Pourboires ou autres gratification
Aperçu
Il est généralement interdit à un employeur de retenir les pourboires ou autres gratifications, d’y opérer une retenue ou de contraindre un employé à les lui retourner ou remettre, sauf si la Loi de 2000 sur les normes d’emploi (LNE) l’y autorise.
Qu’est-ce qu’un pourboire ou une autre gratification?
Le terme « pourboire ou autre gratification » s’entend de ce qui suit :
- tout paiement volontairement versé à un employé ou laissé à son intention par un client
- tout paiement versé à un employeur par un client à l’intention des employés
- tout paiement de frais de service ou de frais semblables demandé par un employeur,
dans des circonstances telles qu’une personne raisonnable conclurait vraisemblablement que le paiement sera remis à un employé ou réparti entre plusieurs
Ce sont les circonstances qui déterminent si un paiement ou des frais de service constitueront ou non un pourboire ou une autre gratification.
Voici ces exemples de pourboires ou autres gratifications :
- un montant laissé sur une table à l’intention du serveur
- un pourboire ajouté au paiement par carte de crédit ou de débit à l’intention d’un employé
- les frais de service que facturent des salles de banquet ou d’autres établissements
Ce que ne sont pas les pourboires et autres gratifications
Est exclue de la définition d’ « un pourboire ou autre gratification » une partie des frais de traitement de carte de crédit facturés à l’employeur par une société émettrice de carte de crédit pour le traitement d’un paiement par carte de crédit effectué par un client.
La partie exclue est la plus élevée des deux suivantes :
- le montant du pourboire ou d’une autre gratification multiplié par le pourcentage facturé par la société émettrice de la carte de crédit pour le traitement du paiement ;
- le montant du pourboire ou d’une autre gratification multiplié par 1,5 %.
L’exclusion indiquée ci-dessus s’applique uniquement aux frais de traitement des cartes de crédit. Les employeurs ne sont pas autorisés à déduire ou à retenir des pourboires ou autres gratifications d’un employé les montants représentant les frais de traitement des cartes de débit ou tout autre type de frais de traitement.
Les pourboires ou autres gratifications ne sont pas des salaires
Les pourboires ou autres gratifications ne sont pas considérés comme des salaires pour l’application de la LNE. Ils ne sont pas pris en compte dans le calcul :
- du salaire minimum
- l’indemnité de licenciement
- l’indemnité de cessation d’emploi
- l’indemnité de vacances
- le salaire pour jour férié
- le taux normal utilisé pour calculer la rémunération des heures supplémentaires
Droit de garder les pourboires ou autres gratifications
Il est interdit à un employeur de retenir les pourboires ou autres gratifications, d’y opérer une retenue ou de contraindre un employé à les lui retourner ou remettre, sauf si la LNE l’y autorise. Par exemple, il ne peut pas opérer une retenue en raison de choses :
- renversées
- brisées
- perdues
- endommagées
Si un employeur est reconnu coupable d’avoir enfreint l’interdiction de prendre les pourboires ou autres gratifications d’un employé, la somme illicitement conservée sera considérée comme une dette de l’employeur envers l’employé. La dette sera exécutable aux termes de la LNE comme s’il s’agissait d’un salaire dû à un employé.
La capacité qu’a un employé en vertu de la LNE de conserver ses pourboires ou autres gratifications, sauf dans des circonstances bien précises, constitue une norme d’emploi. Un employé ne peut se soustraire ni renoncer à cette norme, même s’il accepte de le faire par écrit ou verbalement.
Par exemple, l’employé ne peut pas accepter de faire ce qui suit :
- donner à l’employeur tous ses pourboires ou autres gratifications en échange d’un taux de salaire plus élevé
- renoncer à son droit au salaire minimum en échange du droit de garder tous ses pourboires ou un pourcentage plus élevé de ceux-ci
- donner à l’employeur un pourcentage de ses pourboires, sauf ceux destinés à être mis en commun (par exemple partage des pourboires avec d’autres employés), pour couvrir des frais occasionnés par des choses renversées, brisées, perdues, endommagées, etc.
Paiement et redistribution des pourboires ou autres gratifications
L’employeur peut décider si les pourboires sont autorisés ou non dans son entreprise. S’ils ne le sont pas, il doit indiquer clairement aux clients que ni les employés ni lui n’accepteront les pourboires ou autres gratifications.
Comment les pourboires et autres gratifications doivent-ils être payés?
À compter du 21 juin 2024, les employeurs seront tenus de payer les pourboires ou autres gratifications de l’une des manières suivantes :
- en espèces
- par chèque
- par dépôt direct, ce qui comprend les virements Interac.
L’employeur peut décider du mode de paiement à utiliser parmi ceux qui sont autorisés. Selon le mode de paiement, des critères particuliers doivent être respectés.
Si le paiement est effectué en espèces ou par chèque, l’employé doit recevoir les pourboires ou autres gratifications sur le lieu de travail ou dans un autre endroit dont il aura convenu par écrit (y compris par voie électronique).
Si le paiement est effectué par dépôt direct, les conditions suivantes s’appliquent :
- C’est l’employé qui choisit le compte. Cela signifie que l’employé décide du compte à utiliser. L’employeur ne peut pas exiger d’un employé qu’il utilise un compte dans une institution financière qu’il n’a pas choisi.
- Le compte est ouvert au nom de l’employé.
- Personne d’autre que l’employé ne peut avoir accès au compte, à moins que l’employé ne l’ait autorisé.
La question de savoir si un mode de paiement relève du « dépôt direct » dépend de toutes les circonstances.
Pour les paiements effectués après le 20 juin 2024, l’employé a le droit de choisir le compte sur lequel son salaire, ses pourboires ou autres gratifications seront déposés. Si un employeur a précédemment limité le choix du compte d’un employé, par exemple en l’obligeant à utiliser un compte dans une institution financière particulière, il lui incombera de confirmer que l’employé a choisi le compte qu’il souhaite avant d’effectuer le prochain paiement après le 20 juin 2024. Un employé peut également informer son employeur qu’il souhaite que son salaire, ses pourboires ou autres gratifications soient déposés sur un compte différent et, dans ce cas, l’employeur doit effectuer le changement.
Il convient de noter que la LNE n’interdit pas à un employeur de faire appel à un tiers pour traiter ou distribuer les pourboires ou autres gratifications aux employés, à condition que les règles de la LNE soient respectées. L’employeur qui fait appel à un tiers demeure responsable du respect de la LNE.
Période pour la remise des pourboires ou autres gratifications
En vertu de la LNE, l’employeur n’est pas tenu de fixer une période pour la remise des pourboires ou autres gratifications aux employés. Cependant, si l’employeur omet de remettre les pourboires ou autres gratifications dans un délai raisonnable, il pourrait être réputé les avoir retenus.
Ce sont les circonstances qui déterminent si le délai pour la remise des pourboires ou autres gratifications aux employés est raisonnable ou non. Par exemple, si un employé tarde à recevoir ses pourboires, la durée et la raison du retard sont des facteurs pertinents pour déterminer si les pourboires ou autres gratifications ont été retenus.
Retenues autorisées sur les pourboires ou autres gratifications
Il n’y a que trois types de retenues qui peuvent être faites sur les pourboires ou autres gratifications d’un employé.
Retenues prévues par la loi
Il y a des lois qui peuvent obliger un employeur à retenir les pourboires ou autres gratifications d’un employé ou à y faire des retenues. Les retenues les plus courantes autorisées par la loi sont celles faites au titre de l’impôt sur le revenu, des primes d’assurance-emploi et des cotisations au Régime de pensions du Canada.
L’employeur ne peut pas faire des retenues supérieures à celles qu’autorise la loi applicable et ne peut effectuer les retenues si cet argent n’est pas versé à l’instance voulue (par exemple l’Agence du revenu du Canada).
Ordonnances du tribunal
Une ordonnance du tribunal peut indiquer qu’un employé a une dette envers l’employeur ou quelqu’un d’autre et peut permettre à l’employeur de faire à cet égard une retenue sur les pourboires ou autres gratifications de l’employé pour le remboursement de la dette en question.
Si un employé doit de l’argent à une personne autre que son employeur, ce dernier peut recevoir une ordonnance du tribunal lui demandant de faire la retenue sur les pourboires ou autres gratifications de l’employé et d’envoyer le montant au greffier du tribunal ou à un autre responsable, qui fera parvenir le paiement à une tierce partie. L’employeur n’est pas autorisé à faire la retenue si l’argent n’est pas envoyé au greffier du tribunal ou à l’autre responsable indiqué dans l’ordonnance.
Mise en commun des pourboires ou autres gratifications
L’employeur peut retenir les pourboires ou autres gratifications d’un employé ou y opérer une retenue si le montant prélevé est destiné à être réparti entre la totalité ou une partie des employés du lieu de travail. Cette pratique est communément appelée « mise en commun des pourboires ».
La mise en commun des pourboires est la somme des pourboires recueillis auprès des employés qui est répartie par l’employeur entre la totalité ou une partie des employés. Les pourboires versés sont les contributions qu’un employé accorde à un autre, en général sous forme de versements à la mise en commun des pourboires et ce, conformément à une formule établie par l’employeur. Par exemple, un employeur pourrait exiger qu’un serveur verse à un aide-serveur ou au personnel de cuisine, 1 % des pourboires que le serveur reçoit ou pourrait exiger qu’un serveur contribue la somme équivalant à 2 % des ventes à la mise en commun des pourboires. Cet argent est ensuite réparti parmi les membres du personnel.
Exemple de mise en commun des pourboires
Selon un scénario de mise en commun des pourboires, un employeur a trois serveurs et leur entente sur la mise en commun des pourboires exige que les serveurs contribuent à hauteur de 5 % de leurs ventes à la mise en commun des pourboires, une somme qui sera ensuite répartie parmi les aides-serveurs, les barmans et les hôtesses. Durant son quart, le serveur 1 a obtenu 1 000 $ en ventes et a gagné 150 $ en pourboires et sa contribution à la mise en commun des pourboires serait de 50 $. Le serveur 2 a réalisé des ventes de 100 $ durant son quart et a gagné 20 $ en pourboires. La contribution du serveur 2 à la mise en commun des pourboires serait de 5 $. Le serveur 3 a obtenu des ventes de 500 $ pendant son quart, mais n’a reçu aucun pourboire. La contribution du serveur 3 à la mise en commun des pourboires serait de 0 $ étant donné que les sommes mises en commun ne peuvent parvenir d’une source autre que les pourboires. Selon ce scénario, la somme tirée de la mise en commun des pourboires qui peut être répartie parmi les aides-serveurs et les hôtesses serait de 55 $.
Modalités de mise en commun des pourboires
L’employeur peut décider d’établir dans le lieu de travail des modalités de mise en commun des pourboires qui indique les employés qui y participeront et la façon dont les pourboires seront répartis. Par exemple, l’employeur peut détermine :
- le montant auquel a droit chaque employé, par exemple le montant reçu est fondé sur le nombre d’heures travaillées ou sur le poste de l’employé
- la façon et le moment où les pourboires mis en commun seront répartis entre les employés, par exemple chaque semaine ou chaque jour, en espèces ou par dépôt direct (ce qui comprend les virements Interac)
- la façon et le moment où les modalités de mise en commun des pourboires doivent être modifiées, par exemple l'ajout ou le retrait d’employés participant à la mise en commun, modification du pourcentage versé aux employés ou arrêt de la mise en commun
Les modalités de mise en commun des pourboires peuvent être écrites ou verbales. En vertu de la LNE, l’employeur n’a pas besoin de l’accord des employés pour faire des retenues sur leurs pourboires ou autres gratifications si le montant est mis en commun et réparti. La participation à la mise en commun pourrait être une condition d’emploi.
Il importe de remarquer qu’il n’est pas possible de faire exécuter les modalités de mise en commun des pourboires en vertu de la LNE. Seuls les employés dont les pourboires ou autres gratifications ont été retenus ou ont fait l’objet d’une retenue peuvent demander qu’une ordonnance soit rendue en leur nom en vertu de la Loi. Les autres employés dont les pourboires ou autres gratifications n’ont pas été retenus par l’employeur ou n’ont pas fait l’objet d’une retenue, mais qui auraient normalement reçu un pourcentage des pourboires mis en commun, ne peuvent pas demander une ordonnance pour ces montants.
Participation des gestionnaires et des employeurs à la mise en commun des pourboires
Les gestionnaires sont autorisés à garder les pourboires ou autres gratifications qu’ils reçoivent directement et, en général, ils peuvent participer à l’entente sur la mise en commun des pourboires si la politique de l’employeur le permet.
Les employeurs peuvent garder les pourboires ou autres gratifications qu’ils reçoivent directement.
Un employeur ne peut participer à la mise en commun des pourboires que si les conditions suivantes sont réunies :
- il est le propriétaire unique ou un associé, un administrateur ou un actionnaire de l’entreprise
- il exécute régulièrement et dans une large mesure le même travail que celui exécuté :
- par la totalité ou une partie des employés qui bénéficient de la répartition
- par les employés d’autres employeurs de la même industrie qui reçoivent ou partagent couramment des pourboires ou autres gratifications
Politique en matière de participation de l’employeur au partage des pourboires
À compter du 21 juin 2024, lorsqu’un employeur dispose d’une politique concernant le partage par lui ou l’un de ses directeurs ou actionnaires de pourboires mis en commun, l’employeur est tenu d’afficher une copie de sa politique de partage des pourboires dans au moins un endroit clairement visible sur le lieu de travail où elle est susceptible d’être vue par les employés.
L’exigence consistant à afficher une politique n’oblige pas l’employeur à en établir une. Elle s’applique si l’employeur dispose d’une politique écrite ou s’il existe une pratique établie de partage des pourboires qui est appliquée de manière systématique (même si elle n’est pas écrite). Si l’employeur dispose d’une pratique établie et appliquée de manière systématique, l’obligation d’affichage nécessiterait que l’employeur mette d’abord la politique par écrit.
Si l’employeur modifie ou actualise sa politique, une version révisée doit être affichée.
La LNE ne précise pas les renseignements qui doivent figurer dans la politique, pour autant que le document affiché soit une copie conforme de la politique en vigueur et qu’il indique clairement que l’employeur ou l’un de ses directeurs ou actionnaires participe à la mise en commun des pourboires.
À compter du 21 juin 2024, les employeurs devront conserver une copie de toute politique de partage des pourboires qui doit être affichée pendant trois ans après que la politique n’est plus en vigueur.
Conventions collectives
Si une convention collective entrée en vigueur avant le 10 juin 2016 renferme une disposition qui porte sur le traitement des pourboires ou autres gratifications, la disposition en question l’emporte sur la LNE, même en cas d’incompatibilité avec celle-ci. Si une convention collective expire, mais que la disposition portant sur le traitement des pourboires ou autres gratifications demeure en vigueur, celle-ci continue de l’emporter sur la LNE jusqu’à ce que la convention collective soit renouvelée ou qu’une nouvelle convention soit ratifiée.
Les conventions collectives qui entrent en vigueur ou qui sont renouvelées après le 10 juin 2016 doivent respecter les dispositions de la LNE concernant les pourboires ou les autres gratifications.