une formule de  « revenu assuré » pour les personnes handicapées.

Le processus de conception en collaboration fera intervenir des personnes handicapées, des porte-parole et des travailleurs de première ligne dans l’élaboration d’une formule de revenu assuré fondée sur le revenu afin d’assurer la prestation d’un soutien financier aux personnes handicapées. Dans le nouveau modèle, les travailleurs de première ligne du POSPH joueront un rôle important dans le soutien des buts et aspirations des particuliers, que ce soit à propos de l’éducation, de l’emploi ou de la participation communautaire.

Le revenu assuré marquera une évolution par rapport à la perception du soutien financier aux personnes handicapées comme un genre de « mesure de bien-être social » avec la stigmatisation souvent connexe à celle-ci. Ce revenu donnera souvent une admissibilité à vie aux prestations auxquelles les gens peuvent accéder lorsqu’ils en auront besoin, de sorte que la nécessité de pouvoir réintégrer le programme après avoir occupé un emploi s’il y a un changement de situation sera reconnue.

Transformer L’aide Sociale

OBJECTIF : Simplifier les programmes d’aide sociale et abroger les règles et politiques coercitives. Voir à ce que l’attention soit particulièrement prêtée à l’aide aux personnes pour qu’elles surmontent les obstacles de sortie de la pauvreté et participent pleinement à la société.

La réforme de la sécurité du revenu ne sera pas réussie sans la transformation du programme Ontario au travail et du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées. Le cadre législatif général, la structure de même que certaines hypothèses qui sous-tendent ces programmes ne s’agencent pas bien avec les autres éléments du système de sécurité du revenu. Il est temps de repenser aux aspects de ces programmes afin d’améliorer leur capacité à aider les gens à s’extirper de la pauvreté et à prendre part à la société.

Cadre législatif

Recommandation 7 : Changer fondamentalement le cadre législatif des programmes d’aide sociale pour jeter les bases d’une culture axée sur la confiance, la collaboration et la résolution de problèmes.

Les particuliers qui accèdent au programme Ontario au travail et au POSPH, de même que le personnel qui gère ceux-ci, adhèrent à un ensemble de règles consacrées dans les lois, les règlements et les directives politiques (ce qui constitue un ensemble appelé « cadre législatif »). Ce cadre législatif donne le ton et définit les attentes quant aux règles à observer et à la façon de les observer. Dans le domaine de l’aide sociale, le résultat final porte sur la vérification de l’admissibilité et sur des démarches techniques, souvent rigides, auprès des gens, ce qui met souvent les prestations en péril.

Le cadre législatif actuel met manifestement en relief les mauvaises priorités. Il consacre ce qui suit :

  • Ontario au travail en tant que « programme temporaire », ce qui va à l’encontre de la réalité de nombreux particuliers, pour qui il s’agit du principal filet de sécurité.
  • L’emploi comme seul objectif désirable du programme Ontario au travail, ce qui fait abstraction des obstacles auxquels les gens sont confrontés et de l’importance cruciale des autres résultats liés à la santé, au mieux-être et à l’inclusion sociale, lesquels sont nécessaires pour réussir sur le marché du travail ou être en phase avec sa communauté.
  • L’attention prioritairement accordée à la conformité et à la vérification, assortie d’une série rigoureuse d’exigences de déclaration. Il s’agit d’exigences précises qui, si elles ne sont pas satisfaites, se traduisent par des lettres types mettant en application des menaces réelles ou perçues quant à l’annulation ou à la diminution imminente de l’aide. Les lois qui régissent le programme Ontario au travail font que celui-ci :
    • Reconnaît la responsabilité personnelle et favorise l’autonomie par l’emploi;
    • Fournit une aide financière temporaire aux personnes les plus dans le besoin pendant qu’elles satisfont aux obligations qui consistent à chercher et à conserver un emploi.

Les règles d’admissibilité financière du programme Ontario au travail et du POSPH doivent changer. Bien que les règles et la gestion de l’admissibilité soient nécessaires, il est crucial que le cadre législatif permette d’établir des objectifs élargis et de promouvoir une culture axée sur le respect, la collaboration, le soutien et l’autonomie, par opposition à une culture axée sur la surveillance constante et des menaces de sanctions. Pour ce faire, il faudra instaurer un cadre tout à fait nouveau pour le programme Ontario au travail dès le début de l’instauration de la feuille de route et qui se situe au delà des simples modifications; il faudra également apporter des changements à la réglementation des deux programmes en vue de réduire les règles superflues et inefficaces.

Le nouveau cadre législatif devra également reconnaître de façon explicite le pouvoir des Premières Nations à déterminer les règles qui ne fonctionnent pas bien dans leurs communautés. Cette mesure favorisera la mise en place d’une orientation unifiée et claire, rajustée opportunément en fonction des besoins particuliers de chaque communauté des Premières Nations, et servira de nouveau départ à ceux qui ont actuellement accès au programme et aux gens qui auront besoin d’aide à l’avenir (consulter les pages 150-167 pour obtenir une analyse et des recommandations approfondies). Les communautés des Premières Nations disposeront de l’autonomie et de la souplesse voulues pour se « retirer » du cadre législatif ou de parties de celui-ci, exercer leur autodétermination et instaurer leur(s) propre(s) modèle(s) fondé(s) sur une démarche communautaire humaniste.

Recommandations détaillées

7.1 Concevoir et instaurer une nouvelle législation pour régir le programme Ontario au travail et en modifier l’image de marque. Comme point de départ du changement législatif, pendant la première année des réformes, rédiger un nouvel énoncé de mission faisant l’objet de consultations publiques et qui reconnaît et appuie explicitement :

  • le choix et le mieux-être de chacun;
  • la diversité des besoins de même que l’objectif d’inclusion sociale et économique pour tous.

7.2 Discerner et modifier le Règlement au titre de la Loi de 1997 sur le programme Ontario au travail et de la Loi de 1997 sur le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées avant l’entrée en vigueur de la nouvelle législation du programme Ontario au travail pour donner le coup d’envoi à une culture positive axée sur la confiance, la collaboration et la résolution de problèmes et renforcer celle-ci.

7.3 Donner aux Premières Nations l’occasion de concevoir et d’instaurer leurs propres modèles communautaires d’aide au revenu en vertu de la législation provinciale.

Il est possible de donner le coup d’envoi à une culture positive axée sur la confiance, la collaboration et la résolution de problèmes par la modification des règlements qui occasionnent des obstacles supplémentaires et renforcent l’idée négative selon laquelle les personnes dans le besoin doivent faire l’objet d’une surveillance étroite afin qu’elles ne « profitent » pas des programmes. Voici trois exemples à ce chapitre :

  • La règle qui donne aux travailleurs de première ligne le pouvoir de dénombrer les ressources auxquelles une personne a potentiellement accès pour réduire l’aide à cette dernière ou la rendre inadmissible à celle-ci s’ils n’ont pas acquis la conviction que de justes efforts sont déployés.
  • La règle qui empêche une personne célibataire aux études postsecondaires de toucher des prestations du programme Ontario au travail, même si elle n’a pas droit à l’aide financière aux étudiants.
  • La règle qui affirme que la direction « doit » annuler les prestations s’il y a défaut de conformité à une condition d’admissibilité.

Une culture axée sur la confiance, la collaboration et la résolution des problèmes

Recommandation 8 : Instaurer une philosophie de service aux prestataires du programme Ontario au travail et du POSPH propice à une culture axée sur la confiance, la collaboration et la résolution de problèmes en priorité, compte tenu des traumatismes vécus, et qui débouche sur une bonne qualité de vie pour les personnes de toutes les communautés, y compris les Autochtones.

Les gens ont besoin de sentir qu’ils disposent de choix personnels dans leur vie, que leurs aptitudes sont respectées et mises à contribution. Nous devons demander aux gens qui font leur entrée « dans le système » ce qu’ils ont besoin d’apprendre, selon eux, pour être autonomes, puis [leur] apporter une aide à propos de ces éléments làfootnote 79.

Les services doivent être conçus de façon à soutenir les gens dans la découverte de solutions et la reconnaissance du traumatisme suscité par la pauvreté, les répercussions du préjudice subi historiquement, la réalité de l’instabilité de l’emploi ainsi que l’importance d’un soutien précoce, actif et axé sur la collaboration.

« Personne ne souhaite vous connaître, vous ne pouvez chercher un emploi, vous ne pouvez obtenir un appartement, et vous n’avez pas toujours l’air en bonne santé ou en bonne forme. En règle générale, les gens ne veulent rien savoir de vous. Ils voient en vous l’itinérance. Ils voient quelque chose de brisé. C’est tout ce qu’ils voient : une personne dont le destin est brisé ».

- Jason, un célibataire qui a vécu (avec son chat Garfield) l’itinérance après son retour en Ontario à la suite de perspectives d’emploi infructueuses
(dans l’Ouest canadien)footnote 80.

Pour y arriver, l’Ontario doit se doter d’un système de sécurité du revenu qui accorde la priorité aux personnes : un système dans lequel les services sont expressément conçus pour faciliter l’accès à l’aide financière, ainsi qu’à un personnel bien renseigné et bien formé. Ce système ne doit pas comporter de règles qui reposent sur des notions erronées ou dépassées quant aux motivations de ceux qui ont perdu leur emploi, font face à une crise, ou vivent depuis longtemps et profondément la pauvreté, la discrimination et la stigmatisation. Tant les personnes qui ont accès aux services que celles travaillent avec elles chaque jour doivent bénéficier d’un soutien par des démarches positives et concrètes dans la conception et la prestation des programmes. Le tout doit se traduire au bout du compte par une culture axée sur la confiance, la collaboration et la résolution de problèmes.

Aux yeux des communautés autochtones en milieu urbain, parvenir à une culture axée sur la confiance, la collaboration et la résolution de problèmes signifie établir des liens significatifs dans le respect du vécu et de la manière d’être des Autochtones. Cet élément se situe au cœur de l’inclusion : une assise importante à partir de laquelle des mesures vigoureuses en vue de la réconciliation peuvent être prises. Dans l’inclusion en vue de la réconciliation, il faut également admettre l’histoire et la culture exceptionnelles des Autochtones et la diversité entre communautés. L’inclusion exige du gouvernement qu’il élabore des politiques et programmes adaptés en fonction des priorités des communautés autochtones en milieu urbain pour faire en sorte que le point de vue de ces communautés soit entendu et que le système en témoigne. Une telle conception de l’inclusion est cruciale dans l’établissement de liens respectueux et significatifs avec les Autochtones. De cette façon, les communautés autochtones en milieu urbain, le gouvernement et les fournisseurs de services peuvent s’investir dans des liens davantage axés sur la collaboration et qui tendent vers une amélioration de la qualité de vie des membres des communautés au moyen de la réconciliation.

Aux yeux des communautés des Premières Nations, le besoin d’instaurer de nouveaux modèles fondés sur la culture et l’auto-identification permettra de restaurer un sentiment de fierté et d’acceptation de soi, de sorte que les personnes des Premières Nations se sentiront de nouveau fières de ce qu’elles sont en attaquant la stigmatisation et en supprimant les politiques publiques discriminatoires.

L’accès à l’aide sociale ne doit pas être perçu comme un échec personnel. Il ne doit être ni source de frustration, ni source de stigmatisation, ni difficile au point où le simple fait de demander de l’aide devient en soi un emploi à temps plein.

Les travailleurs de première ligne sont les premiers à affirmer que le temps et l’énergie qu’ils consacrent sont orientés par les règles punitives qu’ils sont tenus d’appliquer. La réorientation de cette idée actuellement maîtresse leur permettra d’axer leurs efforts sur le retrait des obstacles à l’inclusion sociale et économique et l’établissement d’un lien axé sur la confiance et nécessaire au soutien d’une amélioration des résultats obtenus par les gens.

En réalité, les personnes ayant accès au programme Ontario au travail et au POSPH sont confrontées à de nombreux obstacles considérables à l’inclusion sociale et économique, dont la toxicomanie, la violence, les problèmes de santé mentale, ou les difficultés vécues par les jeunes adultes qui effectuent une transition à partir de programmes destinés aux enfants et aux jeunes.

L’expérience vécue récemment en lien avec des demandes de prestation d’invalidité dans le secteur privé révèle qu’une démarche axée sur la mobilisation et la résolution de problèmes et qui adopte une optique élargie est plus bénéfique qu’une démarche axée essentiellement sur l’admissibilité aux prestations en lien avec les demandes. La première démarche comporte deux composantes clés. D’une part, elle consiste en une intervention rapide pour raffermir rapidement la perception de soi de la personne en tant que particulier autonome qui participe au marché du travail. D’autre part, elle consiste à mobiliser le particulier dans la planification et la résolution active des problèmes pour chaque difficulté qui peut constituer un obstacle au travail. Il s’agit ici de bâtir la confiance de la personne par la concrétisation de progrès vers des objectifs concrets. Cette démarche s’appuie sur le contact continu entre l’employeur et l’employé, une pratique fortement recommandée par l’Institut de recherche sur le travail et la santé, entre autresfootnote 81 . Cette démarche s’est traduite par des absences pour cause d’incapacité qui sont de 15 % à 40 % plus courtes que dans les démarches où l’intervention est instaurée tardivement, est axée dans une moindre mesure sur la collaboration, et porte étroitement sur les seuls enjeux médicaux et fonctionnels. L’expérience dans le secteur privé a été menée auprès de personnes récemment employées, mais elle peut se révéler instructive pour aider les gens à demeurer confiants et mobilisés dans l’atteinte de leurs objectifs dans le cadre d’une transformation de la culture de l’aide sociale.

Les principes sous-jacents à cette démarche peuvent éclairer le mode de focalisation des services dans le programme Ontario au travail et le POSPH. Au bout du compte, il faut en arriver à une expérience commune, positive et offrant un soutien, quelle que soit la voie d’accès que la personne emprunte en premier lieu : autrement dit, le résultat final consistera en une seule perception de la « gestion des clients » dans les deux programmes.

Le fait de consentir une certaine marge de manœuvre permettant aux particuliers de se consacrer à des objectifs axés sur l’innovation ou l’entrepreneuriat dans leur plan forme une partie importante de la progression à l’aide de cette démarche. Les collaborateurs de cas doivent être en mesure de soutenir les groupes de particuliers qui, de façon éclairée, choisissent de lancer une nouvelle entreprise ou un autre projet dans le cadre de leurs objectifs de vie et d’emploi, une idée qui n’est pas facilement accueillie à l’heure actuelle. Des changements à la réglementation et à l’orientation sont nécessaires pour soutenir clairement de tels choix.

La conception des outils, des ressources et du perfectionnement professionnel propices au soutien doit se faire en collaboration avec des experts, notamment des personnes ayant du vécu pour garantir leur caractère inclusif et significatif dans la mesure du possible auprès de ceux ayant vécu diverses expériences. Cette mesure englobe le travail auprès de partenaires autochtones pour tenir compte du vécu exceptionnel des Autochtones et inclure celui-ci, ainsi que des experts dans les domaines de la représentation juridique, de la violence et des mauvais traitements en milieu familial, de la santé mentale et de la toxicomanie.

Soutenir les gens pour en arriver à des résultats améliorés signifie intégrer une nouvelle démarche personnalisée au système qui s’appuie sur trois piliers d’interaction aux répercussions élevées : la confiance; l’évaluation globale des besoins; la responsabilité partagée.

En réalité, lorsque les gens se mettent en contact avec des programmes comme l’aide sociale pour la première fois, ils ont vraisemblablement vécu un traumatisme de quelque nature que ce soit. Toute prise de contact qui n’est pas positive cause un préjudice. De plus, plus le soutien actif tarde à se concrétiser, plus la situation des gens se détériore.

Essentiellement, il est crucial de changer la culture actuelle en faveur d’une transformation générale de l’aide sociale et de son mode de fonctionnement pour aider concrètement les gens. Le point de départ doit être une évaluation initiale complète, à l’aide d’une optique sensible aux traumatismes, et enrichie si nécessaire des renseignements de professionnels de la santé qui permettront de discerner les forces, les besoins et les obstacles le plus tôt possible. Cette évaluation fait partie intégrante de l’élaboration d’un plan de soutien clair, réaliste et axé sur les besoins les plus immédiats de la personne, comme trouver un logement, échapper à un milieu non sécuritaire, ou obtenir un traitement crucial en lien avec la santé mentale ou la toxicomanie. De plus, elle peut mettre les gens sur la voie la plus appropriée dès que possible, notamment par une aide constante et efficace dans la mise en application du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées.

L’instauration d’un milieu où les travailleurs de première ligne soutiennent les particuliers dans la création d’un plan tangible qui tient compte des objectifs personnels et favorise l’autonomie comporte de nombreux avantages. Il en résulte une hausse de l’utilisation productive du temps du personnel, une satisfaction accrue envers l’emploi, et une amélioration des résultats chez les particuliers et les familles. L’élément clé de ce milieu positif se trouve dans un processus solide et rapide d’aiguillage, de façon à ce que les particuliers puissent accéder aux soutiens dont ils ont besoin pour concrétiser leur plan.

Cette réorientation culturelle fondamentale ne peut-être réussie que si les conditions suivantes sont remplies :

  • Le cadre législatif est modifié en vue d’avaliser, de soutenir et d’exiger le changement, dont la définition d’un rôle clair pour aider les gens à concrétiser leurs grands objectifs d’inclusion sociale.
  • Les personnes sont en mesure d’accéder aux services et soutiens à un endroit où elles se sentent en sécurité et à l’aise, de même qu’entendues et comprises par un personnel sensible aux divers antécédents et vécus qui leur sont propres. En ce qui touche les Autochtones, cet élément doit signifier la capacité d’accéder aux soutiens à l’endroit de leur choix, que ce soit au sein de la communauté des Premières Nations, dans un centre d’amitié autochtone local ou dans d’autres organismes autochtones qui proposent une gamme de services et soutiens mis en lien et pertinents sur le plan culturel.
  • Les sanctions financières, qui se sont révélées inefficaces et contreproductives, sont éliminées, pendant que les politiques qui causent des obstacles à la sécurité et au mieux-être sont modifiées.

Actuellement, il existe plusieurs sanctions financières qui peuvent s’appliquer à un particulier. En ce moment, une condition d’admissibilité au programme Ontario au travail et, pour les personnes non handicapées, aux prestations du POSPH consiste en l’élaboration d’une « entente de participation » décrivant les activités qui seront menées pour être aptes à l’emploi ou trouver du travail. Si le particulier ne signe pas une entente de participation, ou s’il ne respecte pas les engagements contenus dans celui-ci, l’aide risque d’être suspendue, réduite ou annulée. Des sanctions du même ordre peuvent être appliquées lorsque la personne ne fournit pas un renseignement spécifique dans un nombre de jours définis, peu importe si ce renseignement est d’une importance véritablement cruciale. Lorsque les travailleurs de première ligne mettent souvent fin à ces infractions automatisées ou prennent des mesures pour joindre les personnes afin d’examiner ce qui se passe, il faut mettre en place une attente de service raffermie et davantage cohérente, et qui témoigne des pratiques exemplaires actuelles dans l’obligation de prendre des mesures d’adaptation. Les sanctions reposent sur un renforcement négatif, qui se révèle inefficace et contreproductif, mène fréquemment vers le stress et l’anxiété, et occasionne un risque réel d’enfoncer davantage les gens dans la pauvreté.

Actuellement, il existe des règles dans le programme Ontario au travail et le POSPH qui minent la sécurité, l’autonomie et le mieux-être des particuliers, pour les exposer à la vulnérabilité et au contrôle. Ces règles peuvent notamment toucher les parents qui tentent de reprendre la garde de leurs enfants confiés à une société d’aide à l’enfance, ou une femme qui tente d’échapper à la violence au foyer et qui touche des prestations d’aide sociale sous forme de copaiement avec son conjoint. De même, le prestataire du POSPH qui nécessite les services d’un curateur risque davantage d’être exposé à des mauvais traitements (d’ordre financier, physique, émotif, etc.) s’il n’y a pas de freins et contrepoids appropriés afin d’évaluer la pertinence du curateur.

Il faut procéder à l’analyse des politiques pour faire en sorte que celles-ci n’augmentent pas la vulnérabilité, ni ne compromettent la sécurité des femmes qui fuient la violence, des enfants, des personnes handicapées, des Autochtones, et des autres personnes qui accèdent au système en vue d’obtenir du soutien.

  • Des évaluations globales sont menées et se traduisent par des plans qui témoignent d’objectifs réalisables et définis par les particuliers, en collaboration avec leur travailleur de première ligne.
  • Il existe des attentes claires de rendement pour les travailleurs de première ligne, ainsi qu’un processus transparent par lequel les particuliers peuvent soulever des préoccupations.
  • Des investissements sont consentis pour accroître le nombre de travailleurs de première ligne et ces derniers reçoivent à intervalles réguliers et de façon continue des occasions de perfectionnement professionnel en lien avec leur emploi. Ce perfectionnement professionnel englobe l’obtention des connaissances, des aptitudes, des outils et des ressources qui conviennent pour effectuer des évaluations significatives, l’élaboration de plans de soutien personnalisé en collaboration, et l’exercice de pouvoirs discrétionnaires
    avec discernement.
  • Des mesures concrètes sont prises pour alléger le fardeau administratif des travailleurs de première ligne et des personnes qui réclament de l’aide, de façon à pouvoir consacrer davantage de temps à établir et à forger un lien positif axé sur la collaboration. Pour obtenir davantage de temps, il faut :
    • une structure simplifiée d’aide sociale qui diminue considérablement les exigences de déclaration, ce qui se traduit par un nombre moindre de règles que le personnel doit assimiler, mettre en application et surveiller et à propos desquelles les particuliers et familles doivent s’inquiéter et donner suite;
    • une démarche axée sur la collaboration qui ne s’appuie pas sur les sanctions financières pour imposer des normes de comportement, ni ne mine la capacité des travailleurs de première ligne à concevoir un plan personnalisé;
    • une prestation modernisée et un nombre accru de services en ligne conviviaux, sans oublier le fait que les solutions technologiques doivent s’inscrire directement dans le nouveau paradigme et que ces solutions ne fonctionneront pas dans chaque cas;
    • une démarche différente envers l’intégrité et la responsabilisation des programmes qui portent sur les risques à l’échelle du système plutôt que la « surveillance » à l’échelle individuelle.
  • La nouvelle démarche s’appuie sur une responsabilisation claire et raisonnable, compte tenu de la conception selon laquelle les particuliers dirigent leurs propres plans, aidés et soutenus par leurs travailleurs de première ligne. De concert avec les autres changements nécessaires à la réorientation de la culture, les travailleurs de première ligne observeront la nouvelle démarche de planification et d’évaluation puis établiront des liens avec les ressources requises. En collaboration avec leurs travailleurs de première ligne, les particuliers discerneront les éléments de leur plan et les mesures pour les concrétiser.

Recommandations détaillées

8.1 Demander aux travailleurs de première ligne d’agir comme collaborateurs de cas, ayant pour rôle principal de régler les problèmes dans un esprit coopératif et de cheminer dans les services avec humanité, de telle sorte que les personnes pourront communiquer de l’information sans crainte de représailles. Ce rôle englobe le travail auprès des particuliers dans un cadre individuel ou collectif.

8.2 Instaurer un outil d’évaluation complet pour discerner les besoins et les obstacles en matière d’inclusion sociale et économique, au moyen d’une démarche sensible à l’équité et aux traumatismes afin de mettre les personnes en lien avec les soutiens appropriés.

8.3 Se servir de projets pilotes pour mettre à l’essai l’outil d’évaluation complet et le rôle de collaborateur de cas, compte tenu avant tout des personnes qui cherchent à accéder au POSPH au moyen du programme Ontario au travail, des prestataires d’aide sociale à long terme, des jeunes et des personnes handicapées.

8.4 Éliminer les sanctions financières et d’admissibilité en lien avec les efforts de recherche d’emploi et les exigences rigides de déclaration afin d’appuyer une nouvelle démarche axée sur la personne, de promouvoir la confiance et le respect entre travailleurs de première ligne et demandeurs d’aide, et de privilégier avant tout la résolution de problèmes et le traitement des besoins urgents en premier lieu (p. ex., le risque d’itinérance). Cette démarche englobe l’examen des politiques qui font obstacle à la sécurité et au mieux-être (p. ex., fuir un domicile non sécuritaire).

8.5 Voir à ce que les travailleurs de première ligne aient les aptitudes et connaissances nécessaires pour faire fonction de collaborateurs de cas par les moyens suivants :

  • l’apprentissage et le perfectionnement professionnel obligatoire, dont les aptitudes en travail social
    (c.-à-d. l’action contre le racisme, le perfectionnement professionnel contemporain et la pratique anti-oppressive); ainsi qu’une formation liée à la sécurité culturelle et à la sensibilisation des Autochtones;
  • des normes et mesures de contrôle de la qualité établies et régies par le gouvernement provincial, en lien avec les plans de rendement du personnel.

8.6 Mettre en place fréquemment des collaborateurs de cas du programme Ontario au travail et du POSPH dans les bureaux de prestation de services aux Autochtones afin de rehausser la sensibilisation et la compréhension culturelles et d’appuyer l’amélioration des rapports entre organismes.

8.7 Reconnaître clairement le droit des Autochtones de choisir le lieu qu’ils préfèrent pour obtenir des services.

8.8 Faire en sorte que la dotation, tous niveaux confondus, témoigne de la diversité de l’Ontario, et modéliser des bureaux vraiment propices à l’inclusion, qui sont accueillants et reflètent la multitude des cultures et communautés servies en Ontario, dont la diversité au sein des communautés autochtones et entre celles-ci.

8.9 Revoir et rajuster continuellement la philosophie de service, le perfectionnement professionnel, de même que les outils et ressources en fonction de la rétroaction reçue des partenaires et des gens qui ont accès aux programmes.

8.10 Instituer un programme conçu et mis en œuvre par les Premières Nations, fondé sur l’auto-identification, la conscience de leur propre valeur et un véritable esprit de réconciliation, et qui débouche sur la stabilisation de la vie.

8.11 Procéder à des analyses des politiques et services actuels ou proposés afin que ceux-ci n’occasionnent pas de vulnérabilité et qu’ils ne fragilisent pas la sécurité des personnes qui reçoivent de l’aide. Cette démarche doit englober une analyse culturelle et comparative entre les sexes pour garantir la sécurité des femmes autochtones.

Soutenir les personnes handicapées

Recommandation 9 : Maintenir et raffermir le POSPH comme programme distinct pour les personnes handicapées. Voir à ce que le POSPH et le programme Ontario au travail soient bien outillés pour soutenir les personnes handicapées dans l’atteinte d’objectifs individuels en vue de l’inclusion sociale et économique.

Au fur et à mesure que changent les concepts à propos de l’invalidité, la difficulté consiste à faire évoluer les programmes de soutien du revenu en fonction des personnes handicapées en Ontario, y compris au sein des communautés des Premières Nations, en adéquation avec la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées : faire la promotion d’un niveau de vie suffisant et de l’inclusion sociale et économique complète et, parallèlement, prendre conscience des obstacles comportementaux et environnementaux continus à la participation en tant que membres égaux de la société.

« Les États Parties reconnaissent le droit des personnes handicapées à un niveau de vie adéquat pour elles-mêmes et pour leurs familles, notamment une alimentation, un habillement et un logement adéquats, et à une amélioration constante de leurs conditions de vie, et prennent des mesures appropriées pour protéger et promouvoir l’exercice de ce droit sans discrimination fondée sur le handicap. »

~ Article 28 de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapéesfootnote 82

La majorité des ménages où se trouvent des prestataires de l’aide sociale comportent une personne handicapée ou plus. Par définition, tout prestataire du POSPH présente une importante déficience physique ou mentale. De nombreux prestataires du programme Ontario au travail ont également des invalidités. De fait, la plupart des prestataires du POSPH sont d’abord passés par le programme Ontario au travail. La réorientation vers une culture axée sur la confiance, la collaboration et la résolution de problèmes, telle qu’elle est envisagée dans les deux sections précédentes de la feuille de route, contribuera à discerner dès les premiers stades les problèmes liés à l’invalidité et à apporter un soutien adapté, quelle que soit la voie empruntée par les personnes pour accéder à l’aide sociale.

Nous constatons que le POSPH comporte de nombreuses composantes positives, notamment dans sa définition de l’invalidité. Des difficultés sont toutefois présentes dans l’obtention de l’accès au programme, le niveau et le type de soutien continu aux clients, de même que la vérification et les règles des besoins de l’admissibilité financière.

Un programme distinct pour les personnes handicapées

Les personnes handicapées font souvent face à des obstacles à vie. Selon la nature de leur invalidité, elles pourront s’intégrer au marché du travail et en sortir

à différents moments, ou ne pas être en mesugrre de travailler du tout. Tant et aussi longtemps que les soutiens du revenu pour personnes handicapées ne sont pas pleinement comblés par les programmes fédéraux, les régimes du secteur privé ou les programmes de prévention des blessures en milieu de travail financés par les employeurs, le besoin d’un programme de soutien du revenu distinct se fera sentir en Ontario. Pour de nombreuses personnes, tout particulièrement celles chez qui l’invalidité est innée ou apparue au début de leur vie, il s’agit de leur « premier recours » de soutien du revenu.

Pour enlever l’obstacle administratif et voir à ce que les prestataires du POSPH chez les Premières Nations ne subissent pas de retards à leur calendrier de déclaration et de versement, il y a lieu d’envisager en définitive le fait d’autoriser les Premières Nations à gérer le POSPH sur leurs propres terres et à en assurer la prestation. Les personnes des Premières Nations sont considérablement sous-représentées dans le POSPH, parce que ce programme est difficile d’accès et qu’il n’est pas offert par le personnel local. La gestion et l’administration à l’échelle locale sont des éléments cruciaux pour surmonter les obstacles en question.

Définition des personnes handicapées

La définition de « personnes handicapées » dans la Loi de 1997 sur le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées s’applique bien. Cette définition tient compte de l’invalidité en fonction de la personne dans son intégralité. Il est constaté dans cette définition que les personnes handicapées souhaitent travailler et sont peut-être en mesure de le faire, à l’aide d’un soutien, et que la capacité de travailler n’est pas forcément liée à la gravité apparente de l’invalidité. Cette définition présente également l’avantage d’être bien conçue, son interprétation par la jurisprudence s’étendant sur vingt ans.

Personnes handicapées

4 (1) Est une personne handicapée pour l’application de la présente partie la personne qui satisfait aux conditions suivantes :

(a) elle a une déficience physique ou mentale importante qui est continue ou récurrente et dont la durée prévue est d’au moins un an;

(b) effet direct et cumulatif de la déficience sur la capacité de la personne de prendre soin d’elle-même, de fonctionner dans la collectivité et de fonctionner dans un lieu de travail se traduit par une limitation importante d’une ou de plusieurs de ces activités de la vie quotidienne;

(c) cette déficience et sa durée probable ainsi que les limites des activités de la vie quotidienne ont été confirmées par une personne qui a les qualités prescrites. 1997, chap. 25, annexe B, par. 4(1).

~ Loi de 1997 sur le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées

Processus de présentation d’une demande au POSPH

Pour de nombreuses personnes vulnérables, le processus de présentation d’une demande au POSPH constitue un obstacle à l’accès. Il faut simplifier le processus et donner du soutien aux gens qui cheminent dans celui-ci.

À notre sens, il incombe au gouvernement de voir à ce que les demandeurs obtiennent le soutien et les mesures d’accommodement dont ils peuvent avoir besoin pour cheminer dans le processus de présentation d’une demande au POSPH. Nous reconnaissons le fait que de nombreux groupes communautaires soient intervenus pour fournir ce service. De tels efforts sont louables et ont une place dans le tissu communautaire, mais une seule démarche à l’échelle locale peut vouloir dire que les particuliers de certaines régions en Ontario risquent de ne pas bénéficier du même niveau d’accès.

Nous invitons le MSSC à continuer d’élaborer avec les intervenants (dont ceux qui ont fait l’expérience de l’invalidité et du POSPH, les professionnels de la santé, et les porte-parole) afin que le processus de présentation d’une demande et d’évaluation de l’admissibilité au soutien à l’invalidité soit simple et rationnalisé dans la mesure du possible, et que les particuliers aient des mesures d’accommodement dans ce processus. Le Groupe de travail sur la détermination de l’admissibilité des personnes handicapéesfootnote 83 est bien placé pour prendre en considération les secteurs discernés en vue d’une amélioration quant à la détermination de l’admissibilité au POSPH, et nous proposons de faire intervenir également les chargés de cas du programme Ontario au travail et du POSPH. Les secteurs prioritaires sont les suivants :

  • Augmenter la transparence du processus de détermination de l’admissibilité.
  • Rehausser la qualité des prises de décisions par une amélioration de l’embauche, de la formation et des processus internes;
  • Garantir un accès équitable aux Autochtones.
  • Examiner les processus administratifs et juridiques.

Le fait de rehausser la qualité du processus de détermination de l’admissibilité présentera également l’avantage de réduire le nombre d’appels interjetés superflus.

Actuellement, l’examen médical constitue un mécanisme en place pour déterminer si les personnes prestataires du POSPH en raison d’un état de santé qui est susceptible de s’améliorer dans un délai déterminé montrent des signes concrets d’amélioration ou s’ils demeurent admissibles. Le MSSC, en collaboration avec le Groupe de travail sur la détermination de l’admissibilité des personnes handicapées, a récemment simplifié le processus d’examen médical par l’instauration d’un nouveau formulaire qui sera plus facile à remplir par les prestataires du POSPH et les professionnels de la santé. Voilà une mesure positive dans l’amélioration du processus d’examen médical.

Soutien d’un chargé de cas

Le programme Ontario au travail englobe de nombreuses personnes handicapées, dont certaines qui feront ou non la transition vers le POSPH. Il est essentiel que le POSPH et le programme Ontario au travail soient bien outillés pour soutenir les personnes handicapées et leur fournir des mesures d’accommodement. Le cadre législatif proposé et la modification de l’image de marque du programme Ontario au travail refléteront le principe selon lequel toute personne qui se présente – que ce soit pour une aide à court terme ou pour une aide en vue de bénéficier du soutien à long terme en vertu du POSPH – doit avoir accès aux services complets globaux dont elle a besoin.

La démarche de gestion de cas axée sur la personne et dans un esprit coopératif, laquelle fait partie du changement de culture proposé, est d’une importance cruciale dans les deux programmes. Par exemple, en ce qui touche le POSPH, de nombreuses personnes ont actuellement un contact limité avec leur chargé de cas, sauf si elles décident d’amorcer ce contact-là. Cette situation est imputable en grande partie au nombre élevé de dossiers confiés à chaque chargé de cas.

Les personnes handicapées ont des ambitions et des aspirations. Les chargés de cas doivent fournir aux personnes des soutiens pour les aider à concrétiser de telles aspirations. Ces soutiens pourraient englober une aide d’accès aux études postsecondaires, des soutiens à l’emploi, ou un soutien pour s’investir dans des occasions de bénévolat qui mettent les personnes en lien avec leur communauté, que ces activités débouchent ou non sur un emploi.

Recommandations détaillées

9.1 Reconnaître le besoin continu d’un programme distinct de soutien du revenu pour les personnes handicapées.

9.2 Conserver la définition d’invalidité actuellement dans le POSPH.

9.3 Continuer la collaboration avec le Groupe de travail sur la détermination de l’admissibilité des personnes handicapées en vue de simplifier et d’améliorer le processus de présentation de demande et de détermination de l’admissibilité dans le POSPH.

9.4 Fournir à l’échelle provinciale un soutien et des mesures d’accommodement aux personnes qui ont besoin d’aide dans le processus de présentation d’une demande au POSPH, à partir des leçons tirées des groupes communautaires.

9.5 Inclure un examen particulier auprès des partenaires de prestation de services aux Premières Nations et aux Autochtones en milieu urbain afin que le soutien et les mesures d’accommodement témoignent du vécu exceptionnel des Autochtones.

9.6 Veiller à ce que le POSPH et le programme Ontario au travail répondent aux besoins des personnes handicapées dans le cadre d’une démarche axée sur la personne et la collaboration afin de soutenir les aspirations et buts individuels.

Formule de revenu assuré pour les personnes handicapées

Recommandation 10 : Se servir d’un processus inclusif pour concevoir une formule de « revenu assuré » pour les personnes handicapées.

Le POSPH fournit un soutien financier à long terme car de nombreux prestataires, en raison de la nature de leur invalidité, font souvent face à des obstacles à vie par rapport au travail. Toutefois, la démarche adoptée dans les règles d’admissibilité financière qui s’appliquent aux prestataires du POSPH est tout aussi restrictive et punitive que dans le cas du programme Ontario au travail. Le défaut de conformité au réseau complexe de règles d’admissibilité fragilise fréquemment les prestations mensuelles, même dans les cas où le prestataire demeure clairement admissible.

p>Dans un rapport sur la paupérisation de l’invalidité en Ontario, on a relevé « des restrictions draconiennes au niveau d’actifs que les prestataires peuvent obtenir et conserver, des règles strictes selon lesquelles les prestations varient en fonction de la cohabitation et du partage de l’hébergement, un plafond quant au niveau de cadeaux qu’un prestataire peut recevoir, et une retenue à la plupart des autres sources de revenu provenant des prestations à un taux de récupération de 100 %… Chacune de ces règles ajoute à la stigmatisation systématique des prestataires en empêchant ces derniers d’améliorer leur sort par des façons considérées comme acquises (p. ex., épargner, emménager avec quelqu’un pour diminuer les dépenses, ou obtenir l’aide d’un membre de la famille) par la plupart des Canadiens »footnote 84 .

Plutôt que d’avoir le même modèle de vérification des besoins financiers pour les deux programmes, il faut instaurer pour les prestataires du POSPH un modèle de « revenu assuré » qui soit moins restrictif et davantage transparent, et qui permette aux prestataires d’intégrer le marché du travail et d’en sortir en toute sécurité, sans craindre un retard dans le rapprochement du revenu ni la perte de désignation liée à l’invalidité.

Un programme de revenu assuré aux personnes handicapées permettrait de bien refléter les besoins des particuliers, dont un grand nombre font face à des obstacles à vie à l’inclusion sociale et à l’emploi.

Le seul revenu stable ne suffit pas à soutenir la pleine inclusion sociale et économique des personnes. Même au moyen d’une formule de revenu assuré, il sera essentiel que les bénéficiaires continuent de bénéficier d’un accès constant à un collaborateur de cas du POSPH ainsi qu’à un plan de soutien personnalisé pour les aider à les mettre en lien avec les autres services dont ils pourraient avoir besoin. Même une fois atteinte la suffisance du revenu, il y aura des particuliers à qui des coûts extraordinairement élevés seront imposés, ce qui signifie qu’une aide financière supplémentaire doit demeurer accessible en lien avec des besoins tels que les déplacements pour raisons médicales. Cette aide engloberait des soutiens actuellement accessibles au moyen des Prestations obligatoires pour les nécessités spéciales (déplacements pour raisons médicales, fournitures chirurgicales et pour incontinents) ainsi que des soutiens conçus pour favoriser l’atteinte des buts personnels et professionnels des personnes.

Parce que le passage à un modèle de revenu assuré constituera un changement considérable au mode de prestation du soutien financier, il doit être conçu en collaboration avec des personnes ayant une vaste gamme d’invalidités (p. ex., mobilité, douleur chronique, santé mentale, trouble du développement, problème de santé chronique épisodique). Voilà une pratique importante ancrée dans la devise « rien sur nous sans nous » du mouvement de défense des droits des personnes handicapées. Des porte-parole et chargés de cas chevronnés doivent également faire partie du processus de conception en collaboration.

De nombreux porte-parole des personnes handicapées ont recommandé la personnalisation du volet des prestations des soutiens du revenu aux personnes handicapées, sans inclure le revenu du conjoint pour déterminer l’admissibilité. Toutefois, chez certaines familles, une telle mesure risque de se révéler risquée. Le processus de conception en collaboration doit examiner les répercussions du changement du volet des prestations allant de familial à personnalisé sur les personnes handicapées.

Parmi les variables inconnues qui peuvent influer sur le nouveau modèle, il y a l’établissement des coûts, la mise en œuvre réussie des autres éléments de la feuille de route, et les suites données ou non par le gouvernement fédéral aux appels lancés par les parties prenantes des personnes handicapées en faveur de l’instauration d’un programme national de soutien du revenu pour les personnes handicapées.

Les particularités du nouveau mécanisme de revenu assuré en faveur d’un soutien financier dépendront du processus de conception en collaboration, mais nous avons recensé des composantes souhaitables dans les recommandations ci-dessous.

Recommandations détaillées

10.1 Concevoir en collaboration un mécanisme de « revenu assuré » servant à la prestation d’un soutien financier aux personnes conformes à la définition de l’invalidité dans le POSPH. La consultation des personnes des Premières Nations est essentielle.

10.2 Inclure les composantes suivantes dans le mécanisme de revenu assuré :

  • fondé sur le revenu seulement (c.-à-d. pas sur les actifs);
  • le cumul des prestations de revenu pour arriver à
    la suffisance;
  • une définition fiscale du revenu (c.-à-d. sans tenir compte de l’aide financière [sous forme de cadeaux] apportée par la famille ou les amis);
  • la responsabilité continue du gouvernement provincial quant à la détermination de l’invalidité, avec le droit d’interjeter appel au Tribunal de l’aide sociale de l’Ontario;
  • une marge de manœuvre en vue de rajustements selon les variations du revenu au cours de l’année;
  • la garantie de pouvoir réintégrer le programme après avoir occupé un emploi.

10.3 Fournir un revenu assuré initial au moins aussi élevé que le taux forfaitaire normal du POSPH au moment de la transition. Fournir des hausses continues jusqu’à ce que le niveau minimum de revenu soit atteint en combinaison avec d’autres composantes de sécurité du revenu (voir la section Établir un but en vue de la suffisance du revenu).

10.4 Voir à ce que les personnes qui reçoivent le revenu assuré aient pleinement accès aux services et au soutien d’un chargé de cas du POSPH.

10.5 Donner aux Premières Nations la capacité d’appliquer le POSPH et d’en assurer la prestation dans leurs propres communautés, tout comme le programme Ontario au travail.

Une structure d’aide sociale transformée

Structure tarifaire

Recommandation 11 : Transformer la structure tarifaire de l’aide sociale, afin que tous les adultes aient accès à un niveau constant de soutien, quelle que soit leur situation de vie (c.-à-d. locataire, propriétaire, gîte et couvert, sans adresse fixe, domicile en fonction du loyer indexé sur le revenu, centre subventionné par l’État).

La structure actuelle du soutien du revenu et des prestations de l’aide sociale ajoute à la complexité, à la culture axée sur l’intrusion et la « surveillance », et au fardeau que portent les personnes qui cherchent à obtenir de l’aide. Cette structure, qui ne témoigne pas de la façon dont les personnes établissent un budget au quotidien, part du principe que les personnes qui vivent dans la pauvreté n’ont pas droit à des choix, ni à la dignité. Elle permet difficilement à ces personnes de connaître les soutiens offerts, et elle rend onéreuse la prestation performante des programmes par les travailleurs de première ligne.

Les taux de l’aide sociale varient selon le lieu où la personne habite, ceux avec qui elle habite, et ses frais de logement. La personne doit donc fournir continuellement la preuve de ses conditions et frais réels de logement. Elle doit divulguer si elle habite avec des colocataires ou seule, si quelqu’un lui prépare ses repas, et si elle se trouve dans un logement social. Si la personne habite avec quelqu’un qui n’a pas de lien de parenté avec elle, une situation fréquente dans le marché coûteux du logement à l’heure actuelle, elle doit révéler sa contribution au loyer et, après trois mois, les deux risquent d’être considérés comme conjoints à la suite d’une vérification intrusive.

Dans les programmes d’aide sociale actuels, on juge que les personnes vivent en couple après seulement trois mois, sur la base de questions intrusives à propos de leurs liens personnels et financiers. Non seulement ce principe semble-t-il déphasé par rapport au partage des coûts qui a souvent lieu entre colocataires, mais il engendre des obstacles injustes pour les personnes à faible revenu qui entament une relation intime parce que ces dernières risquent de ne plus avoir droit à l’aide et de dépendre complètement du (ou de la) partenaire. Cette éventualité est particulièrement injuste pour les personnes handicapées, car elle risque de les empêcher de bénéficier de leur propre autonomie personnelle.

La personne qui n’assume pas de coûts de logement parce qu’elle est sans abri ou qu’elle vit temporairement chez des amis ou la famille n’obtient pas de soutien lié aux frais de logement, ce qui complique passablement pour elle l’obtention d’un logement tout court. L’adulte qui choisit de vivre avec ses parents doit passer par un test d’« autonomie » qui prête à confusion, porte atteinte aux préférences personnelles liées à l’unité familiale et part du principe qu’il existe d’autres options de logement dans la communauté, ce qui pose particulièrement problème chez les communautés des Premières Nations et dans les collectivités en milieu rural ou éloigné.

La simplification de la structure tarifaire du programme Ontario au travail et du POSPH présentera de nombreux avantages transformationnels :

  • Elle permettra d’accroître l’équité et la suffisance du revenu chez certaines des personnes les plus vulnérables, comme celles sans adresse fixe.
  • Elle procurera au personnel de première ligne davantage de temps à consacrer à l’établissement de rapports positifs avec les particuliers pour les aider à régler les problèmes et à se mettre en lien avec les soutiens dont ils ont besoin.
  • Elle réduira le caractère intrusif et complexe des règles actuelles aux termes desquelles les personnes doivent, par exemple, prouver la part du loyer qu’elles assument chaque mois.

Cette structure de taux forfaitaire s’appliquera à tous les adultes, assortie d’un taux forfaitaire normal supérieur pour les personnes handicapées, y compris sans s’y limiter les locataires du marché privé, les adultes qui vivent dans un logement social ou qui ont des conditions de subsistance, les propriétaires de leur domicile, ou ceux sans adresse fixe.

Les adultes non handicapés qui habitent chez leurs parents et sont prestataires de l’aide sociale pourront désormais être admissibles de plein droit sans devoir prouver leur autonomie financière après 24 ans, tandis que les 18-24 ans recevront un taux forfaitaire pour personne à charge qui reconnaît les économies d’échelle pour les jeunes qui habitent le domicile familial.

Les couples considérés comme conjoints auront droit à un taux 1,5 fois plus élevé que le taux forfaitaire normal pertinent. Les couples seront considérés comme des conjoints après avoir vécu ensemble durant au moins trois ans (conformément à la Loi sur le droit de la famille) à moins qu’ils soient mariés ou qu’ils se déclarent volontairement comme conjoints. Voilà un cadre plus réaliste pour déterminer une relation maritale, le partage des ressources et les obligations de soutien que la période actuelle de trois mois. Sauf si l’état civil des conjoints est confirmé, deux personnes qui habitent la même résidence seront considérées comme deux célibataires.

Le passage à une structure de taux forfaitaire se traduira par l’élimination des échelles de loyer actuellement utilisées pour les prestataires de l’aide sociale et ceux qui habitent un logement avec loyer indexé sur le revenu (LIR). Les particuliers dans un logement avec LIR feront l’objet d’un taux forfaitaire normal ou d’un taux forfaitaire normal pour couples. Les prestataires de l’aide sociale qui habitent un logement avec LIR verseront 30 % de leur revenu, dont le revenu tiré de l’aide sociale, à leur loyer pour harmoniser le paiement du loyer avec celui des locataires qui ne sont pas prestataires de l’aide sociale.

Chez certains particuliers, nommément ceux qui touchent l’allocation au titre du gîte et du couvert ou qui sont sans adresse fixe, le passage à un taux forfaitaire se traduira par une hausse immédiate et considérable de leur revenu mensuel. Par exemple, à partir des taux d’aide sociale de 2017, en ce qui concerne un particulier qui touche des allocations au titre du gîte et couvert, son revenu augmentera pour passer d’un maximum de 594 $/mois avec l’aide sociale à 721 $/mois. Chez le particulier sans adresse fixe, le revenu s’accroîtra pour passer de 337 $/mois à 721 $/mois. Voilà une réorientation cruciale qui, de même que la simplicité découlant de la transformation de la structure tarifaire, compte parmi les raisons pour lesquelles ce changement doit être instauré immédiatement. Toutefois, il importe également que cette hausse de revenu soit accompagnée d’une offre active de soutien pour mettre les personnes en lien avec le logement, les programmes d’autonomisation financière, les soutiens à l’établissement d’un budget personnel, le counseling et les autres services et soutiens dont elles pourront avoir besoin pour tirer le plus grand parti de ce changement transformationnel. Par exemple, des programmes tels que le programme d’autonomisation financière et de résolution de problèmes (FEPS) fournissent aux personnes à faible revenu une éducation financière, la défense de leurs droits ainsi que des services comme la production de déclaration de revenus et l’établissement d’un budget dans leur collectivité, pendant que certaines municipalités outillent les travailleurs du logement social pour leur permettre d’instruire les particuliers à propos des droits et responsabilités des locataires.

Recommandations détaillées

11.1 Transformer la structure tarifaire de l’aide sociale comme suit :

  • les adultes célibataires reçoivent un taux forfaitaire normal dans lequel les besoins de base et le logement ne sont pas différenciés;
  • les couples reçoivent un taux forfaitaire normal pour couples qui est 1,5 fois plus élevé que le taux forfaitaire normal;
  • étant donné l’augmentation du coût de la vie qu’occasionne une invalidité, les adultes célibataires ayant une invalidité reçoivent un taux forfaitaire normal supérieur – invalidité pendant que les couples reçoivent un taux forfaitaire normal pour couples – invalidité qui est 1,5 fois plus élevé que le taux forfaitaire normal – invalidité. Les enfants d’âge adulte de 18 à 24 ans (sans invalidité) qui habitent chez leurs parents prestataires de l’aide sociale reçoivent un taux forfaitaire pour personne à charge (75 % du taux forfaitaire normal pour la première personne à charge et 35 % pour chaque personne à charge subséquente). Les enfants d’âge adulte de 24 ans et plus non handicapés et qui habitent chez leurs parents reçoivent le taux forfaitaire normal complet. Les personnes handicapées continuent d’être admissibles de plein droit au POSPH à 18 ans.

11.2 Harmoniser la définition de conjoint aux termes de l’aide sociale avec la Loi sur le droit de la famille (c.-à-d. considérés comme conjoint après trois ans).

11.3 Dans le passage à une structure de taux forfaitaire normal, éliminer les échelles de loyer actuellement utilisées pour les prestataires de l’aide sociale. Exiger des gestionnaires des services municipaux de logement qu’ils investissent les revenus accrus tirés de l’élimination des échelles de loyer indexé sur le revenu (en raison de la transformation de la structure tarifaire) dans des mesures prioritaires locales de logement et d’aide aux sans-abri.

Soutenir les objectifs d’emploi

Recommandation 12 : Améliorer les règles de l’aide sociale et reconcevoir les prestations afin que les personnes puissent se consacrer facilement à leurs objectifs d’emploi et réaliser les avantages que procure le travail.

Le passage d’une culture d’aide sociale à une culture axée sur la confiance, la collaboration et la résolution de problèmes, de même que la transformation de la structure tarifaire qui donnera aux travailleurs de première ligne du temps pour jouer le rôle de collaborateurs de cas et de navigateurs dans les services avec humanité, y compris auprès des groupes de particuliers, sont d’une importance cruciale pour soutenir l’amélioration de la qualité de vie.

Un soutien personnalisé et un système continu de services d’emploi et de formation jouent un rôle fondamental pour aider les particuliers à recenser leurs objectifs et à tirer parti de leurs forces et de leurs actifs pour y parvenir. Déjà, le travail est en cours afin d’améliorer l’intégration des services d’emploi et de formation et de rehausser la façon dont les programmes s’agencent avec d’autres systèmes, comme celui de l’éducation, afin que les particuliers, notamment les personnes handicapées, puissent faire progresser leur aptitude à l’emploi et réussir sur le marché du travail.

Par exemple, Emploi Ontario travaille à la transformation de ses services d’emploi et de formation. Parmi les mesures en cours, il y a une nouvelle démarche envers les conseils locaux de planification en matière d’emploi, la mise en place du Centre ontarien Innovation Emploi, et la reconception des programmes de formation axés sur les compétences pour bien cibler les lacunes et déséquilibres dans les compétences. À l’échelle locale, les projets tels que le TLR Eglinton Crosstown de Metrolinx n’ont pas manqué de répertorier les avantages communautaires liés au soutien de l’emploi, dont les objectifs d’emploi à l’échelle locale. Des mesures ont également été prises par des initiatives de perfectionnement de la main-d’œuvre pour accroître le caractère inclusif de la main-d’œuvre. Par exemple, Accès aux talents, une stratégie d’emploi récemment lancée pour les personnes handicapées, comporte des mesures visant à accroître les possibilités d’emploi des personnes handicapées et à jumeler les entreprises aux nouveaux talentsfootnote 85 .

Les agents de prestation du programme Ontario au travail chez les Premières Nations ont cherché à obtenir la désignation leur permettant d’assurer la prestation et la gestion des programmes des services d’emploi en lien avec Emploi Ontario, ce qui aidera les membres de leur communauté à accroître leur aptitude à l’emploi, à réussir à obtenir un emploi et à conserver celui-ci.

Globalement, l’objectif de la présente feuille de route ne consiste pas à reproduire en double le travail de transformation des services d’emploi et de formation; celle-ci constate plutôt qu’une aide sociale transformée peut jouer un rôle d’une efficacité accrue afin d’aider les gens à s’orienter vers l’emploi en tant que résultat positif.

Si les particuliers sont, d’entrée de jeu, mis en lien avec les soutiens dont ils ont besoin pour stabiliser leur vie – qu’il s’agisse de trouver un endroit sécuritaire où vivre ou de chercher à obtenir des services de counseling en santé mentale ou en toxicomanie –, ils seront alors à même de réfléchir à leurs aspirations professionnelles et de prendre des mesures pour concrétiser leurs objectifs. Le fait de retirer les règles contreproductives et punitives qui occasionnent du stress, et de permettre aux particuliers de se tailler une place dans le marché du travail les mettra également en bonne posture pour réaliser les avantages que procure le travail au-delà de la gratification financière, lesquels englobent une amélioration de la santé et du mieux-être, une confiance et une estime de soi revigorées, ainsi qu’un sentiment d’appartenance communautaire. Afin d’aider les personnes à se consacrer à leurs objectifs d’emploi, il y a matière à amélioration dans deux autres facettes de l’aide sociale :

  • Actuellement, les prestataires de l’aide sociale doivent cheminer entre de nombreuses prestations relatives à l’emploi qui, chacune, comporte ses propres règles distinctes, bien que l’objet de ces prestations semble le même : fournir un soutien supplémentaire à l’atteinte des objectifs d’emploi. La reconception de ces prestations simplifierait l’obtention d’une aide financière supplémentaire permettant de se consacrer à des possibilités d’emploi ou de formation.
  • Les exemptions de gains ne sont pas mises en application au titre du programme Ontario au travail avant que le particulier n’ait bénéficié de l’aide sociale durant trois mois consécutifs. Cette mesure signifie que les gains réalisés par le particulier au cours des trois premiers mois sont déduits intégralement de ses paiements mensuels. Voilà qui risque de décourager les efforts du particulier pour se trouver un emploi au cours des trois premiers mois de l’aide sociale, ce qui risque par ricochet de compliquer davantage ses efforts afin de retrouver une stabilité et de reprendre confiance en lui. Le raccourcissement de cette période d’attente pour la faire passer de trois mois à un mois permettrait au particulier d’amorcer hâtivement son cheminement vers l’emploi et l’autosuffisance et d’obtenir des résultats améliorés sur le plan personnel.

Recommandations détaillées

12.1 Reconcevoir, par un processus de conception en collaboration, les prestations actuelles en lien avec l’emploi (sauf la Prestation liée à l’emploi du POSPH) en une seule prestation, en tenant compte du caractère obligatoire ou discrétionnaire à donner à la prestation, du niveau de prescription dans les activités que la prestation peut soutenir, et du niveau de soutien fourni pour combler une vaste gamme de besoins; puis mettre la prestation à l’essai avant de la déployer à l’échelle provinciale.

12.2 Faire passer de trois mois à un mois la période d’attente pour l’exemption des gains d’emploi dans le programme Ontario au travail.

12.3 Désigner des agents de prestation des Premières Nations dans le programme Ontario au travail pour assurer la prestation et l’application du programme d’aide à l’emploi d’Emploi Ontario. Cette mesure permettra de bien aider les membres de leur communauté à devenir aptes au travail par une série de prestations et de programmes auxquels ils n’ont pas accès pour diverses raisons. Celles-ci peuvent comprendre, sans s'y limiter, la grande distance les séparant des municipalités ou des centres urbains où se déroulent les programmes d’Emploi Ontario, le manque de services axés sur l’acquisition d’aptitudes au travail dans le programme Ontario au travail, et le retrait récent de programmes d’aide (p. ex., le Fonds pour l’emploi des Premières Nations).

12.4 Soutenir la collaboration aux cas, tant en contexte individuel que collectif.

Revenu et actifs

Recommandation 13 : Moderniser les règles régissant le revenu et les actifs, afin que les personnes puissent optimiser les sources de revenu dont elles disposent et épargner pour l’avenir.

Plusieurs facteurs contribuent actuellement à l’admissibilité à l’aide sociale, notamment le niveau et le type de revenu, le montant et le type d’actifs, de même que la période passée à vivre en compagnie de quelqu’un qui pourrait être considéré comme un « conjoint ».

Être capable d’optimiser la vaste gamme de mesures d’aide au revenu offertes et d’en tirer parti forme une étape importante du cheminement vers la suffisance : depuis trop longtemps nous apprenons des personnes vivant dans la pauvreté que le revenu qu’elles tirent d’une source finit par être « prélevé » par une autre source, de sorte que leur situation ne s’améliore pas. Par exemple, bien qu’il y ait une exemption partielle pour les gains d’emploi, les paiements au titre de l’assurance emploi et du Programme de prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada occasionnent une réduction intégrale du revenu provenant de l’aide sociale.

Les règles des politiques sur les actifs, lesquelles incitent les personnes à dilapider presque toutes leurs épargnes – même celles en vue de la retraite – avant qu’elles puissent être admissibles au soutien sont toutes aussi préjudiciables. Le fait d’être résilient et autonome et d’avoir un coussin de sécurité sur lequel on peut compter contribue grandement à réduire le stress et à favoriser la stabilité.

Dans le budget de 2017, le gouvernement provincial a apporté des changements positifs aux politiques des actifs qui sont entrés en vigueur depuis le mois de septembre 2017 :

Dans le programme Ontario au travail, les plafonds des actifs ont été relevés comme suit :

  • De 2 500 $ à 10 000 $ pour les personnes célibataires.
  • De 5 000 $ à 15 000 $ pour les couples.

Dans le POSPH, les plafonds des actifs ont été relevés comme suit :

  • De 5 000 $ à 40 000 $ pour les personnes célibataires.
  • De 7 500 $ à 50 000 $ pour les couples.

Toutefois, il est possible d’en faire davantage, tout particulièrement dans le soutien et la promotion de moyens de placement à long terme. Au fur et à mesure que les programmes évoluent, la démarche relative à l’épargne et aux avoirs devra être réévaluée.

Recommandations détaillées

13.1 Exempter à titre d’actifs les fonds détenus dans les
comptes d’épargne libre d’impôt et les régimes enregistrés d’épargne-retraite afin que les personnes ne soient pas tenues d’épuiser les ressources destinées à leurs années de retraite.

13.2 Au départ, exempter de l’aide sociale 25 % des versements au titre du Programme de prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada, de l’assurance-emploi et de la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (c.-à-d. l’aide sociale sera réduite de 75 cents pour chaque dollar de revenu provenant de ces sources plutôt que retranchée intégralement).

13.3 Hausser l’exemption du revenu en lien avec le Programme de prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada, l’assurance-emploi et la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail au même niveau que l’exemption de gains actuelle d’ici 2022-2023.

Indemnités et prestations

Recommandation 14 : Garantir l’accès continu aux indemnités et prestations ciblées d’ici à ce que la suffisance soit atteinte. Déterminer les coûts extraordinaires qui demeurent inabordables pour les personnes, même une fois atteinte la suffisance, puis maintenir les prestations s’y rapportant.

À cause de l’insuffisance des taux d’aide sociale, exacerbée par des règles sur le revenu qui nuisent au « cumul » du revenu provenant des nombreuses sources décrites au préalable, il peut-être très difficile pour les gens de trouver un revenu supplémentaire afin de composer avec les autres coûts qu’ils peuvent devoir supporter : que ce soit le coût d’un régime médical nécessaire, de déplacements à intervalles réguliers vers un spécialiste ou un guérisseur traditionnel à l’extérieur de la ville, ou le coût de la vie supérieur dans les régions ontariennes en milieu éloigné, où les biens de première nécessité que sont la nourriture, l’électricité et les matériaux de construction sont considérablement plus onéreux qu’ailleurs dans la province. Au fil du temps, cette situation s’est traduite par la création de prestations supplémentaires pour composer avec des coûts exceptionnels.

Il se peut que l’atteinte de la suffisance dans l’ensemble du système de sécurité du revenu n’atténue pas le rôle joué actuellement par les prestations ciblées. En effet, certaines prestations sont cruciales et doivent être maintenues en permanence ou d’ici à ce qu’une suffisance accrue soit concrétisée. Au fur et à mesure que des progrès sont réalisés vers la suffisance et que les revenus des gens sont bien conçus au moyen d’une mesure ontarienne du panier de consommation, ces soutiens pourront être revus à partir d’une évaluation concrète du besoin continu. Une telle révision doit être menée par des experts, dont des professionnels de la santé et des personnes ayant un vécu.

Par exemple, des rajustements pourront être apportés aux types de situations prises en considération aux termes de l’Allocation pour régime alimentaire spécial, qu’il s’agisse d’ajouter certaines situations à ce programme, d’en retirer d’autres, ou les deux. Le transport pour raisons médicales est également assujetti à l’offre de divers moyens de transport au sein des communautés, de sorte qu’il faudra envisager si le programme témoigne bien de cette diversité. En raison de ces subtilités, il faut recourir à une vaste gamme de points de vue dans la prise en compte des indemnités et prestations à des fins spéciales.

Recommandations détaillées

14.1 Conserver les indemnités et prestations suivantes à des fins spéciales et les revoir au fur et à mesure que des progrès vers la suffisance sont réalisés et que les revenus des personnes sont bien compris :

  • l’Allocation pour régime alimentaire spécial;
  • les Prestations obligatoires pour les nécessités spéciales et les prestations de transport pour raisons médicales;
  • l’Allocation nutritionnelle en période de grossesse
    et d’allaitement;
  • la Prestation liée à l’emploi du POSPH.

14.2 Réviser les règles du transport pour raisons médicales afin d’y inclure et de soutenir un accès élargi aux guérisseurs traditionnels.

14.3 Revoir les critères d’admissibilité à l’Allocation pour les collectivités éloignées et les élargir pour bien répondre aux besoins des communautés du Nord et éloignées.

14.4 Reconcevoir les prestations discrétionnaires du programme Ontario au travail au fur et à mesure que d’autres recommandations sont instaurées (p. ex., rendre obligatoires les prestations pour soins de santé de base et l’aide relative aux frais de funérailles et d’enterrement), puis songer à les rendre accessibles à l’ensemble de la population à faible revenu.

Aider Ceux Dans La Pauvreté Extrême

Objectif : Prendre des mesures précoces et urgentes pour hausser le niveau de soutien du revenu à la disposition des personnes dans la pauvreté extrême.

Le besoin d’une mesure urgente

Recommandation 15 : Aider ceux dans la pauvreté extrême en augmentant immédiatement le soutien du revenu offert par l’aide sociale comme moyen facilement accessible de progrès précoce et absolument critique vers la suffisance.

Les programmes d’aide sociale sont depuis longtemps le principal filet de sécurité ayant pour objet de protéger le mieux-être des personnes qui ont peu, sinon pas, de gains ou d’autres revenus de source privée, et presque aucune autre prestation de soutien du revenu ou en nature. Le soutien reçu par le truchement de l’aide sociale est en soi insuffisant pour presque tous les prestataires. De tels programmes n’empêchent pas les personnes de plonger dans la pauvreté : de fait, ces programmes entraînent le maintien des personnes dans le cycle de la pauvreté au fil des ans, et d’une génération à l’autre.

La pire chose en lien avec l’état de prestataire du programme Ontario au travail, c’est l’état de prestataire du programme Ontario au travail. Quelqu’un d’autre décide quand et si je mange. Je vis dans la pauvreté et dans un état constant de vigilance extrême : d’un mois à l’autre, je ne sais pas si j’aurai de la nourriture ou un logement… et ça ne s’arrête jamais; mais ça ne devrait pas fonctionner ainsi.

- Tracy footnote 86

Les personnes célibataires – dont un grand nombre sont aux prises avec des problèmes de santé mentale, de toxicomanie, de violence, de mauvais traitements et d’itinérance, ainsi que les effets traumatisants de la pauvreté enracinée – sont celles pour qui les répercussions à ce chapitre ont été les plus marquées. Ce sont elles qui, en particulier, ont été abandonnées par suite des compressions draconiennes au programme Ontario au travail dans les années 1990, dont les effets se sont aggravés en raison essentiellement des augmentations en deçà de l’inflation au cours des années subséquentes, et des autres failles inhérentes aux programmes d’aide sociale.

Afin d’exemplifier leur situation actuelle, le taux d’aide sociale pour personne célibataire correspondait en 1990 à 70 % du salaire minimum. Actuellement, ce taux se situe à environ 38 % du salaire minimum. Si les taux actuels demeuraient identiques pendant que le salaire minimum progresse pour s’établir à 15 $/heure, le niveau d’aide régresserait pour se fixer à 30 %. D’après les estimations, les personnes célibataires prestataires du programme Ontario au travail et du POSPH ont subi un recul à leur pouvoir d’achat de 315 $ et de 302 $ par mois, respectivement, au cours des 22 dernières années (compte tenu de l’inflation). À cette situation s’est ajoutée une décroissance de l’accès aux autres prestations du système de sécurité du revenu dans son ensemble.

Lorsque les niveaux de soutien du revenu sont insuffisants, les particuliers dépendent du soutien des autres personnes et prennent d’autres moyens pour vivre. Certains de ces soutiens sont malsains, car ils entraînent une hausse du risque de mauvais traitements, d’exploitation et de traite des personnes.

Des mesures immédiates doivent être prises pour sortir les personnes de la pauvreté extrême.

La feuille de route recommande l’instauration de réformes précoces qui transformeront la structure des programmes d’aide sociale et institueront des soutiens élargis et indispensables comme une prestation de logement transférable. Chez certains, dont ceux qui sont sans abri ou vivent dans des pensions, cette mesure se traduira par des hausses considérables. Toutefois, elle ne suffira pas pour changer la situation du très grand nombre de personnes les plus laissées pour compte. Le besoin de hausser les niveaux d’aide sociale des personnes dans la pauvreté extrême au cours des trois premières années de la réforme – des hausses supérieures aux investissements très modestes consentis ces dernières années – demeure urgent.

Dans la présente section de la feuille de route, nous recommandons donc l’accroissement de certains taux pour progresser de façon significative dans l’amélioration des revenus de ceux les plus éloignés du niveau minimum de revenu (voir la section Parvenir à la suffisance du revenu à la page 79).

Personne non handicapée célibataire

Automne 2017

1re année

2e année

3e année*

 

+10 %

+7 %

+5 %

721 $ / mois

794 $ / mois

850 $ / mois

893 $ / mois

* Compte tenu des prestations fiscales, à la fin de la 3e année, le revenu de cette personne passera de 60 % à 52 % en deçà de la MFR de la SORP, de sorte que son revenu total annuel augmentera de 2 097 $.

Personne handicapée célibataire

Automne 2017

1re année

2e année

3e année*

 

+5 %

+5 %

+5 %

1 151 $ / mois

1 209 $ / mois

1 270 $ / mois

1 334 $ / mois

* Compte tenu des prestations fiscales, à la fin de la 3e année, le revenu de cette personne passera de 53 % à 45 % en deçà de la MFR de la SORP (auquel s’ajoutera une bonification de 30 %, étant donné l’augmentation du coût de la vie qu’occasionne une invalidité), de sorte que son revenu total annuel augmentera de 2 240 $.

Ces hausses, urgentes mais néanmoins modestes, se traduisent par un soutien du revenu annuel de l’aide sociale de 10 716 $ pour une personne célibataire prestataire du programme Ontario au travail et de 16 008 $ pour une personne célibataire prestataire du POSPH. De tels montants ne correspondent qu’à 63 % et à 70 % des montants fournis aux participants du Projet pilote portant sur le revenu de base des personne non handicapées et des personnes handicapées, respectivement.

Il ne s’agit là que d’un point de départ. Au cours des années subséquentes, le niveau minimum de revenu sera atteint par la combinaison des réformes en matière de sécurité du revenu, dont celle relative à l’aide sociale.

Remarque importante du Groupe de travail sur la réforme en matière de sécurité du revenu

Les membres du Groupe de travail sur la réforme en matière de sécurité du revenu ont peiné en ce qui touche la cadence d’élimination de la pauvreté extrême. L’écart entre la situation actuelle et la situation souhaitable des personnes est si important que nous ne pouvions convenir d’un chiffre « exact » pour les hausses précoces des taux. Les recommandations de la première année atteignent les personnes dans la pauvreté extrême, mais ne permettent que des progrès modérés chez la majorité des personnes qui éprouvent des difficultés à survivre à l’aide des prestations du programme Ontario au travail et du POSPH. Nous avons opté pour un chiffre qui, selon nos attentes, peut-être instauré par le gouvernement, mais nous exhortons celui-ci à agir plus rapidement afin de rapprocher les personnes de la suffisance du revenu.

Les personnes ne décident pas tout simplement un jour de leur plein gré de délaisser la sécurité d’un bon emploi, ni le confort que procurent un foyer et une famille. Le monde dans lequel nous vivons diffère de celui d’il y a 25 ans, et les idées conventionnelles sur le travail et l’éthique de travail ne tiennent pas face aux nombreux obstacles et à la précarité du marché du travail auxquels les personnes font face actuellement. Il y a longtemps que des mesures auraient dû être prises afin que les personnes vivant dans la pauvreté aient suffisamment de ressources pour subsister, au-delà des préoccupations malavisées à propos des problèmes de « dépendance au bien-être » à long terme et de l’utilité d’investir dans l’aide sociale… il faut plutôt restaurer l’objet souhaité de tels programmes : la préservation de l’aide sociale et du mieux-être des personnes.

Recommandations détaillées

15.1 Instaurer des changements qui résultent en des progrès significatifs dans le rehaussement des revenus de ceux les plus à l’écart du niveau minimum de revenu (voir la section Parvenir à la suffisance du revenu à la page 79) par le truchement de l’aide sociale comme moyen le plus facilement accessible et rajusté par les mesures suivantes (à l’automne 2018) :

  • fixer le taux forfaitaire normal à 794 $/mois (une hausse de 10 % par rapport aux taux minimaux pour les besoins de base et le logement dans le programme Ontario au travail à l’automne 2017);
  • fixer le taux forfaitaire normal – invalidité à 1 209 $/mois (une hausse de 5 % par rapport aux taux minimaux pour les besoins de base et le logement dans la POSPH à l’automne 2017).
  • 15.2 Instaurer des hausses au taux forfaitaire normal et au taux forfaitaire normal – invalidité à l’automne 2019 :
  • hausser le taux forfaitaire normal pour le faire passer à 850 $/mois (une hausse de 7 % par rapport à la première année);
  • hausser le taux forfaitaire normal – invalidité pour le faire passer à 1 270 $/mois (une hausse de 5 % par rapport à la première année).
  • 15.3 Instaurer d’autres hausses au taux forfaitaire normal et au taux forfaitaire normal – invalidité à l’automne 2020 :
  • hausser le taux forfaitaire normal pour le faire passer à 893 $/mois (une hausse de 5 % par rapport à la deuxième année);
  • hausser le taux forfaitaire normal – invalidité pour le faire passer à 1 334 $/mois (une hausse de 5 % par rapport à la deuxième année).

15.4 Continuer de hausser le niveau de soutien du revenu accessible par le programme Ontario au travail (dont l’image de marque est modifiée) d’ici à ce que le niveau minimum de revenu soit atteint, en combinaison avec d’autres composantes de sécurité du revenu, en 2027-2028 (voir également la section Un revenu assuré pour les personnes handicapées à la page 126).

Communautés Des Premières Nations

Dans la prise en compte des Premières Nations en contexte de réforme de sécurité du revenu, l’Ontario devra comprendre que rien dans la nouvelle législation proposée ne correspond à une abrogation, ni à une dérogation des droits ancestraux ou issus de traités des Premières Nations tels qu’ils sont reconnus et confirmés à l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Dans les réformes, il faudra également reconnaître la responsabilité fiduciaire du gouvernement fédéral à l’égard des Premières Nations, en sus des ententes actuelles de partage des coûts.

Historiquement, les peuples autochtones de l’Île Turtle ont mis en place des systèmes distincts de gouvernance axés sur les lois et enseignements de la nature. En tant que nations souveraines, les peuples autochtones ont établi des traités de paix, d’amitié et d’alliance ainsi que des droits de passage pour réglementer les échanges et le commerce de même que d’autres relations.

Actuellement, un grand nombre des communautés des Premières Nations sont situées dans des territoires traditionnels qui sont reconnus par des traités signés avant l’adoption de la plupart des lois fédérales et provinciales. En ce qui touche l’Ontario, il y a à l’heure actuelle 46 traités qui officialisent les rapports entre la Couronne (le gouvernement) et les Premières Nations. Ces traités ont été signés entre 1781 et 1930footnote 87 et affirment les droits des Premières Nations sur leurs terres (voir l’illustration au https://files.ontario.ca/firstnationsandtreaties_1.pdf). La portée de certains de ces traités se situe au-delà des compétences provinciales, ce qui suscite plusieurs difficultés. Les droits et rapports issus des traités de même que le droit inhérent à l’autonomie gouvernementale sont d’une importance capitale pour les Premières Nations.

C’est en 1876 que le Parlement a adopté la première version de la Loi sur les Indiens. Des agents des Indiens étaient nommés pour gérer la vie des Anishinaabe, des Haudenosaunee, des Cris et des autres peuples des Premières Nations dans les communautés des autochtones partout en Ontario. Ils ont contrôlé à toutes fins utiles chaque aspect de la vie des Premières Nations au moyen de la Loi sur les Indiens, même la prédétermination des numéros de bande avant la naissance et le contrôle des successions après le décès. Bien que des adaptations aient été nécessaires, la gouvernance traditionnelle des Premières Nations demeure. Ce dont les Premières Nations ont besoin des gouvernements de la Couronne, ce sont les ressources pour exercer leur propre compétence.

Les répercussions des événements historiques sur les peuples et gouvernements des Premières Nations ont été dévastatrices. Les communautés des Premières Nations en Ontario comptent désormais parmi les populations les plus vulnérables de la province. Elles font face à d’importantes difficultés et épreuves et un pourcentage ahurissant des membres des communautés vivent en deçà du seuil de la pauvreté. Les particuliers et les familles ont peine à joindre les deux bouts. Une grande majorité n’ont pas les moyens de s’offrir des produits essentiels de première nécessité comme des aliments sains, et même ceux qui s’en tirent relativement bien doivent souvent choisir parmi une gamme d’aliments transformés et préemballés plutôt que des aliments frais. Dans les communautés des Premières Nations, le coût des aliments sains (s’il y en a) est trop élevé, la nourriture est généralement rare, et le fait de consommer des aliments préemballés se traduit par un accroissement du coût des soins de santé. Bien que les foyers multigénérationnels puissent témoigner d’un attachement solide à la famille, les options limitées en matière de logement risquent d’occasionner le surpeuplement et la vie en commun de personnes, y compris d’anciens conjoints, par nécessité plutôt que par choix personnel. L’espérance de vie des peuples des Premières Nations est de cinq à sept fois inférieure à celle des Canadiens non autochtonesfootnote 88 .

Les 133 communautés des Premières Nations en Ontario s’étendent sur l’ensemble de la province et sont situées à diverses distances des centres urbains. Ce peut-être des communautés restreintes, où les services offerts sont peu nombreux. La plupart des communautés sont isolées et font face à des difficultés considérables

dans l’accès aux services et aux avantages offerts en milieu urbain. La prestation de services coûte cher dans les communautés du Nord et en milieu éloigné de même que celles situées à distance des centres de service. L’accès limité à Internet et à la bande passante nuit à l’accès aux services électroniques et à la possibilité de remplir les formulaires du MSSC. Les membres des communautés doivent parcourir de longues distances pour obtenir des soins de santé adéquats, et sont contraints de déménager pour faire des études ou s’inscrire à des programmes de formation qui pourraient leur procurer les connaissances et aptitudes nécessaires à l’atteinte de leurs objectifs et à l’accroissement de la capacité communautaire. Souvent, les communautés sont caractérisées par une économie saisonnière et des offres d’emploi peu nombreuses.

Les rapports avec les programmes municipaux, provinciaux et fédéraux de soutien du revenu sont compliqués, frustrants, décousus et sans égards à la situation personnelle ou individuelle des personnes des Premières Nations, ni respect quant à la diversité qui s’y trouve. Le traumatisme intergénérationnel causé par le colonialisme, les séquelles des pensionnats indiens et d’autres réalités historiques sont aggravés par la discrimination systémique, passée et présente, au sein des centres urbains dans de nombreux secteurs, dont les secteurs judiciaire, juridique, pénitentiaire, de la santé mentale, de la santé et de la protection de l’enfance. Les organismes ordinaires, empreints de paternalisme, ne veulent pas céder le contrôle aux gouvernements et organismes des Premières Nations, lesquels sont concrètement les fournisseurs de services aux clients des Premières Nations.

Afin que les services sociaux soient significatifs et performants dans les communautés des Premières Nations, ces dernières doivent participer pleinement à la conception des programmes et services. Voilà un élément crucial dans la satisfaction des attentes et besoins des Premières Nations, la correction des points qui suscitent la critique et la structure des priorités. Aux yeux des Premières Nations, la gestion des initiatives d’autrui correspond non seulement à une perte de capital humain, mais à la gestion de leur propre pauvreté perpétuelle.

Les administrateurs des services sociaux des Premières Nations doivent être reconnus pour leur savoir-faire dans la prestation de services sécuritaires sur le plan culturel et la mise en application de la philosophie d’accès comme quoi « chaque porte est la bonne porte ». Les Premières Nations ont également manifesté un savoir-faire dans l’élaboration de formation et d’outils particuliers. Bâtir la capacité communautaire correspond à un besoin continu.

Il existe également un manque d’intégration entre ministères dans des domaines tels que la santé et l’éducation. Une souplesse accrue à ce chapitre pourrait se traduire par de nouvelles possibilités de conception de programmes et de politiques.

Le nombre de clients des Premières Nations dans le programme Ontario au travail a augmenté depuis 2003, pour se fixer à plus de 11 000 en 2016-2017. Parmi les 133 communautés des Premières Nations, 101 sont des partenaires de prestation des Premières Nations et 68 assurent une prestation complète de services à 79 communautés. Voilà qui révèle la capacité des Premières Nations à assurer la prestation de programmes adaptés et complets. Ceux qui n’ont pas accès, par choix, au programme Ontario au travail ont des ententes bilatérales avec le gouvernement fédéral pour assurer la prestation de l’aide au revenu. Le MSSC convient du fait que des difficultés se font sentir dans la prestation complète chez certaines communautés : des populations de moins de 100 personnes, un nombre restreint de clients du programme Ontario au travail (moins de 30), l’éloignement géographique, les possibilités économiques restreintes, et les structures administratives des petites bandes.

Certes, les recommandations susmentionnées dans la feuille de route contribueront à régler certaines des difficultés, mais il y a des changements exceptionnels et particuliers qui sont cruciaux aux yeux des communautés des Premières Nations et doivent être pris en compte dans toute voie à suivre quant à la réforme de la sécurité du revenu. Si la tendance à la hausse des coûts se maintient et que le statu quo demeure dans la prestation, un nombre accru de personnes s’enfonceront dans la pauvreté. Le besoin d’une démarche révisée est désormais plus manifeste que jamais. La feuille de route donne véritablement l’occasion d’examiner minutieusement la façon par laquelle nous soutenons les personnes les plus vulnérables en Ontario. Pour les Premières Nations, il est du plus grand intérêt de se trouver à l’avant-plan de la réforme de la sécurité du revenu et de prendre part à la modernisation de la technologie des systèmes actuels, elles qui s’adaptent depuis longtemps aux changements.

Il convient également de souligner que les recommandations dans le chapitre sur les Premières Nations sont le fruit de discussions et de délibérations particulières tenues à la table de concertation, mais que le contexte historique et un grand nombre des problèmes relevés touchent également les Autochtones qui habitent à l’extérieur des communautés des Premières Nations. À ce titre, de nombreuses recommandations dans la présente section comporteraient des répercussions positives à l’échelle de l’Ontario, y compris chez les Autochtones qui habitent à l’extérieur des communautés des Premières Nations, et le gouvernement provincial devrait en tenir compte.

Autonomie gouvernementale et respect des compétences des Premières Nations

Recommandation 16 : Prendre des mesures afin qu’en bout de ligne, les services sociaux soient contrôlés et déterminés par les Premières Nations et propres à ces dernières.

La situation exceptionnelle des Premières Nations de même que l’ampleur de la pauvreté et de la dépendance à l’aide sociale dans les communautés des Premières Nations exigent une intervention spéciale. Dans la version finale du Rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones paru en 1996, on désigne l’aide sociale comme étant, de loin, l’aspect le plus important du filet de sécurité sociale des communautés autochtonesfootnote 89 , et on a répertorié trois principes pour traiter la dépendance aux prestations d’aide sociale dans la réforme de l’aide sociale : le contrôle par les Autochtones de la conception et de la gestion des programmes de soutien du revenu; des programmes qui appuient le développement social et économique dans les communautés autochtones; et une démarche holistique ancrée dans les traditions et valeurs autochtones et qui intègre le développement social et économiquetfootnote 90. En outre, l’article 5 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtonesfootnote 91 affirme le droit des peuples autochtones de maintenir et de renforcer leurs institutions distinctes, notamment sociales et économiques, tout en conservant le droit, si tel est leur choix, de participer pleinement à la vie sociale et économique de l’État.

Conformément aux rapports gouvernementaux d’égal à égal entre les Premières Nations et le gouvernement de l’Ontario et à la demande de longue date en services sociaux fondés sur l’autodétermination, suivant ce qui a été énoncé en 1991footnote 92 puis réitéré dans un exposé donné en 1997 à un comité permanent du programme Ontario au travailfootnote 93 , les Premières Nations cherchent à exercer leur compétence inhérente sur l’ensemble des programmes de services sociaux, de même qu’à élaborer et contrôler ces programmes. Les Premières Nations nécessitent une exemption législative qui reconnaît leur pouvoir de se retirer des éléments du programme provincial de sécurité du revenu comme bon leur semble à la faveur de modèles plus souples et adaptés. Le libellé proposé de ce changement législatif doit être mis au point en collaboration avec les Premières Nations.

Une option législative de retrait fournira aux Premières Nations la base de la planification, de la prestation et de la gestion des services d’aide sociale qui seront souples et permettront aux programmes d’évoluer en fonction des besoins et priorités communautaires, dont le mieux-être des familles, le perfectionnement des aptitudes et l’essor des petites entreprises. Les mécanismes de responsabilisation et de déclaration seront négociés en fonction des pouvoirs des Premières Nations et des résultats souhaités par ces dernières.

Recommandations détaillées

16.1 À partir du droit inhérent dont elles disposent, les Premières Nations doivent avoir la possibilité de concevoir et de contrôler leurs propres programmes de services sociaux.

16.2 Reconnaître l’autorité des Premières Nations dans la création et l’instauration de leur propre modèle d’aide au revenu.

16.3 Établir des liens avec le gouvernement fédéral et les Premières Nations dans une entente tripartite, afin que les nouvelles démarches souples et adaptables bénéficient d’un soutien financier et continu.

16.4 Respecter l’autonomie des Premières Nations et collaborer avec ces dernières à l’élaboration d’une option de retrait qui reconnaît explicitement leur droit de se retirer des dispositions du cadre législatif du programme Ontario au travail pour favoriser leurs propres modèles. Mettre en place des processus de communication pour renseigner les Premières Nations sur les dispositions et les possibilités de retrait afin de diriger directement la prestation des programmes.

16.5 Discerner des démarches ou des modèles de service plus souples et adaptables, et que les Premières Nations pourraient adapter, comme :

  • la règle relative aux personnes vivant avec le père ou la mère;
  • la période d’admissibilité aux exemptions de gains;
  • les règles de non conformité;
  • un revenu locatif pour les prestataires du programme Ontario au travail;
  • la définition de conjoint, à établir aux termes de la Loi sur le droit de la famille
  • les exigences de participation (à titre volontaire);
  • les coûts maximaux de logement, à partir des
    montants réels.

16.6 Déterminer et communiquer des lignes directrices claires à observer par le personnel du gouvernement provincial dans l’accès aux données que possèdent les Premières Nations, suivant le protocole de propriété, de contrôle, d’accès et de possession avalisé par l’Assemblée des Premières Nations.

16.7 S’engager à collaborer avec les Premières Nations à la conception et au lancement de projets pilotes de prestation directe des programmes, dont le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées, Emploi Ontario, le programme d’Aide à l’égard d’enfants qui ont un handicap grave et le Programme de services particuliers à domicile, dans l’optique à long terme d’une prestation par les Premières Nations, selon leur volonté.

16.8 Soutenir la mise au point de formulaires et processus administratifs, ainsi que d’une formation destinée au personnel des services sociaux des Premières Nations, pour appuyer la nouvelle démarche souple et adaptable.

16.9 S’engager à collaborer avec les Premières Nations (par le truchement des OPT, des conseils tribaux ou de certaines Premières Nations) à l’instauration d’un plan de mise en œuvre, afin que les Premières Nations acceptent la responsabilité de concevoir et de fournir des programmes aux communautés des Premières Nations, notamment : le programme Ontario au travail; le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées; le programme d’Aide à l’égard d’enfants qui ont un handicap grave; le Programme de services particuliers à domicile; et le programme d’Aide pour soins temporaires.

16.10 Prendre des mesures afin que les Premières Nations demeurent admissibles au nouveau financement des nouveaux programmes que le gouvernement de l’Ontario pourrait créer après qu’une Première Nation a assumé l’autonomie gouvernementale dans l’aide sociale.

Formule axée sur les Premières Nations

Recommandation 17 : Élargir les résultats des programmes pour englober l’inclusion sociale. Simplifier les processus et fournir des outils en vue d’une démarche globale et personnalisée qui propose des services complémentaires.

Les systèmes de soutien social ont toujours constitué une caractéristique déterminante de l’identité culturelle des Premières Nations. La responsabilité collective du mieux-être de tous les membres et la prestation d’une aide à ceux dans le besoin sont des principes fondamentaux que les Premières Nations ont maintenus tout au long de leur histoire jusqu’à maintenant. Étant donné la perte des terres et ressources et la dépendance croissante envers les prestations d’aide sociale que vivent les communautés des Premières Nations, il est urgent de remplacer la focalisation étroite et les aspects punitifs de l’aide sociale par un système de soutiens globaux pour répondre aux besoins particuliers des communautés des Premières Nations.

Une démarche véritablement axée sur les Premières Nations ne portera pas strictement sur la prestation de l’aide sociale : elle intégrera également des stratégies qui recoupent de façon globale les quatre quadrants de la vie que sont le mieux-être physique, spirituel, mental et émotionnel. Les familles et les particuliers doivent être soutenus par un réseau de programmes qui les invite à s’appuyer sur leurs aptitudes pour parvenir à l’autosuffisance dans leur vie. De tels soutiens permettront de fournir des services complémentaires par une démarche axée sur les points forts qui favorise la réussite et l’autonomie personnelles, l’inclusion sociale, le mieux-être familial et le développement communautaire, et qui procure d’autres soutiens à ceux dans le besoin. On peut également inclure des démarches de développement communautaire, plutôt que de s’en tenir strictement à des programmes axés sur la personne et la famille.

La protection de la cellule familiale est d’une importance primordiale chez les communautés des Premières Nations. Les programmes, règles et politiques de l’aide sociale doivent favoriser la stabilité familiale et soutenir la revitalisation des familles.

Les particuliers et les familles doivent avoir accès à des soutiens et services complémentaires qui admettent la diversité des situations personnelles, sociales et économiques chez les communautés des Premières Nations. Les rapports doivent être fondés sur la confiance et le respect, avec l’engagement de comprendre et de traiter le traumatisme intergénérationnel. Une démarche globale tient compte de tous les aspects du particulier et appuie son cheminement vers le mieux-être et l’autosuffisance.

Les gestionnaires des services sociaux des Premières Nations connaissent intimement les besoins et difficultés des particuliers et familles dans leur communauté, et sont les mieux placés pour fournir les soutiens et services appropriés.

Recommandations détaillées

17.1 Il faut reconnaître les divers objectifs, besoins et trajectoires des particuliers pour encourager et promouvoir la réussite personnelle, notamment élargir les résultats des programmes pour y intégrer la mobilisation communautaire et l’inclusion sociale, de même que soutenir les particuliers qui améliorent leur aptitude à l’emploi.

17.2 Il faut reconnaître et soutenir la capacité des programmes de services sociaux des Premières Nations à fournir ce qui suit :

  • une aide au revenu à l’intention des célibataires,
    des couples et des familles;
  • des activités préalables à l’emploi, y compris, sans s’y limiter, l’alphabétisation, la mise à niveau, une expérience de travail, une formation professionnelle propre à l’emploi, des initiatives destinées aux jeunes, des ressources d’aide à l’entreprise sociale et au travail indépendant;
  • les aiguillages et interventions précoces ayant trait à la santé mentale et à la toxicomanie;
  • les initiatives communautaires propres à la langue, à la culture, à la tradition ainsi qu’au contexte économique et éducatif de la communauté.
  • La prestation de tous les services susmentionnés se fera selon une démarche globale des Premières Nations.

17.3 Une formation en développement communautaire et social destinée au personnel des Premières Nations.

17.4 Il faut reconnaître le ressourcement pour le mieux-être, la stabilisation de la vie, l’inclusion sociale, les activités préalables à l’emploi et l’acquisition des aptitudes essentielles comme d’importantes réalisations dans la trajectoire vers la réussite.

17.5 Il faut harmoniser les règles du travail indépendant dans le programme Ontario au travail avec le POSPH afin d’englober les travailleurs à temps partiel et saisonniers. Il faut simplifier et réviser les règles, les lignes directrices et les évaluations d’admissibilité en lien avec le travail indépendant.

17.6 Favoriser le travail indépendant et les entreprises sociales comme des options viables pour les peuples et communautés des Premières Nations.

17.7 Collaborer avec les Premières Nations à la promotion des renseignements et à la création de possibilités en lien avec l’offre de microprêts, le lancement de petites entreprises, et les programmes fédéraux et provinciaux.

17.8 Les administrateurs des services sociaux des Premières Nations doivent continuer de fournir des services liés à l’emploi pour promouvoir une démarche globale qui soutient les membres des communautés.

17.9 Les administrateurs des services sociaux des Premières Nations doivent fournir et superviser les services et soutiens en matière d’emploi du programme Emploi Ontario dans leur communauté.

17.10 Les jeunes des Premières Nations sont l’avenir des communautés des Premières Nations et nécessitent l’accès aux services et soutiens dans le début de leur vie pour parvenir à la réussite dans leur emploi, leurs études et leur transition vers l’âge adulte :

  • les jeunes de 14 ans et plus doivent avoir accès aux soutiens à l’emploi du programme Ontario au travail et du POSPH;
  • la prestation d’un financement de soutien aux programmes, à l’inclusion sociale, à l’apprentissage culturel et à la transmission des connaissances entre aînés et jeunes.

17.11 En reconnaissance du fait que les Premières Nations doivent assurer la prestation du POSPH, briser les entraves au POSPH par les moyens suivants :

  • financer le personnel de soutien afin qu’il fasse une gestion de cas intensive et veille à la tenue d’évaluations pour aider les particuliers à cheminer dans le POSPH;
  • soutenir un accès élargi aux professionnels de la santé dans les communautés des Premières Nations pour aider à remplir la Trousse de documents et de formules sur la détermination de l’invalidité (TDFDI) par le recours à la vidéo ou aux services de télésanté;
  • augmenter l’aide relative aux frais de transport pour raisons médicales et en accélérer la prestation;
  • donner un soutien continu aux prestataires et groupes de prestataires du POSPH;
  • fournir une prestation supplémentaire destinée aux personnes handicapées prestataires du POSPH;
  • prolonger les délais d’achèvement des étapes dans le processus de présentation d’une demande, si nécessaire.

17.12 Des outils, ressources, fonds et formations doivent être en place pour soutenir le perfectionnement professionnel continu des Premières Nations.

17.13 Promouvoir et soutenir le ressourcement pour le mieux-être parmi le personnel des services sociaux.

17.14 Il faut bien reconnaître les capacités, les aptitudes et le perfectionnement professionnel des administrateurs des services sociaux des Premières Nations et souligner leur rôle crucial quant à leur incidence sur la vie et les résultats des particuliers des Premières Nations qui sont prestataires de l’aide sociale.

Financement suffisant pour les Premières Nations

Le système de sécurité sociale doit bien s’adapter à la situation économique et géographique locale des communautés des Premières Nations afin que les gens obtiennent l’aide nécessaire pour maintenir un niveau de vie suffisant et s’extirper de la pauvreté.

L’Entente de 1965 sur le bien-être des Indiens conclue entre le gouvernement du Canada et le gouvernement de l’Ontario a élargi la prestation des programmes provinciaux d’aide sociale (Ontario au travail), de services à l’enfance et à la famille, d’aide familiale et de garderies pour y intégrer les particuliers des Premières Nations et dans les réserves partout en Ontario. Aux termes de cette entente, le gouvernement du Canada rembourse au gouvernement de l’Ontario la plus grande partie du coût de prestation de ces services selon une formule de partage des coûts. Toutefois, ce système n’a pas évolué en phase avec les besoins croissants des communautés des Premières Nations et l’essor des programmes provinciaux dans les municipalités. Du travail est requis chez les Premières Nations, le gouvernement fédéral et le gouvernement de l’Ontario afin d’améliorer et élargir ou de remplacer l’Entente de 1965 en ce qui touche l’aide sociale (le programme Ontario au travail et le POSPH) ainsi que d’autres domaines. Par exemple, l’un des points qui posent problème dans le fonctionnement de l’Entente de 1965 se rapporte au programme Ontario au travail, tout particulièrement la contribution municipale à l’administration. À l’heure actuelle, le gouvernement provincial finance les coûts d’administration au moyen de deux postes de financement distincts assortis d’ententes de partage des coûts différentes. Le gouvernement provincial finance 50 % du poste de financement lié au coût de l’administration et 97,2 % du poste de financement lié à la prise en charge. À compter de janvier 2018, le poste de financement lié à la prise en charge sera financé intégralement par le gouvernement provincial. On attend des municipalités qu’elles assument leur part des coûts au moyen de leurs revenus, notamment leur assiette foncière. Dans les communautés des Premières Nations, le gouvernement fédéral est censé assumer ce montant. Cependant, des plafonds placés arbitrairement à cette contribution par le gouvernement du Canada se sont traduits par un sous-financement et l’inégalité parmi les Premières Nations (c.-à-d. les montants offerts pour l’administration sont insuffisants, lorsqu’ils sont comparés aux montants des municipalités ainsi qu’aux besoins des Premières Nations). Il faut corriger cette inégalité, afin que les Premières Nations disposent de ressources suffisantes pour assurer convenablement l’administration et la prestation du programme normal, auquel s’ajoutent les ressources requises à la conception, à la création et à la régie de nouveaux programmes fondés sur les modèles des Premières Nations.

D’ici à ce que d’autres changements soient instaurés à l’Entente de 1965 et aux relations financières, il serait tout indiqué que le gouvernement de l’Ontario prenne en charge l’intégralité des coûts pour les Premières Nations puis procède avec elles à un partage des coûts au moyen de la formule de 1965, pour faire en sorte que cessent les résultats inéquitables.

Le Groupe de travail sur la réforme en matière de sécurité du revenu pour les Premières Nations a discerné le besoin en investissements supplémentaires pour montrer que l’intention ne consiste pas à porter préjudice, mais plutôt à soutenir des clients dans leur cheminement vers l’emploi ou l’inclusion sociale dans les cas où l’obtention d’un emploi n’est pas réaliste. Les difficultés et obstacles exceptionnels à l’emploi et au développement économique chez les communautés des Premières Nations de même que la situation actuelle nécessitent des mesures correctives afin que le système de sécurité du revenu soutienne convenablement les particuliers et familles des Premières Nations.

Ce même groupe de travail a également remarqué tout au long du présent rapport que les investissements proposés par les réformes, comme les soutiens au logement, les prestations pour enfants fondées sur le revenu, les crédits d’impôt remboursables et les prestations pour soins de santé de base nécessitent souvent une modification pour bénéficier pleinement aux Premières Nations, nonobstant le statut exceptionnel des terres dans les réserves et le statut fiscal des Premières Nations.

Recommandations détaillées

18.1 Les programmes, services et soutiens fournis par le truchement de l’aide sociale doivent bien témoigner des réalités de la vie dans les communautés des Premières Nations.

18.2 Le financement discrétionnaire doit s’appuyer sur le remboursement des dépenses réelles.

18.3 Les taux doivent refléter les coûts supplémentaires de la vie dans les communautés des Premières Nations, y compris celles qui sont éloignées et isolées (p. ex., l’achat d’aliments nutritifs, les frais de transport).

18.4 Se pencher sur les pratiques de fixation du prix des aliments, des produits et des services dans les communautés du Nord (p. ex., les rives du Nord).

18.5 Élargir les critères d’admissibilité à l’Allocation pour les collectivités éloignées à une superficie d’une ampleur accrue.

18.6 Reconnaître et mettre en application un concept de quotient d’éloignement mis au point par les Premières Nations et qui témoigne du coût de la vie accru chez les Premières Nations en milieu éloigné.

18.7 Mettre au point une formule de financement du Fonds de soutien à la transition (FST) qui s’appuie sur les dépenses réelles.

18.8 Fournir un financement supplémentaire pour soutenir les frais d’administration, tout particulièrement chez les communautés où le nombre de clients est moindre.

18.9 Concevoir un outil et une technologie supplémentaires en lien avec le nombre de clients pour saisir avec exactitude les données sur le nombre réel de clients dont témoignent les frais d’administration et les prestations discrétionnaires.

18.10 Financer les solutions technologiques des Premières Nations.

Un Appel Au Gouvernement Fédéral

La participation engagée du gouvernement fédéral est nécessaire si les personnes à faible revenu doivent atteindre leur plein potentiel et toucher un revenu suffisant. Dans le rapport « Briser le cycle : Une étude sur la réduction de la pauvreté » du Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées (l’étude HUMA), publié le 31 mai 2017, il est question du rôle de chef de file que le gouvernement fédéral doit jouer, compte tenu des ressources exceptionnelles dont il dispose et de ses secteurs de compétencefootnote 94 .

Tout au long de l’étude, le Comité a appris que si la pauvreté n’est pas strictement une question de revenu, les revenus insuffisants ou instables comptent néanmoins parmi les facteurs les plus importants qui mènent à la pauvreté. Le rapport susmentionné comporte des recommandations qui sont clairement en phase avec la présente feuille de route et appuient celle-ci. Par exemple :

Recommandations de l’étude HUMA :

Recommandations de la feuille de route :

Le gouvernement fédéral collabore avec les provinces et les territoires au raffermissement des politiques des programmes de soutien du revenu afin que les personnes ne voient pas tout leur revenu « récupéré » par les programmes provinciaux
d’aide sociale.

Exempter une partie du revenu tiré du Programme de prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada et de l’assurance emploi du gouvernement fédéral (et du revenu tiré de la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail, de compétence provinciale).

Modifier la prestation fiscale pour le revenu de travail (PFRT) afin d’étendre l’admissibilité, d’augmenter le niveau des prestations et de limiter les récupérations, de manière à faire sortir de la pauvreté les travailleurs à bas salaire et à faible revenu.

Augmenter la PFRT afin qu’elle reflète bien les réalités auxquelles font face les travailleurs à faible revenu en Ontario, y compris l’admissibilité, le niveau auquel la prestation est retirée, et les montants fournis.

Qu’Affaires autochtones et du Nord Canada examine les taux d’aide sociale pour les membres des Premières Nations dans les réserves, en tenant compte du coût plus élevé de la vie et des occasions d’emploi limitées pour les gens qui y vivent, afin que les prestataires soient assurés d’un revenu suffisant.

Les taux doivent refléter les coûts supplémentaires de la vie dans les communautés des Premières Nations, y compris celles qui sont éloignées et isolées (p. ex., l’achat d’aliments nutritifs, les frais
de transport).

Qu’Emploi et Développement social Canada et la Société canadienne d’hypothèques et de logement créent des prestations de logement transférables, en consultation et en collaboration avec les provinces et
les territoires.

Instaurer une prestation de logement pour aider les personnes à faible revenu à composer avec la hausse du coût de la vie, afin qu’elles n’aient pas à choisir entre un domicile et d’autres biens de première nécessité.

La feuille de route insiste sur le besoin d’une norme de revenu minimum en Ontario à concrétiser sur dix ans par la mobilisation de tout le système de sécurité du revenu. Il est crucial que des mesures d’amélioration des programmes fédéraux soient prises afin que ceux-ci contribuent davantage à la sécurité du revenu et aident les gens à toucher un revenu suffisant. Voici les mesures à instaurer :

  • Mettre en place un programme de type Assurance santé Plus à l’échelle nationale pour donner à tous l’accès aux médicaments nécessaires.
  • Indexer l’Allocation canadienne pour enfants afin que les familles ne constatent pas l’effritement de cette prestation d’une année à l’autre.
  • Revoir les règles de l’Allocation canadienne pour enfants dans les cas où l’enfant est temporairement retiré du domicile familial, afin que les familles ne soient pas à risque de perdre leur logement, ce qui pourrait mettre en péril leur capacité à se réunir.
  • Améliorer l’accès aux prestations fiscales pour enfants des familles ayant un statut d’immigrant précaire et celles qui subissent des changements catastrophiques au revenu de l’année en cours.
  • Accroître le montant du soutien du revenu fourni par le Programme de prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada.
  • Réformer l’assurance emploi afin que celle-ci redevienne un véritable programme de remplacement du revenu en phase avec la réalité du marché du travail et de la main d’œuvre modernes.
  • Créer un programme national de soutien du revenu pour les personnes handicapées.
  • Accroître les prestations pour aînés, dont la Sécurité de la vieillesse et le Supplément de revenu garanti.
  • Mettre en place des promesses en vue d’une Stratégie nationale sur le logement, dont un investissement dans la construction et la réparation de logements abordables et une prestation nationale de logement transférable.

Le gouvernement fédéral doit également travailler directement avec les Autochtones dans un esprit de réconciliation ainsi qu’avec les communautés des Premières Nations dans une relation d’égal à égal entre nations pour traiter les carences importantes dans l’infrastructure physique et sociale des communautés des Premières Nations, notamment dans les domaines du logement, de l’eau potable, de l’accès aux soins de santé et à l’éducation, des centres communautaires et culturels, et de la sécurité alimentaire.

Instaurer Et Mesurer Le Changement

Gérer le processus de changement

Recommandation 19 : La réforme en matière de sécurité du revenu doit aller de pair avec un plan rigoureux de gestion et de mise en œuvre du changement.

  • Les recommandations dans la présente feuille de route n’ont qu’un seul objectif commun : améliorer la vie des gens et leur capacité à contribuer à leur communauté. Toutefois, même le changement positif peut-être source de stress et d’anxiété. Il se peut que les personnes craignent l’inconnu, se méfient de l’intention du changement et saisissent mal ce que le changement signifiera pour eux; pendant ce temps, il est possible que le gouvernement ne saisisse pas pleinement les répercussions du changement sur les gens et le risque de conséquences indésirables. Pour cette raison, il est crucial que les réformes urgentes aillent de pair avec un plan de gestion du changement qui prévoit une communication claire et transparente, l’appui au perfectionnement des compétences et à la formation technique, des changements aux processus opérationnels et la mise au point d’outils nouveaux ou révisés, ainsi que des boucles de rétroaction appropriées entre les programmes et les partenaires.

Le changement doit permettre l’évaluation de soutiens supplémentaires dont les gens pourront avoir besoin. Par exemple, nous savons qu’il y a matière à amélioration dans les taux de production de déclaration de revenus, particulièrement chez les jeunes célibataires de sexe masculin. Actuellement, les répercussions liées à l’absence de production de déclarations de revenus chez ce groupe sont limitées, car ceux qui en font partie ont droit à un nombre restreint de prestations fiscales. Cependant, en période de transition pour envisager l’utilisation du système fiscal dans un nombre croissant de prestations (p. ex., une prestation de logement transférable), il deviendra de plus en plus vital que les gens soient en phase avec ce système et qu’il y ait des solutions de rechange viables pour ceux qui ne le sont pas, par choix ou en raison de leur situation (p. ex., les nouveaux arrivants au Canada qui ne sont pas présents au pays durant un cycle fiscal complet).

Mesurer les résultats

Recommandation 20 : Les recommandations dans la présente feuille de route doivent être suivies d’un rapport transparent sur les résultats et indicateurs connexes que le MSSC doit actualiser chaque année et rendre public.

Par le passé, les efforts de documentation de l’efficacité des programmes de sécurité du revenu ont porté sur la description des services et activités fournis et des extrants qui en ont résulté : le nombre de chèques émis ou le nombre de personnes servies, à titre d’exemple. Ces renseignements sont importants et continueront d’être recueillis, mais il est nécessaire de passer à la description des répercussions des programmes, par le recours à un cadre de mesure du rendement.

La première étape à laquelle nous nous attendons dans la définition des résultats est de voir si le système de sécurité du revenu fonctionne exactement comme il devrait, tant en ce qui touche les résultats à l’échelle des particuliers (p. ex., sur les plans physique, émotionnel, mental, du mieux-être, financier) que ceux à l’échelle du système (p. ex., facilité de navigation, transparence). Il n’appartient pas aux groupes de travail de mettre au point un cadre complet de mesure du rendement quant à la sécurité du revenu, et il est entendu que le MSSC a déjà amorcé les travaux à ce chapitre.

Pendant que le cadre de mesure du rendement est mis au point définitivement, voici des prises en compte à intégrer que nous proposons :

  1. L’importance de recueillir des données désagrégées et de les rendre publiques afin que les répercussions et les résultats chez chacune des sous populations puissent être observés et qu’il soit possible d’appuyer la conception et l’évaluation des programmes sous l’angle de l’équité. Il s’agit d’un élément important pour faire en sorte que le système puisse déceler la concrétisation des résultats souhaités chez les groupes marginalisés, y compris les Autochtones, les particuliers racialisés, les femmes, les nouveaux arrivants au Canada, les demandeurs d’asile, les membres de la communauté LGBTQ2S, et les jeunes.
  2. La nécessité de voir à ce que les indicateurs soient significatifs pour les communautés et à ce que leur conception fasse appel à une vaste gamme d’experts, y compris des personnes ayant du vécu.
  3. La nécessité d’adopter une démarche systémique envers les résultats et la mesure. Celle-ci exige le couplage de données entre systèmes reliés les uns aux autres (p. ex., santé, protection de l’enfance, éducation/postsecondaire, judiciaire, emploi et formation, logement), de telle sorte que le cheminement et les résultats d’un particulier puissent être compris.
  4. Les principes de propriété, de contrôle, d’accès et de possession (PCAPMD) sont ceux grâce auxquels « les communautés peuvent déterminer les diverses étapes de la collecte des données, c’est à dire l’objectif principal, les moyens employés et les personnes responsables de la collecte, ainsi que décider de l’utilisation et de la communication de ces renseignements » footnote 95 . Il faut respecter ces principes dans l’élaboration et la mise en application d’un cadre de mesure du rendement.
  5. L’importance de prendre, de concert avec les principes susmentionnés, des mesures énergiques pour améliorer la collecte et la diffusion de données à propos des Autochtones, car l’absence de ces données masque les problèmes d’accès, de stigmatisation, de discrimination et de racisme. Tous les formulaires de demande devraient comporter une question volontaire permettant de déclarer faire partie des Autochtones et de fournir de plus amples détails à ce sujet (p. ex., Premières Nations, Métis ou Inuits; langue; etc.). La méthode et les questions s’y rapportant doivent être élaborées avec les Autochtones et les organismes de prestation des services, de façon à les encadrer pour éliminer toute forme de préjugé ou de stigmatisation et fournir des renseignements quant aux raisons pour lesquelles les données sont recueillies et aux usages qui en seront faits. Les données que possède
  6. la communauté ne pourront servir que si celle-ci le souhaite et des données doivent être accessibles si les particuliers quittent les communautés des Premières Nations.

Faire rapport des progrès

La présente feuille de route jette les bases de la transformation du système de sécurité du revenu, et comporte des recommandations détaillées et particulières pour s’engager dans cette voie.

Le gouvernement doit rendre des comptes dans la mise en œuvre de ce programme de changement, et faire rapport avec transparence, de façon factuelle et à intervalles réguliers au public quant aux progrès réalisés, notamment ceux vers la concrétisation du niveau minimum de revenu sur dix ans.

Il est entendu que les catalyseurs du changement ne se cantonnent pas dans les pouvoirs d’un seul ministère ou ministre, et qu’une démarche pangouvernementale sera requise pour évaluer les progrès et l’apport du changement dans l’ensemble du système de sécurité du revenu.

Étant donné qu’il n’existe pas une seule source de pouvoir et de responsabilisation, nous recommandons qu’un organisme tiers – un établissement universitaire, un groupe de réflexion ou un groupe d’experts – fasse l’examen du rapport annuel sur les progrès présenté par le gouvernement et commente celui-ci, notamment la validité des déclarations sur les progrès réalisés.

Recommandations détaillées

20.1 Instaurer un rapport annuel public dans lequel seront décrits les progrès quant aux recommandations de la feuille de route, dont les progrès par rapport aux résultats.

20.2 Mettre en place un organisme tiers qui examinera le rapport annuel sur les progrès puis formulera à ce sujet des commentaires qu’il présentera au Conseil des ministres.

20.3 Exiger que le rapport annuel et les commentaires de l’organisme tiers soient déposés à l’Assemblée législative.

Mise En Séquence Du Changement : Une Feuille De Route Décennale

Dans les sections précédentes de la feuille de route, des changements tangibles sont recommandés au système de sécurité du revenu de l’Ontario pour en améliorer dans l’ensemble la capacité de soutien aux diverses personnes qui y ont recours. Il ne faut envisager les changements proposés ni isolément, ni comme un menu d’options. Pour être efficace, l’instauration de ces changements doit être mise en séquence de façon à :

  • Accorder du temps à la mise en place de démarches cruciales de conception en collaboration qui permettent de mobiliser les points de vue d’une gamme d’experts, tout particulièrement les personnes ayant du vécu.
  • Permettre aux leçons tirées aux premiers stades de la réforme d’éclairer les stades ultérieurs, y compris les leçons tirées du projet pilote portant sur le revenu de base.

La mise en séquence reflète une attention fortement prêtée aux recommandations au cours des trois premières années, lesquelles sont cruciales pour donner l’impulsion voulue et jeter les bases des changements subséquents. La feuille de route est moins contraignante en ce qui touche la mise en séquence allant de la quatrième à la dixième année, puisque celle-ci dépendra en grande partie du déroulement de l’instauration initiale et des autres changements apportés au paysage de la sécurité du revenu.

Première Année

Au cours de la première année, le changement est instauré de plusieurs façons. D’abord, il s’agit d’aider les gens dans la pauvreté extrême par une augmentation des taux d’aide sociale, de transformer la structure tarifaire de l’aide sociale et d’apporter des changements bénéfiques aux règles sur les gains et les actifs dans l’aide sociale. En ce qui touche les personnes qui habitent des régions rurales éloignées, l’admissibilité à l’Allocation pour les collectivités éloignées dans le contexte de l’aide sociale sera élargie.

Ces changements immédiats s’accompagnent de la préparation à d’autres changements aux prestations au cours des trois premières années de la feuille de route : concevoir en collaboration les détails d’une prestation de logement transférable, mobiliser le gouvernement fédéral dans l’augmentation de la Prestation fiscale pour le revenu de travail (PFRT), et prendre des mesures de transition afin de situer les prestations restantes pour enfants à l’extérieur de l’aide sociale. À long terme, les changements visant à améliorer le fonctionnement du système de l’aide sociale s’amorcent également par une nouvelle démarche envers les lois et règlements du programme Ontario au travail, la mise à l’essai de nouvelles démarches pour travailler avec les prestataires de l’aide sociale, la prise d’un engagement envers un niveau minimum de revenu et l’élaboration connexe d’une mesure du panier de consommation « ontarienne », de même que divers autres changements administratifs à l’aide sociale (p. ex., des améliorations apportées au processus de présentation de demande et d’une détermination de l’admissibilité dans le POSPH, des changements à la définition de « conjoint »).

De plus, des travaux s'attaqueront immédiatement à l’élaboration de systèmes de gestion de cas et d’évaluation intensive relativement à l’aide sociale, la conception en collaboration débutant précocement la première année pour appuyer la pleine mise en œuvre de ces systèmes d’ici la fin de la troisième année.

Durant la première année, il sera également important de déterminer l’organisme tiers qui procédera à l’examen puis formulera des commentaires dans des rapports annuels sur les progrès, de façon à pouvoir véritablement mesurer les retombées des réformes liées à la feuille de route. De plus, les discussions avec les partenaires des Premières Nations s’amorceront immédiatement pour définir la portée des exemptions législatives et déterminer les processus de collaboration pour tendre vers le contrôle par les Premières Nations des services sociaux, y compris des mesures provisoires comme la prestation du POSPH.

Deuxième Année

Durant la deuxième année de mise en œuvre, le soutien du revenu aux personnes dans la pauvreté extrême continuera d’augmenter. L’attention sera également prêtée à l’instauration d’une prestation de logement en Ontario, à la mise au point définitive de l’élaboration d’une mesure ontarienne du panier de consommation, et aux changements apportés qui permettront le « cumul des prestations » afin de bien appuyer la suffisance du revenu de certaines personnes.

Cette année là, certains changements agiront également sur les soutiens existants dans le cadre de l’aide sociale. Les prestations pour soins de santé de base seront accrues, une révision du Programme d’appareils et accessoires fonctionnels s’amorcera, et des changements seront apportés au programme Aide pour soins temporaires. La nouvelle démarche de gestion de cas intensive et en collaboration sera également maintenue.

Au cours de la deuxième année, il sera également important d’amorcer le travail de conception en collaboration nécessaire en vue de soutenir l’instauration d’une formule de revenu assuré pour les personnes handicapées au cours de la quatrième année.

Troisième Année

En troisième année, il s’agira de mener à bien le premier stade de l’instauration de la feuille de route. D’autres hausses seront instaurées au soutien du revenu à l’intention des personnes dans la pauvreté extrême. L’attention sera également prêtée à l’augmentation de la prestation de logement et à la nouvelle exemption du revenu (instaurée en deuxième année) dans le cadre de l’aide sociale. Le taux forfaitaire normal et le taux forfaitaire normal pour personne handicapée augmenteront également.

Les travaux d’élaboration de la mesure ontarienne du panier de consommation devraient être terminés, et les nouvelles démarches envers les suppléments pour enfants, le programme Aide pour soins temporaires et l’Allocation pour les collectivités éloignées dans le cadre de l’aide sociale se poursuivront.

De La Quatrième À La Dixième Année

De la quatrième à la dixième année, des progrès seront constamment effectués vers l’objectif de suffisance en fonction d’un niveau minimum de revenu confirmé, mais l’attention sera également prêtée aux changements structurels à long terme qui accompagnent les changements apportés au cours des trois premières années. On aura l’occasion d’accroître la prestation de logement transférable et d’officialiser la nouvelle démarche de gestion de temps. Dans le contexte de l’aide sociale, il est prévu que les prestations discrétionnaires seront pleinement reconçues, et que l’image de marque du programme Ontario au travail sera modifiée suivant une amélioration de la culture et de la démarche de service.

En quatrième année, les thèmes centraux seront l’instauration d’une formule de revenu assuré pour les personnes handicapées prestataires du POSPH et l’instauration d’un supplément à la Prestation ontarienne pour enfants à l’intention des familles ayant les revenus les plus faibles plutôt que des seuls prestataires de l’aide sociale. Cette année là, il y aura également l’instauration de prestations de soins de santé accrues et nouvelles pour les personnes à faible revenu, à partir des bases jetées par le programme Beaux sourires Ontario et le programme Assurance-santé+, et dont le point de départ sera l’élargissement de l’admissibilité des adultes à faible revenu à la couverture des médicaments. En cinquième année, l’exemption du revenu dans l’aide sociale sera complètement en phase avec l’exemption actuelle des gains.

L’inaction Contre L’action

À bien des égards, le système de sécurité du revenu est défectueux et, conformément à la description faite au début de la feuille de route, les conséquences sur le plan humain sont très graves :

  • Près de deux millions de personnes vivent en deçà de la mesure fédérale de faible revenu, ce qui signifie qu’elles vivent dans la pauvretéfootnote 96
  • Plus de 900 000 particuliers et familles, dont environ 270 000 enfants, dépendent de l’aide socialefootnote 97 : ce nombre englobe les personnes dans la pauvreté extrême qui chaque jour, sont préoccupées à propos de leur prochain repas, du lieu où elles dormiront, et de leur sécurité à l’avenir.
  • Plus d’un demi-million de personnes ont peine à accéder à des aliments abordables et sainsfootnote 98 , le nombre de personnes dépendantes des banques alimentaires ne cessant d’augmenter. En mars 2016 seulement, 333 944 personnes ont eu accès aux banques alimentaires en Ontario, une hausse de 6 % depuis 2008footnote 99.
  • La pauvreté rend les gens malades et cause le décès prématuré de milliers de personnes chaque annéefootnote 100.

Le coût de l’inaction

La pauvreté est un phénomène intensément personnel qui, s’il est vécu à l’échelle individuelle, touche néanmoins tout le monde. Elle se traduit par des résultats défavorables non seulement pour une personne, mais pour les familles, les communautés et l’ensemble de la province.

La pauvreté occasionne une demande accrue en services sociaux et programmes communautaires, une hausse de la fréquence d’utilisation du système de soins de santé, et un accroissement des interactions avec le système de justice, ce qui entraîne des coûts qui pourraient être évités. Par exemple :

  • Une étude réalisée à Toronto a permis de constater que les personnes du quintile de revenu inférieur passaient 89 jours de plus à l’hôpital pour chaque tranche de 1 000 résidents que ceux du quintile de revenu supérieur suivantfootnote 101. Si le coût d’un séjour à l’hôpital à Toronto est évalué en moyenne à 1 158 $/jourfootnote 102 les coûts supplémentaires pour chaque tranche de 1 000 résidents à faible revenu se chiffrent à plus de 100 000 $.
  • D’après l’Agence de la santé publique du Canada, les inégalitésfootnote 103  occasionnent 20 % des dépenses totales en soins de santé.
  • Une étude du Toronto Star a révélé que 70 % des contrevenants incarcérés avaient des antécédents instables sur le plan professionnel. La même étude a également permis de sonder 300 adultes sans abri pour constater que 73 % des hommes ont été arrêtés et 49 % d’entre eux, incarcérés au moins une fois; 12 % des femmes avaient été incarcéréesfootnote 104.

Il ne fait aucun doute que la pauvreté coûte cher et que nous en payons tous le prix.

De nombreux efforts ont été déployés pour quantifier le coût de la pauvreté dans les administrations canadiennes, le plus fréquemment à l’échelle provinciale. Les démarches à ce chapitre varient, mais il ressort de la recherche que les coûts sont considérables, allant de 4 % à 7,6 % du produit intérieur brut (PIB)footnote 105. En Ontario, si nous partons du principe que les coûts se situent au milieu de cette fourchette, à 6 % du PIB, ils se chiffreraient à 48 G$footnote 106 . Dans une étude réalisée en 2008, les coûts évalués à ce chapitre sont supérieurs, dans une fourchette allant de 32 à 38 G$/année par suite d’une hausse des coûts des soins de santé et des services sociaux, d’une baisse des recettes fiscales, et des répercussions de la pauvreté intergénérationnellefootnote 107. Ces coûts correspondent à environ 2 300 $/année pour chaque ménage en Ontario.

Le fait de ne pas réformer le système de sécurité du revenu occasionne également des coûts très élevés. De plus, ces coûts déboucheront sur une détérioration perpétuelle des résultats chez les personnes à faible revenu et à l’échelle de l’économie dans son ensemble. Selon les estimations :

  • Les coûts de renonciation de la productivité perdue en raison de la pauvreté se traduisent par une baisse allant de 4 à 6,1 G$/année de l’impôt sur le revenu perçu par tous les gouvernementsfootnote 108.
  • L’économie de l’Ontario pourrait grimper en flèche de 4,7 G$ si la
    main-d’œuvre autochtone avait davantage de possibilitésfootnote 109.
  • En 2020-2021, l’Ontario dépensera plus de 10 G$ seulement pour maintenir les programmes d’aide sociale compliqués et inefficaces actuellement en place : ces dépenses sont supérieures de plus d’un milliard de dollars aux dépenses actuelles. Une hausse de l’inflation, même modeste, se traduirait par des coûts de plus de 600 M$ au cours des trois prochaines années, sans pour autant changer le cours des choses dans l’expérience vécue par les gens ou les résultats qu’ils obtiennent.
  • Les coûts du Programme de médicaments de l’Ontario en lien avec les prestataires de l’aide sociale ont augmenté de 16 % au cours des cinq dernières années, ce qui est attribuable en partie au nombre croissant de personnes ayant un trouble de santé mentale ou un problème de toxicomanie.

Les décisions prises antérieurement pour réaliser des économies par des réductions à l’aide sociale ont occasionné une détérioration des résultats chez les gens et exacerbé les problèmes liés à la pauvreté. Ces économies se sont traduites par un abandon des dépenses se chiffrant à environ 36 G$ au cours des 22 dernières annéesfootnote 110.

Les retombées de l’action

Le fait de passer à l’action et d’engager sur 10 ans des investissements stratégiques et liés entre eux pour réformer le système de sécurité du revenu garantira un rendement amélioré à long terme des dépenses gouvernementales. Globalement, l’investissement sera réparti entre plusieurs secteurs, dont le logement, la santé, les prestations fiscales, les soutiens aux personnes handicapées et l’aide sociale; de plus, il touchera idéalement divers ordres de gouvernement. Il est crucial de ne pas oublier que ces investissements ne sont pas ceux qui iront dans le système tel qu’il existe actuellement. Ce sont plutôt des investissements qui créeront le système de l’avenir : un système qui témoigne des changements fondamentaux nécessaires afin d’aider les gens à parvenir à l’inclusion sociale et économique.

Il est impossible d’évaluer le coût complet de l’instauration de la feuille de route sur dix ans, pour plusieurs raisons :

  • Un important travail de conception en collaboration doit être mené afin de déterminer les détails sous-jacents aux réformes recommandées (p. ex., l’élargissement des prestations pour soins de santé de base aux personnes à faible revenu, le rehaussement de la Prestation fiscale pour le revenu de travail).
  • Les recommandations feront intervenir de nombreux ministères provinciaux et le gouvernement fédéral en tant que chefs de file des politiques et bailleurs de fonds, ainsi que les communautés des Premières Nations à titre de partenaires autonomes.
  • Certaines recommandations doivent être mises à l’essai avant l’instauration à grande échelle des changements (p. ex., une nouvelle philosophie de service aux prestataires du programme Ontario au travail et du POSPH qui favorise une culture axée sur la confiance, la collaboration et la résolution de problèmes).
  • On ne saurait évaluer avec certitude les compensations qui seront obtenues au fur et à mesure de l’implantation des réformes, et qui influeront sur le comportement des personnes et amélioreront les résultats. De même, les gains d’efficience réalisés par les efforts de modernisation actuellement en cours dans la prestation des services demeurent actuellement inconnus.

Cependant, un effort concerté a été consenti pour évaluer l’investissement nécessaire au soutien d’un grand nombre des éléments clés répertoriés au cours des trois premières années de la feuille de route. De façon précise, les éléments suivants sont pris en compte :

  • Le logement, par :
    • l’instauration d’une prestation de logement transférable qui aidera à composer avec les coûts extraordinairement élevés du logement dans le marché locatif actuel et favorisera la mobilité des personnes afin que ces dernières puissent profiter des offres d’emploi ou déménager pour soutenir les besoins familiaux.
    • une démarche équitable envers le soutien du revenu chez les personnes qui habitent un logement dont le loyer est indexé sur le revenu par une structure tarifaire d’aide sociale transformée.
    • une exigence, en lien avec les points susmentionnés, pour les municipalités de réinvestir les revenus supplémentaires dans des mesures prioritaires locales de logement et d’aide aux sans abri.
  • L’aide sociale, par :
    • une structure transformée qui donne à tous les adultes l’accès à un niveau constant de soutien, quelle que soit leur situation de vie.
    • une période d’attente abrégée pour les exemptions de gains dans le programme Ontario au travail.
    • les règles modernes régissant le revenu et les actifs qui appuient les personnes afin qu’elles puissent optimiser le revenu qui s’offre à elles et épargner pour l’avenir.
  • Les personnes dans la pauvreté extrême, par :
    • des hausses substantielles au soutien du revenu dans l’aide sociale afin que les programmes s’y rapportant puissent faire le « gros du travail » nécessaire pour satisfaire aux besoins profonds et immédiats et donner suite aux problèmes urgents auxquels font face actuellement les personnes qui tentent de se tailler une place dans le marché du travail.

Le coût estimatif total de ces éléments clés se chiffre à 3,2 G$ à partir de 2020-2021 (3e année), à savoir 810 M$ en 2018 2019, 2,41 G$ en 2019 2020, et 3,2 G$ en 2020 2021.

Comme nous l’avons souligné au préalable, cet investissement sera pris en compte dans le contexte élargi des décisions prises antérieurement et des dépenses actuelles; le montant de 4,75 G$ correspond à ce qui suit :

  • un pourcentage de 9 % des dépenses abandonnées dans l’aide sociale au cours des 22 dernières années; (36 G$)
  • moins de 10 % des prestations fédérales et provinciales de sécurité du revenu versées aux Ontariens (65,7 G$);
  • environ 6 % des dépenses prévues dans le secteur de la santé en Ontario (51,8 G$)footnote 111
  • un pourcentage de 1,7 % des investissements prévus dans les infrastructures en Ontario (190 G$, à compter de 2014-2015)footnote 112.

Au fur et à mesure que s’améliorera la suffisance du revenu, il y aura un effet multiplicateur puisque cette somme monétaire agira sur l’économie. Pour l’exercice 2017-2018, le gouvernement fédéral a évalué que le multiplicateur de dépenses et fiscal des mesures budgétaires orientées vers les ménages à revenu modeste et à faible revenu s’établira à 1,3, ce qui signifie qu’un investissement de 1,00 $ se traduira par une activité économique de 1,30 $. Il s’agit d’un rendement considérable, car le multiplicateur relatif à l’investissement d’infrastructure se fixe à 1,4footnote 113. À l’aide de cet effet multiplicateur, les répercussions totales des changements sur l’économie prévues au cours des trois premières années de la feuille de route se chiffreraient à plus de 8 G$.

Une tendance se dessine à l’échelle mondiale pour trouver des moyens de donner un essor à la classe moyenne face à la disparité de plus en plus croissante des revenus. La présente feuille de route montre un plan pour en arriver à la suffisance du revenu en dix ans et pour orienter efficacement les sommes monétaires (en milliards de dollars) consacrées à l’amélioration des résultats dans les domaines de la santé et du mieux-être, de l’emploi, et de l’inclusion sociale. Les gens sont notre ressource la plus importante. Faute d’investir dans l’amélioration de la qualité de vie des personnes appauvries, les problèmes auxquels ces dernières, nos communautés et l’économie dans son ensemble font face ne s’en trouveront qu’aggravés.

En Conclusion

La présente feuille de route promet un système réformé et renouvelé de sécurité du revenu en Ontario. Ce système est ancré dans une vision commune pour l’Ontario, où les particuliers sont traités avec respect et dignité, outillés pour atteindre leur plein potentiel et inspirés à le faire, et bénéficiant d’un accès équitable à un système axé sur la responsabilisation qui aide à surmonter l’effet dévastateur de l’insuffisance du revenu ou du soutien sur la vie. L’objectif ultime consiste à parvenir à l’inclusion sociale et économique, tout en prêtant particulièrement attention aux besoins et au vécu des Autochtones.

La feuille de route consiste en un plan d’action global afin d’amener un changement fondamental au cours des dix prochaines années. Elle est axée sur le besoin urgent de mesures immédiates de même que la synchronisation et l’ordre subséquents d’une série intégrée de réformes. Il s’agit d’un plan ambitieux mais réalisable si tous les partenaires du paysage de la sécurité du revenu collaborent en vue de soutenir ce changement transformationnel.

Il est dans notre intérêt collectif d’appuyer la capacité des gens à prospérer de même qu’à contribuer au tissu social de nos collectivités et au mieux-être économique de notre province. Nous avons constaté que les insuffisances du système actuel, notamment la privation, le désespoir et les occasions perdues, ont occasionné de graves conséquences sur le plan humain. D’innombrables rapports et recommandations sont parus au cours des 30 dernières années. Il est désormais temps de passer à l’action.

Annexe A : Membres Des Groupes De Travail

Groupe de travail sur la réforme en matière de sécurité du revenu pour les Premières Nations

Nancy Johnson : Animatrice
Denise Stonefish (coprésidente) : Grand chef adjoint, Association des Iroquois et des Indiens alliés Chiefs of Ontario
Linda Sandy : Chiefs of Ontario
Zachariah General : Association des Iroquois et des Indiens alliés
Samantha Maracle : Association des Iroquois et des Indiens alliés/Mohawks de la baie de Quinte
Debbie Lipscombe : Grand conseil du Traité no 3
Bobby Narcisse : Nation Nishnawbe Aski
Violet Chilton : Nation Nishnawbe Aski
Adrienne Pelletier : Nation Anishinabek (Union des Indiens de l’Ontario)
Shelly Trudeau : Nation Anishinabek (Union des Indiens de l’Ontario)/Wikwemikong
Diane Maracle : Nadjiwon Premières Nations indépendantes
Daniel Bruyere : Premières Nations indépendantes/Akwesasne
Sandy Porter : Six Nations de la rivière Grand
Laurie Miller : Six Nations de la rivière Grand
Elizabeth Richer : Services Niigaaniin
Scott Wemigwans : Services Niigaaniin/Conseil tribal de North Shorel
Violet Boissoneau : Services Niigaaniin
Linda Cobiness : Programme de l’initiative des services sociaux Min-O-Qwe-Ka-Ga-Bwe’in (chefs de Kenora)
Joe Barnes : Programme de l’initiative des services sociaux Min-O-Qwe-Ka-Ga-Bwe’in (chefs de Kenora)
Melanie Copenace : Programme de l’initiative des services sociaux Min-O-Qwe-Ka-Ga-Bwe’in (chefs de Kenora)
Norma Albert : Programme de services de soutien Stepping Stones
Patrick Thunder : Child Programme de services de soutien Stepping Stones
Megan Logan : Conseil des jeunes des Premières Nations de l’Ontario
Darian Baskatawang : Conseil des jeunes des Premières Nations de l’Ontario
Jessica Nadjiwon : Ontario Native Welfare Administrators Association
Denise Bouchard : Ontario Native Welfare Administrators Association/Bande indienne de Red Rock

Groupe de travail sur la réforme en matière de sécurité du revenu

George Thomson : Facilitateur
Paula Allen : Morneau Shepell
Pedro Barata : United Way
Gary Bloch : Hôpital St. Michael’s
Pat Capponi : Voices from the Street
Giuliana Carbone : Ville de Toronto
Laura Cattari : Table ronde de Hamilton pour la réduction de la pauvreté
Debbie Douglas : Conseil ontarien des organismes de service aux immigrants (OCASI) Colour of Poverty, Colour of Change (COPC-COC)
Dr. Ruth Koleszar-Green : Faculté de service social, Université York
Mary Marrone : Centre d’action pour la sécurité du revenu (ISAC)
Lekan Olawoye : Studio Y, District de la découverte MaRS
Bina Osthoff : Ministère des Services sociaux et communautaires
Keith Palmer : Comté de Dufferin, Association des services sociaux des municipalités de l’Ontario (OMSSA)
Janet Patterson : Conseil d’administration des services sociaux du district de Parry Sound
Janet Reansbury : Community Living Brant
John Stapleton : Fondation Metcalf

Table de concertation sur la réforme en matière de sécurité du revenu pour les Autochtones en milieu urbain

Fédération des centres d’amitié autochtones de l’Ontario
Association des femmes autochtones de l’Ontario
Nation métisse de l’Ontario

Annexe B : MFR chez différents types de familles dans la stratégie de réduction de la pauvreté

Mesure de faible revenu de la Stratégie ontarienne de réduction de la pauvreté (MFR de la SORP)*

Taille du ménage

dollars de 2016

1

21 929 $

2

31 013 $

3

37 983 $

4

43 859 $

5

49 035 $

6

53 716 $

7

58 019 $

* Selon la répartition des revenus en 2012 et après rajustement en fonction
de l’inflation

Annexe E : Glossaire

Suffisance : En ce qui touche le revenu, conviction quant à la quantité de ressources nécessaires pour parvenir à un niveau de vie en particulier.footnote 114.

Programme Aide à l’égard d’enfants qui ont un handicap grave (AEHG) : Programme du gouvernement de l’Ontario qui fournit un soutien financier aux familles à revenu faible ou modeste afin de couvrir certaines des dépenses supplémentaires liées aux soins prodigués à un enfant qui a un handicap gravefootnote 115 .

Programme d’appareils et accessoires fonctionnels : Programme du gouvernement de l’Ontario qui aide les personnes ayant une déficience physique de longue durée à payer de l’équipement adapté (p. ex., fauteuils roulants, prothèses auditives) et des fournitures spécialiséesfootnote 116.

Gîte et couvert : Aux fins de l’aide sociale, le fait qu’un particulier bénéficie des repas et du logement d’une même source, à l’exclusion d’un refuge d’urgencefootnote 117 .

Allocation canadienne pour enfants (ACE) : Paiement mensuel non imposable versé par le gouvernement fédéral aux familles admissibles pour les aider à subvenir aux besoins de leurs enfants de moins de 18 ans. L’ACE peut comprendre la prestation pour enfants handicapés et les programmes provinciaux et territoriaux connexes, notamment la Prestation ontarienne pour enfantsfootnote 118 .

Programme de prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada (PPIRPC) : Le RPC verse des prestations d’invalidité aux personnes qui ont suffisamment cotisé au Régime et qui ont une invalidité qui les empêche d’occuper un emploi, quel qu’il soit, de façon régulière. Leurs enfants à charge peuvent aussi être admissibles à des prestationsfootnote 119.

Inclusion économique : L’ouverture des possibilités économiques aux groupes sociaux mal servis. Dans une économie de marché inclusive, toute personne, nonobstant son genre, son lieu de naissance, ses antécédents familiaux, son âge ou les autres éléments de sa situation, dispose d’un accès complet et équitable aux marchés du travail, aux finances et à l’entreprenariat et, de façon générale, aux possibilités économiquesfootnote 120.

Assurance emploi (AE) : Programme fédéral de prestations fondé sur le revenu et qui offre un soutien du revenu temporaire aux travailleurs sans emploi pendant qu’ils cherchent du travail ou perfectionnent leurs compétences. Ce programme fournit également des prestations spéciales aux travailleurs qui s’absentent du travail en raison d’événements précis de la vie (maladie; grossesse; soins à un nouveau né, à un enfant nouvellement adopté ou à un enfant gravement malade; soins à un membre de la famille qui est gravement malade et qui risque de mourir). Les travailleurs reçoivent des prestations d’assurance emploi seulement s’ils ont cotisé au régime au cours de la dernière année et satisfont aux conditions d’admissibilitéfootnote 121.

Premières Nations : Nations distinctes et autonomes qui possèdent des droits inhérents à l’autodétermination. Elles ont des lois, des systèmes de gouvernance, une langue, une culture, des territoires, des systèmes économiques, une citoyenneté, une histoire et des structures sociales qui leur sont propresfootnote 122.

Sécurité alimentaire : Situation où les gens ont accès à une alimentation suffisante, sécuritaire, nutritive et adaptée sur le plan culturel, et qui répond à leurs besoins alimentairesfootnote 123 .

Régime de revenu annuel garanti (RRAG) : Revenu minimum garanti versé par le gouvernement de l’Ontario aux retraités admissibles. Les prestations mensuelles du RRAG sont versées uniquement lorsque le revenu total (y compris la Sécurité de la vieillesse, le Supplément de revenu garanti et les autres sources de revenu) est inférieur au niveau total annuel garanti par la provincefootnote 124https://www.fin.gov.on.ca/fr/credit/gains/index.html.

Supplément de revenu garanti (SRG) : Prestations mensuelles non imposables offertes par le gouvernement fédéral aux bénéficiaires de la pension de la Sécurité de la vieillesse (SV) qui ont un faible revenu et qui vivent au Canadafootnote 125 .

Beaux sourires Ontario (BSO) : Programme de soins dentaires financé par le gouvernement de l’Ontario et qui offre des services dentaires préventifs, courants et d’urgence pour les enfants et les jeunes de 17 ans et moins d’un ménage à faible revenufootnote 126.

Système de sécurité du revenu : Le « filet de sécurité » élargi des programmes dont la prestation est assurée par les gouvernements fédéral ou provincial ou les administrations municipales dans l’optique de traiter la dimension du faible revenu et les besoins connexesfootnote 127.

Centres d’amitié autochtones : Sociétés sans but lucratif situées dans les villes et villages de l’Ontario et dont le mandat consiste à répondre aux besoins des Autochtones, au delà de la définition juridique. Les centres d’amitié sont les principaux agents de prestation de services aux Autochtones qui nécessitent des services sensibles et adaptés sur le plan culturel en milieu urbain. La Fédération des centres d’amitié autochtones de l’Ontario est l’organisme autochtone provincial qui défend les intérêts collectifs des centres d’amitié membresfootnote 128.

Autochtones : Aux fins de la présente feuille de route, le terme Autochtones désigne les membres des Premières Nations, les Métis et les Inuits qui vivent en Ontario.

Traumatisme intergénérationnel : « Traumatisme complexe collectif infligé à un groupe de personnes ayant en commun une identité ou une affiliation collective particulière : l’appartenance ethnique, la nationalité et l’affiliation religieuse. Il correspond aux séquelles de plusieurs événements traumatisants vécus par un groupe de génération en génération, et il recoupe les réactions psychologiques et sociales à de tels événements »footnote 129.

En contexte autochtone, le colonialisme pratiqué durant des siècles pour anéantir l’identité culturelle et le mode de vie des Autochtones a causé un traumatisme collectif grave qui est transmis d’une génération à l’autrefootnote 130.

Taux d’activité : Mesure par Statistique Canada de l’ensemble de la population active (qui regroupe les personnes occupées et les chômeurs) par rapport à la taille de la population en âge de travailler. Il s’agit de la proportion de la population en âge de travailler qui travaille ou qui recherche du travailfootnote 131.

Faible revenu : Revenu qui se situe en deçà de ce dont un particulier a besoin pour s’offrir les biens de première nécessité de la vie modernefootnote 132. En des termes statistiques, le faible revenu est habituellement défini en fonction d’une méthodologie ou d’un calcul, comme la mesure de faible revenu (veuillez consulter la page 47 pour obtenir une description de la mesure de faible revenu).

Niveau minimum de revenu : Niveau calculé à intervalles réguliers et qui révèle le revenu dont les particuliers ont besoin pour s’offrir un niveau de vie acceptablefootnote 133. Pour obtenir la démarche recommandée d’élaboration d’un niveau minimum de revenu, veuillez consulter les pages 79 à 83.

Effet multiplicateur : Situation où une hausse des dépenses se traduit par une hausse au revenu et à la consommation supérieure au montant initial dépenséfootnote 134.

Emploi atypique : Emploi dans lequel la personne, contre son gré, travaille à temps partiel ou à titre temporaire, cumule plusieurs emplois ou est travailleur autonome et n’a pas d’employéfootnote 135.

Programme de subventions accordées aux résidents du Nord de l’Ontario pour frais de transport à des fins médicales – Assurance santé de l’Ontario : Subvention pour frais de transport fournie par le gouvernement de l’Ontario aux résidents admissibles du Nord de l’Ontario qui doivent parcourir d’importantes distances pour obtenir un traitement médical. Cette subvention aide à payer certains coûts comme le voyage et l’hébergement, mais ne couvre pas toutes les dépenses comme les repas. Elle est calculée en fonction d’un trajet dans un sens jusque chez le médecin spécialiste ou à l’établissement de soins de santé approuvé le plus prochefootnote 136.

Sécurité de la vieillesse (SVS) : Pension versée par le gouvernement fédéral. Il s’agit d’une prestation mensuelle offerte aux personnes âgées de 65 ans et plus qui satisfont aux conditions canadiennes relatives à la résidence et au statut juridiquefootnote 137 .

Prestation ontarienne pour enfants (POE) : Programme qui fournit un soutien financier direct aux familles à revenu faible ou modeste, que les parents disposent ou non d’un emploi, afin d’aider les parents à subvenir aux besoins de leurs enfantsfootnote 138.

Programme de médicaments de l’Ontario (PMO) : Le Programme de médicaments de l’Ontario prend en charge la majeure partie des coûts de plus de 4 400 médicaments d’ordonnance pour les résidents de l’Ontario de 65 ans et plus. Des particuliers peuvent également y avoir droit avant 65 ans s’ils sont inscrits au programme Soins à domicile, au programme Ontario au travail, au POSPH ou au Programme de médicaments trilliumfootnote 139.

Stratégie ontarienne de réduction de la pauvreté (SORP) : Plan interministériel, d’une durée de cinq ans, actuellement axé sur la rupture du cycle de pauvreté chez les enfants et les jeunes en créant des possibilités d’emploi, en renforçant la sécurité du revenu et en mettant fin à l’itinérancefootnote 140.

Pauvreté : Le recoupement du faible revenu et des autres dimensions de l’exclusion sociale, comme l’accès à un logement approprié, aux biens et services essentiels, à la santé et au mieux-être ainsi qu’à la participation communautairefootnote 141footnote 142.

Emploi précaire : Concept au sens large qui définit un emploi ou une rémunération qui se caractérise par l’incertitude, la faiblesse du revenu ainsi que des avantages sociaux et des droits accordés par la loi qui sont limités. Dans certains cas, ce concept est synonyme d’emploi atypique mais dans d’autres, il désigne le travail qui comporte un élément d’incertitudefootnote 143.

Allocation nutritionnelle en période de grossesse et d’allaitement (ANPGA) : Programme du gouvernement de l’Ontario qui aide les femmes en période de grossesse ou d’allaitement à obtenir une aide sociale en lien avec les coûts des besoins nutritionnels relatifs à la grossesse et à l’allaitement footnote 144.

Racialisé : Processus par lequel les sociétés assoient la notion que les races sont bien réelles, différentes et inégales, de façons qui importent pour la vie sociale, économique et politiquefootnote 145.

Réconciliation : Collaboration avec les partenaires autochtones pour remédier aux tristes séquelles laissées par les pensionnats et relever les défis socioéconomiques auxquels les communautés autochtones sont confrontées, après des siècles de colonisation et de discriminationfootnote 146 .

Allocation pour les collectivités éloignées (ACE) : Programme du gouvernement de l’Ontario qui aide les prestataires de l’aide sociale qui vivent au nord du 50e parallèle et sans accès à une route pendant toute l’année à composer avec l’augmentation des coûts relatifs à la vie dans les collectivités du Nord et éloignéesfootnote 147

Loyer indexé sur le revenu (LIR) : Aide financière fournie aux ménages admissibles afin de diminuer le montant que le ménage consacre pour occuper un logement social. En Ontario, l’aide au LIR est fondée actuellement sur 30 % du revenu mensuel brut d’un ménage, ou une échelle de loyer si le ménage est prestataire de l’aide socialefootnote 148.

Soins d’une société : Situation où un enfant est confié aux soins d’une société d’aide à l’enfance au moyen d’une ordonnance en vertu de la Loi de 2017 sur les services à l’enfance, à la jeunesse et à la famille. Les soins d’une société de façon provisoire sont donnés dans les situations où l’enfant est retourné à un parent ou à une autre personne après une (ou des) période(s) d’au plus 12 mois au total. Les soins d’une société de façon prolongée se produisent lorsque l’enfant est confié à des soins d’ici à ce que l’ordonnance expire ou si elle est terminée.

Entreprise sociale : Entreprise qui utilise des stratégies d’affaires pour maximiser son impact social ou environnemental. Elle génère des revenus, mais son but premier est la création de résultats positifs qu’elle mesure en conséquencefootnote 149.

Inclusion sociale : L’inclusion sociale s’appuie sur les notions d’appartenance, d’acceptation et de reconnaissance; elle fait intervenir la concrétisation d’une participation pleine et égale aux organisations économiques, sociales, culturelles et politiques. Elle consiste à reconnaître la diversité et à lui accorder de l’importance, de même qu’à susciter un sentiment d’appartenance par un accroissement de l’égalité sociale et de la participation de diverses populations défavoriséesfootnote 150.

Allocation pour régime alimentaire spécial (ARS) : Programme du gouvernement de l’Ontario qui aide les bénéficiaires de l’aide sociale à financer le coût supplémentaire lié au régime alimentaire spécial dont ils ont besoin pour un état pathologique figurant sur l’annexe « Régimes alimentaires spéciaux »footnote 151.

Logement subventionné : Situation dans laquelle les particuliers ou familles à faible revenu ou à revenu modéré obtiennent l’aide du gouvernement ou d’un organisme privé pour payer leur loyer 152. Le type le plus répandu de logement subventionné en Ontario est le loyer indexé sur le revenu, mais les suppléments au loyer et les allocations de logement comptent parmi les autres moyens d’aide possiblesfootnote 152 .

Aide pour soins temporaires (AST) : Programme qui accorde un appui financier à un adulte pour le compte d’un enfant qui a besoin d’aide financière, n’est pas légalement à la charge de l’adulte et n’est pas sous la protection d’une société d’aide à l’enfance. L’admissibilité à l’AST est déterminée en fonction du revenu et de l’avoir de l’enfantfootnote 153.

Fonds de soutien à la transition (FST) : Créé en 2013 comme suite donnée au regroupement des soutiens au logement financés par le gouvernement provincial, dont ceux accordés aux prestataires de l’aide sociale, le FST a pour objet de fournir aux particuliers et familles à faible revenu, dont les particuliers prestataires de l’aide sociale, dans les communautés des Premières Nations une aide financière pour obtenir, conserver et entretenir un domicile sécuritaire et sainfootnote 154.

Pratiques sensibles au traumatisme : Pratiques qui tiennent compte du traumatisme dans tous les volets de la prestation de services et donnent la priorité au sentiment de sécurité, de choix et de contrôle du survivant. Elles promeuvent une culture thérapeutique axée sur la non-violence, l’apprentissage et la collaborationfootnote 155

Autochtones en milieu urbain : Concept qui fait principalement référence aux membres des Premières Nations, aux Inuits et aux Métis qui vivent actuellement dans les régions urbainesfootnote 157.

Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (CSPAAT) : Organisme indépendant qui gère les indemnisations et l’assurance collective sans égard à la responsabilité dans les milieux de travail en Ontario. Pour avoir droit aux prestations de la CSPAAT, le particulier doit satisfaire à plusieurs critères, notamment avoir une blessure ou une maladie directement liée à son travailfootnote 158 .