10.1 Champ d’application et exclusions

La Loi de 1995 sur les relations de travail (LRT) ne s’applique pas : à un domestique employé dans un foyer privé;

  • à une personne qui est employée à la chasse ou au piégeage;
  • à un employé agricole (couvert par la Loi de 2002 sur la protection des employés agricoles [LPEA]);
  • à une personne employée dans l’horticulture (sous réserve de certaines conditions et exceptions);
  • à un juge provincial;
  • à une personne employée comme médiateur ou conciliateur en matière de relations de travail.

En outre, la LRT prévoit que nul ne peut être considéré comme un employé :

  • s’il est architecte, dentiste, arpenteur-géomètre, avocat ou médecin, habilité à exercer sa profession en Ontario et employé en cette qualité; ou
  • si, de l’avis de la Commission des relations de travail de l’Ontario (CRTO), il exerce des fonctions de direction ou est employé à un poste de confiance ayant trait aux relations de travail.

Enfin, pour certains groupes d’employés dans le secteur public qui sont couverts par une législation particulière qui ne fait pas l’objet du présent examen, soit la LRT ne s’applique pas du tout, soit son application est modifiéefootnote 377.

10.1.1 Droit d’association et négociation collective

Lors des précédents examens des lois du travail dans la province de l'Ontario, la liberté d'association n'avait pas encore été entièrement formulée par la Cour suprême du Canada. Il s’agit du premier examen de la Loi de 1995 sur les relations de travail qui oblige le gouvernement de l’Ontario à tenir compte du fait qu’au Canada, le droit à la négociation collective véritable (y compris le droit de grève) est une composante essentielle de la liberté d’association, en vertu de l’alinéa 2d) de la Charte. Les décisions législatives antérieures visant à exclure ces catégories d’employés doivent maintenant être réévaluées compte tenu du contexte juridique bien différent à la suite de modifications importantes.

La Cour suprême du Canada a donné à la liberté d'association en vertu de l’alinéa 2d) de la Charte une interprétation solide et claire qui lie tous les gouvernements du Canada. Dans bien des cas, la Cour a clairement établi l'importance du droit constitutionnel protégé. Dans l’arrêt Association de la police montée de l’Ontario c. Canada (Procureur général), la Cour a affirmé ce qui suit :

Le droit d’association [...] constitue un droit distinct doté d’un contenu autre, un droit essentiel au développement et au maintien de la société civile dynamique sur laquelle repose notre démocratiefootnote 378.

Comme dans d'autres cas relatifs au travail, la Cour, dans le cas concernant l’Association de la police montée, a établi clairement que dans le contexte de l’emploi, la liberté d’association garantit le droit des employés « de véritablement s’associer en vue de réaliser des objectifs collectifs relatifs à leurs conditions de travail » et « inclut un droit de négocier collectivementfootnote 379 ».

Les employés privés du droit de poursuivre collectivement des objectifs relatifs aux conditions de travail pourraient se retrouver essentiellement impuissants dans leurs échanges avec leur employeur ou pour influencer leurs conditions d’emploi. L’idée n’est pas nouvelle. Comme l’a affirmé la Cour suprême des États-Unis dans l'arrêt National Labor Relations Board c. Jones & Laughlin Steel Corp., 301 U.S. 1 (1937), à la page 33 :

Il y a longtemps, nous avons exposé la raison d’être des organisations ouvrières. Nous avons dit qu’elles se sont formées pour répondre à l’urgence de la situation; qu’un simple employé était démuni quand il traitait avec un employeur et qu’il était habituellement tributaire de son salaire quotidien pour ce qui est de son entretien et de celui de sa famille; que si l’employeur refusait de lui payer le salaire qu’il estimait juste, il était néanmoins incapable de quitter son emploi et de résister à un traitement arbitraire et injuste [...] [Nous soulignons.]footnote 380

À de nombreuses reprises, la Cour a reconnu l’importance de la liberté d’association en réagissant au déséquilibre entre l’employeur et son pouvoir économique et la vulnérabilité relative des travailleurs individuels :

[...] l’al. 2d) vise à la fois à empêcher que des personnes – qui, isolées, demeureraient impuissantes – soient opprimées par des entités plus puissantes et à accroître leur influence par l’exercice d’un pouvoir collectif. Or, cette double fonction de l’al. 2d) ne peut être plus évidente que dans le cadre des relations de travail. En effet, les employés, agissant individuellement, ne disposent habituellement pas du pouvoir de négocier et de poursuivre des objectifs relatifs à leurs conditions de travail avec un employeur plus puissant. Seul le regroupement en association en vue de négocier collectivement – qui augmente ainsi leur pouvoir de négociation – permet à des employés de poursuivre véritablement leurs objectifs relatifs à leurs conditions de travailfootnote 381.

La Cour a insisté sur le fait que la négociation collective constitue un aspect fondamental de la société canadienne qui favorise la dignité humaine, la liberté et l’autonomie des travailleurs :

La négociation collective représente un aspect fondamental de la société canadienne qui « favorise la dignité humaine, la liberté et l’autonomie des travailleurs en leur donnant l’occasion d’exercer une influence sur l’adoption des règles régissant leur milieu de travail et, de ce fait, d’exercer un certain contrôle sur un aspect d’importance majeure de leur vie, à savoir leur travail » (Health Services, paragr. 82). En termes simples, son objectif consiste à protéger l’autonomie collective des employés contre le pouvoir supérieur de l’administration et à maintenir un équilibre entre les parties. Cet équilibre s’établit grâce à la liberté de choix et à l’indépendance accordées aux employés dans le cadre de ce processus de relations de travail.footnote 382

De plus, la Cour a souligné le fait que pour être significatif, le processus ne doit pas nuire substantiellement en réduisant le pouvoir de négociation des employés, puisque l’intention est de contrebalancer le déséquilibre qui existait par le passé entre le pouvoir de négociation des employés et des employeurs :

Le droit à un processus véritable de négociation collective constitue donc un élément nécessaire du droit de poursuivre collectivement et de manière véritable des objectifs relatifs au travail (Health Services; Fraser). Un processus de négociation collective n’aura toutefois pas un caractère véritable s’il empêche les employés de poursuivre leurs objectifs. Comme l’a affirmé la Cour dans Health Services : « un des succès fondamentaux résultant de la négociation collective est de pallier l’inégalité qui a toujours existé entre employeurs et employés [...] » (paragr. 84). Ainsi, le mécanisme qui porte substantiellement atteinte à un processus véritable de négociation collective en réduisant le pouvoir de négociation des employés ne respecte pas la liberté d’association garantie par l’al. 2d).footnote 383

Dans l’arrêt Saskatchewan Federation of Labour c. Saskatchewan, la Cour suprême précise que le droit à la grève est aussi protégé par la liberté d’association. La majorité affirmait ce qui suit :

L’histoire, la jurisprudence et les obligations internationales du Canada confirment que dans notre régime de relations de travail, le droit de grève constitue un élément essentiel d’un processus véritable de négociation collectivefootnote 384.

Et plus loin :

En recourant à la grève, les travailleurs s’unissent pour participer directement au processus de détermination de leurs salaires, de leurs conditions de travail et des règles qui régiront leur vie professionnelle (Fudge et Tucker, p. 334). Ainsi, le recours possible à la grève fait en sorte que les travailleurs peuvent, par leur action concertée, refuser de travailler aux conditions imposées par l’employeur. Cette action concertée directe lors d’une impasse se veut une affirmation de la dignité et de l’autonomie personnelle des salariés pendant leur vie professionnellefootnote 385.

Dans le contexte des relations de travail, il est clairement établi que ces principes sont applicables et s’exercent de façon à garantir le droit des employés de véritablement s’associer en vue de réaliser leurs objectifs collectifs en milieu de travail.

10.1.2 Le droit de grève des employés assurant des services essentiels

La Cour suprême a maintenu le droit du gouvernement de retirer le droit de grève dans certaines circonstances limitées en cas de conflit de travail touchant des employés assurant des services essentiels. L’expression « services essentiels » doit être interprétée conformément à la définition adoptée par le juge en chef Dickson dans l’arrêt Renvoi relatif à la Public Service Employee Relations Act (Alb.)footnote 386, qui affirme que les « services essentiels » doivent être interprétés et appliqués d’une manière qui soit conforme à l’article 1 de la Constitution, qui affirme ce qui suit :

La Charte canadienne des droits et libertés garantit les droits et libertés qui y sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique.

Le juge en chef Dickson a affirmé que pour se conformer à l’article 1, toute restriction imposée sur le droit d’association ne devrait pas être diminuée par une définition trop large de l’expression « services essentiels », mais que lorsqu’une interruption de services mettrait en danger la vie, la sécurité ou la santé de la totalité ou d’une partie de la population ou des personnes touchées par la maintenance et l'administration de la règle de droit, il peut être opportun de retirer le droit de grève pour limiter raisonnablement le droit d’association.

Dans l’arrêt Alberta Reference, le juge en chef Dickson s’inquiétait également du profond déséquilibre du pouvoir de négociation créé lorsque le retrait du droit de grève ne s’accompagne pas d’un véritable mécanisme de règlement des différends :

Manifestement, si le droit de grève devait être refusé et s’il n’était remplacé par aucun moyen efficace et juste de résoudre les conflits de travail, les employés se verraient refuser tout apport susceptible d’assurer des conditions de travail équitables et décentes et le droit des relations de travail s’en trouverait faussé entièrement à l’avantage de l'employeur. C’est pour cette raison que l’interdiction législative de la grève doit s’accompagner d’un mécanisme de règlement des différends par un tiers. Je suis d’accord avec ce que dit l’Alberta International Fire Fighters Association à la p. 22 de son mémoire, à savoir qu' « Il est généralement reconnu qu’employeurs et employés doivent être sur un pied d’égalité en situation de grève ou d’arbitrage obligatoire lorsque le droit de grève est retiré ». Le but d’un tel mécanisme est d’assurer que la perte du pouvoir de négociation par suite de l’interdiction législative des grèves est compensée par l’accès à un système qui permet de résoudre équitablement, efficacement et promptement les différends mettant aux prises employés et employeursfootnote 387.

Dans l’arrêt Saskatchewan Federation of Labour c. Saskatchewan mentionné précédemment, la Cour suprême du Canada a confirmé que lorsque le droit de grève est retiré pour des services essentiels, un processus de règlement de différends indépendant et efficace est nécessaire. Dans cette affaire, la Cour a été saisie de la question de savoir si une loi pouvait interdire à certains employés désignés assurant des services essentiels de faire la grève. Pour trancher cette question, la Cour a invoqué de nombreuses obligations internationales, y compris les obligations internationales du Canada en matière de droits de la personne, dont la Cour a déclaré :

Les obligations internationales du Canada en matière de droits de la personne commandent également la protection du droit de grève en tant qu’élément d’un processus véritable de négociation collective. Ces obligations ont amené le juge en chef Dickson à faire observer ce qui suit :

[...] il existe un consensus manifeste au sein des organes décisionnels de l’[Organisation internationale du Travail] suivant lequel la [Convention (no 87) concernant la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 68 R.T.N.U. 17 (1948)] ne se borne pas uniquement à protéger la formation des syndicats, mais protège leurs activités fondamentales, soit la négociation collective et le droit de grève. [Renvoi relatif à l’Alberta, p. 359]footnote 388.

Estimant que le droit de grève constitue un élément essentiel d’un processus véritable de négociation collective, la Cour a conclu que, puisque le législateur a restreint le droit de grève sans proposer de mécanisme de règlement des différends de rechange, l’interdiction est inconstitutionnelle. Parlant de la loi de la Saskatchewan intitulée Public Service Essential Services Act, 2008 (PSESA), la Cour a affirmé ce qui suit :

Lorsque le législateur limite le droit de grève d’une manière qui entrave substantiellement un processus véritable de négociation collective, il doit le remplacer par l’un ou l’autre des mécanismes véritables de règlement des différends couramment employés en relations de travail. La loi qui prévoit un tel mécanisme de rechange voit sa justification accrue au regard de l’article 1 de la Charte. À mon avis, l’absence d’un tel mécanisme dans la PSESA représente ce qui, en fin de compte, rend les restrictions apportées par celle-ci inadmissibles sur le plan constitutionnelfootnote 389.

Le juge de première instance conclut que les dispositions de la PSESA « vont au-delà de ce qui est raisonnablement nécessaire pour assurer la prestation ininterrompue de services essentiels durant une grève ». J’abonde dans le même sens. Le pouvoir unilatéral de l’employeur public de décider que des services essentiels seront assurés durant un arrêt de travail et de déterminer la manière dont ils le seront, à l’exclusion de tout mécanisme de contrôle approprié, sans compter l’absence d’un véritable mécanisme de règlement des différends, justifie la conclusion du juge selon laquelle la PSESA porte atteinte plus qu’il n’est nécessaire aux droits garantis par l’al. 2d). [Charactères gras dans l’original]footnote 390

10.1.3 L’obligation du gouvernement d’éliminer les obstacles à l’exercice et à la réalisation des droits d’association

Dans l'arrêt Health Services and Support - Facilities Subsector Bargaining Assn. c. Colombie-Britannique, (« Health Services, C.-B. »), la juge en chef McLachlin et le juge LeBel, au nom de la majorité, ont expliqué que le droit d’association impose aux gouvernements des obligations positives destinées à étendre la protection légale à des groupes particuliers :

[…] Dunmore reconnaît qu’en certaines circonstances l’al. 2d) peut imposer aux gouvernements des obligations positives destinées à étendre la protection légale à des groupes particuliers. Une loi d’application restreinte peut, « dans des contextes exceptionnels, avoir un effet substantiel sur l’exercice d’une liberté constitutionnelle » (paragr. 22). Un tel effet se produira dans les cas où l’argument fondé sur la portée trop limitative repose sur une liberté fondamentale garantie par la Charte et non simplement sur l’accès à un régime légal (paragr. 24); où la création d’une obligation positive en vertu de la Charte exige un fondement de preuve approprié (paragr. 25); où l’État peut vraiment être tenu responsable de toute incapacité d’exercer une liberté fondamentale (paragr. 26)footnote 391.

Dans l'arrêt Ontario (Procureur général) c. Fraser, la majorité de la Cour suprême du Canada a affirmé ce qui suit :

Après l’arrêt Dunmore, nul ne pouvait contester que l’exercice véritable et substantiel du droit de s’associer pour réaliser des objectifs liés au travail bénéficiait de la protection constitutionnelle accordée à la liberté d’association et que ce droit englobait la réalisation d’objectifs collectifs et non seulement individuels. Nul ne pouvait non plus douter que la loi (ou l’absence d’un cadre législatif) qui rendait essentiellement impossible cette démarche collective restreignait l’exercice de la liberté d’association. Enfin, la garantie devait indéniablement être interprétée de manière généreuse et téléologique, conformément aux valeurs canadiennes et aux engagements internationaux du Canada.footnote 392

Dans l’arrêt Health Services, C.-B., la Cour a déclaré :

Il peut être utile, avant d’aller plus loin, de préciser qui est touché par la protection de la négociation collective garantie par l’al. 2d) et de quelle manière elle l’affecte. La Charte s’applique seulement à l’acte de l’État. Une forme d’acte de l’État est l’adoption de textes législatifs. En l’espèce, la législature de la Colombie-Britannique a adopté une loi régissant les relations entre les employeurs du secteur de la santé et les syndicats accrédités auprès d’eux. Cette loi doit être compatible avec l’al. 2d) de la Charte, sinon elle est inopérante en vertu de l’art. 52 de la Loi constitutionnelle de 1982 (en l’absence de justification selon l’article premier de la Charte)footnote 393.

Dans les arrêts Health Services, C.-B. et Fraser, la Cour suprême a affirmé clairement que les gouvernements avaient l’obligation de retirer les obstacles à la négociation collective en fonction du droit d’association constitutionnel.

10.1.4 Les exclusions actuelles de la LRT

Le professeur Michael Lynk a affirmé dans son document intitulé A Review of the Employee Occupational Exclusions under the Ontario Labour Relations Act, 1995 :

[…] si la négociation collective, l’un de nos biens publics les plus importants, possède maintenant une place protégée en vertu de la Charte, l’accès à cette négociation ne devrait pas être établi uniquement en fonction de la politique économique et sociale ou des conséquences de la force du marché et de la puissance politique, mais aussi en tenant compte de facteurs respectant les droits et valeurs fondamentaux de notre constitution.

Deuxièmement, l’un des principaux thèmes des relations industrielles modernes est le fait que tous les employés, peu importe le travail qu’ils exécutent, leur poste ou leur statut dans le milieu de travail, sont intrinsèquement la partie vulnérable dans la relation d’emploi en raison de l’inégalité qui existe dans les pouvoirs de négociation des personnes qui dirigent et des personnes qui obéissent dans le milieu de travail. Dans cette optique, la Cour suprême du Canada a ajouté que : « l’inégalité entre le pouvoir économique de l’employeur et la vulnérabilité relative du travailleur sous-tend presque toutes les facettes de la relation entre l’employeur et son employé. » Selon ce point de vue, le concept de vulnérabilité de l’emploi et la solution correspondante de la protection réglementaire et l’accès à la négociation collective constitueraient une caractéristique fondamentale pour toute personne qui se trouve dans une relation d’emploi ou une relation similaire, peu importe l’endroit où elle se trouve sur le spectre de la main-d’œuvre.

Parallèlement à la compréhension de la portée de la vulnérabilité de l’employé, on retrouve dans la législation le concept d’universalité. Ce concept mentionne que l’institution protectrice que constitue la négociation collective devrait être à la disposition de chaque catégorie professionnelle d’employés, un peu comme si le droit du travail était sans frontière. En effet, l’universalité anime le travail de l’Organisation internationale du Travail et se trouve au cœur de son énoncé fondamental sur le droit d’association dans le milieu de travail relativement à l’élargissement du champ d’application de la négociation collective à tous les employés « sans distinction d'aucune sortefootnote 394. »

Nos recommandations sur la portée et le champ d’application de la LRT sont éclairées par la portée du droit constitutionnel de tous les employés de l’Ontario au droit d’association, par un mandat constitutionnel du gouvernement permettant d’éliminer les obstacles à l’exercice des droits constitutionnels des employés et par notre point de vue sur la politique publique pertinente.

Nous traiterons des exclusions existantes en vertu de la LRT dans l’ordre où elles y sont présentées.

10.2 Domestiques employés dans un foyer privé

Les domestiques employés dans un foyer privé sont les « employés embauchés directement par un ménage pour fournir des soins personnels au foyer ou à la résidence d’une famille avec enfants, d’une personne âgée ayant besoin de soins personnels ou d’une personne souffrant d’une maladie ou d’un handicap sans supervision et qui habitent dans ce foyerfootnote 395. »

La LRT ne s’applique pas à un domestique employé dans un foyer privé. La situation des domestiques est unique. L’exclusion historique de ce groupe était apparemment fondée sur la conviction que les domestiques formaient un lien social intime avec les foyers privés dans lesquels ils travaillaient, et que la possibilité de syndicalisation serait un obstacle injustifié à ce lien nécessairefootnote 396.

La réalité pratique est que l’élimination de cette exclusion visant les domestiques n’amènerait pas beaucoup d’avantages pour les domestiques parce que bon nombre d’entre eux sont les seuls employés d’un foyer privé dirigé par un propriétaire. La promesse du droit de s’associer à d’autres employés et de procéder à une négociation collective sera illusoire la plupart du temps. Cependant, il n’existe pas de motif valable sur le plan politique pour refuser à ce groupe de travailleurs son droit d’association constitutionnel.

Comme le professeur Lynk le mentionne dans son examen :

[…] sans revoir la manière dont la négociation collective ou une voix collective pourrait être exécutée pour la relation de travail d’un domestique, le retrait de leur exclusion de la LRT de l’Ontario, même s’il s’accompagne de l’assouplissement de la taille minimale d’une unité de négociation, qui est de deux employés, ne permettrait pas de faire progresser les possibilités d’une véritable négociation collective pour cette catégorie professionnellefootnote 397.

Cette catégorie professionnelle est dotée de caractéristiques particulières, décrites par Lynk dans son examen. Elles sont résumées comme suit :

Premièrement, ces travailleurs sont surtout des femmes et des migrants racialisés qui se trouvent actuellement au Canada ou y sont venus grâce à des permis de travail temporaires accordés aux termes du Programme des aides familiaux résidents (en vigueur depuis 1992) par l’intermédiaire d’ententes avec les Philippines et des pays des Caraïbes.

[…]

Deuxièmement, les spécialistes en droit et en sciences sociales qui ont étudié le statut d’emploi et social des domestiques en Ontario et au Canada ont noté le fait que ces travailleurs étaient particulièrement vulnérables et marginalisés. Cela découle de leurs nombreux emplois et de leurs insécurités sociales : leur état de travailleur temporaire, leurs conditions de logement sous le même toit que leur employeur, les limitations linguistiques, leur isolement social et professionnel, leur invisibilité politique, le fait que ce sont des femmes migrantes et racialisées, et le fait que leur travail demande peu de compétences et offre un faible salaire. L’un des thèmes récurrents dans la littérature en sciences sociales est le fait que ces travailleurs dépendent fortement de la volonté de leurs employeurs pour la protection et le maintien des trois caractéristiques dominantes de leur vie au Canada, soit leur emploi, leurs conditions de logement à titre de domestique et leur statut d’immigrant. À titre de travailleurs migrants au Canada, ils travaillent et vivent dans un pays dont ils ne connaissent pas les pratiques et modèles culturels qui prévalent, où ils n’ont qu’une faible compréhension de leurs droits dans le système réglementaire de l’emploi et où plusieurs travaillent et parlent une langue qui n’est pas leur langue maternelle. Surtout, ils travaillent et vivent en isolement relatif et ont peu de contact pendant leurs heures de travail et de repos avec d’autres personnes qui partagent leur situation sociale et ethnique et leur profession. Ces personnes interviennent peu dans la négociation de leurs conditions d’emploi; elles sont souvent réticentes à contester une décision d’un employeur qui contrevient à leur contrat d’emploi et elles ont souvent bien peu de recours efficaces dans le mode de plainte réglementaire normal si l’employeur rejette leur plainte ou préoccupation. Parmi les mauvais traitements dans le milieu de travail les plus signalés se trouvent un plus grand nombre d’heures de travail que prévu aux termes de leurs contrats ou de la législation sur les normes d’emploi, le manque constant de limites entre les heures de travail et les heures personnelles et le sentiment courant qu’ils sont surveillés et n’ont pas le droit d’avoir une vie privée parce qu’ils vivent dans le foyer de leur employeurfootnote 398.

Compte tenu de la vulnérabilité unique des domestiques et du manque d’accès à la négociation collective en pratique, on suggère que le gouvernement revoie la réglementation des droits et protections de ces employés en vertu de la LNE pour « les adapter à la nature particulière de ce travail et les vulnérabilités des domestiquesfootnote 399. » Dans nos recommandations portant sur la réglementation sectorielle en vertu de la LNE (voir le chapitre 6), nous recommandons un comité sectoriel spécifique composé d’employeurs et de représentants des employés afin de régler les enjeux touchant particulièrement les domestiques.

Recommandation

  1. L’exclusion de la Loi de 1995 sur les relations de travail touchant les domestiques devrait être retirée.

10.3 Personnes employées à la chasse ou au piégeage

La LRT ne s’applique pas à une personne qui est employée à la chasse ou au piégeage.  Aucun autre territoire canadien n’exclut ce groupe du champ d’application de la législation provinciale applicable à l’emploi. Il s’agit d’un anachronisme en 2017.

Recommandation

  1. L’exclusion de la Loi de 1995 sur les relations de travail touchant les personnes employées à la chasse ou au piégeage devrait être retirée.

10.4 Employés de l’agriculture et de l’horticulture

La LRT ne s’applique pas à un employé agricole (couvert par la LPEA) ou à un employé de l’horticulture (sous réserve de certaines conditions et exceptions). Nous avons décidé de traiter ces deux exclusions ensemble, en commençant par les employés agricoles.

10.4.1 Employés agricoles

L’agriculture est définie comme suit dans la LRT :

« agriculture » S’entend de tous ses domaines d’activité, notamment la production laitière, l’apiculture, l’aquiculture, l’élevage du bétail, dont l’élevage non traditionnel, l’élevage des animaux à fourrure et de la volaille, la production, la culture et la récolte de produits agricoles, y compris les œufs, les produits de l’érable, les champignons et le tabac, et toutes les pratiques qui font partie intégrante d’une exploitation agricole. La présente définition exclut toutefois tout ce qui n’a pas ou n’aurait pas été établi comme étant de l’agriculture aux termes de l’article 2 de la loi que la présente loi remplace telle qu’elle existait au 22 juin 1994.

Jusqu’en 1994, les travailleurs agricoles étaient exclus du régime des relations de travail de l’Ontario.

En 1992, le gouvernement de l’Ontario a reçu des recommandations du Groupe d'étude sur les relations de travail dans le secteur agricole, composé de représentants du secteur agricole, des organisations syndicales, de travailleurs agricoles et du gouvernementfootnote 400. Les recommandations du groupe d’étude s’opposaient à l’exclusion absolue de l’application de la LRT en vue d'atteindre l’objectif du gouvernement, soit la protection de la production agricole et de sa viabilitéfootnote 401.

Le groupe d’étude a examiné si les travailleurs agricoles devaient avoir le droit à la négociation collective compte tenu des caractéristiques uniques du secteur agricole, et la manière dont cela devrait se faire. Il a conclu que toutes les personnes qui travaillent dans le secteur de l'agriculture et de l’horticulture devraient avoir le droit à la négociation collective, y compris ceux qui travaillent sur de petites fermes ou des fermes familiales, mais conformément à un modèle de relations de travail distinct qui soit suffisamment modifié pour refléter les besoins particuliers du secteur agricolefootnote 402.

Le problème le plus crucial soulevé par les propriétaires agricoles devant le groupe d’étude est la menace d’interruption du travailfootnote 403. En réponse entre autres à cette observation, le groupe d’étude a recommandé que toute forme d’interruption de travail soit interdite et remplacée par un mécanisme de règlement de différends offrant un processus d’arbitrage pour le règlement définitif et obligatoire de toutes les questions non réglées entre les parties après la fin du processus de négociationfootnote 404. Il recommandait également l’adoption d’une loi sur les relations de travail dans l’agriculture qui serait administrée par une commission distinctefootnote 405.

Le groupe d’étude a examiné la législation d’autres provinces, où l’application des droits de négociation aux travailleurs agricoles est la norme, et il a conclu que la disponibilité du droit à la négociation collective dans ces provinces n’avait pas eu une incidence défavorable importante sur l’économie agricolefootnote 406. Cette situation au pays n’empêche clairement pas le gouvernement de présenter une justification relative à l’article 1 propre à l’Ontario, mais il n’a pas expliqué, peut-être parce qu’il ne peut pas le faire de manière réaliste, pourquoi les intérêts agricoles de l’Ontario sont si différents qu’ils requièrent une exclusion complète plutôt qu’une façon moins intrusive d’atteindre ses objectifs. Le secteur agricole est sans doute confronté à d’importants défis de nature économique, mais d’autres secteurs sont dans une situation semblable et aucun d’entre eux ne retire aux employés l’accès à un processus de négociation collective.

En 1994, la Loi de 1994 sur les relations de travail dans l’agriculture (LRTA) a été adoptée par la législature de l’Ontario, qui acceptait la plupart des recommandations du groupe d’étude. Les dispositions de la LRTA comprenaient entre autres :

  • un préambule indiquant qu’il était dans l’intérêt public d’étendre le droit à la négociation collective dans ce secteur, et que les industries agricole et horticole possédaient certaines « caractéristiques particulières » (caractère saisonnier, sensibilité au climat et au facteur temps, nature périssable des produits agricoles et horticoles, nécessité de maintenir des procédés continus afin de garantir le soin et la survie des animaux et des végétaux);
  • une interdiction des arrêts de travail (les différends de négociation ne pouvant être résolus dans le cadre des négociations ou de la médiation sont renvoyés à l’arbitrage des propositions finales ou, avec l’accord des parties, à l’arbitrage volontaire d’intérêts);
  • l’intégration par renvoi de plusieurs dispositions de la LRT (sous réserve de certaines modifications), y compris les dispositions sur le devoir de négocier de bonne foi, la succession aux qualités, les pratiques de travail déloyales et l’application assurée par une division distincte de la CRTO pour le secteur agricole;
  • l’accréditation et la révocation de l’accréditation des agents négociateurs;
  • les limites à l’accréditation d’unités de négociation renfermant des travailleurs saisonniers (ces unités de négociation ne pouvaient être accréditées que si un règlement le permettait et que si l’unité ne renfermait que des employés saisonniers);
  • des protections pour garantir que les membres de la famille pouvaient effectuer un travail pour l’employeur, malgré les dispositions d’une convention collective, d’un acte constitutif d’un syndicat, de la LRTA ou de la LRT (dans sa version d’alors).

La LRTA est demeurée en vigueur de juin 1994 à novembre 1995. Au cours de cette période, l’Union internationale des travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce a été accréditée comme agent négociateur d’une unité de négociation unique à Leamington (Ontario) et a déposé deux autres demandes d’accréditation.

La LRTA a été intégralement abrogée en 1995, et le projet de loi 7, Loi de 1995 modifiant des lois en ce qui concerne les relations de travail et l’emploi, a été adopté. En plus de mettre fin à tous les accords conclus en vertu de la LRTA, le projet de loi 7 a résilié tous les droits d’accréditation des syndicats. Adopté à l’initiative du gouvernement, le projet de loi 7 a abrogé la seule loi qui ait jamais étendu aux travailleurs agricoles ontariens le droit de se syndiquer et les droits de négociation collective.

Dans l’arrêt Dunmore c. Ontario (Procureur général)footnote 407, la Cour suprême du Canada a examiné une contestation de la constitutionnalité de l’exclusion des travailleurs agricoles de la LRT. Des travailleurs agricoles faisaient valoir que le projet de loi 7, de pair avec l’al. 3b) de la LRT, les empêchait de former un syndicat, d’adhérer à un syndicat et de participer à des activités syndicales, en les privant de la protection légale accordée à la plupart des groupes professionnels en Ontario.

La Cour suprême a cité la décision de la Cour de l’Ontario (Division générale) dans laquelle le juge Sharpe a déclaré que le gouvernement de l’Ontario avait :

« [...] un point de vue très différent de son prédécesseur en matière de politique économique et de relations de travail » et, en fait, écarte toute possibilité d’inclure les travailleurs agricoles dans son régime de relations de travail ([1997], 155 D.L.R. (4e) 193, p. 199). En outre, la preuve par affidavits fait ressortir « deux points de vue diamétralement opposés sur le régime de relations de travail approprié pour le secteur agricole en Ontario », l’un niant l’existence d’une justification quelconque de l’exclusion sur le plan des relations de travail, l’autre affirmant que le modèle de négociation collective prévue dans la LRTA ou la LRT mettrait en danger l’économie agricole de la province (p. 201 et 202). Ce dernier point de vue est manifestement partagé par la législature de l’Alberta, la seule autre province à exclure les travailleurs agricoles de son régime de relations de travailfootnote 408.

Dans l’arrêt Dunmore, au moment de discuter de la portée de la responsabilité de l’État en ce qui concerne la liberté d’association, la Cour s’est demandé si :

[...] pour que la liberté syndicale ait un sens, l’al. 2d) de la Charte impose à l’État l’obligation positive d’étendre la protection légale à des groupes non protégés. De façon plus générale, on peut se demander si la distinction entre obligations positives et négatives de l’État doit être nuancée dans le contexte des relations de travail, en ce sens que l’exclusion des travailleurs agricoles de l’application d’un régime de protection contribue substantiellement à la violation de libertés protégéesfootnote 409.

La réponse à la question de savoir si l’exclusion des travailleurs agricoles de la LRT contribuait à la violation des libertés protégées a reçu une réponse sans équivoque. La Cour suprême a affirmé ce qui suit :

[...] il est raisonnable de conclure que l’exclusion des travailleurs agricoles de la LRT porte substantiellement atteinte à leur liberté fondamentale de s’organiser. Les difficultés inhérentes à l’organisation des travailleurs agricoles, de pair avec le risque de représailles financières de la part de l’employeur, n’expliquent qu’en partie l’impossibilité d’association dans le secteur agricole en Ontario. Tout aussi important est le message que transmet l’al. 3b) de la LRT, qui retire à l’activité associative sa légitimité et assure ultimement son échec. Vu ces effets connus et prévisibles de l’al. 3b), je conclus que la disposition porte atteinte à la liberté d’association et, par conséquent, à l’al. 2d) de la Chartefootnote 410.

En déclarant que l’exclusion des travailleurs agricoles de la LRT était invalide, la Cour suprême a donné au gouvernement 18 mois pour adopter une loi modificative qu’il estimerait nécessaire. La réparation prévue par la Cour n’exigeait pas et n’interdisait pas l’inclusion des travailleurs agricoles dans un régime complet de négociation collective, que ce soit la LRT ou un régime spécial applicable uniquement aux travailleurs agricoles tel que la LRTA. En se tournant vers la législature, la Cour a déclaré qu’« il convient de laisser au législateur le soin de déterminer si les travailleurs agricoles devraient avoir le droit de grève, d’autant plus que ce droit était refusé dans la LRTAfootnote 411. »

En 2002, en réponse à Dunmore, la législature de l’Ontario a adopté la Loi de 2002 sur la protection des employés agricoles, laquelle est entrée en vigueur le 17 juin 2003. Les employés travaillant dans l’agriculture sont couverts par cette loi.

10.4.2 La Loi de 2002 sur la protection des employés agricoles

La Loi de 2002 sur la protection des employés agricoles (LPEA) crée un régime de relations de travail distinct pour les travailleurs agricoles. La LPEA accorde aux travailleurs agricoles le droit de former une association d’employés, d’y adhérer, de participer à ses activités, de s'assembler, de présenter des observations à leurs employeurs par l’intermédiaire de leur association sur leurs conditions d’emploi et d’être protégés contre l’ingérence, la contrainte et la discrimination dans l’exercice de leurs droits. L’employeur doit donner à une association la possibilité de présenter des observations au sujet des conditions d’emploi, et l’employeur doit les écouter ou les lire. Les plaintes en vertu de la LPEA peuvent être déposées auprès du Tribunal d’appel de l’agriculture, de l’alimentation et des affaires rurales. La LPEA relève de la compétence du ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et des Affaires rurales de l’Ontario.

Dans l’arrêt Fraser, une majorité de la Cour suprême du Canada a statué que l’article 5 de la LPEA, s’il est correctement interprété, protège non seulement le droit des employés de présenter à l’employeur des observations relatives au travail, mais aussi celui de les voir prises en considération de bonne foi par l’employeur. En ne jugeant pas que la LPEA était inconstitutionnelle, la Cour a noté qu’aucun effort n’a été fait pour obtenir réparation auprès du Tribunal d’appel de l’agriculture, de l’alimentation et des affaires rurales et qu’« il convient de donner au Tribunal la possibilité raisonnable de montrer qu’il peut s’acquitter adéquatement de la fonction que lui confie la LPEA »footnote 413. La Cour a affirmé :

L’article 11 de la LPEA habilite expressément le Tribunal à déterminer s’il y a eu infraction à la Loi et à rendre des ordonnances réparatrices. De plus, le Tribunal pourrait, conformément à son mandat, interpréter de façon téléologique ses pouvoirs de sorte qu’ils soient efficaces et utilesfootnote 413.

La Cour a également réaffirmé qu’un véritable processus de négociation collective garantit un processus plutôt qu’un résultat ou l’accès à un modèle particulier de relations de travail. Autrement dit, la Wagner Act est un modèle particulier de négociation collective, mais pas un modèle obligatoire, pour garantir le droit des employés à s’associer véritablement pour poursuite d’objectifs collectifs en milieu de travail.

10.4.3 Employés du secteur agricole – Facteurs à prendre en compte

En plus des droits d’association des employés, la formulation de la politique d’emploi des employés agricoles et la mise en œuvre de cette politique à l’aide de la législation doivent tenir compte de plusieurs autres facteurs. Certains d’entre eux sont décrits ci-après. Cette liste n’est pas exhaustive; il y en a sans doute d’autres.

  1. Après la promulgation de la LPEA, la Cour suprême du Canada a publié sa décision dans l’arrêt Saskatchewan Federation of Labour, où elle donne des détails sur l’intention du droit prévu au paragraphe 2d) de la Charte, en soutenant que le droit de grève est une partie essentielle d’une véritable négociation collective et que lorsque ce droit est retiré, un mécanisme de règlement de différends indépendant et efficace doit être mis en place.
  2. Certaines entreprises agricoles ont des caractéristiques uniques, notamment la production saisonnière, la sensibilité au climat et aux délais, la nature périssable des produits agricoles et la nécessité de maintenir des processus continus pour assurer les soins des animaux et des plantes et leur survie.
  3. Les grèves des travailleurs agricoles pourraient avoir d'importantes répercussions défavorables sur la plantation, la culture et la récolte, sur la santé et la sécurité des animaux, sur la biosécurité et sur d’autres intérêts importants.
  4. Les travailleurs agricoles sont vulnérables dans leurs milieux de travail. Cette vulnérabilité a fait l’objet de commentaires du juge Bastarache dans l’arrêt Dunmore. Ila trouvé que la protection législative des travailleurs agricoles et de leurs droits de s’organiser sont absolument cruciaux compte tenu de leur état. Il a affirmé ce qui suit :

    Les travailleurs agricoles n’ont ni pouvoir politique ni ressources pour se regrouper sans la protection de l’État, et ils sont vulnérables face aux représailles patronales; comme le fait observer le juge Sharpe, les travailleurs agricoles « sont mal rémunérés, ils ont des conditions de travail difficiles, une formation et une instruction limitées, un statut peu élevé et une mobilité d’emploi restreintefootnote 414. »

    La vulnérabilité des travailleurs agricoles a également fait l’objet de commentaires de la juge Abella dans l’arrêt Fraser, où elle affirme qu’ils sont « les employés les plus vulnérables », et elle cite le professeur David M. Beatty qui a fait remarquer, « en termes éloquents » que les travailleurs agricoles comptent « parmi les personnes les plus exploitées sur le plan économique et les plus démunies sur le plan politique au sein de notre sociétéfootnote 415. » Elle continue de citer le professeur Beatty :

    Parce qu’ils proviennent en grande partie de populations migrantes ou immigrantes, ces travailleurs éprouvent d’autant plus de difficultés à participer véritablement au processus politique […] En privant les travailleurs agricoles des avantages que confère [la négociation collective], on met hors de leur portée les processus juridiques qui permettent au gros de la population active de participer de manière réaliste à la prise de décisions en milieu de travail. Ainsi, un groupe de travailleurs qui comptent déjà parmi les plus impuissants ont encore moins que les autres l’occasion de participer à l’établissement et à l’application des règles régissant leurs conditions de travail.

    (« Putting the Charter to Work: Designing a Constitutional Labour Code » [1987], p. 89)footnote 416

    Nous conseillons vivement de porter attention à l'examen du professeur Lynk. Dans sa discussion sur l’exemption visant les employés agricoles, il souligne un certain nombre de facteurs importants dont les décideurs doivent tenir compte :

    1. La documentation sur les sciences sociales décrit bien la nature particulièrement vulnérable et précaire des travailleurs migrants temporaires qui travaillent en Ontario dans le secteur agricole. En 2013, il y avait environ 20 845 ouvriers migrants temporaires travaillant par l’intermédiaire du Programme des travailleurs agricoles saisonniers (PTAS) et 1 260 ouvriers étrangers travaillant par l’intermédiaire d’autres programmes d’administration fédérale à l’intention des travailleurs agricoles migrantsfootnote 417.
    2. [Le titre de « travailleurs sans liberté »] décrit la condition des travailleurs agricoles migrants modernes, selon ces spécialistes, parce qu’ils sont fortement dépendants de leur employeur en raison de leur état d’immigrant et de leur permis de travail limité (qui les lient à leur employeur et à leur lieu de travail) et de leurs conditions d’hébergement sur leur lieu de travail. Ces travailleurs ne peuvent exercer que difficilement ce que toutes les autres personnes sur le marché du travail canadien considèrent comme un droit, soit quitter un emploi qui est insatisfaisant et chercher un meilleur emploi. Cet état diminué des travailleurs sans liberté est compliqué par le fait que ces travailleurs agricoles migrants n’ont pas de voix collective et ne peuvent pas utiliser la négociation collective pour formuler, défendre et améliorer leurs intérêts liés à leur emploifootnote 418.
    3. Un certain nombre de spécialistes ont souligné la composante raciale du programme des travailleurs migrants, à la fois dans ses origines et de nos jours, puisque l’ethnicité et le manque de pouvoir réel des travailleurs agricoles migrants au Canada et en Ontario reproduisent une hiérarchie raciale troublante qui ne respecte pas les objectifs sociaux et multiculturels ambitieux d’une démocratie libéralefootnote 419.
    4. Les conditions de travail des ouvriers agricoles migrants sont exigeantes, voire difficiles dans plusieurs cas. Le travail est habituellement long, physique et difficile, les conditions de vie sont rudimentaires et, souvent, le travail a des incidences défavorables sur la santé des travailleurs agricoles. La plupart d’entre eux vivent dans des dortoirs sur leur lieu de travail, dans des circonstances où leur vie professionnelle et privée est fortement surveillée par l’employeurfootnote 420.
  5. Les plus grands tribunaux de l’Organisation internationale du Travail sur le droit d’association ont critiqué l’Ontario au cours des dernières années en raison de ses obstacles réglementaires à une négociation collective efficace pour les travailleurs agricolesfootnote 421.
  6. Bien que plusieurs entreprises agricoles soient des fermes familiales, d’autres entreprises visées par la LPEA ressemblent à des entreprises de fabrication classiques. Dans l’arrêt United Food and Commercial Workers Canada c. MedReleaf Corp., le président Bernard Fishbein observait ce qui suit :

    Comme le vice-président MacDowell le mentionnait dans sa conclusion dans l’arrêt Wellington Mushroom, […] il peut y avoir peu ou pas de justification dans les relations industrielles pour expliquer le fait que les employés de MedReleaf ne sont pas traités comme d’autres employés en vertu de la LRT. Peu importe le bien-fondé de l’exclusion agricole en vertu de la LRT, ces employés travaillent dans un environnement similaire à une usine et leur emploi comporte des caractéristiques typiques pour une industrie, comme les catégories d’emploi. Plusieurs ou même toutes les « caractéristiques uniques » de l’agriculture, sa nature saisonnière, sa sensibilité au climat et le besoin de protéger les animaux et les plantes, qui sont mentionnées dans l’objet de la LPEA, ne semblent pas présents dans le cas qui nous occupefootnote 422.

    Les observations du vice-président MacDowell dans l’arrêt Wellington Mushroom Farm et mentionnées par le président Fishbein sont pertinentes. Le vice-président MacDowell, lorsqu’il décrit l’entreprise de l’employeur intimé dans cette affaire, a affirmé que la nature de ce type de ferme « n’était pas bien différente d’une usine de fabrication typiquefootnote 423. » Il a ajouté ce qui suit :

    Les employés ne participent pas étroitement à la ferme familiale. Le processus de production n’est pas saisonnier et ressemble plutôt à un cycle de production. La main-d’œuvre n'est ni occasionnelle ni transitoire. Les activités sont d’une taille considérable, près de 200 employés travaillent dans un seul lieu présentant une atmosphère d’usine et la société est beaucoup moins vulnérable sur le plan économique que plusieurs autres employeurs auxquels la Loi de 1995 sur les relations de travail s’appliquefootnote 424.

    Ces observations du président Fishbein et du vice-président MacDowell soulignent l’affirmation du juge Bastarache dans l’arrêt Dunmore, soit que le secteur agricole est fortement diversifié et que « l’agriculture canadienne évolue de plus en plus vers l’exploitation commerciale et l’agro-industriefootnote 425. »

  7. La ferme familiale peut justifier un traitement législatif particulier. Comme le mentionne l’arrêt Dunmore :

    La preuve en l’espèce me convainc à la fois qu’il existe en Ontario de nombreuses fermes dont la propriété et l’exploitation revêtent un caractère familial; et que la protection de ce caractère familial est un objectif suffisamment urgent pour justifier l’atteinte à l’al. 2d) de la Chartefootnote 426.

    [L]’agriculture est un secteur volatile et hautement concurrentiel de l’économie privée, [...] ses marges de profit sont disproportionnellement minces et [...] son caractère saisonnier la rend particulièrement vulnérable aux grèves et aux lock-outfootnote 427.

10.4.4 Les lacunes de la LPEA

Nous n’offrons pas d’opinion juridique sur le caractère constitutionnel de la LPEA. Cependant, dans l’optique politique (qui doit être éclairée par les principes de la Charte et en tenir compte) et en pratique, à notre avis, la LPEA comporte des lacunes et apporte des obstacles à la réalisation de la capacité des employés agricoles de faire valoir leurs intérêts et de se protéger. La LPEA crée l’illusion que les travailleurs agricoles ont une voix efficace et sont protégés, alors qu’en réalité ce n'est pas le cas en Ontario. Certains de ces obstacles sont décrits ci-après. Cette liste n’est pas exhaustive.

À notre avis :

  1. Même si la LPEA donne le droit d’adhérer à une association d’employés, elle ne mentionne pas clairement que ces employés ont le droit d’adhérer à un syndicat et de participer à ses activités légales.
  2. Contrairement à la LRT, la LPEA n’interdit pas à un employeur ou à une organisation d’employeurs de participer à une association d’employés ou à un syndicat ou de fournir un soutien, notamment financier. La LPEA ne protège pas l’indépendance des employés de la même façon que la LRT.
  3. La portée de la protection des employés contre la mauvaise conduite de l’employeur est insuffisante, puisque le Tribunal ne possède pas de compétence similaire à celle de la CRTO pour remédier à la mauvaise conduite de l’employeur qui exerce des activités comme la contrainte, l’intimidation, les menaces, les promesses ou l’abus d’influence.
  4. La LPEA ne prévoit pas de droit à la négociation collective. Elle ne contient pas d’obligation exigeant que les parties se rencontrent, aient un dialogue constructif et déploient des efforts raisonnables pour conclure une convention collective. Comme la juge Abella l’a noté dans son opinion dissidente dans l’arrêt Fraser, citant l’arrêt Health Services, C.-B. : « le droit de négociation collective ne saurait se limiter à la simple possibilité de présenter des revendicationsfootnote 428. » En effet, comme le notait la juge Abella dans l’arrêt Fraser, une revue du dossier législatif indique clairement que l’intention n’était pas de créer un droit de négociation collective. La ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation de l’époque, l’honorable Helen Johns, a confirmé au moment de la présentation de la LPEA que la législation ne prévoyait pas de tel droit. Elle a affirmé :

    Cependant, je me dois de préciser une chose. Bien qu’un employé agricole puisse adhérer à une association constituée en syndicat, le projet de loi ne donne pas aux travailleurs agricoles le droit de négociation collective. (Assemblée législative de l’Ontario, Journal des débats (Hansard), no 46A, 22 octobre 2002, p. 2339)footnote 429

    Puisque la LPEA n’impose pas de devoir de négocier de bonne foi pour en venir à une convention collective, le Tribunal d’appel de l’agriculture, de l’alimentation et des affaires rurales n’a pas la compétence ni le mandat d'accorder un recours à une partie pour omission de négocier de bonne foi. En comparant cela à la compétence en matière de redressement de la CRTO au paragraphe 43(2) de la LRT, qui donne à la CRTO le pouvoir d’ordonner l’arbitrage de la première convention collective et à l'article 96 relativement à la négociation de mauvaise foi.

  5. La LPEA n’oblige pas l’employeur à reconnaître l’agence exclusive ni le pouvoir de négociation du syndicat ou de l’association d’employés. Cela s’oppose à la LRT, dont le paragraphe 4 (1) prévoit ce qui suit : « Chaque convention collective est réputée stipuler que le syndicat partie à la convention est reconnu comme le seul agent négociateur des employés compris dans l’unité de négociation qui y est définie. » Au paragraphe 73(1), la LRT prévoit que « tant qu’un syndicat conserve la qualité de représenter les employés compris dans une unité de négociation, l’employeur, l’association patronale et quiconque agit pour leur compte ne concluent avec une autre personne, avec un autre syndicat ou un autre conseil de syndicats, une convention collective qui vise à lier ou qui prétend lier même une partie des employés compris dans cette unité, ni ne négocient une telle convention pour leur compte ». Et enfin, la LRT prévoit de plus que la CRTO peut accorder l’arbitrage de la première convention collective si l’employeur refuse de reconnaître l’autorité de négociation du syndicat.
     

    L’exclusivité du pouvoir du syndicat à titre d’agent des employés est un principe de base de longue date dans le droit du travail canadien. Nous ne pouvons pas exprimer cette pensée mieux que l’a fait la juge Abella dans l’arrêt Fraser :

    Sauf dans certains services publics et dans le secteur de la construction au Québec (Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d’œuvre dans l’industrie de la construction, L.R.Q., ch. R-20), le monopole syndical conféré par un vote majoritaire est demeuré un principe déterminant du modèle canadien des relations du travail (Rayner, p. 16; Carter et coll., paragr. 574).

    Cette protection est dictée par le bon sens et justifiée par la situation qui existait avant 1944. Sans monopole syndical, l’employeur peut susciter des rivalités et semer la discorde parmi les multiples représentants des employés dans le but de « diviser pour régner sur la main-d’œuvre », par diverses tactiques, comme négocier directement avec certains employés en vue de miner « la crédibilité du syndicat [...] à la table de négociation » (Paul Weiler, « Reconcilable Differences:  New Directions in Canadian Labour Law [1980] », p. 126; voir également Adams, paragr. 3.1750).

    […]

    L’inévitable scission de l’unité de représentation en l’absence de reconnaissance légale du monopole syndical est particulièrement grave pour les employés les plus vulnérablesfootnote 430.

    […]

    Permettre la représentation de personnes ou groupes distincts par divers agents au sein d’un tel milieu de travail a pour effet de priver ces travailleurs de la capacité d’avoir une voix unie et puissante, pour tenter d’alléger et d’améliorer leurs conditions de travail ardues et incessantesfootnote 431.

  6. La LPEA n’interdit ni n’exige le droit pour les travailleurs agricoles de faire la grève et ne prévoit aucun mécanisme de règlement des différends de rechange en cas d’impasse dans les « discussions ». Cela s’oppose aux dispositions de la LPEA, qui remplaçaient les grèves et les lock-out par l’arbitrage des propositions finales pour régler les différends de négociation. Dans l'arrêt Dunmore, la Cour suprême du Canada a déclaré qu’« il convient de laisser au législateur le soin de déterminer si les travailleurs agricoles devraient avoir le droit de grève [...]footnote 432. » Il est maintenant clair que le retrait du droit de grève par le gouvernement, autorisé lorsque les circonstances le justifient, doit s’accompagner d’un mécanisme de rechange pour le règlement des différends.
  7. Comme la LRT, la LPEA ne distingue par les fermes familiales et l’agro-industrie. Tous les employés agricoles sont exclus du champ d’application de la LRT. La mise en œuvre de la LPEA couvrant tous les employés agricoles est trop large sur le plan politique. 
  8. Il n’existe pas de mécanisme de règlement de différends obligatoire pour l’application des conventions collectives en vertu de la LPEA et, par conséquent, il est difficile, voire impossible, de faire appliquer toute convention collective négociée en vertu de cette loi. En comparaison, le paragraphe 48(1) de la LRT exige ce qui suit : « Chaque convention collective contient une disposition sur le règlement, par voie de décision arbitrale définitive et sans interruption du travail, de tous les différends entre les parties que soulèvent l’interprétation, l’application, l’administration ou une prétendue violation de la convention collective, y compris la question de savoir s’il y a matière à arbitrage. »
  9. En pratique, la LPEA ne fonctionne pas comme un cadre pour l’exercice par les employés de leur droit d’association. Aucune convention collective n’a été signée dans le secteur agricole depuis l’adoption de cette loi. Cela est conforme à l’intention du gouvernement au moment de l’adoption de la législation, qui était de ne pas mettre en œuvre la négociation collective.

En conclusion, à notre avis, la LPEA n’offre pas de mécanisme efficace permettant aux employés d'avoir accès à la négociation collective et d’améliorer leurs conditions de travail, ce qui fait qu’ils n’ont pas le pouvoir de traiter avec leur employeur ni d’influencer leurs conditions d’emploi. En pratique, le fait que les travailleurs agricoles n’ont pas de voix efficace ni de protection depuis des années, soit depuis la promulgation de la LPEA, prouve que la loi n’est pas efficace.

10.4.5 Autres territoires canadiens

Ailleurs au Canada, les travailleurs agricoles et horticoles sont généralement inclus dans les lois générales sur les relations de travail. À cet égard, nous notons que lorsqu’il a examiné les conséquences de la quasi-universalité de l’élargissement des droits de négociation aux travailleurs agricoles canadiens, le groupe d’étude de 1992 a conclu que la disponibilité du droit à la négociation collective dans ces provinces n’avait pas « eu une incidence défavorable importante sur l’économie agricolefootnote 433. »

L’Alberta a récemment adopté une loi qui étendra la notion de relations de travail aux travailleurs agricoles (ces changements ne sont pas encore en vigueur). D’après nos renseignements, le gouvernement de l’Alberta consulte les parties prenantes pour élaborer des règlements propres à ce secteur.

Avant 2014, l’article 21 du Code du travail du Québec prévoyait que « les personnes employées à l’exploitation d’une ferme ne sont pas réputées être des salariés aux fins de la présente section, à moins qu’elles n’y soient ordinairement et continuellement employées au nombre minimal de trois. » Le but allégué de cette disposition était d’exempter les petites exploitations des dispositions du Code. Cependant, l’effet de l’article 21 du Code est que dans une ferme qui employait deux travailleurs à temps plein et de nombreux employés saisonniers, ces derniers n’étaient pas visés par les dispositions du Code et ne pouvaient bénéficier des avantages de l’organisation et de la négociation collective. L’article 21 du Code a été contesté devant la Cour supérieure du Québec et jugé inconstitutionnel. En réponse à la décision de la Cour supérieure, en 2014, le gouvernement actuel a modifié le Code et promulgué des « Dispositions particulières applicables aux exploitations agricoles ». Ces dispositions particulières sont calquées sur la LPEA de l’Ontario. Elles s’appliquent aux exploitations agricoles où moins de trois salariés sont ordinairement et continuellement employés. Dans le secteur agricole, lorsque trois salariés ou plus sont ordinairement et continuellement employés, les dispositions générales du Code du travail sont applicables, ce qui permet l’accréditation des agents de négociation et la négociation collective. Comme pour l’ancien article 21 du Code, le fait que de nombreux travailleurs saisonniers peuvent être employés dans une entreprise agricole ne déclenche pas l’application des dispositions générales du Code relatives aux droits des travailleurs à se joindre à un syndicat et à participer à la négociation collective. Ces droits sont déclenchés uniquement lorsque trois salariés sont ordinairement et continuellement employés.

Sur le plan politique, il est significatif que les travailleurs agricoles de toutes les provinces, sauf l’Alberta, ont les mêmes droits de négociation collective que les autres employés, à l’exception des exemptions existantes au Québec et au Nouveau-Brunswick, qui semblent viser les fermes familiales (comme il est mentionné précédemment). 

En résumé, à notre avis, tous les facteurs décrits ci-après sont en faveur du retrait de l’exclusion des travailleurs agricoles en vertu de la LRT : 

  1. la nature particulièrement vulnérable et précaire des travailleurs migrants temporaires du secteur agricole de l’Ontario, y compris la dépendance résultant de leur statut limite d’immigrant et de leur permis de travail, qui les lient exclusivement à leur employeur et accentuent considérablement le déséquilibre entre les pouvoirs des employés et ceux des employeurs; 
  2. la composante raciale du programme de travailleurs migrants, à la fois dans ses origines et de nos jours;
  3. la nature exigeante, voire difficile dans plusieurs cas, du travail, le grand nombre d’heures de travail, les conditions de vie rudimentaires, les incidences défavorables sur la santé et la surveillance étroite de leur vie privée;
  4. l’exclusion trop large des entreprises qui sont en fait des entreprises de fabrication classiques et dont la nature n’est pas saisonnière, qui ne sont pas sensibles au climat et qui n’ont pas d’animaux et de plantes à protéger;
  5. le manque de mécanisme réellement efficace dans la LPEA pour que les travailleurs agricoles puissent se protéger et faire valoir leurs intérêts, tant sur le plan théorique que pratique;
  6. le fait que presque tous les autres territoires canadiens permettent aux travailleurs agricoles de se prévaloir de la négociation collective;
  7. la disponibilité de mécanismes de règlement de différends de rechange pour remplacer les grèves et les lock-out, l’une des principales raisons d’appuyer l’exclusion;
  8. les valeurs sous-jacentes à la protection en vertu de la Charte en faveur de la négociation collective, c’est-à-dire qu’elle « favorise la dignité humaine, la liberté et l’autonomie des travailleurs en leur donnant l’occasion d’exercer une influence sur l’adoption des règles régissant leur milieu de travail et, de ce fait, d’exercer un certain contrôle sur un aspect d’importance majeure de leur vie, à savoir leur travailfootnote 434. »

Conclusion

Le maintien de l’exclusion des travailleurs agricoles de la LRT n’est pas justifié.

10.4.6 Employés de l’horticulture

La LRT ne s’applique pas « à la personne qui est employée dans l’horticulture par un employeur dont l’entreprise principale est l’agriculture ou l’horticulture, sauf si elle est au service d’une municipalité ou employée en sylviculture ».

Le terme « horticulture » n’est pas défini dans la LRT, mais il a été interprété par la CRTO comme englobant des activités telles que le jardinage, l’aménagement paysager, les pépinières, la culture des arbres, etc.

Les travailleurs horticoles sont exclus de la LRT, sans aucun régime distinct de relations de travail.

Les travailleurs horticoles ne sont pas exclus de la législation sur les relations de travail d’autres territoires canadiens.

Il n’y a aucun motif valable justifiant l’exclusion de cette catégorie d’employés du champ d’application de la LRT. Cela étant dit, il est reconnu que les employés horticoles peuvent exécuter un travail nécessaire pour assurer la croissance, la santé et la survie de plantes et d’arbres et que des grèves de travailleurs horticoles dans certaines circonstances pourraient avoir une incidence défavorable importante sur la plantation, la croissance, la cueillette et le soin de plantes et d’arbres.

Recommandations

Recommandations pour les employés de l’agriculture et de l’horticulture :

  1. Les employés du secteur de l’agriculture et de l’horticulture devraient être inclus dans la Loi de 1995 sur les relations de travail et bénéficier des mêmes droits et protections que d’autres employés.
  2. Le gouvernement devrait se demander si la protection des exploitations agricoles familiales représente un objectif assez urgent et important pour justifier d’exclure de la protection de la Loi de 1995 sur les relations de travail une partie ou la totalité des personnes employées sur une exploitation agricole familiale. Nous ne donnons aucun conseil précis au gouvernement quant à la définition appropriée d’une « exploitation agricole familiale », mais nous le mettons en garde quant au fait qu’une définition ne devrait pas être si large qu’elle en limiterait la portée des droits conférés par la Charte aux travailleurs agricoles.
     

    Certaines entreprises agricoles, mais pas toutes, ont des caractéristiques uniques, notamment la production saisonnière, la sensibilité au climat et aux délais, la nature périssable des produits agricoles et le besoin de maintenir des processus continus pour assurer les soins des animaux et des plantes et leur survie. Dans certaines circonstances, les grèves des travailleurs agricoles pourraient avoir d'importantes répercussions défavorables sur la plantation, la culture et la récolte, sur la santé et la sécurité des animaux, sur la biosécurité et sur les denrées périssables Les employés d’entreprises horticoles peuvent également être tenus de maintenir leur emploi afin d'assurer la croissance, la santé et la survie de plantes et d'arbres, ce qui fait que les employeurs pourraient être touchés de manière particulière et défavorable en cas de grève. Compte tenu de cette réalité, nous présentons les recommandations suivantes.

  3. La Loi de 1995 sur les relations de travail devrait être modifiée de façon à conférer à la Commission des relations de travail de l’Ontario l’autorité d’interdire aux employés d’un employeur du secteur de l’agriculture et de l’horticulture de déclencher une grève, ou de leur en limiter le droit, dans les cas où une entreprise doit être exploitée afin de protéger une partie ou la totalité de la plantation, de la culture et de la récolte, ou pour protéger l’intégrité, la santé et la sécurité des plantes ou de la vie animale.
  4. Lorsqu’une grève est interdite, la Commission des relations de travail de l’Ontario devrait recevoir de la Loi de 1995 sur les relations de travail l’autorité de pouvoir, à sa discrétion, exiger une médiation du différend de négociation collective, et demander que, si la question n’est pas réglée, le médiateur formule des recommandations quant aux modalités de règlement du conflit de travail, y compris une recommandation quant au mécanisme approprié de règlement du différend en l’absence d’un règlement obtenu par médiation.
  5. La Loi de 1995 sur les relations de travail devrait être modifiée de façon à obliger la Commission des relations de travail de l’Ontario à imposer un mécanisme efficace de règlement des différends lorsque la négociation collective se retrouve dans l’impasse, dans tous les cas où la Commission a retiré ou limité le droit de grève à des employés de l’agriculture ou de l’horticulture, et où l’impasse n’est pas résolue de façon volontaire par les parties en conflit.Les mécanismes de règlement définitif des différends devraient comprendre : un arbitrage des propositions finales (y compris un arbitrage enjeu par enjeu); une médiation ou un arbitrage; un arbitrage; tout autre mécanisme de règlement des différends en mesure de résoudre de façon équitable, efficace et rapide les différends survenant entre les employés et les employeurs.

10.5 Juges provinciaux

La LRT ne s’applique pas aux juges provinciaux. Les juges sont nommés à la magistrature et ne sont pas des employés. En vertu de la constitution, ils disposent de l’indépendance judiciairefootnote 435. Les processus aux termes desquels les associations judiciaires participent à l’établissement des conditions qui s’appliquent aux juges sont décidés aux termes de divers accords-cadres entre les diverses associations de juges et le gouvernement et dans la législation comme l’annexe A de la Loi sur l'organisation judiciaire. Sur le plan constitutionnel, il ne s’agit pas d’un problème pouvant être réglé à l’aide de la LRTfootnote 436.

Recommandation

  1. L’exclusion des juges provinciaux devrait être maintenue.

10.6 Personnes employées comme médiatrices ou conciliatrices en matière de relations de travail

La LRT ne s’applique pas à une personne qui est employée comme médiatrice ou conciliatrice en matière de relations de travail. Cette exclusion vise à préserver l’impartialité des personnes qui exercent des activités de médiation et de conciliation. Le fait d’être membre d’un syndicat pourrait causer des conflits d’intérêts, réels ou perçus, et nuire au rôle important des médiateurs ou conciliateurs au cours d’un règlement de différends. Il n’existe pas de motif politique justifiant la modification de la loi actuelle.

Recommandation

  1. L’exclusion des personnes employées comme médiatrices ou conciliatrices en matière de relations de travail devrait être maintenue.

10.7 Professionnels – Architectes, dentistes, arpenteurs-géomètres, avocats ou médecins habilités à exercer leur profession en Ontario et employés en cette qualité

La LRT prévoit qu’aucune personne n’est réputée être un employé si elle est architecte, dentiste, arpenteur-géomètre, avocat ou médecin, habilitée à exercer sa profession en Ontario et employée en cette qualité. 

On considère probablement que ces professionnels bénéficient d’une protection adéquate grâce à leurs organismes professionnels autoréglementés. De plus, il est possible que leur exclusion ait semblé appropriée, étant donné le conflit entre, d’une part, la poursuite du devoir et de l’obligation d’un professionnel envers ses patients ou clients et le droit de grève d’autre part. Beaucoup se demandaient certes si les justifications historiques pour exclure ces groupes de la LRT continuent d’être pertinentes. Il y a, par exemple, 19 professions réglementées ne relevant pas du domaine de la santé et 27 professions réglementées de la santé en Ontario; toutefois, seules les professions d’avocat, de médecin, de dentiste, d’architecte et d’arpenteur-géomètre sont exclues en vertu de la LRTfootnote 437. Au total, il existe 46 professions réglementées et les employés appartenant à 41 de ces professions réglementées ont le droit de se syndiquer et de négocier collectivement en vertu de la LRT ou d’une autre loi sur les relations de travailfootnote 438.

À la fin des années 1960, l’Équipe spécialisée en relations de travail (Équipe Woods) a examiné les exclusions qui existaient alors en vertu de la législation fédérale (largement similaires à celles prévues par la LRT de nos jours), et elle n’a rien pu trouver pour les justifier en regard du principe de la liberté d’associationfootnote 439. L’Équipe Woods a recommandé que le droit légal de négocier collectivement devrait être étendu entre autres aux professionnels titulaires de permis. Promulgué en 1973, le Code canadien du travail reprend ce conseil en donnant une large définition du terme « employé » qui comprend les professionnels titulaires de permis.

En 1993, la Loi sur les relations de travail de l’Ontario a été modifiée et la liste des exclusions en vertu de la législation a été révisée. La nouvelle loi a permis aux architectes, dentistes, géomètres, professionnels du droit et certains médecinsfootnote 440 de présenter une demande d’accréditation.

En 1995, la loi a été modifiée à nouveau, et les exclusions précédemment existantes, y compris celles pour les professionnels, ont été réintroduites.

Cette interdiction visant les professionnels employés à titre de professionnel est incompatible avec la garantie constitutionnelle du droit d’association et va à l’encontre de ce droit. L’approche calculée de la Cour à l’alinéa 2d) a été récemment résumée par la juge en chef McLachlin et le juge LeBel dans l’arrêt Association de la police montée, où ils ont affirmé ce qui suit :

La jurisprudence sur la liberté d’association garantie par l’al. 2d) de la Charte [...] se divise en deux périodes importantes. La première s’est caractérisée par une interprétation restrictive de la liberté d’association. La seconde a, pour sa part, graduellement privilégié une interprétation généreuse et fondée sur l’objet de la garantie constitutionnelle.

[...] après une période initiale marquée par une réticence à reconnaître toute la portée de la liberté d’association en matière de relations de travail, la jurisprudence a évolué vers une approche généreuse de cette liberté. Cette approche visait essentiellement à encourager l’épanouissement individuel et la réalisation collective des objectifs humains, dans le respect des valeurs démocratiques, à la lumière des « origines historiques des concepts enchâssés » dans l’al. 2d) […]footnote 441

Rien ne suggère dans la jurisprudence récente que les professionnels employés à titre de professionnel ne devraient pas avoir le droit d’association constitutionnel. Au contraire, l’interprétation large et calculée de l’alinéa 2d) de la Loi constitutionnelle de 1982 justifie le retrait de cette exclusion et l’élargissement du champ d’application de la LRT à ce groupe d’employés.

Le fait que certains de ces employés professionnels peuvent fournir des services essentiels ne constitue pas un motif valable de leur refuser le droit d’association constitutionnel. On peut spéculer que dans certaines occasions l’exercice de ces droits constitutionnels (y compris le droit de grève) par certains de ces employés professionnels pourrait nuire à la prestation de services essentiels d’employeurs du secteur public.

Notre utilisation de l’expression « services essentiels » dans cette partie du rapport doit être interprétée conformément à la définition adoptée par le juge en chef Dickson dans l’arrêt Renvoi relatif à la Public Service Employee Relations Act (Alb.), décrite précédemment. Comme il est mentionné précédemment, dans l’arrêt Saskatchewan Federation of Labour c. Saskatchewan, la Cour suprême a confirmé que, lorsque le droit de grève est retiré pour des services essentiels, un processus de règlement de différends indépendant et efficace est nécessaire.

En conclusion, la LRT devrait être modifiée pour élargir son champ d’application aux architectes, dentistes, arpenteurs-géomètres, avocats ou médecins habilités à exercer leur profession en Ontario et employés en cette qualité, en reconnaissant que dans certaines circonstances, il peut être justifier de retirer ou de limiter le droit de grève.

Recommandations

  1. Les architectes, dentistes, arpenteurs-géomètres, avocats ou médecins habilités à exercer leur profession en Ontario et employés en cette qualité devraient être inclus dans la Loi de 1995 sur les relations de travail et obtenir les mêmes droits et protections que les autres employés.
     

    Certains employés professionnels, mais pas tous, peuvent fournir des services essentiels au public. Tout en reconnaissant ce fait, nous n’oublions pas l’opinion du juge en chef Dickson qui a affirmé dans l’arrêt Alberta Union of Provincial Employees, Syndicat canadien de la fonction publique et Alberta International Fire Fighters Associationfootnote 442 que pour se conformer à l’article 1, toute restriction imposée sur le droit d’association ne devrait pas être diminuée par une définition trop large de l’expression « services essentiels », mais que lorsqu’une interruption de services mettrait en danger la vie, la sécurité ou la santé de la totalité ou d’une partie de la population ou des personnes touchées par la maintenance et l'administration de la règle de droit, il peut être opportun de retirer le droit de grève pour limiter raisonnablement le droit d’association. Compte tenu de cet avertissement, nous présentons les recommandations suivantes.

  2. En ce qui a trait aux professionnels qui pourraient être inclus à la suite de nos recommandations, la Loi de 1995 sur les relations de travail devrait être modifiée de façon à conférer à la Commission des relations de travail de l’Ontario l’autorité d’interdire à ceux qui assurent un service essentiel à une communauté de déclencher une grève, ou de leur en limiter le droit.
     

    Certains professionnels profitent maintenant de la négociation collective hors du champ d’application de la LRT. Ces négociations se font conformément à des accords-cadres qui offrent des mécanismes de règlement de différends efficaces. Avant que la Commission des relations de travail de l’Ontario traite les enjeux liés à des grèves ou lock-out potentiels, on présume que la Commission donnera aux parties l’occasion de régler les questions conformément à un accord-cadre, sous réserve de l’approbation de la Commission.

  3. Lorsqu’une grève déclenchée par des employés professionnels est interdite, ou si ces derniers n’y ont qu’un droit limité, la Commission des relations de travail de l’Ontario devrait se voir accorder par la Loi de 1995 sur les relations de travail l’autorité de pouvoir, à sa discrétion, exiger une médiation du différend de négociation collective, et demander que le médiateur formule des recommandations quant aux modalités de règlement du conflit de travail, y compris une recommandation quant au mécanisme approprié de règlement du différend en l’absence d’un règlement obtenu par médiation.
  4. La LRT devrait être modifiée de façon à obliger la Commission des relations de travail de l’Ontario à imposer un mécanisme efficace de règlement des différends lorsque la négociation collective se retrouve dans l’impasse, dans tous les cas où la Commission a retiré ou limité de droit de grève à des employés professionnels assurant des services essentiels, et où l’impasse n’est pas résolue de façon volontaire par les parties en conflit. Les mécanismes de règlement définitif des différends devraient comprendre : un arbitrage des propositions finales (y compris un arbitrage enjeu par enjeu); une médiation ou unarbitrage; un arbitrage; tout autre mécanisme de règlement des différends en mesure de résoudre de façon équitable, efficace et rapide les différends survenant entre les employés professionnels et les employeurs.

10.8 Personnes exerçant des fonctions de direction ou employées à un poste de confiance ayant trait aux relations de travail

La LRT prévoit qu’aucune personne n’est réputée être un employé si elle exerce des fonctions de direction ou est employée à un poste de confiance ayant trait aux relations de travail.

Toutes les administrations canadiennes dispensent les employés exerçant des fonctions de direction ou les employés à un poste de confiance ayant trait aux relations de travail de la définition d’« employé » en vertu de leur législation du travail respective (bien qu’il y ait une certaine variation dans le champ d’application de l’exclusion de la direction).

Les personnes qui exercent des fonctions de direction et qui dirigent et contrôlent des employés ont clairement un conflit d’intérêts par rapport aux intérêts des employés en vertu de la LRT. Elles sont chargées de la mise en œuvre des politiques et procédures de l’employeur et peuvent habituellement prendre des mesures de discipline à l’encontre des employés qui relèvent d’elles. De même, les personnes qui occupent un poste de confiance ayant trait aux relations de travail possèdent des renseignements confidentiels de l’employeur et ne pourraient pas exercer leurs activités de manière efficace si elles faisaient partie de syndicats. De plus, l’exclusion des gestionnaires et personnes occupant des postes de confiance ayant trait aux relations de travail permet de veiller à ce que les syndicats qui représentent les employés conservent leur indépendance de l’employeur.

Le seul enjeu important décelé au cours de notre examen est la question de savoir si l’exclusion des gestionnaires pouvait être modifiée afin de permettre la négociation collective des personnes qui sont plus des superviseurs que des gestionnaires et qui se trouvent au bas niveau de l’échelle des gestionnaires. Cet enjeu ne constitue pas une priorité pour l’instant et la question de la définition des fonctions de gestion devrait incomber à la CRTO pour qu’elle l’interprète et l’applique aux divers secteurs en fonction du contexte.

Il n’y a aucun motif valable permettant de remettre en question l’exclusion de ce groupe de personnes du champ d’application de la LRT.

Recommandation

  1. L’exclusion touchant les personnes exerçant des fonctions de direction ou employées à un poste de confiance ayant trait aux relations de travail devrait être maintenue.

Notes en bas de page

  • note de bas de page[377] Retour au paragraphe En particulier : les membres d’un corps de police (visés par la Loi sur les services policiers ou par la Loi de 2006 sur la négociation collective relative à la Police provinciale de l’Ontario); les pompiers professionnels (visés par la Loi de 1997 sur la prévention et la protection contre l’incendie); les employés des collèges d’arts appliqués et de technologie (visés par la Loi de 2008 sur la négociation collective dans les collèges); les membres d’unités de négociation des enseignants (visés par la Loi de 2014 sur la négociation collective dans les conseils scolaires); les employés de la Couronne (visés par la Loi de 1993 sur la négociation collective des employés de la Couronne).
  • note de bas de page[378] Retour au paragraphe 2015 CSC 1, paragr. 49.
  • note de bas de page[379] Retour au paragraphe Ibid., paragr. 67.
  • note de bas de page[380] Retour au paragraphe Ibid., paragr. 68.
  • note de bas de page[381] Retour au paragraphe Ibid., paragr. 70 et 71.
  • note de bas de page[382] Retour au paragraphe Ibid., paragr. 82.
  • note de bas de page[383] Retour au paragraphe Ibid., paragr. 71.
  • note de bas de page[384] Retour au paragraphe 2015 CSC 4, paragr. 3.
  • note de bas de page[385] Retour au paragraphe Ibid., paragr. 54.
  • note de bas de page[386] Retour au paragraphe [1987] 1 RCS 313, paragr. 14.
  • note de bas de page[387] Retour au paragraphe Ibid., paragr. 116.
  • note de bas de page[388] Retour au paragraphe Saskatchewan Federation of Labour, op. cit., paragr. 62.
  • note de bas de page[389] Retour au paragraphe Ibid., paragr. 25.
  • note de bas de page[390] Retour au paragraphe Ibid., paragr. 81.
  • note de bas de page[391] Retour au paragraphe 2007 CSC 7, paragr. 34.
  • note de bas de page[392] Retour au paragraphe 2011 CSC 20, paragr. 32.
  • note de bas de page[393] Retour au paragraphe Health Services, C.-B., op. cit., paragr. 88.
  • note de bas de page[394] Retour au paragraphe (Toronto, ministère du Travail de l’Ontario, 2015), préparé pour le ministère du Travail de l’Ontario en vue de soutenir l’Examen portant sur l’évolution des milieux de travail, p. 7.
  • note de bas de page[395] Retour au paragraphe Ibid., p. 41.
  • note de bas de page[396] Retour au paragraphe A. Macklin, « On the Inside Looking In: Foreign Domestic Workers in Canada », in Maid in the Market: Women’s Paid Domestic Labour, W. Giles et S. Arat-Koc (Halifax : Fernwood Publishing, 1994), p. 32.
  • note de bas de page[397] Retour au paragraphe Lynk (2015), op. cit., p. 46.
  • note de bas de page[398] Retour au paragraphe Ibid., p. 43 et 44.
  • note de bas de page[399] Retour au paragraphe Voir Lynk (2015), op. cit., p. 45, tiré d’un rapport de 2010 sur les domestiques préparé par la professeure Adelle Blackett de l’Université McGill et publié par l’Organisation internationale du Travail.
  • note de bas de page[400] Retour au paragraphe Rapport présenté au ministère du Travail (juin 1992) [premier rapport]; deuxième rapport présenté au ministère du Travail (novembre 1992).
  • note de bas de page[401] Retour au paragraphe Le gouvernement avait demandé au groupe d’étude d’examiner l’option d’élargir le champ d’application de la LRT pour qu’elle s’applique à l’aménagement paysager et aux parties du secteur de l’agriculture et de l’horticulture utilisant « des méthodes de production industrielles ou de type usine », et de présenter un rapport à ce sujet. Le groupe d’étude a finalement recommandé le retrait total de l’exclusion.
  • note de bas de page[402] Retour au paragraphe Op. cit., premier rapport, p. 7 et 8.
  • note de bas de page[403] Retour au paragraphe Ibid., premier rapport, p. 3.
  • note de bas de page[404] Retour au paragraphe Ibid., premier rapport, p. 10.
  • note de bas de page[405] Retour au paragraphe Ibid., deuxième rapport, p. 17.
  • note de bas de page[406] Retour au paragraphe Ibid., premier rapport, p. 3.
  • note de bas de page[407] Retour au paragraphe 2001 CSC 94.
  • note de bas de page[408] Retour au paragraphe Ibid., paragr. 5.
  • note de bas de page[409] Retour au paragraphe Ibid., paragr. 19 et 20.
  • note de bas de page[410] Retour au paragraphe Ibid., paragr. 48.
  • note de bas de page[411] Retour au paragraphe Ibid., paragr. 68.
  • note de bas de page[413] Retour au paragraphe Fraser, op. cit., paragr. 111, citant la décision du juge Farley de la Cour supérieure de justice de l’Ontario.
  • note de bas de page[414] Retour au paragraphe Dunmore, op. cit., paragr. 41.
  • note de bas de page[415] Retour au paragraphe Fraser, op. cit., paragr. 348.
  • note de bas de page[416] Retour au paragraphe Ibid., paragr. 348.
  • note de bas de page[417] Retour au paragraphe Lynk (2015), op. cit., p. 36 et 37.
  • note de bas de page[418] Retour au paragraphe Ibid., p. 37 et 38.
  • note de bas de page[419] Retour au paragraphe Ibid., p. 38.
  • note de bas de page[420] Retour au paragraphe Ibid., p. 38.
  • note de bas de page[421] Retour au paragraphe Ibid., p. 40 et 41.
  • note de bas de page[422] Retour au paragraphe (2015) CanLII 85534 (ON LRB), paragr. 47.
  • note de bas de page[423] Retour au paragraphe [1980] OLRB Rep. mai 813, paragr. 59.
  • note de bas de page[424] Retour au paragraphe Ibid., paragr. 25.
  • note de bas de page[425] Retour au paragraphe Dunmore, op. cit., paragr. 62.
  • note de bas de page[426] Retour au paragraphe Ibid., paragr. 52.
  • note de bas de page[427] Retour au paragraphe Ibid., paragr. 53.
  • note de bas de page[428] Retour au paragraphe Fraser, op. cit., paragr. 326. Au paragr. 327, la juge Abella affirmait  « cette obligation de consultation sous forme de dialogue véritable est reconnue depuis longtemps dans les régimes de négociation collective : Royal Oak Mines Inc. c. Canada (Conseil des relations du travail), [1996] 1 R.C.S. 369, paragr. 41; U.E.W. and DeVilbiss Ltd., [1976] 2 C.L.R.B.R. 101 (Ont.); George W. Adams, Canadian Labour Law (2e éd. [feuilles mobiles]), paragr. 10.1710 et 10.1870 à 10.1920; Donald D. Carter et coll., Labour Law in Canada, (5e éd. 2002), paragr. 621–622; Wesley B. Rayner, Canadian Collective Bargaining Law (2e éd. 2007), p. 333 et 334; Elisheva (Elika) Barak–Ussoskin, « Collaboration in the Tripartite System: The Right to be Consulted and the Duty to Consult », dans A. Höland et coll., dir., « Employee Involvement in a Globalising World: Liber Amicorum Manfred Weiss » (2005), 439, p. 445 ».
  • note de bas de page[429] Retour au paragraphe Ibid., paragr. 332.
  • note de bas de page[430] Retour au paragraphe Ibid., paragr. 345 à 348.
  • note de bas de page[431] Retour au paragraphe Ibid., paragr. 350.
  • note de bas de page[432] Retour au paragraphe Dunmore, op. cit., paragr. 68.
  • note de bas de page[433] Retour au paragraphe Op. cit., premier rapport, p. 3.
  • note de bas de page[434] Retour au paragraphe Health Services, C.-B., op. cit., paragr. 82.
  • note de bas de page[435] Retour au paragraphe Voir : Renvoi relatif à la rémunération des juges de la Cour provinciale de I.P.E.; Renvoi relatif à l'indépendance et à l'impartialité des juges de la Cour provinciale de I.P.E., [1997] 3 RCS 3.
  • note de bas de page[436] Retour au paragraphe Ibid.
  • note de bas de page[437] Retour au paragraphe Lynk (2015), op. cit., p. 50.
  • note de bas de page[438] Retour au paragraphe Lynk (2015), op. cit., p. 9.
  • note de bas de page[439] Retour au paragraphe Équipe spécialisée en relations de travail, Les relations du travail au Canada : rapport de l’Équipe spécialisée en relations de travail (Ottawa, Gouvernement du Canada, 1968).
  • note de bas de page[440] Retour au paragraphe En ce qui concerne les médecins, la modification de 1993 n’a pas été appliquée à ceux qui sont visés par la Loi de 1991 sur les cotisations de l’Ontario Medical Association ou aux stagiaires ou résidents au sens de cette loi.
  • note de bas de page[441] Retour au paragraphe Association de la police montée, op. cit., paragr. 30 et 46.
  • note de bas de page[442] Retour au paragraphe [1987] 1 RCS 313.